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Décisions

CA Poitiers, 1re ch. civ., 24 mai 2022, n° 20/02062

POITIERS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Eiffage Construction Poitou Charentes (SAS)

Défendeur :

Arkadea La Rochelle (SCI)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Monge

Conseillers :

M. Orsini, Mme Verrier

Avocat :

SCP Equitalia

T. com. La Rochelle, du 11 sept. 2020

11 septembre 2020

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE, DES PRÉTENTIONS

Courant 2013, la SCI Arkadea la Rochelle (SCI), promoteur, a fait rénover un ensemble de 66 logements place de l'Hôtel de Ville à la Rochelle.

La maîtrise d'oeuvre des travaux était confiée selon contrat du 1er juin 2011 à un groupement comprenant notamment un cabinet d'architecte, plusieurs bureaux d'études dont la société Settec, Bureau d'Etudes Structure.

Les honoraires du groupement s'élevaient à 440. 918 euros HT.

Ceux de la société Settec représentaient un forfait de 48. 602,41 euros.

Une mission de contrôle technique en outre était confiée à la société Socotec, mission portant notamment sur la solidité des existants.

La société Settec a établi des plans de structure qui ont été intégrés dans les documents d' offre soumis aux entreprises.

Les plans prévoyaient en particulier une chape de 6 cm devant être coulée sur les planchers existants.

La société Eiffage Construction (Eiffage) a été désignée comme entreprise générale selon contrat du 4 février 2013, contrat portant sur 16 lots, ' tous corps d'état ' pour un prix de 5.400 000 euros HT.

Par contrat de sous-traitance du 13 février 2013, la société Eiffage a confié à la société Settec le lot : établissement des plans d'exécution.

La durée des travaux était estimée à 20 mois.

En cours de chantier, sont apparus des fissurations, un affaissement des planchers.

Les travaux ont été interrompus en partie le 14 octobre 2013, en totalité, courant mai 2014.

Par actes des 14 et 17 janvier 2014, la société Eiffage a assigné la SCI, les sociétés Settec et Axa devant le juge des référés aux fins d'expertise judiciaire.

M. P. a été désigné par ordonnance du 4 février 2014.

Le 26 juin 2014, un accord de préfinancement des travaux de renforcement était conclu.

La SCI acceptait de préfinancer 25%, les sociétés Settec et Axa 50 % du montant des travaux pour le compte de qui il appartiendra.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 3 mai 2016.

Il a considéré que les désordres provenaient d'une évaluation initiale erronée de la portance des planchers existants qui devaient être conservés.

Les prescriptions du bureau Settec n'étaient pas cohérentes avec la portance des planchers existants.

Par actes des 23 et 24 mars 2017, la société Eiffage a assigné les sociétés Settec, Axa devant le tribunal de commerce de La Rochelle aux fins d'indemnisation des préjudices résultant des travaux supplémentaires, de l'allongement de la durée du chantier.

La SCI Arkadea est intervenue volontairement à la procédure.

Elle a demandé la condamnation des sociétés Settec et Axa à l'indemniser des préjudices résultant du préfinancement des travaux, du retard de livraison.

Par jugement du 11 septembre 2020, le tribunal de commerce de La Rochelle a notamment statué comme suit :

'

- dit que la société Settec et son assureur Axa et la société Eiffage partagent la responsabilité des conséquences des insuffisances de portance des planchers conservés, bâtiments ABCD, les premières à hauteur de 75% et la seconde à hauteur de 25 % bâtiment F, 50% chacune

- dit que le montant des travaux à supporter solidairement par la société Settec et son assureur Axa s'élève à la somme de 163 392,47 euros HT

- condamne solidairement les sociétés Settec et Axa à payer à la SCI Arkadea en quittance et deniers la somme de 56 329,71 euros HT, assorti des intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision

- condamne solidairement les sociétés Settec et Axa à payer à la société Eiffage en quittance et deniers les sommes de

.5 423,07 euros assorti des intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision

.16 285,12 euros au titre des frais consécutifs à l'allongement de la durée des travaux

- condamne la société Eiffage à payer à la société Settec la somme de 16 320 euros TTC

- ordonne la compensation des sommes dues entre les parties '

Le premier juge a notamment retenu que :

- sur les désordres, leurs origines, les travaux supplémentaires

Les désordres sont consécutifs à un défaut de portance des planchers conservés. Ils se sont d'abord manifestés sur le bâtiment F.

Ensuite, il a fallu vérifier l'ensemble des structures horizontales conservées dans les 5 bâtiments, ce qui n'avait été fait ni avant le coulage, ni après démolition.

Il avait seulement été fait un rapide bilan de charges reposant sur l’hypothèse que les charges induites par une nouvelle utilisation des locaux étaient comparables aux charges avant rénovation.

Les désordres du bâtiment F ont entraîné une vérification de l’ensemble des travaux, des correctifs du traitement acoustique, travaux supplémentaires qui ont été nécessaires pour mettre fin aux désordres.

Le coût des travaux supplémentaires a été vérifié par un économiste agrée par la société Axa.

Il s'élève à 238 920,74 HT.

- sur les responsabilités

La société Settec est intervenue au titre de deux contrats : l'un avec la SCI, l'autre avec la société Eiffage.

La société Settec était membre du groupement de maîtrise d'oeuvre. C'est au stade des études d'avant-projet que les choix techniques relatifs aux structures porteuses et solutions acoustiques ont été arrêtés.

La société Settec avait aussi conclu un contrat de bureau d'études le 13 février 2013 avec la société Eiffage.

Il importe de savoir au titre de quel contrat incombait le calcul de la capacité porteuse des planchers.

La société Ginger n'avait pas pour mission les calculs de structure nécessaires pour déterminer les capacités portantes des planchers.

C'est le CCTP 'gros oeuvre' qui précisait les charges et surcharges à prendre en compte.

Il n'est pas explicite sur le calcul de résistance des structures.

La vérification s'imposait dès la conception.

Le CCTP prévoyait la pose d'une chape ou d'un complexe acoustique pour traiter l'isolation acoustique ce qui augmentait les charges permanentes supportées par les ouvrages en place conservés.

La société Socotec avait pour mission la solidité des existants. Elle avait fait des observations sur les bâtiments A,B,C,D, indiqué qu'il conviendrait après démolition des faux plafonds de vérifier la structure des planchers. Elle n'a pas fait d'observations sur le bâtiment F.

La vigilance de la société Settec n’a pas été mise en alerte pour F, l'a été pour les autres bâtiments. Elle n'a pas fait les vérifications nécessaires.

Dans le dossier des entreprises, le tribunal a trouvé des plans de structure, n'a pas trouvé de notes de calcul.

La société Settec est restée sur l'hypothèse de l’égalité des charges. Le dossier de conception n'a pas été mis à jour après les démolitions avant le coulage des chapes.

Si la société Settec n'a pas tenu compte des demandes du contrôleur technique, la société Eiffage ne prouve pas avoir demandé une note de calcul, avoir exigé la mise à jour du dossier de conception.

La faute est l’insuffisance de portance des planchers. Cette faute a remis en cause les principes constructifs qui avaient été arrêtés.

Le préjudice de la société Eiffage résulte de la désorganisation des travaux, du coût des travaux supplémentaires.

Le lien causal entre l’insuffisance de portance des planchers et les travaux supplémentaires est démontré par l' expertise.

La société Settec a engagé sa responsabilité quasi-délictuelle à l'égard de la société Eiffage au titre du contrat de maîtrise d'oeuvre pour les immeubles ABCD.

Toutefois, la société Eiffage comme entreprise générale avait à sa charge la production des notes de calcul et des plans.

Sur les bâtiments ABCD, le tribunal estime que les fautes respectives des sociétés Settec et Eiffage sont intervenues dans le préjudice à hauteur de 75 / 25 %.

Le préjudice de la société Eiffage est donc de 131 796,32 euros (75 % de 175 728,43).

sur le bâtiment F , la société Eiffage avait appelé la vigilance de la société Settec le 18 septembre 2013. Elle avait relevé un défaut d'aplomb entraînant une épaisseur de chape supérieure aux 5cm prévus.

Le calcul résultant d'une charge supplémentaire était un aléa de chantier qui incombait à la société Settec dans le cadre de son contrat de sous-traitance.

Si la responsabilité civile de la société Settec est engagée, la société Eiffage n'est pas un simple exécutant. Elle devait produire des plans et notes de calcul, exiger des notes de calcul. Le coût des travaux supplémentaires sur le bâtiment F s'est élevé à 63 192,29 euros.

