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Décisions

ADLC, 27 juillet 2011, n° 11-DCC-119

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle conjoint de GEG Energies Nouvelles et Renouvelables par la CDC et GEG

ADLC n° 11-DCC-119

26 juillet 2011

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 22 juin 2011, relatif à la prise de contrôle conjoint de GEG Energies Nouvelles et Renouvelables par la CDC et GEG, formalisée par un protocole d’acquisition et un protocole d’investissement respectivement en date du 20 avril 2011 et du 20 juin 2011 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. La CDC est un établissement public, régi par les articles L. 518-2 et suivants du code monétaire et financier, qui remplit des missions d’intérêt général en appui des politiques publiques conduites par l’État et les collectivités locales et qui exerce des activités ouvertes à la concurrence. Celles-ci sont regroupées autour de quatre pôles : (i) l’assurance de personnes, (ii) l’immobilier, (iii) les services, (iv) le développement de PME et le capital investissement. Dans le cadre de cette dernière activité, la CDC détient des participations contrôlantes dans plusieurs entreprises produisant de l’électricité selon diverses méthodes (biogaz, éolien, photovoltaïque, etc.). Créée par la loi du 28 avril 1816, la CDC est placée « sous la surveillance et la garantie de l’autorité législative »1, ce mode de gouvernance étant destiné à assurer l’autonomie de cette institution qui gère des fonds privés nécessitant une protection particulière.

 2. GEG est une société d’économie mixte producteur et fournisseur historique de gaz et d’électricité de la région de Grenoble. GEG gère les réseaux de distribution d’électricité de Grenoble et de Montsapey ainsi que le réseau de distribution de gaz naturel de Grenoble. S’agissant plus particulièrement de la production d’électricité, GEG utilise aussi bien la cogénération2 que l’énergie hydraulique et développe des projets d’électricité photovoltaïque et éolien. GEG est contrôlée exclusivement par la ville de Grenoble.

3. La société GEG Energies Nouvelles et Renouvelables (ci-après « GEG ENR »), auparavant dénommée Hydelec, a pour principale activité le développement, l’exploitation et la maintenance d’installations de production d’énergie d’origine renouvelable ou à haute performance énergétique, ainsi que la valorisation de leur production. GEG ENR détient et exploite3 ainsi onze centrales hydroélectriques, une installation photovoltaïque et un parc éolien. Antérieurement à la présente opération, le capital de GEG ENR était intégralement détenu par GEG.

4. Aux termes des protocoles en date du 20 avril 2011 et du 20 juin 2011, il est prévu que la CDC acquiert 17,9 % du capital et des droits de vote de GEG ENR. A la lecture du projet de pacte d’actionnaires annexé au protocole d’investissement du 20 juin 2011, il apparaît que la CDC disposera d’un droit de veto portant sur le plan d’affaires et le budget annuel de GEG ENR. Dans la mesure où ces droits de veto excèdent les droits normalement consentis aux actionnaires minoritaires pour protéger leurs intérêts financiers, il convient de considérer que, à l’issue de la concentration notifiée, la CDC exercera avec GEG un contrôle conjoint sur GEG ENR.

5. En ce qu’elle se traduit par la prise de contrôle conjoint de GEG ENR par la CDC et GEG, l’opération notifiée constitue une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce. Les entreprises concernées ont réalisé ensemble un chiffre d’affaires hors taxes consolidé sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros au dernier exercice clos (CDC4 : […] milliards d’euros pour l’exercice 2010 ; GEG : […] millions d’euros pour le même exercice). Chacune de ces entreprises a réalisé, en France, un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (CDC : […] milliards d’euros pour l’exercice 2010 ; GEG : […] millions d’euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

6. S’agissant du secteur de l’électricité, les autorités de concurrence nationales et communautaire distinguent généralement les marchés de produits suivants de l’amont à l’aval : (i) la production et la vente en gros, (ii) le négoce, (iii) le transport, (iv) la distribution, (v) la fourniture au détail d’électricité5. Compte tenu des activités des parties à l’opération, est uniquement concerné en l’espèce le marché de la production et la vente en gros d’électricité.

 7. Le marché de la production et de la vente en gros d’électricité6 comprend, du côté de l’offre, non seulement l’électricité produite par les centrales, mais également les importations d’électricité vers la France via les interconnexions7. Producteurs et importateurs vendent l’électricité en gros aux opérateurs fournissant les consommateurs finaux, à des négociants ou encore à de gros clients industriels. Les parties sont en accord avec la pratique décisionnelle et considèrent qu’il n’est pas pertinent de distinguer différents marchés de la production d’électricité, en fonction des différentes technologies de production ou du caractère « renouvelable » ou non de la production. Au cas présent, il n’y a pas lieu de remettre en cause la définition du marché, les conclusions de l’analyse restant inchangées8.

