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Décisions

ADLC, 18 juillet 2011, n° 11-DCC-112

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle exclusif par le groupe Pittsburgh Plate Glass du groupe Dyrup

ADLC n° 11-DCC-112

17 juillet 2011

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 9 juin 2011, relatif à la prise de contrôle exclusif par le groupe Pittsburgh Plate Glass (ci-après, « PPG ») du groupe Dyrup, formalisée par une convention d’achat d’actions signée le 5 mai 2011 entre la société Monberg & Thorsen et la société PPG Industries Inc. ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-10 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. La société PPG Industries Inc. est la société holding du groupe PPG, cotée à la bourse de New York. Elle contrôle plus de deux cents filiales à travers le monde, qui constituent avec elle le groupe PPG. Celui-ci est présent dans les secteurs de la production et de la vente, au niveau mondial, de revêtements, de résines, de verre, de produits d’optique et de matériaux de spécialité, ainsi que de produits chimiques.

2. La société danoise Dyrup A/S est la société holding du groupe Dyrup, qui contrôle des filiales établies au Danemark, en France, en Allemagne, en Pologne, au Portugal, en Angola et en Autriche. Dyrup A/S est contrôlée par Monberg & Thorsen, société danoise de participation financière, elle-même contrôlée par la fondation Ejnar & Meta Thorsen. Le groupe Dyrup est présent dans le secteur de la production et de la distribution de revêtements décoratifs.

3. L’opération, formalisée par une convention d’achat d’actions signée le 5 mai 2011 entre la société Monberg & Thorsen et la société PPG Industries Inc., consiste en la prise de contrôle exclusif du groupe Dyrup par le groupe PPG. En conséquence, la présente opération constitue une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.

 4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (groupe PPG : 10,1 milliards d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2010 ; groupe Dyrup : 193,4 millions d’euros pour le même exercice). Le groupe PPG et le groupe Dyrup réalisent chacun, en France, un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (groupe PPG : […] millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2010 ; groupe Dyrup : […] millions d’euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce, relatives à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Les parties à l’opération sont simultanément actives dans le secteur des revêtements décoratifs.

 

A. MARCHÉS DE PRODUITS

6. Les revêtements décoratifs sont des peintures et enduits utilisés pour recouvrir des surfaces (sols, plafonds, murs et façades notamment) situées à l’intérieur comme à l’extérieur de bâtiments, lors de travaux de construction ou de rénovation. La pratique décisionnelle a considéré que les revêtements décoratifs constituaient un marché distinct de ceux d’autres types de revêtements tels que les revêtements automobiles et les revêtements industriels1.

7. De plus, la Commission européenne a envisagé de segmenter le secteur des revêtements décoratifs en distinguant le marché des peintures décoratives de celui des produits de protection du bois, compte tenu de la différence de finalité entre ces deux types de produits. Dans les cas les plus récents, sans trancher définitivement la question, la Commission a cependant relevé l’importante substituabilité de ces produits du point de vue de la demande, ainsi que la capacité des opérateurs à fabriquer ces deux types de produits2.

8. Par ailleurs, la pratique décisionnelle française a envisagé l’existence d’un marché des peintures décoratives distinct de celui des peintures industrielles3.

9. En outre, la Commission européenne a envisagé l’existence d’une segmentation entre les revêtements décoratifs destinés aux professionnels et les produits destinés à des acheteurs non professionnels, désignés par le terme « grand public », du fait de différences concernant les circuits de distribution, la technicité et la qualité des produits, ainsi que le niveau de service liés à la commercialisation des produits, qui sont plus élevés pour les produits vendus aux professionnels4. Parmi les revêtements décoratifs destinés au grand public, la pratique décisionnelle a envisagé une sous-segmentation entre les produits vendus sous marque de fournisseur (« MDF ») et les produits vendus sous marque de distributeur (« MDD »)5. Cependant, dans les cas les plus récents, la Commission, sans définitivement trancher la question, a constaté la substituabilité du point de vue de la demande des produits destinés aux professionnels et au grand public et des produits vendus sous marque de fournisseur et de distributeur6.

10. En outre, la partie notifiante relève que les revêtements décoratifs peuvent être vendus à des revendeurs au niveau du commerce de gros et à des acheteurs finaux au niveau du commerce de détail ce qui suggèrerait l’existence de marchés distincts. Néanmoins, seuls les marchés du commerce de gros de revêtements décoratifs sont concernés par l’opération dans la mesure où Dyrup n’est pas présente sur les marchés de vente au détail en France.

11. En l’espèce, la question de la délimitation précise des marchés peut être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.

 

B. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE DES MARCHÉS

12. La pratique décisionnelle7 ainsi que la partie notifiante considèrent que les marchés de revêtements décoratifs sont de dimension nationale compte tenu de différences de spécifications techniques, de propriétés des produits et de prix des produits d’un pays à l’autre. De plus, les fabricants ont tendance à avoir des capacités de production dans le pays de distribution, notamment parce que les coûts de transport obèrent la rentabilité du transport de revêtements décoratifs sur de longues distances.