Compte tenu des fautes respectives des sociétés Settec et Eiffage ( 50 /50 %), la société Settec et son assureur seront condamnés à payer à la société Eiffage la somme de 31 596,15 euros ( 50 % de 63 192,29) au titre du bâtiment F.

- sur la TVA,

La TVA ne s'applique pas à l'indemnité versée par la société Axa dans la mesure où la société Eiffage réalise des travaux sur son propre ouvrage.

- sur les sommes dues au titre des travaux supplémentaires

Le total des travaux supplémentaires s'est élevé à 238 920,74 euros HT.

La SCI a financé des travaux à hauteur de 56 329,71 euros HT, la société Settec et Axa à hauteur de 101 639,69 euros HT.

Il y a lieu de condamner les sociétés Settec et Axa à payer à la SCI la somme de 56 329,71 euros HT à la société Eiffage la somme de 5423,07 euros HT (107 062,76 euros HT (163 392,47 - 56 329, 71 euros) - 101 639,69).

- sur les frais dus à l'allongement de la durée des travaux

Selon la société Eiffage, la prolongation du chantier a été de 8,5 mois.

Elle demande de ce chef la somme de 188 151 euros.

Les démolitions nécessaires à l’examen des structures ont eu lieu en mars 2013. Le contrôleur technique avait préconisé les vérifications des planchers ABCD.

La société Eiffage a coulé les chapes sans notes de calcul, sans justifications.

Le retard imputable à la société Settec sera évalué à 4,5 mois.

L’expert retient un préjudice de 23 264, 46 euros (pénalités de retard et immobilisations de matériels ) à l'exclusion des coûts d'encadrement qui sont inclus dans les prix unitaires des travaux.

Les fautes des sociétés Settec et Eiffage ont concouru au préjudice subi à hauteur de 70/30%. Les sociétés Settec et Axa seront donc condamnées à payer à la société Eiffage la somme de 16 285, 12 euros (70 % de 23 264,46 euros).

- sur les autres demandes

La société Eiffage sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

La société Settec sera déboutée de sa demande fondée sur une résistance abusive de la société Eiffage.

La demande reconventionnelle formée par la société Settec de paiement d'une facture d'un montant de 16 320 euros est fondée.

- sur les demandes de la SCI

La SCI sera déboutée de sa demande au titre des frais exposés à l'occasion de l’expertise pour 778,03 euros, au titre d'une atteinte à image.

Le retard de livraison est imputable pour 70 % à la société Settec.

Les sociétés Settec et Axa seront condamnées à lui payer la somme de 16 615,58 euros au titre des dédommagements versés aux propriétaires.

LA COUR

Vu l'appel en date du 1er octobre 2020 interjeté par la société Eiffage

Vu l'article 954 du code de procédure civile

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 29 juin 2021, la société Eiffage a présenté les demandes suivantes :

Statuant sur l'appel interjeté par la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES le 1 er octobre 2020, enregistré le même jour sous le numéro 20/02062,

À titre principal, en application des dispositions des articles 1240 et suivants du Code civil dans leur rédaction issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ou à défaut, par application des dispositions des articles 1134 et 1147 applicables aux contrats signés avant le 1 er octobre 2016,

- Écarter des débats les conclusions signifiées par les sociétés SETTEC et AXA France IARD le 5 mai 2021.

- Réformer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de LA ROCHELLE le 11 septembre 2020 en ce qu'il a :

.partagé la responsabilité des conséquences des insuffisances de portance des planchers conservés entre les sociétés SETTEC et EIFFAGE CONSTRUCTION.

.limité à la somme de 5 423,07 € la somme due solidairement par la société SETTEC et par son assureur, la société AXA France IARD à la société EIFFAGE CONSTRUCTION au titre des travaux supplémentaires consécutifs à l'insuffisance de portance des planchers.

.limité à la somme 16 285,12 € la somme due solidairement par la société SETTEC et par son assureur, la société AXA France IARD à la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES au titre de l'allongement de la durée du chantier.

.limité à 4,5 mois le retard consécutif aux erreurs imputables à la société SETTEC.

.jugé que la taxe sur la valeur ajoutée ne s'appliquait pas aux sommes dues par la société AXA France IARD.

.condamné la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES à payer à la société SETTEC la somme de 16 320 € TTC.

.rejeté les demandes présentées par la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES d'allocation des sommes de 10 000 € et 20 000 € à titre de dommages et intérêts.

.rejeté la demande présentée par la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

.partagé les dépens de l'instance, comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire et les frais liés aux instances en référé.

Et statuant à nouveau,

.Déclarer la société SETTEC entièrement et exclusivement responsable des erreurs affectant la conception et les plans de l'opération immobilière dénommée LE PATIO HERMES et liées à l'absence de diagnostic des existants.

.Déclarer que les erreurs commises par la société SETTEC ont entrainé des travaux supplémentaires hors marché, ainsi qu'un allongement de la durée du chantier de 8,5 mois.

En conséquence, condamner in solidum, les sociétés SETTEC et AXA France IARD à payer à la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES les sommes suivantes :

-  113 388,97 €, augmentée des intérêts :

. Au taux conventionnel pour ce qui concerne la société AXA France IARD, à compter de la mise en demeure délivrée le 2 octobre 2014 à concurrence de la somme de 103 134,69 € (pièce 51 : mise en demeure et taux d'intérêt conventionnel prévu par les factures, pièces 43, 45 et 56) et à compter du 27 octobre 2014 pour le solde (pièce 76).

. Au taux légal pour ce qui concerne la société SETTEC à compter de l'assignation.

Les intérêts seront capitalisés à chaque échéance de la demande.

-  Par application des dispositions issues de la loi n° 2012-387, 22 mars 2012 et du décret n° 2012-1115 du 2 octobre 2012 visant à lutter contre les retards de paiement entre professionnels, codifiées sous les articles D. 441-5, L 441-6, I, al. 12 et L. 441-3, al. 4 du Code de commerce, quatre fois l'indemnité forfaitaire de 40 €, soit 160 €.

-  10 000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement de sommes dues.

-  188 151 € TTC au titre des frais générés par l'allongement de la durée du chantier, augmentés des intérêts au taux légal à compter du 27 octobre 2014, date de la réclamation ou à défaut, à compter de l'assignation.

Déclarer que les intérêts seront capitalisés à chaque échéance de la demande.

-  20 000 € à titre de dommages et intérêts.

-  Débouter la société SETTEC de sa demande en paiement de la somme de 16 320 € TTC.

-  À défaut, la limiter à la somme de 14 280 € et ordonner la compensation avec les sommes dues par la société SETTEC à la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES.

-  Débouter les sociétés SETTEC et AXA France IARD de toutes leurs demandes, fins et conclusions, et notamment de l'appel incident qu'elles ont régularisé par des écritures signifiées le 29 mars 2021.

-  Condamner in solidum les sociétés SETTEC et AXA France IARD à payer à la société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU-CHARENTES une somme de 10 000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance, comprenant notamment les frais d'expertise judiciaire et les frais liés aux instances en référé.

A l'appui de ses prétentions, la société Eiffage soutient notamment que :

- Le BES devait vérifier ses calculs de charges. Les caractéristiques des planchers avaient été mal appréhendées, les existants ne pouvaient supporter les dispositifs qu'il avait conçus.

- Les travaux ont été interrompus le 14 octobre 2013 dans l'attente de la définition d'une solution technique validée. Il n' y avait pas accord notamment sur l' imputabilité des difficultés. Le contrat prévoyait des pénalités de retard de 354 000 euros par mois.

- Le 28 mai 2014, la société Eiffage a établi un devis de renforcement de la structure.

- L' accord de préfinancement devant permettre la reprise du chantier, avait été accepté par les sociétés Settec et Axa le 26 juin 2014.

- L'expertise a établi que la société Settec n'avait pas établi de note de calcul des charges induites par la réhabilitation, qu'elle n'avait pas vérifié que les structures existantes étaient en capacité de supporter le poids des aménagements, n'avait pas prévu de renforcement sur les planchers compte tenu de l' adjonction de chape.

- Le contrat de maîtrise d'oeuvre incluait des études sur l'état du bâtiment et la faisabilité de l'opération, l'analyse technique sur la résistance mécanique des structures en place.

- La société Settec a établi des plans sans savoir si les planchers étaient capables de supporter les constructions. Elle a occulté les contraintes du site dans ses études.