8. La partie notifiante définit également un marché amont, dans lequel seule la CDC intervient, consistant en la fourniture de services destinés à la mise en place d’installations de production électrique, notamment en ce qui concerne des installations micro-hydrauliques, éoliennes ou photovoltaïques. L’opération n’entrainant aucun effet anticoncurrentiel à ce titre, la définition précise de ce marché peut être laissée ouverte.

9. Enfin, s’agissant de la délimitation géographique du marché pertinent, les autorités de concurrence nationale et communautaire considèrent que les marchés de l’électricité sont de dimension nationale, notamment en raison de la diversité des systèmes réglementaires en vigueur9. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de la présente opération.

 

III. Analyse concurrentielle

10. Avant l’opération, la CDC détient des participations dans plusieurs entreprises actives dans la production d’électricité par divers moyens, à titre principal éoliens et photovoltaïques et, à titre plus limité, hydraulique. L’opération permet donc à la CDC d’étoffer son portefeuille de participations dans chacune de ces technologies de production.

11. A l’issue de l’opération, la position de la nouvelle entité demeurera néanmoins très limitée et en tout état de cause inférieure à [0-5] % du marché de la production et la vente en gros d’électricité10. En outre, la cible représente une portion négligeable (inférieure à [0-5] %) de la production du parc correspondant à chaque technologie concernée. Par conséquent, la concentration n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence dans le secteur de la production d’électricité par le biais d’effets horizontaux.

 12. Enfin, la CDC est active à un stade amont du marché, en matière de fourniture de services destinés à la mise en place d’installations de production électrique, notamment en ce qui concerne des installations micro-hydrauliques, éoliennes ou photovoltaïques. Néanmoins, la partie notifiante estime représenter une portion modeste de ce marché, et en tout état de cause significativement inférieure à 25 %. Enfin, la faiblesse des positions cumulées de la CDC et de la cible à l’issue de l’opération en aval conduit à écarter tout risque d’atteinte à la concurrence par le biais d’effets verticaux.

 

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 11-0116 est autorisée.

 

NOTES :

1 Voir l’article L. 518-2 du code monétaire et financier.

2 Production d’électricité et de chaleur au moyen de centrales au gaz.

3 Préalablement à l’opération notifiée, GEG SE, filiale à 100 % de GEG, a apporté à GEG ENR les actifs suivants : six centrales hydroélectriques, une participation à hauteur de 51 % dans le capital de la société SHFB qui détient et exploite deux centrales hydroélectriques.

4 Les chiffres d’affaires sont évalués à la date du dernier exercice clos et corrigés pour tenir compte des modifications de périmètre intervenues depuis cette date.

5 Décisions de la Commission M.5224 – EDF/British Energy du 22 décembre 2008 ; M.5170 – E.On/Endesa Europa/Viesgo du 19 juin 2008 , lettre du ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi du 2 juillet 2008, aux conseils de la société A2A, relative à une concentration dans les secteurs de la production d’électricité, des réseaux urbains de chaleur et de froid, et de la production et fourniture de chaleur ; décision de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-028 relative à la prise de contrôle exclusif de la société POWEO par la société Österreichische Elektrizitätswirtschafts-Aktiengesellschaft ; n° 11-DCC-41 du 11 mars 2011 relative à l’acquisition du contrôle exclusif par la société NeoElectra Group de certains actifs de la société SEEM.

6 Décisions de la Commission n° M.4180 – Gaz de France/Suez du 14 novembre 2006, n° M4994 Electrabel/Compagnie du Rhône du 29 avril 200, lettre du ministre de l’économie n° C2008-42 - A2A / Cofatech Coriance et décisions de l’Autorité de la concurrence n°09-DCC-028 et n°11-DCC-41.

7 Décisions de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-028 et n° 11-DCC-41 précitées.

8 Dans le même sens, voir la décision de la Commission, M. 5366 – Iberdrola Renovables/Gamesa du 4 décembre 2008, §8.

9 Voir notamment décisions de la Commission M.4180 – Gaz de France/Suez du 14 novembre 2006 ; M.4994 – Electrabel/Compagnie Nationale du Rhône du 29 avril 2008, § 26 ; et les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-028 et n° 11-DCC-41.

10 Les estimations de part de marché produites par les parties ont été obtenues à partir des données fournie dans l’étude « Bilan électrique français 2010 » de Réseaux Transport Electricité.