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Décisions

ADLC, 1 septembre 2011, n° 11-DCC-131

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle exclusif de la société Aeroconseil par la société Akka Technologies

ADLC n° 11-DCC-131

31 août 2011

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 29 juillet 2011, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Aeroconseil par la société Akka Technologies, formalisée par un contrat de cession en date du 28 juillet 2011 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. Akka Technologies est une société holding du groupe familial Akka, spécialisé dans le domaine de l’ingénierie et du conseil en technologies. L’offre de services proposée par Akka concerne chacune des étapes de la vie d’un produit, de la conception à l’industrialisation. Ses clients appartiennent à différents secteurs industriels, notamment aéronautique et automobile.

2. Aeroconseil est actuellement contrôlée par la société MF & Associés, détenue par la famille X. Aeroconseil est également active dans le secteur de l’ingénierie et propose un ensemble de services couvrant l’intégralité du cycle de vie d’un avion, depuis sa conception jusqu’à son exploitation. Les prestations d’ingénierie délivrées par Aeroconseil concernent aussi bien le développement des avions que la mise en oeuvre du transport aérien.

3. Aux termes du contrat de cession en date du 28 juillet 2011, il est prévu que la société Akka Technologies acquiert l’intégralité du capital de la société Aeroconseil.

4. En ce qu’elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de la société Aeroconseil par la société Akka Technologies, l’opération notifiée constitue une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce. Les entreprises concernées ont réalisé ensemble un chiffre d’affaires hors taxes consolidé sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros au dernier exercice clos (Akka : 400,3 millions d’euros pour l’exercice 2010 ; Aeroconseil : 115,5 millions d’euros pour l’exercice 2010). Chacune de ces entreprises a réalisé, en France, un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (Akka : 350 millions d’euros pour l’exercice 2010 ; Aeroconseil : 81 millions d’euros pour l’exercice 2010). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

A. DÉLIMITATION DU MARCHÉ DE PRODUITS

5. Les parties sont présentes sur les marchés de l’ingénierie et des études techniques qui englobe l’ensemble des opérations de conception et d’assistance à la réalisation d’équipements à dominante industrielle dans de nombreux domaines tels que l’industrie, l’énergie, le transport, l’environnement, le BTP et les services publics1.

6. Les autorités de concurrence, tant française2 que communautaire3, ont déjà eu l’occasion de se prononcer sur des opérations de concentration dans le domaine des services en ingénierie et études techniques. Ces services correspondent à l’ensemble des prestations fournies au cours du cycle de vie d’un produit, à chaque étape de la conduite de projets (R&D, développement, ingénierie et process, réalisation, exploitation et maintenance)4. La pratique a ainsi envisagé de distinguer, au sein du secteur de l’ingénierie et des études techniques, un marché plus étroit dit « de conseil en technologies », excluant de son périmètre les entreprises d’ingénierie en BTP et les sociétés proposant uniquement des conseils en système d’information5. De même, les autorités de concurrence se sont interrogées sur la pertinence d’une segmentation du marché des services d’ingénierie en fonction de leurs secteurs d’intervention. A ce titre, les secteurs de l’aéronautique, de la défense, des télécommunications, de l’énergie, du ferroviaire, de la banque et de l’assurance peuvent être considérés comme autant de marchés pertinents6. En l’espèce, les parties sont simultanément actives sur le marché de l’ingénierie et des études techniques à destination du secteur aéronautique.

7. La délimitation exacte des marchés de l’ingénierie et des études techniques peut toutefois être laissée ouverte dans la mesure où les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurent inchangées quelle que soit l’hypothèse retenue.

 

B. DÉLIMITATIONS DU MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE

8. S’agissant du marché de l’ingénierie et des études techniques, si la pratique a généralement retenu des marchés de dimension nationale7, elle a aussi envisagé qu’ils puissent être de dimension infranationale8 selon le type de clientèle et les missions concernées.