- La mission confiée par la société Settec à la société Ginger était incomplète.

- Le tribunal a laissé à tort à la charge de la société Eiffage 25 % du montant des travaux supplémentaires, a méconnu le rôle du BES.

- Elle fonde ses demandes sur la responsabilité délictuelle, désapprouve la distinction faite entre les bâtiments.

- La société Settec avait imaginé des chapes de 6 cm d'épaisseur pour traiter l’isolation acoustique entre les logements.

- La société Eiffage n'a commis aucune faute. La conception confiée à une équipe incluait la réalisation de toutes les études nécessaires. Elle n'avait pas à s'immiscer dans la conception.

L’expert n'avait envisagé aucun partage de responsabilité.

- La société Eiffage établit seulement des plans de chantier qui sont fonction des plans de maîtrise d'oeuvre. Elle a fait une offre sur la base des plans élaborés par la maîtrise d'oeuvre.

- Les appartements sont commercialisés sur la base des plans établis par la maîtrise d'oeuvre.

- Elle n 'avait pas à remettre en question les plans de conception validés par le bureau de contrôle, des ouvrages non prévus en l'absence d'un diagnostic correct des structures existantes. -Les travaux de renforcement non prévus étaient des travaux hors forfait. Seule, la SCI est habilitée à contester la qualification de travaux hors marché.

- Subsidiairement, le sous-traitant a engagé sa responsabilité contractuelle, avait une obligation de résultat, devait conseiller l'entrepreneur principal dans sa spécialité.

-  sur les préjudices

Le coût des travaux hors marché a été validé par l'expert à la somme de 286 704,88 TTC. Il restait dû lors de l'assignation 113 388,97 euros. Ils ont été définis par la maîtrise d'oeuvre

- La suppression des chapes initiales a posé des difficultés imprévues.

- Les travaux de réfection sont soumis à la TVA. Les malfaçons ne lui sont pas imputables.

- La réception est intervenue le 19 mars 2015 avec 8,5 mois de retard.

- Le tribunal a retenu un retard de 4,5 mois seulement.

- Les coûts supplémentaires sont liés à l’allongement de la durée du chantier.

La chantier a été ralenti, puis arrêté entre octobre 2013 et septembre 2014. Elle a dû maintenir du personnel. Le tribunal a imputé 30 % de ces frais à la société Eiffage à tort.

Elle demande une somme de 188 151 euros TTC, produit des factures relatives à l'entretien, l'eau, l’électricité, la location de matériels, d'échafaudage.

- Elle a dû avancer des frais et payer ses sous-traitants sans entrée d'argent correspondante.

- La demande en paiement de la société Settec ne correspond pas à une facture établie. Elle estime ne pas avoir à payer un travail erroné.

Aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions en date du 23 septembre 2021, les sociétés Settec et Axa ont présenté les demandes suivantes :

Vu les articles 1240 et suivants du Code Civil (anciennement 1382 et suivants du Code Civil),

Vu l'article 1343-2 du Code Civil

Vu les pièces versées aux débats,

Déclarer EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU CHARENTE mal fondée en son appel et l'en débouter

- Infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré les demandes d'EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU CHARENTES et d'ARKADEA fondées à l'égard de SETTEC,

- Rejeter l'appel incident de la Société ARKADEA LA ROCHELLE,

- Déclarer les demandes d'EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU CHARENTE et d'ARKADEA dépourvues de fondement à l'égard de SETTEC,

Juger en effet que ni EIFFAGE ni ARKADEA ne font la preuve qui leur incombe :

' d'une faute de SETTEC,

' d'un préjudice alors qu'ARKADEA aurait dû financer les travaux de renforcement des planchers existants si leur insuffisance avait été décelée avant le démarrage des travaux et qu'EIFFAGE était titulaire d'un marché forfaitaire au terme duquel elle devait assumer tous les aléas de chantier dès qu'ils n'occasionnaient pas un bouleversement de l'économie du marché,

'd'un lien de causalité entre la faute de SETTEC, à la supposer établie, et le préjudice allégué,

Rejeter toute argumentation contraire,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu le principe de la responsabilité d'EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU CHARENTE dans la survenance des désordres, mais l'infirmer en ce qu'il a limité cette responsabilité, alors qu'il appartenait à EIFFAGE d'effectuer, dans le cadre de son marché forfaitaire, les renforcements nécessaires, et de solliciter les vérifications de calcul nécessaires après le curage,

Admettre la responsabilité d'EIFFAGE pour une part qui ne saurait être inférieure à celle de SETTEC,

En déduire que la Société SETTEC n'est pas intégralement responsable des conséquences de l'insuffisance de portance des planchers, et qu'EIFFAGE doit garder à sa charge une part non négligeable des travaux supplémentaires,

Rejeter la demande de remboursement d'ARKADEA LA ROCHELLE pour les travaux supplémentaires rendus nécessaires par l'état préexistant de son immeuble, ou et juger que cette somme sera mise en partie à la charge d'EIFFAGE,

Sur le quantum,

- Infirmer le jugement sur le quantum des travaux supplémentaires, et en ce qu'il a condamné SETTEC et AXA FRANCE à verser des sommes à ARKADEA et à EIFFAGE,

- Rejeter la demande présentée au titre des travaux supplémentaires qui présente des incohérences manifestes,

- Rejeter toute demande supérieure au strict coût des travaux nécessaires au renforcement des planchers soit 139.747,34 euros HT,

- Prononcer toute éventuelle condamnation en deniers ou quittance, AXA France IARD, assureur de la Société SETTEC ayant d'ores et déjà réglé la somme de 101.639,69 euros, outre celle d'ARKADEA

- Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes présentées par EIFFAGE au titre de l'indemnité forfaitaire, de la résistance abusive, des dommages et intérêts et sur l'application de la TVA,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a accordé une indemnité à EIFFAGE au titre de l'allongement de la durée du chantier, et subsidiairement sur le montant retenu, en limitant l'indemnisation au titre de l'allongement de la durée du chantier à 16.320euros HT, telle que retenue par l'Expert judiciaire, en rejetant toute demande plus ample, et confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré que la Société SETTEC n'était pas seule responsable de l'allongement de la durée du chantier,

- Réduire la demande de la Société ARKADEA LA ROCHELLE au titre des "dédommagements clients" en excluant l'accord conclu suite à des problèmes sur l'installation électrique.

- Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les demandes d'ARKADEA au titre des frais de reproduction des plans, au titre de l'atteinte à son image et au titre de l'absence de remboursement spontanée de son préfinancement,

- Rejeter l'appel incident d'ARKADEA LA ROCHELLE et rejeter l'ensemble de ses demandes,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné SETTEC et AXA FRANCE au paiement de 70% des indemnités versées aux acquéreurs,

Juger que la responsabilité de SETTEC ne peut être que très subsidiaire,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande au titre des frais irrépétibles au bénéfice d'EIFFAGE, et l'infirmer en ce qu'il a condamné SETTEC et AXAFRANCE à verser une indemnité à ce titre à ARKADEA,

- Rejeter tous moyens demandes et fins contraires,

Sur la demande reconventionnelle,

- Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné EIFFAGE CONSTRUCTIONPOITOU CHARENTE à payer à SETTEC la somme de 16.320 euros TTC,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a rejeté les intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2015 et les intérêts devront être capitalisés à compter du 30 septembre 2016,

- Condamner la Société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU CHARENTES à payer à la Société SETTEC la somme de 16.320 euros TTC en règlement des honoraires dus, et cette somme devra porter intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2015 et les intérêts devront être capitalisés à compter du 30 septembre 2016,

En tout état de cause,

Condamner la Société EIFFAGE CONSTRUCTION POITOU CHARENTES à payer à la Société SETTEC et à son assureur AXA FRANCE IARD une indemnité de 10.000euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens.

A l'appui de leurs prétentions, les sociétés Settec et Axa soutiennent notamment que :

- Le marché de 5.400 000 euros HT était global et forfaitaire.

- La société Eiffage a décidé de son propre chef d' interrompre les travaux le 14 octobre 2013. -Elle n'avait pas intimé la SCI qui a été assignée par les sociétés Settec et Axa.

- La société Eiffage est au moins autant responsable que la société Settec de l' aléa de chantier même si elle a réussi à persuader l' expert du contraire.

- La responsabilité d'Eiffage est bien plus importante que celle retenue par le tribunal.

- Le problème découvert en cours de chantier est un problème de structure qui concerne le gros oeuvre, spécialité de la société Eiffage.

