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Décisions

Cass. com., 23 mars 2010, n° 09-12.455

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Avocats :

SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Piwnica et Molinié

Riom, du 21 janv. 2009

21 janvier 2009

Sur le moyen unique, pris en ses quatre dernières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 21 janvier 2009), que la société Jag Holding et Gestion a donné mandat à la société Financière X... de préparer une offre en vue de prendre le contrôle de la société Axcell Biotechnologie (la société cible) ; que M. Y..., dirigeant de cette dernière, a donné mandat à la société AG Partenaire de céder les titres qu'il détient dans sa société ; qu'en cours de pourparlers, la société Financière X... a, le 24 janvier 2004, adressé à la société AG Partenaire un mémorandum, prévoyant, après la prise de contrôle de la société cible, l'émission de bons de souscription d'actions par la société Jag Holding et Gestion au profit de M. Y... ; que l'acte de cession ayant conduit à la prise de contrôle de la société cible a été signé le 8 avril 2005 ; qu'au motif que la société Jag Holding et Gestion n'aurait pas respecté l'obligation prévue par le mémorandum, M. Y... a assigné la société Biocorps Services, venant aux droits de cette société, afin d'obtenir des dommages-intérêts ;

Attendu que la société Biocorps services fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande de M. Y..., alors, selon le moyen :

1° / qu'en présence d'un acte dont elle relève qu'il comportait une clause emportant renonciation des parties à tout acte ou engagement antérieurement conclu " en relation avec la matière régie par les présentes ", la cour d'appel qui n'explique pas en quoi cette renonciation aurait été obtenue dans des circonstances caractérisant un prétendu " manque de loyauté " de la société Biocorps Services, prive sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1134 du code civil ;

2° / que toute décision doit comporter des motifs ; que toute affirmation d'ordre général équivaut à un défaut de motif ; que la cour d'appel, qui énonce que la bonne foi de M. Y... " avait été trahie " et que son partenaire aurait " manqué de loyauté ", sans apporter le moindre élément permettant de caractériser la mauvaise foi ou la déloyauté de la société Biocorps services au cours des négociations ayant précédé la signature de l'acte de cession, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3° / que pour condamner la société Biocorps services à payer une certaine somme à M. Y... à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel a estimé que ce dernier avait " cru à une convention spécifique " à son profit, consistant en l'émission de 1 000 bons de souscription d'actions à son profit par la société Biocorps services ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que " l'acte de cession du 8 avril 2005 comportait renoncement à tout ", que " l'acte de cession des actions écartait tout autre engagement antérieur entre les parties " ; et enfin qu "'il résulte qu'entre les partenaires à la cession d'actions, les parties sont seulement tenues au contenu dudit acte, y compris en ce que l'article 23. 3 apporte exclusion de tout engagement antérieur qui pouvait avoir été pris au cours des négociations ", ce dont il résulte que M. Y... n'avait pu se méprendre sur l'existence d'une autre convention conclue entre les mêmes parties lui conférant des droits autres que ceux dont traitait l'acte de cession, la cour d'appel a refusé de tirer les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et violé les articles 1134 et 1382 du code civil ;

4° / que le préjudice, pour être réparable, doit être direct, certain et légitime ; que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que le cocontractant ne saurait prétendre obtenir l'exécution des propositions discutées en cours de négociation mais qui n'ont pas fait l'objet du contrat finalement conclu au terme des pourparlers ; qu'en réparant le prétendu préjudice subi par M. Y... " résultant pour lui du défaut de mise en oeuvre d'un élément de la négociation " ; à savoir l'émission de 1 000 bons de souscription d'actions à son profit par la société Biocorps services, tout en constatant que cet élément de la négociation ne faisait pas la matière du contrat finalement conclu entre les parties, en sorte que M. Y... ne pouvait prétendre en obtenir exécution sans méconnaître les termes clairs et précis de la convention qu'il avait conclue, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, ensemble les article 1134 et suivants du même code ;

Mais attendu que l'arrêt relève que dans le cadre d'un large mandat de négociation et pour parvenir à un but difficile et sérieux, le mandataire de la société Jag Holding a agi au mieux, en négociant, outre la cession globale pour l'ensemble des actionnaires de la société cible, la collaboration déterminante, ou pour le moins active de ses dirigeants ; qu'il retient ensuite que M. Y... a participé à cette négociation dont le but a été obtenu par la rédaction d'un mémorandum prévoyant à son égard un traitement particulier en tant que dirigeant de la société cible ; que, de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire, par une décision motivée, que la société Jag Holding avait manqué de loyauté dans la négociation en ne reprenant pas, dans l'acte de cession, l'avantage négocié au profit de M. Y... et a souverainement apprécié le préjudice causé par ce comportement fautif ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le moyen, pris en sa première branche, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.