13. En conséquence, il n’y pas lieu de remettre en cause la dimension nationale des marchés de revêtements décoratifs concernés par l’opération.

 

III. Analyse concurrentielle

14. Sur un marché français global de la production de revêtements décoratifs, PPG détient une part de marché de [10-20] % et Dyrup une part de marché de [0-5] %, soit un total de [10-20] % pour la nouvelle entité. Elle y sera confrontée à la concurrence d’opérateurs tels qu’Akzo Nobel, qui détient une part de marché de [10-20] % et de V33, Matéris et Somefor notamment, qui détiennent respectivement une part de marché de [5-10] %, [5-10] % et [5-10] %.

 15. S’agissant de la vente en gros, les activités des parties ne se chevauchent que sur le marché de la vente en gros des produits de protection du bois, Dyrup n’ayant quasiment* aucune activité en France de vente en gros de peintures décoratives. La position de la nouvelle entité à l’issue de l’opération sera donc examinée sur le segment global des revêtements décoratifs et sur le seul sous-segment des produits de protection du bois.

 Ensemble des revêtements décoratifs

16. S’agissant en premier lieu de la vente en gros de revêtements décoratifs, la nouvelle entité détiendra une part de marché de [10-20] % sur l’ensemble des ventes.

17. Sur le segment des produits destinés aux professionnels, sur lequel Dyrup est peu présent, la part de marché de la nouvelle entité à l’issue de l’opération s’élèvera à [20-30] %. De nombreux offreurs sont présents sur ce segment comme Matéris, avec une part de marché estimée à [10-20] %, et Akzo Nobel, Daw Caparol et Meffert, qui détiennent tous une part de marché supérieure à [5-10] %.

18. Sur le segment des produits destinés au grand public, PPG détient avant l’opération une part de marché de [10-20] %, contre [0-5] % pour Dyrup, soit [10-20] % au total. PPG fait face, sur ce marché, à la concurrence d’Akzo Nobel, qui détient une part de marché de [20-30] % et de V33, qui détient une part de marché de [10-20] %. Conformément à la pratique décisionnelle, il est possible d’envisager une sous-segmentation de ce marché entre les produits vendus sous MDF et produits vendus sous MDD, sous-segments sur lesquels la nouvelle entité aurait une part de marché plus modeste, avec [10-20] % du segment des revêtements décoratifs destinés au grand public vendus sous MDF et [10-20] % du segment des MDD.

 Produits de protection du bois

19. S’agissant en second lieu de la vente en gros des seuls produits de protection du bois, PPG représente avant l’opération [5-10] % des ventes sur le marché français et Dyrup [10-20] %, soit [20-30] % au total. La nouvelle entité sera confrontée à la concurrence d’opérateurs tels que V33, Synthilor Blanchon et Akzo Nobel, dont les parts de marché respectives s’élèvent à [10-20] %, [10-20] % et [10-20] %.

20. En ce qui concerne les éventuelles segmentations du marché, la nouvelle entité représentera [20-30] % des ventes en gros de produits de protection du bois à destination des professionnels. Elle fera face à la concurrence d’Akzo Nobel et de Matéris, qui détiennent respectivement une part de marché de [10-20] % et de [10-20] %. S’agissant des ventes à destination du grand public, le cumul des ventes de PPG et Dyrup représente [10-20] % du total, face à V33 et Synthilor / Blachon, qui détiennent une part de marché de [20-30] %, et d’Akzo Nobel, qui représente [10-20] % du marché. Sur ce marché, la nouvelle entité représentera [20-30] % des produits vendus sous MDF et [10-20] % des produits vendus sous MDD.

 21. En conséquence, au vu des éléments qui précèdent, la présente opération n’est pas de nature à affecter la concurrence sur les marchés de revêtements décoratifs.

 

DECIDE

Article unique : l’opération notifiée sous le numéro 11-0091 est autorisée.

 

NOTES :

1 Voir notamment la décision de la Commission européenne du 10 janvier 1994, AKZO / Nobel Industrier, M.390 ; la décision de la Commission européenne du 30 juin 1998, AKZO Nobel / Courtaulds, M.1182 ; la décision de la Commission européenne du 10 décembre 2007, PPG / Sigmakalon, M.4853 ; et la décision de la Commission européenne du 13 décembre 2007, AKZO Nobel / ICI, M.4779.

2 Voir notamment la décision de la Commission européenne M.4779 précitée.

3 Voir notamment la décision du Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie en date du 21 juillet 2005 au conseil de la société Matéris relative à une concentration dans le secteur des peintures industrielles, C 2005-57.

4 Voir notamment les décisions de la Commission européenne M.390, M.4853 et M. 4779 précitées, ainsi que la décision C. 2005-57 du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie précitée.

5 Voir notamment les décisions de la Commission européenne M.4779 et M4853 précitées.

6 Voir notamment la décision de la Commission européenne M.4779 précitée.

7 Voir notamment la décision de la Commission européenne M.4779 et M.4853 précitées.

* Erreur matérielle corrigée.