- La part d'honoraires de la société Settec dans l’équipe de maîtrise d'oeuvre était de 1, 06 %.

- Comme sous-traitant d'Eiffage, le marché était de 34 000 euros HT. Sa mission était limitée au béton armé.

- Les plans, les notes de calcul de la société Settec ont été faits avant curage sur la base de la mission confiée à la société Ginger, avant que la structure des planchers ne soit visible.

- Les existants relevaient de la responsabilité de la société Eiffage.

Le CCTP du lot gros oeuvre prévoit un relevé d'état des ouvrages existants, relevé qui devait être fait avant le démarrage des travaux.

- Le CCTP ne pouvait être explicite tant que les immeubles n'étaient pas curés.

- L'entreprise générale est en charge des plans et des notes de calcul d'exécution.

- La société Settec a fait toutes les vérifications en l'état du bâtiment initial.

sur les préjudices

- Le forfait comprenait les travaux supplémentaires nécessaires au renforcement des planchers.

- La situation a été découverte en cours de chantier. Le principe même du préjudice est discutable.

Le chiffrage est discuté. Les situations produites n'ont pas été vérifiées.

Les travaux nécessaires se sont élevés à la somme de 139 747,34 euros HT, le reste est sans relation avec les fautes de la société Settec.

Les travaux acoustiques n'ont rien à voir avec l’isolation. L'isolation a été traitée dans le CCTP par des faux plafonds en placo-plâtre.

- Les sociétés Settec et Axa ont déjà réglé 101 639,69 euros.

- Le jugement sera confirmé s'agissant du rejet de la TVA.

- La société Eiffage, entreprise générale a mal géré le chantier.

Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions en date du 23 juin 2021, la société Arkadea a présenté les demandes suivantes :

Vu, notamment, les articles 1147 et 1382 (anciens) du code civil,

Vu, notamment, le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur P.,

Il est demandé à la Cour de :

- INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a limité la condamnation solidaire de la société SETTEC et de son assureur, la société AXA France IARD, au bénéfice de la SCI ARKADEA LA ROCHELLE, à la somme de 56.329,71 € au titre du montant des travaux ;

- INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a limité la condamnation solidaire de la société SETTEC et de son assureur, la société AXA France IARD, au bénéfice de la SCI ARKADEA LA ROCHELLE, à la somme de 16.615,58 € au titre de l'indemnisation versée aux acquéreurs

- INFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté la SCI ARKADEA LA ROCHELLE de ses autres demandes ;

Et statuant à nouveau,

- CONDAMNER solidairement la société SETTEC et son assureur, la société AXA France IARD, à payer à la SCI ARKADEA LA ROCHELLE, la somme de 67.595,05 € au titre du préfinancement des travaux supplémentaires dont elle dû supporter la charge ;

- CONDAMNER solidairement la société SETTEC et son assureur, la société AXA France IARD, à payer à la SCI ARKADEA LA ROCHELLE, la somme de 23.736,54 € euros en remboursement des indemnités versées à ses clients ;

- CONDAMNER solidairement la société SETTEC et son assureur, la société AXA France IARD, à payer à la SCI ARKADEA LA ROCHELLE, la somme de 5.000 € de dommages et intérêts pour atteinte à son image liée au retard de chantier ;

- CONDAMNER solidairement la société SETTEC et son assureur, la société AXA France IARD, à payer à la SCI ARKADEA LA ROCHELLE, la somme de 5.000 € de dommages et intérêts au titre de la résistance abusive à rembourser spontanément les sommes engagées dans le préfinancement ;

- CONDAMNER solidairement la société SETTEC et son assureur, la société AXA France IARD, aux entiers dépens de première instance et d'expertise, y incluant la somme de 778,02 € pour les frais de tirages de plans

- CONDAMNER solidairement la société SETTEC et son assureur, la société AXA France IARD aux intérêts au taux légal de condamnation, avec capitalisation des intérêts :

' pour la somme de 43.740 € : à compter du 01/07/2014.

' pour la somme de 7.826,51 € : à compter du 01/09/2014.

' pour la somme de 16.028,54 € : à compter du 01/11/2014.

' A compter du jugement pour le surplus

Y ajoutant,

CONDAMNER solidairement la société SETTEC et son assureur, la société AXA France IARD, à payer à la SCI ARKADEA LA ROCHELLE, la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens au titre de l'appel.

A l'appui de ses prétentions, la SCI soutient notamment que :

- Les plans établis par la société Settec figuraient dans l’offre, prévoient un coulage d'une chape de 6 cm sur les planchers existants. Elle devait faire les études nécessaires pour vérifier l’état des planchers existants.

- Elle devait mettre à jour les plans, vérifier la structure des planchers après la démolition des faux plafonds comme la société Socotec l'avait prescrit.

-  sur les préjudices

La SCI a pré financé les travaux supplémentaires à hauteur de 25 %. Elle n'avait pas à assumer le coût des travaux supplémentaires.

- Les études APS devaient permettre de déterminer le coût de réalisation des travaux. A défaut, la maîtrise d'oeuvre devait faire le nécessaire pour que le coût soit respecté.

- Le jugement sera infirmé s'agissant de la TVA.

- Le retard de livraison lui a coûté 23 736,54 euros selon l'expert judiciaire, retard imputable en totalité à la société Settec. Les travaux ont été interrompus près de 9 mois.

- La réception est intervenue le 19 mars 2015 avec un retard de 8 mois.

- Elle réitère sa demande d'indemnisation au titre d'une atteinte à son image.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 24 février 2022.

SUR CE

- sur l'objet du litige

La société Settec, bureau d'études structure, est intervenue en deux qualités distinctes dans la réalisation du chantier, comme membre du groupement de maîtrise d'oeuvre qui a contracté avec la SCI, et comme sous-traitant de la société Eiffage.

La société Eiffage a la qualité d'entrepreneur principal, s'est vu confier la réalisation de tous les lots.

Elle fonde ses demandes d'indemnisation sur la responsabilité délictuelle de la société Settec, à titre subsidiaire, sur la responsabilité contractuelle.

La SCI fonde ses demandes sur la responsabilité contractuelle de la société Settec.

Les premiers juges ont distingué selon les bâtiments, condamné la société Settec au titre du membre du groupement et au titre du contrat de sous-traitance.

Ils ont retenu que les sociétés Settec et Eiffage avaient l'une et l'autre commis des fautes.

- sur les fautes de la société Settec

1) sur le contrat de maîtrise d'oeuvre du 1er juin 2011 entre la SCI et le groupement de maîtrise d'oeuvre

Le contrat indique que les obligations du marché naissent d'un lien de droit établi en raison du marché entre le maître de l'ouvrage et chacun des membres titulaires d'une part de mission à effectuer. Leur répartition est fixée par le marché.

Le contrat de maîtrise d'oeuvre prévoit que chaque co-traitant doit dans la mission qui lui est impartie tenir compte des observations du contrôleur technique y compris reprendre des études à sa charge si nécessaire afin d'obtenir un accord sans réserve tant en phase études qu'en phase travaux.

Les études d'esquisse ont notamment pour objet de vérifier la faisabilité du programme au regard des différentes contraintes et proposer si nécessaire des études complémentaires

Les études d'avant-projet sommaire ont pour objet de vérifier la compatibilité de la solution retenue avec les différentes contraintes du programme et du site. Elles définissent les principes constructifs, de fondation et de structure.

Les études d'avant-projet ont pour objet de justifier les solutions techniques retenues, permettre au maître de l'ouvrage d'arrêter définitivement le programme.

Les études de projet et le dossier de consultation des entreprises doivent permettre l'élaboration du dossier de consultation des entreprises (DCE) qui comprendra les plans, coupes et élévations et l'ensemble des plans de détail nécessaires, les formes des éléments de construction, la nature et les caractéristiques des matériaux et les conditions de leur mise en oeuvre.

Elles doivent permettre aux entreprises consultées de présenter leurs offres en toute connaissance de cause sur la base du DCE.

La phase III (réalisation des travaux) définit les missions DET et VISA.

Elles ont pour objet de s'assurer que les études d'exécution et de synthèse réalisées par l'entrepreneur ne comportent ni erreur ni omission ou contradiction.

Le groupement doit alerter le maître de l'ouvrage de tout décalage par rapport au coût de réalisation des travaux et aux délais contractuels et proposer toutes mesures propres à y remédier.

L'article 10 attire l'attention du groupement sur l'importance que revêt pour le maître de l'ouvrage le respect des coûts, des délais et des surfaces du projet.

