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Décisions

CA Paris, 14e ch. B, 12 septembre 2008, n° 08/04173

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Monsieur (H) MATRAS

Défendeur :

VILLA DURMAR (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Madame Marne PROVOST-LOPIN

Conseillers :

Madame Sophie DARBOIS, Madame Annick FELTZ

Avoués :

SCP GRAPPOTTE BENETREAU JUMEL, SCP DUBOSCQ - PELLERIN

Avocats :

Me Philippe BENSUSSAN, Me Michel PIALOUX

Paris, du 11 fev. 2008

11 février 2008

Vu l'appel formé par M. Hervé MATRAS de l'ordonnance de référé rendue le 11 février 2008 par le président du tribunal de grande instance de PARIS qui a :

- constaté l'acquision de la clause résolutoire des deux baux,

- dit que faute par M. Hervé MATRAS de libérer les locaux sis [...] après significaon de l'ordonnance, il sera procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l'aide, si nécessaire, d'un serrurier et de la force publique, et à la séquestraon, à ses frais, risques et péril, des meubles laissés dans les lieux,

- condamné M. Hervé MATRAS à payer à la S.C.I. VILLA DURMAR la somme de 26 084,82€ à tre de provision sur les loyers impayés augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 avril 2007 pour la somme de 20 907,11 € et à compter de l'ordonnance pour le surplus,

- condamné M. Hervé MATRAS à payer à la S.C.I. VILLA DURMAR une indemnité provisionnelle d'occupaon égale au montant du loyer contractuel, augmenté des charges, jusqu'à libéraon

effecve des lieux par remise des clés,

- condamné M. Hervé MATRAS aux dépens et à payer à la S.C.I. VILLA DURMAR la somme de 700 € par applicaon de l'arcle 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions en date du 11 juin 2008 par lesquelles l'appelant demande à la cour, au visa des arcles L. 145-41 du code de commerce, 1244-1 à 1244-3 du code civil, de :

- le recevoir en son appel et l'y déclarer bien fondé,

- infirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses disposions,

statuant à nouveau,

- prendre acte de sa bonne foi et du paiement par lui de la somme réclamée par la société VILLA DURMAR au tre de ses dees locaves,

- suspendre la réalisaon et les effets de la clause résolutoire inscrite dans les deux baux dont il est tulaire,

en tout état de cause,
- condamner la société VILLA DURMAR aux dépens de première instance et d'appel ;

Vu les dernières conclusions en date du 22 mai 2008 par lesquelles la société civile de construcon VILLA DURMAR demande à la cour de :

- déclarer M. Hervé MATRAS irrecevable et, subsidiairement, sans fondement en son appel,

- confirmer la décision entreprise en toutes ses disposions, sauf à préciser que la condamnaon au paiement doit être prononcée en deniers ou quiances,

- en tout état de cause, 'dire et juger' irrecevable, subsidiairement sans fondement, M. Hervé MATRAS en toutes ses demandes et, en conséquence, les rejeter,

 

- condamner M. Hervé MATRAS au paiement de la somme complémentaire de 3 000 € sur le fondement de l'arcle 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux eners dépens ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, selon acte sous seing privé du 10 juillet 1996, Mme Suzanne DAMERON épouse DURAND, M. Roger DAMERON et Mlle Gabrielle DAMERON ont consen à M. Hervé MATRAS un bail commercial portant sur une pare de terrains n° 7 et 9 passage dénommé 'Cité Durmar' dépendant d'un immeuble situé [...] moyennant un loyer annuel en principal de 60 000 Frs, payable d'avance par trimestre ;

Que, selon acte sous seing privé du 3 mars 1999, les consorts DURAND ont consen à M. Hervé MATRAS un bail commercial en renouvellement portant sur un autre terrain situé à gauche dans le passage susnommé à effet du 1er janvier 1999 moyennant un loyer annuel en principal de 19 000 Frs, payable par trimestre, à terme échu ;

Que la société civile de construcon VILLA DURMAR est devenue propriétaire de ces biens selon acte authenque en date du 29 décembre 2004 ;

Que les causes des commandements de payer les sommes principales de 15 187,36 et 3 568,45€ représentant respecvement les loyers/indemnités d'occupaon et charges des 3ème, 4ème trimestres 2006, 1er et 2ème trimestres 2007 pour le premier bail et les loyers/indemnités d'occupaon et charges des 3ème, 4ème trimestres 2006 et 1er trimestre 2007 pour le second bail, délivrés tous deux le 24 avril 2007 et visant la clause résolutoire insérée dans chacun des baux, n'ayant pas été réglées dans le délai d'un mois, la société civile de construcon VILLA DURMAR a saisi le juge des référés en résiliaon de plein droit des baux, expulsion de M. MATRAS et paiement par celui-ci, à tre prévisionnel, de l'arriéré locaf global et d'une indemnité d'occupaon ;