9. En l’espèce, les parties précisent que s’agissant de technologies de pointe telles que celles utilisées dans l’industrie aéronautique, les principaux clients sont des groupes industriels de dimension au moins nationale. Pour cette raison, l’analyse sera menée au niveau national, étant précisé que la question de la délimitation géographique exacte des marchés de l’ingénierie et des études techniques peut être laissée ouverte en l’absence de problème concurrentiel.

 

III. Analyse concurrentielle

10. Comme l’a déjà relevé l’Autorité de la concurrence9, en matière d’ingénierie et d’études techniques, l’offre est particulièrement hétérogène et atomisée. Parmi les opérateurs dont l’ingénierie constitue l’activité principale, on compte des filiales spécialisées appartenant à de grands groupes industriels ainsi que des bureaux d’études de taille variable.

11. Sur le marché national de l’ingénierie et des études techniques, tous domaines d’activité confondus, les parties ont estimé leurs parts de marché en 2010 à [0-5] % pour le groupe Akka et [0-5] % pour Aeroconseil, soit une part de marché cumulée inférieure à [0-5] %10.

12. Sur le marché plus restreint de conseil en technologie11 les parts de marché du groupe Akka et d’Aeroconseil sont évaluées respectivement à [5-10] % et [0-5] %, soit une position à l’issue de l’opération de [5-10] %.

13. Si l’on retient le seul segment de l’ingénierie et des études techniques à destination du secteur aéronautique, la part de marché estimée de la nouvelle entité restera inférieure à [5-10] %.

14. A l’issue de l’opération le groupe Akka demeurera confronté à la concurrence exercée notamment par Altran ([5-10] % de part de marché sur le segment du conseil en technologie), Assystem ([5-10] % de part de marché sur le segment du conseil en technologie) ou encore Alten ([5-10] % de part de marché sur le segment du conseil en technologie).

15. Compte tenu de ce qui précède, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés de l’ingénierie et des études techniques.

 

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 11-0133 est autorisée.

 

NOTES :

1 Décisions de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-71 du 8 décembre 2009 relative à la fusion du groupe Coteba et du groupe Sogreah, n° 10-DCC-164 du 18 novembre 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de IOSIS Holding par EGIS SA et n° 11-DCC-20 du 7 février 2011relative à la prise de contrôle exclusif du groupe APTUS par le groupe AUSY.

2 Lettres du ministre de l’économie du 29 avril 2003 au conseil de la société Assystem relative à une concentration dans le secteur de l’ingénierie ; du 10 septembre 2003 aux conseils de la société Pininfarina, relative à une concentration dans les secteur du design et de l’ingénierie automobile ; du 27 novembre 2003 aux conseils de la société Brime Technologies, relative à une concentration dans le secteur du conseil et de l’ingénierie ; du 19 octobre 2007 au conseil de la société Akka Technologies.

3 Décision de la Commission européenne n° M.2645 Saab / WM-Data AB / Saab Caran / JV du 6 décembre 2001.

4 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-71, n° 10-DCC-164 et n° 11-DCC-20, ainsi que les lettres du ministre de l’économie du 29 avril 2003 et du 27 novembre 2003 précitées.

5 Voir la lettre du ministre de l’économie du 19 octobre 2007 précitée.

6 Voir lettre du ministre de l’économie du 27 novembre 2003.

7 Décision de l’Autorité de la concurrence n° 10-DCC-164.

8 Décision de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-71.

9 Voir par exemple la décision de l’Autorité de la concurrence n° 11-DCC-20.

10 Les parties ont estimé leurs positions à partir des données publiées en 2011 par Syntec-Ingénierie, fédération des professionnels de l'ingénierie, et selon lesquelles le marché français de l’ingénierie et des études techniques représente environ 35 milliards d’euros.

11 D’après Syntec-Ingénierie le marché français de conseil en technologie représente environ 6 milliards d’euros.