L’article 13 relatif aux responsabilités prévoit que chaque co-traitant est responsable des manquements à son devoir de conseil y compris l' exploitation des renseignements transmis par le maître de l'ouvrage.

Lorsque le retard dans l’exécution des travaux est imputable au Groupement, il est prévu une pénalité de 1/3000 ème du montant de sa rémunération de la phase DET par jour calendaire de retard.

L'article 3.4 intitulé missions complémentaires prévoit la mise à jour des études de conception, la réalisation sans rémunération complémentaire des études nécessitées par une omission ou une erreur commise par un co-traitant.

Il résulte donc du contrat précité que le bureau d'études Settec, membre du groupement, a souscrit à l'intégralité des engagements que ce dernier a pris à l'égard de la SCI.

La société Eiffage estime qu'il a mal exécuté ses obligations dans la mesure où il ne s'est pas assuré de la faisabilité du programme, n'a pas tenu compte des contraintes résultant de l'existant.

Elle soutient qu'il a été défaillant également en phases II et III dès lors qu'il n'a pas vérifié les solutions techniques retenues.

Elle estime que le dossier de consultation des entreprises en fonction duquel elle a postulé était erroné, qu'il ne lui a pas permis de postuler en connaissance de cause faute de prévoir les travaux de renfort nécessaires.

Elle assure que la faute initiale s'est poursuivie dans le temps alors que des avertissements, des interrogations étaient émises par les architectes, le contrôleur technique, l'entreprise.

La société Eiffage estime donc que le BET a manqué de perspicacité, de professionnalisme, de réactivité.

La société Settec fait valoir que ses plans et notes de calcul ont été réalisés avant curage, avant démolition, qu'ils reposaient sur les études réalisées par le bureau d'études Ginger. Elle estime qu'elle ne pouvait anticiper les difficultés tant que la structure des planchers n’était pas visible.

Elle estime avoir fait les vérifications en l'état du bâtiment initial, assure qu'elle n'intervenait pas au stade de l'exécution.

Il ressort des pièces produites les éléments suivants :

Le contrôleur technique, la société Socotec indique dans son rapport initial en janvier 2013 : Il conviendra après la démolition des plafonds de vérifier la structure des planchers.

Le curage des bâtiments commence courant mars.

Un état des lieux des existants est réalisé après démolition sur les bâtiments B,C,F le 19 mars 2013 en présence notamment de la société Settec.

La société Eiffage établit un document avec photos des existants après démolition le 16 mai 2013.

Les 17, 18 juillet 2013, l'architecte écrit à la société Settec

'Suite à la remarque de Socotec et après vérification sur site, le plancher bois existant au dessus du futur local vélos D ne semble pas en mesure de supporter le poids d'une chape, des cloisons et la charge d'exploitation d'un logement. En conséquence, nous proposons de le remplacer par un plancher hourdi.'.

Le 18 septembre, la société Eiffage interroge la société Settec :' Nous aurions besoin de connaître l'épaisseur maximale de chape liquide que l'on peut mettre en oeuvre vis à vis de la surcharge admissible des planchers bois'. Le 18 septembre, la société Settec répond à la société Eiffage, indique 'les éventuelles solives qui semblent fragiles ou détériorées seront confortées ou remplacées.'

Le 11 octobre, la société Settec écrit à la société Eiffage : 'comme pressenti le problème de sections plancher bois R+1 et R+2 renforts nécessaires Bâtiment F.

Elle envoie une proposition de renforcement suite à constat de la faiblesse du plancher bois.

Le 15 octobre, la société Settec écrit à la société Eiffage, aux architectes, à la Socotec.

Elle continue d’envisager l' hypothèse de charges antérieures identiques, propose une chape sèche.

Le 16 octobre, la société Eiffage reçoit 'à son grand étonnement' de la société Settec un schéma d'exécution qui prévoit des reprises sur les planchers bois conservés. Elle demande confirmation.

Le 17 octobre, la société Eiffage prend connaissance du plan d'exécution de la société Settec qui prévoit des renforts de plancher sur le bâtiment F.

Elle relève l'absence d'éléments antérieurs en ce sens entre les 19 mars et 15 octobre, demande confirmation que seul le bâtiment F est concerné.

Le 18 octobre, la société Settec détaille les hypothèses de charges sur les planchers pour chaque bâtiment.

Le 5 novembre, la société Eiffage avertit les architectes qu'elle a interrompu les travaux intérieurs depuis le 14 octobre suite à la nécessité de renforcer des planchers ou définir des solutions techniques adaptées aux structures existantes.

La société Socotec indique le 5 novembre 2013 qu'il aurait fallu une campagne de sondages très importante pour reconnaître correctement la nature des planchers.

Le 20 novembre 2013, les parties se réunissent pour faire le point sur les plus-values et les problèmes de structure des planchers conservés.

Les chapes sont supprimées dans les bâtiments A B.

Un plancher hourdi en RC plancher bois est prévu bâtiment D, les étages doivent être sondés, à renforcer ou remplacer vraisemblablement en attente de diagnostic.

Le 20 novembre, l’ensemble des plus-values est présenté par la société Eiffage à la SCI.

La société Socotec valide les travaux comme équivalent acoustiquement aux solutions initiales avec chapes.

La société Settec reçoit des instructions de l'architecte le 21 novembre 2013 qui lui demande de prévoir des renforts sur les bâtiments FDB.

Le 28 novembre 2013, la société Eiffage demande au cabinet d’architecte de rédiger un avenant, précise vouloir un accord écrit sur le devis.

Le 20 juin 2014, la société Settec produit une note vérifiant la capacité du plancher haut R+2 du bâtiment B.

Le 30 juin 2014, la société Socotec émet un avis défavorable sur le bâtiment F, plancher sous-sol, indique 'aucune justification des poutres et planchers n'est apportée vis à vis des surcharges d'exploitation. Par ailleurs certaines poutres sont très endommagées par l'humidité et une réparation s'impose.

- La réception avec réserves intervient le 19 mars 2015, la livraison le 23 mars 2015.

Il résulte des éléments précités que la société Settec est partie d'une hypothèse de charges identiques supportées par les planchers, qu'elle a réalisé ses premiers calculs, plans, modes opératoires sur la base des études confiées au cabinet CEBTP Ginger.

Il n’est pas contesté que le cabinet Ginger n'avait pas pour mission de vérifier la capacité de portance des planchers, que sa mission avait été définie par le BES Settec.

Le contrôleur technique a indiqué qu'il aurait fallu réaliser une campagne de sondages très importante, campagne qui n'avait pas été faite.

Cette campagne aurait dû être préconisée par la société Settec.

La société Settec n'a pas vérifié son hypothèse de départ, a attendu les opérations d'expertise pour demander au cabinet Ginger de réaliser une mission complémentaire.

Elle indique elle-même que sa reconnaissance a été faite alors que les faux plafonds occultaient les planchers, en connaissait donc forcément les limites.

La société Settec a manqué d'autant plus de vigilance que le contrôleur technique dès janvier 2013 avait prescrit la vérification de la structure des planchers après démolition, recommandation qu'elle a ignorée.

Alors que le curage des bâtiments avait commencé courant mars et qu'un état des existants était réalisé après démolition le 19 mars, la société Settec n'a pas vérifié ses hypothèses au regard de l'état des planchers devenu apparent.

Le premièr indice a été vu par les architectes courant avril, concernaient le bâtiment D. Si la société Settec l'a pris en compte, elle a limité sa révision au seul bâtiment D, n'a pas pris d'initiative pour engager des vérifications systématiques.

Des interrogations concernant le bâtiment F ont ensuite été émises par la société Eiffage en septembre. C'est seulement courant septembre et octobre que la société Settec fera état d'éventuelles solives qui semblent fragiles ou détériorées, proposera des renforts.

Il faudra attendre le 18 octobre 2013 pour que le BET formule des hypothèses de charges pour les planchers sur tous les bâtiments.

Les pièces produites comme l'expertise judiciaire démontrent que l’hypothèse de départ de charges identiques supportées par les planchers était fausse, que la société Settec n'a pas vérifié, contrôlé cette hypothèse, qu'elle n'a pas été en mesure de prendre en compte les observations qui lui avaient été faites, qu'elle a révisé le projet de façon partielle et tardive alors qu'elle aurait dû anticiper et à intégrer les contraintes méconnues à compter du mois de mars.

L' expert judiciaire a confirmé que les études techniques étaient à la charge exclusive des BET. Il a indiqué que les prescriptions de la société Settec n'étaient pas cohérentes avec la portance des planchers existants, que le défaut de portance avait conduit la maîtrise d'oeuvre à modifier des éléments de structure ce qui a entraîné des modifications des volumes des appartements déjà vendus.

1) sur le contrat de sous-traitance du 13 février 2013 entre la société Eiffage et la société Settec

Le contrat de sous-traitance du 13 février 2013 conclu entre les sociétés Eiffage et Settec porte sur la réalisation des plans d'exécution de l'opération immobilière.

Il prévoit notamment que l'entreprise (Eiffage) s'engage à fournir les pièces et indications jugées nécessaires à l'accomplissement de sa mission, que l'entreprise s'engage à examiner les plans et documents remis et faire connaître son accord et ou ses observations dans le délai de 3 semaines après réception.

Le BE se chargera de l'établissement des notes de calcul et plans nécessaires à l'intelligence de la construction selon les règles en usage dans la profession, et à ce titre sa mission comprendra notamment les éléments suivants :

1 mise au point (mise au point des solutions optimales, approbation des calculs, des plans , des modes opératoires à la charge du BET).

2 documents d'exécution établissement de tous les plans permettant l'exécution de tous les éléments d'ossature, les fondations, les éléments préfabriqués ainsi que tous les autres ouvrages de béton armé ou maçonnerie nécessaires à l'exécution du projet.

Il est rappelé que le BET a connaissance de l'ensemble des pièces du marché, ne pourra prétendre pour ses omissions ou imprévisions à une modification de son prix global et forfaitaire et devra l'ensemble des plans nécessaires à l'exécution du projet.

Il doit établir toutes les notes de calcul nécessaires, tenir compte des réglementations, du respect des surcharges, des degrés coupe-feu, de stabilité au feu.

Les plans sont inventoriés par le contrat qui prévoit la remise de notes de calcul détaillées pour tous les ouvrages, les plans de synthèse des charges.

L'article 10 est relatif à la responsabilité.

Le BE Settec est responsable des erreurs ou omissions qu'il pourrait commettre dans la limite de sa mission.

Il est responsable de ses fautes, erreurs, omissions, insuffisance d'études, inexécution de ses obligations, et en supporte seul les conséquences tant vis à vis de Eiffage que du maître d'ouvrage et des tiers.

Le BE doit pendant toute l'exécution de son contrat attirer l'attention de l'entreprise sur les erreurs omissions constatées sur les documents remis et les ordres reçus.

Il doit garantir Eiffage des recours exercés du fait de sa responsabilité.

Il doit s'assurer,ne peut opposer à l'entreprise ni franchise, ni insuffisance du plafond de garantie.

Il résulte donc du contrat précité que le BES était chargé d'établir les notes de calcul et les plans nécessaires, que contrairement a ce qu'il conclut, sa mission n'était pas limitée au béton armé, que l'établissement des plans et des notes de calcul était l'objet exprès du contrat de sous-traitance conclu.

Destinataire des pièces provenant de l'entreprise (et donc notamment des documents de conception auxquels il avait participé comme membre du groupement de maîtrise d'oeuvre), il lui appartenait de les analyser, faire connaître son accord ou émettre des observations.

Sa mission essentielle était d'établir des notes de calcul détaillées, des plans, des modes opératoires.

Il se devait de rechercher les solutions optimales, obtenir l'approbation de ses calculs, plans, modes opératoires par le contrôleur technique.

Force est de relever que les productions de la société Settec sont particulièrement maigres s'agissant en particulier des plans, notes de calcul, modes opératoires qu'elle a remis à son cocontractant.

Il est établi par les productions que les documents d'exécution réalisés reposaient sur des hypothèses erronées non vérifiées, que la production de nouveaux documents d'exécution a été tardive et provoquée par les observations de l'entreprise, des architectes, du contrôleur technique.

Le bureau d'études ne justifie pas avoir jamais effectué les calculs de résistance nécessaires alors qu'il savait que des chapes devaient être coulées sur les planchers, qu'un traitement acoustique était prévu sur les planchers.

Le manque de rigueur du bureau d'étude est démontré par les échanges des parties entre mars 2013 et juin 2014, échanges qui établissent l'incapacité du bureau d'études à admettre son erreur jusqu'en octobre 2013, en tirer les conséquences sur l'ensemble du chantier et émettre rapidement les documents contractuels nécessaires.

- sur les fautes prêtées à la société Eiffage

Il résulte du CCAP produit par la société Eiffage que le marché est à prix global et forfaitaire pour l'ensemble des travaux définis par les pièces contractuelles.

Le prix est qualifié de ferme, non révisable, non actualisable.

La société Settec et son assureur demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu des fautes à la charge de l'entreprise générale.

Le tribunal a estimé que la société Eiffage devait elle-même produire des notes de calcul, des plans, qu'elle aurait dû exiger la mise à jour du dossier de conception.

Devant la cour, les sociétés Settec et Axa soutiennent que la société Eiffage est responsable en tout, subsidiairement, en partie des erreurs commises dans la mesure où elle

- était chargée du lot gros oeuvre, que le problème découvert est un problème de structure

- était responsable des existants, devait réaliser un relevé d'état des ouvrages existants, relevé inclus dans le lot gros oeuvre.

- était en charge des plans et notes de calcul d'exécution comme entreprise générale alors que le contrat de maîtrise d'oeuvre ne prévoyait pas de mission EXE

- a interrompu les travaux de son propre chef le 14 octobre 2013 contrairement aux propositions de la maîtrise d'oeuvre.

Il résulte de l'économie de l'opération que la SCI s'était donnée les moyens d'une maîtrise technique de l'opération en contractant avec un groupement de maîtrise d'oeuvre incluant plusieurs bureaux d'études dont un bureau d'études structure, la société Settec, qu'elle avait en outre conclu un contrat distinct avec la société Socotec, contrôleur technique.

La société Eiffage, entreprise tous corps d'état, s'était également donnée les moyens d'une maîtrise technique de la phase exécution en confiant l'établissement de l'intégralité des documents d'exécution à la société Settec, bureau d'études spécialisé.

La rédaction du contrat de sous-traitance est univoque, porte sur l'intégralité des notes de calcul, plans puis documents d'exécution.

Si la société Eiffage dans le cadre de l'exécution de son contrat d'entreprise avait vocation à établir des documents d'exécution, ces documents en toute logique devaient se fonder sur les calculs, plans, modes opératoires élaborés par le bureau d'études.

Il ne peut lui être reproché d'avoir manqué d'esprit critique au regard des travaux réalisés par le BET, de ne pas lui avoir demandé de réviser ses productions alors que celui-ci intervenait par définition dans son domaine de compétence spécifique.

Le seul fait que le problème identifié soit un problème de structure affectant le lot gros oeuvre expressément confié à la société Eiffage n'établit en rien la faute de l’entreprise.

Il résulte des pièces produites qu'un état des existants, contrairement à ce qui est soutenu par la société Settec avait été réalisé après démolition des faux plafonds par la société Eiffage le 19 mars 2013, état suivi de la réalisation d'un document avec photographies des existants le 16 mai 2013, document qui est produit par la société Eiffage (pièce 15).

La société Settec ne saurait soutenir que le contrat de maîtrise d'oeuvre excluait l'exécution dès lors qu'il inclut une mission direction de l'exécution des travaux (DET) et une mission Visa dont l'objet est notamment de s'assurer que les études d'exécution et de synthèse réalisées par l'entrepreneur ne comportent ni erreur ni omission ou contradiction.

La société Settec n'a pas rectifié les erreurs et omissions affectant les études d'exécution de la société Eiffage.

Le fait qu'elle soit elle-même à l'origine de ces erreurs et omissions ne l'exonère pas de sa responsabilité.

S'agissant de l'interruption des travaux, elle résulte effectivement d'une décision de l'entreprise prise par la société Eiffage.

La société Settec prétend que cette décision ne s'imposait pas, que la société Eiffage a mal géré l'aléa survenu.

Force est de relever que la société Settec n'a pas été en mesure de formuler de nouvelles propositions sur l'intégralité des bâtiments avant le 18 octobre 2013, que les contraintes omises modifiaient le projet de manière significative en imposant des vérifications , un renforcement des planchers, des solutions diversifiées selon les bâtiments , que les modifications devaient être validées techniquement et financièrement, que cette validation s'imposait d'autant plus au regard des fautes antérieures révélées.

La société Settec ne démontre nullement que les délais de traitement aient été excessifs au regard de la nature des travaux, de leurs incidences et du coût induit, fût-il limité au regard du montant total du marché.

Elle ne démontre pas que l'expertise judiciaire ait sensiblement allongé les délais étant observé que la société Eiffage n’avait rien à gagner d'un allongement des délais au regard des pénalités financières prévues par le contrat qui la liait au maître de l'ouvrage.

La mise à jour des erreurs de conception du BET a imposé de nouvelles études, de nouveaux plans et modes opératoires, une validation technique puis financière qui ont différé la réalisation des travaux et retardé la livraison.

Les fautes imputées à l'entreprise générale ne sont donc pas établies.

Les fautes commises par le BET Settec sont des fautes de conception , fautes caractérisées par des hypothèses erronées quant à la capacité de portance des planchers, un défaut de vérification de ces hypothèses dès que celle-ci était réalisable courant mars 2013, une révision tardive, laborieuse de ses hypothèses au fur et à mesure de l'exécution du contrat de maîtrise d'oeuvre et du déroulement du chantier en dépit des recommandations du contrôleur technique, des interrogations formulées par les architectes et par l'entreprise.

La distinction qui a été effectuée par les premiers juges entre les immeubles ABCD et F est contestée et contestable dès lors qu'il n'est pas soutenu que les préconisations du BET pour le bâtiment F aient été plus adaptées que pour les autres bâtiments.

Ce sont les mêmes erreurs de conception qui sont en cause, erreurs qui sont apparues plus tôt sur le bâtiment F.

La société Settec doit répondre en totalité des fautes qu'elle a commises dans l'exécution des contrats. Elle a engagé sa responsabilité délictuelle à l'égard de la société Eiffage, co-constructeur, sa responsabilité contractuelle à l'égard de la SCI, maître de l'ouvrage.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a limité les sommes allouées à la société Eiffage et à la SCI en réparation des préjudices qu'elles ont subis.

- sur les préjudices

I sur les demandes formées par la société Eiffage

a) les travaux hors marché

La société Eiffage demande la condamnation de la société Settec et de son assureur à lui payer la somme de 113 388,97 euros, somme dont elle indique qu'elle correspond au solde restant dû à la date de l'assignation compte tenu du préfinancement intervenu.

Elle rappelle que le coût des travaux supplémentaires a été défini et validé par le groupement de maîtrise d'oeuvre, qu'il a été accepté par le maître de l'ouvrage qui n'a pas contesté qu'ils soient hors marché.

Elle indique que la suppression des chapes initialement prévues a entraîné des problèmes de résistance au feu et de nuisances sonores, qu'il a fallu adapter les plafonds afin de les rendre acoustiques, ajouter des matériaux isolants, éléments qui n'étaient pas prévus.

La société Settec conteste le chiffrage des travaux supplémentaires, estime à 139 747,34 euros le coût des seuls travaux nécessaires au renforcement des planchers, rappelle avoir déjà réglé de ce chef la somme de 101 639,69 euros.

Elle soutient que ces travaux incombaient en tout état de cause à la SCI, qu'ils étaient inclus dans le forfait.

Elle relève que l'aléa de chantier représente moins de 5 % du marché global et forfaitaire, n'a pas entraîné le bouleversement de l'économie générale du contrat.

Le tribunal a estimé que le coût des travaux imputable aux fautes de la société Settec était de 163 392,47 euros (131 796,32 euros HT au titre des bâtiments ABCD (75 % de 175 728,43 euros), 31 596,15 euros HT au titre du bâtiment F (50 % de 63 192,29 euros).

S'il résulte effectivement du CCAP que les omissions constatées postérieurement à la remise des offres ne pouvaient en aucun cas conduire à une modification du prix global forfaitaire des marchés, le contrat qui lie la SCI et la société Eiffage n'exclut pas l'hypothèse de travaux modificatifs ou supplémentaires.

Le contrat prévoit une procédure à respecter, le prix des travaux modificatifs ou supplémentaires devant être prédéterminé sur la base d'un devis présenté par l'entrepreneur et accepté par écrit par la maîtrise d'oeuvre et le maître d'ouvrage.

Il résulte des pièces produites que les travaux litigieux ont fait l'objet d'un devis présenté par l'entrepreneur, accepté par le maître de l'ouvrage, validé par la maîtrise d'oeuvre.

La société Settec, tiers au contrat conclu entre la SCI et la société Eiffage, n'est pas fondée à critiquer la qualification des travaux qu'elles ont retenue.

Le coût des travaux supplémentaires a été fixé par l'expert judiciaire à la somme de 238 920,74 euros HT, 286 704,88 euros TTC, l’expert rappelant que l'économiste mandaté par la société Axa les avait validés.

La société Eiffage est donc fondée à demander la condamnation des sociétés Settec et Axa à lui payer la part des travaux supplémentaires qu'elle a préfinancée.

Elles seront condamnées à lui payer la somme de 80 951,34 euros HT, 97 141,60 euros TTC (238 920,74 euros - 157 969, 40 euros : sommes préfinancées par la SCI et par Settec).

b) sur les frais générés par l'allongement du chantier

La société Eiffage demande la condamnation des sociétés Settec et Axa à lui payer la somme de 188 151 euros TTC au titre des frais supplémentaires générés par l'allongement du chantier avec intérêts à compter du 27 octobre 2014.

Elle soutient que le retard pris a été de 8 mois, que la réception programmée le 30 juin 2014 a été ajournée au 19 mars 2015.

Elle rappelle que les travaux ont été interrompus en partie le 14 octobre 2013, arrêtés le 14 mai 2014, repris en septembre 2014.

Elle assure avoir exposé des frais supplémentaires, avoir dû maintenir du matériel, du personnel, des sous-traitants.

La société Settec fait valoir que les frais demandés sont inclus dans le coût des travaux, que d'autres incidents ont eu un impact sur les délais d'exécution.

Les frais de personnel, de matériel, de sous-traitance sont inclus ainsi que l'expert l'a rappelé dans le coût des travaux supplémentaires estimé à 286 704,88 euros TTC.

L'expert a retenu néanmoins que ce chiffre ne tenait pas compte du coût de l’immobilisation complémentaire des installations de chantier qu'il a évalué à 19 584 euros TTC , ni des pénalités de retard estimées à 8333,35 euros TTC.

Il résulte du CCAP produit que le montant du marché comprend :

- le bénéfice des entrepreneurs

- les frais relatifs au compte prorata et toutes les dépenses d'intérêt commun liées au chantier quel que soit leur montant, montant dont le maître de l'ouvrage n'a pas à connaître.

Le contrat prévoit que le prix doit prévoir dans son forfait l'ensemble des fournitures, la main d'oeuvre, et les moyens nécessaires au complet achèvement des travaux de construction.

Toutes les dépenses communes nécessaires à l'organisation matérielle et collective du chantier sont inscrites au compte pro-rata.

La société Eiffage ne peut demander le coût des travaux supplémentaires et les frais de matériel, de personnel, de sous-traitance dès lors que ces frais sont inclus dans le coût des travaux.

Elle est fondée en revanche à demander la condamnation des sociétés Settec et Axa au titre des seuls frais non inclus dans le coût des travaux, soit la somme de 27 917,35 euros TTC.

c) sur le non-paiement des factures,

La société Eiffage demande la condamnation de la société Settec à lui payer la somme de 160 euros ( 40 euros x 4) au titre de 4 factures non réglées.

La société Settec fait valoir qu'une telle demande suppose des factures émises au titre d'un contrat.

Les factures produites sont adressées à la société Axa.

Elles ont été établies en exécution de l’accord de préfinancement des travaux supplémentaires et non au titre du contrat conclu entre le BET et la société Eiffage.

La société Eiffage sera donc déboutée de sa demande de ce chef.

d) sur la résistance abusive prêtée aux sociétés Settec et Axa

La société Eiffage assure que les sociétés Settec et Axa sont fautives en ce qu’elles avaient donné leur accord sur le pré-financement des travaux, sont revenues sur cet accord. Elle assure avoir été mise dans une situation très difficile à l'égard de la SCI.

La société Settec fait observer que le maître de l'ouvrage avait souscrit une assurance Tous Risques Chantier qu'il a choisi de ne pas mobiliser.

Il résulte d'un dire du conseil de la SCI qu'un sinistre a été déclaré à l'assureur Tous Risques Chantier sans que la suite donnée à cette déclaration ne soit connue.

Il ressort des pièces que l'accord donné par la société Settec et son assureur sur le pré- financement réservait expressément une faculté de contestation ultérieure.

Le fait de contester la faute et le coût des travaux ne caractérise pas une faute susceptible d'indemnisation.

e) sur les dommages et intérêts

La société Eiffage sollicite une somme de 20 000 euros.

Elle fait valoir qu'elle a dû avancer des provisions pour payer les sous-traitants sans rentrée d’argent corrélative.

Dans la mesure où 75 % des travaux supplémentaires ont été préfinancés par la SCI et par la société Settec, où la société Eiffage a obtenu le paiement des travaux qu'elle avait préfinancés, elle sera déboutée de sa demande d'indemnisation faute de justifier d'un préjudice distinct de celui qui a déjà été réparé.

II sur les demandes formées par la SCI

a) sur les travaux préfinancés à hauteur de 67.595,05 euros

La SCI a préfinancé des travaux pour un montant de 67.595,05 euros ( juillet, septembre, novembre 2014).

Le tribunal a limité la somme allouée à la somme de 56. 329,71 euros (70%).

La SCI demande la condamnation des sociétés Settec et Axa à lui payer la somme de 67 595,05 euros.

La société Settec estime que ces travaux avaient vocation à être supportés par la SCI ou par la société Eiffage s'agissant de travaux rendus nécessaires par l’état préexistant de l'immeuble ou inclus dans le marché forfaitaire. Elle conteste en outre le coût des travaux.

Comme indiqué précédemment, les travaux litigieux ont fait l'objet d'un devis présenté par l'entrepreneur, accepté par le maître de l'ouvrage, validé par la maîtrise d'oeuvre.

La société Settec, tiers au contrat conclu entre la SCI et la société Eiffage, n'est pas fondée à critiquer la qualification des travaux qu'elles ont retenue.

S'agissant du montant des travaux, il résulte du dire transmis par le conseil de la SCI à l'expert le 17 juillet 2014 l'existence d'un accord sur un montant HT des travaux supplémentaires de 267 320,48 euros, un préfinancement par la SCI à hauteur de 25%, par la société Settec à hauteur de 50 %, par la société Eiffage à hauteur de 25%.

L'expert a relevé que l'économiste qui avait été désigné par la société Axa avait validé le devis.

L'expert judiciaire a chiffré le coût des travaux modificatifs à la somme de 286 704,88 euros TTC, somme qui correspond au montant de la facture définitive émise par la société Eiffage et indiqué que la SCI avait préfinancé à hauteur de 67 595,05 euros TTC.

Elle est donc fondée à demander paiement de cette somme à la société Settec.

Les sociétés Settec et Axa seront donc condamnées à payer à la SCI la somme de 67 595,05 euros TTC avec intérêts au taux légal. Les intérêts courront à compter du 11 septembre 2020, date du jugement, faute pour la SCI d'indiquer la date de son intervention volontaire.

b) sur la résistance abusive des sociétés Settec et Axa

La SCI considère que le défaut de remboursement spontané des sommes avancées dans le cadre du préfinancement établit une faute justifiant une indemnisation.

La faute n'est pas caractérisée par le défaut de remboursement spontané au regard des contestations sur le coût des travaux et l'imputabilité des fautes, et alors que les sociétés Settec et Axa ont toujours indiqué que l'accord de préfinancement ne valait pas reconnaissance de responsabilité.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la SCI de sa demande de ce chef.

c) sur les indemnités versées par la SCI aux clients.

L'expert a rappelé que les appartements avaient été commercialisés sur la base des plans établis par la maîtrise d'oeuvre, que les plans étaient annexés aux contrats de réservation.

La SCI indique avoir dû indemniser certains de ses clients, en justifie, produit des protocoles d'accord.

L'expert a chiffré le préjudice consécutif à la somme de 23 756,54 euros TTC.

Le tribunal a condamné les sociétés Settec et Axa à payer à la SCI la somme de 16 615,58 euros estimant que 70 % seulement du préjudice était imputable à la société Settec.

Les protocoles qui sont produits indemnisent le retard de livraison d'un trimestre et les modifications qui ont dû être apportées aux plans.

Les sociétés Settec et Axa seront donc condamnées à payer à la SCI la somme de 23 756,54 euros, somme qui a été vérifiée par l'expert.

d) sur l’atteinte à l' image

La SCI réitère devant la cour sa demande d'indemnisation, fait valoir que l'ensemble immobilier donne sur la place de l'Hôtel de Ville dans une zone très touristique, qu'un retard de 8 mois dans une zone nuit nécessairement à son image et à sa réputation.

La société Settec fait valoir que la demande n'est pas justifiée.

Elle se prévaut de la clause de confidentialité qui figure dans les protocoles d'indemnisation. Elle observe que seuls 6 acquéreurs sur 58 ont été indemnisés dont l'un sans rapport avec le désordre des planchers.

Il résulte des pièces produites que la livraison prévue au troisième trimestre 2014 a été reportée au 1er trimestre 2015.

Il n'est pas démontré que le retard de livraison ait effectivement porté atteinte à l'image du promoteur.

e) sur les frais de tirage de plans

Ce sont des frais qui ont été exposés par la SCI dans le cadre des opérations d'expertise.

La SCI est fondée à demander le remboursement à la société Settec et son assureur de la somme de 778,02 euros dont le montant n'est pas contesté.

- sur les honoraires de la société Settec

La société Settec demande la condamnation de la société Eiffage à lui payer la somme de 16 320 euros correspondant à une facture 3 bis d'un montant de 14 280 euros établie le 31 juillet 2015 outre une somme de 2040 euros correspondant à la dernière fraction des honoraires (5 %).

La société Eiffage conteste devoir régler ces sommes dans la mesure où elles correspondraient aux prestations réalisées par le bureau d'études pour réparer ses erreurs. A défaut, elle demande la réduction des factures.

Le contrat prévoit (page 21) que les travaux supplémentaires dus à des erreurs, manquements, omission ou imprécision d'un co-traitant sur tous documents et notamment les plans ou descriptifs, ou des oublis dans le dossier marché ne donneront lieu à aucune rémunération complémentaire.

La facture de 14 280 euros correspond aux honoraires inclus dans le forfait, a donc vocation à être réglée. En revanche, aucune facture n'est produite s'agissant de la somme de 2040 euros.

La société Eiffage sera donc condamnée au paiement de la somme de 14 280 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2015.

-  sur la TVA

La société Eiffage et la SCI sont assujetties à la TVA. Elles sont donc fondées à demander paiement des sommes allouées TTC s’agissant des travaux supplémentaires qu'elles ont réglés.

- sur les autres demandes

Il résulte de l'article 696 du code de procédure civile que ' La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. (...).'

Compte tenu de la solution apportée au présent litige, les dépens d'appel seront fixés à la charge des sociétés Settec et Axa.

Il est équitable de condamner les sociétés Settec et Axa à payer à la société Eiffage et à la SCI Arkadea la somme fixée au dispositif du présent arrêt sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

- infirme le jugement entrepris :

Statuant de nouveau

- condamne in solidum la société Settec et la société Axa à payer à la société Eiffage Construction Poitou Charentes les sommes de

.97 141,60 euros TTC au titre des travaux supplémentaires avec intérêts au taux légal à compter du

23 mars 2017

.27 917,35 euros TTC au titre des frais supplémentaire générés par l'allongement du chantier avec intérêts au taux légal à compter du 23 mars 2017

- condamne la société Eiffage construction Poitou Charentes à payer à la société Settec la somme de 14 280 euros avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2015

- ordonne la compensation entre les sommes précitées

- condamne in solidum la société Settec et la société Axa à payer à la SCI Arkadea La Rochelle les sommes de

.67 595,05 euros TTC au titre des travaux préfinancés avec intérêts au taux légal à compter du 11 septembre 2020

.23 736,54 euros au titre des indemnités versées aux clients

. 778,02 euros au titre des frais de tirage des plans

-  dit que les intérêts échus des capitaux produisent des intérêts pourvu qu'ils soient dus au moins pour une année entière

Y ajoutant :

- déboute les parties de leurs autres demandes

- condamne in solidum les sociétés Settec et Axa aux dépens de première instance et d'appel incluant les frais de référé et d'expertise judiciaire

- condamne in solidum les sociétés Settec et Axa à payer à la société Eiffage Construction Poitou Charente la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamne in solidum les sociétés Settec et Axa à payer à la SCI Arkadea La Rochelle la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.