Que c'est dans ces condions qu'a été rendue l'ordonnance entreprise, en l'absence du défendeur;

Considérant que l'inmée n'invoque aucun moyen au souen de la fin de non-recevoir qu'elle soulève à l'encontre de l'appel formé par M. MATRAS, de sorte que la cour, qui ne relève aucun moyen d'ordre public suscepble d'être soulevé d'office, sera amenée à rejeter ces prétenons et à déclarer l'appel recevable ;

Considérant qu'au souen de son appel, M. MATRAS fait valoir qu'il a réglé avant la significaon de l'ordonnance la somme de 23 988,55 € correspondant, selon ses calculs, au montant des loyers impayés puis, la somme de 2 096,27 € représentant la différence entre la somme réclamée, qu'il déclare contester, et l'acompte versé, qu'il est de bonne foi, aucun incident sérieux dans le paiement des loyers n'ayant été enregistré et les difficultés étant apparues entre le bailleur et les locataires de la Cité Durmar lors de l'acquision des lots par la société VILLA DURMAR en vue d'un projet immobilier -le coût de réparaons ayant été avancé par les locataires et une procédure étant en cours sur les congés délivrés, que le montant des charges, en constante augmentaon, n'est pas jusfié ; que, prétendant avoir réglé la totalité de la dee locave grâce à un prêt accordé par sa belle-mère en raison de ses difficultés financières, il sollicite la suspension de la réalisaon et des effets de la clause résolutoire en applicaon des arcles L. 145-41 alinéa 2 du code de commerce, 1244-1 alinéa 1er et 1244-2 du code civil et le rejet de la demande d'expulsion ;

Que, pour s'opposer à cee demande, l'inmée souent que M. MATRAS ne peut protester de sa bonne foi alors que l'arriéré portait sur plus de trois ans, que l'absence d'incidents antérieurs et l'ancienneté dans les lieux sont sans incidence, que la contestaon sur le montant des charges et le coût d'une réparaon est inopérante et qu'il n'est pas jusfié de la réalité des difficultés financières alléguées ; qu'elle ajoute qu'il reste dû la somme de 2 363,13 € au tre du premier trimestre 2008 de la seconde locaon et que M. MATRAS est irrecevable et sans fondement à solliciter la suspension des effets de la clause résolutoire alors que les causes des commandements n'ont pas été réglées dans le délai d'un mois impar ;

Considérant que, même si elle n'a pas été expressément formulée par l'appelant, sa demande tendant à la suspension des effets de la clause résolutoire insérée dans les baux, dès lors qu'elle est fondée sur les arcles L. 145-41 alinéa 2 du code de commerce, 1244-1 alinéa 1er et 1244-2 du code civil, induit nécessairement une demande de délais de paiement jusqu'au jour du règlement des causes des commandements de payer ;

Que M. MATRAS est donc recevable en sa demande ;

Considérant que l'appelant ne criquant pas précisément le montant de la provision accordée au tre des arriérés locafs qu'il a accepté de régler en exécuon de l'ordonnance entreprise, les développements sur le climat de tension régnant entre le bailleur et les locataires de l'ensemble immobilier, le défaut de jusficaf de l'augmentaon des charges et l'acquiement du coût de réparaons sont inopérants ;

Qu'il est jusfié, en l'espèce, du règlement intégral des causes des commandements de payer et de la condamnaon prononcée, en deux versements reçus les 15 et 27 février 2008 par la bailleresse ; que M. MATRAS jusfie en outre avoir réglé, le 29 mai 2008, le solde de la dee locave invoquée dans les conclusions de la société civile VILLA DURMAR ; qu'il démontre enfin avoir été aidé financièrement pour apurer sa dee, en sorte que sa bonne foi pour faire face à ses obligaons malgré ses difficultés ne saurait être remise en cause ;

Qu'il y a donc lieu, en applicaon de l'arcle L. 145-41 du code de commerce , de suspendre les effets de la clause résolutoire visée aux commandements de payer, d'imparr à M. MATRAS un délai expirant le 1er mars 2008 pour en apurer les causes et, constatant qu'il s'est libéré dans les condions fixées par la présente décision, de dire que la clause est réputée n'avoir pas joué avec toutes conséquences de droit, l'ordonnance étant infirmée de ce chef ;

Considérant que le présent lige trouvant son origine dans la défaillance de l'appelant à régler l'arriéré de loyers dans le délai des commandements, les eners dépens seront laissés à sa charge;

Que, cependant, l'équité conduit à ne pas faire applicaon des disposions de l'arcle 700 du code de procédure civile au profit de l'inmée en cause d'appel ;

PAR CES MOTIFS, Déclare l'appel recevable ;

Infirme l'ordonnance entreprise, à l'excepon de ses disposions relaves aux dépens et à l'indemnité de procédure ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Déclare M. Hervé MATRAS recevable en sa demande ;

Ordonne la suspension des effets de la clause résolutoire dont l'acquision ne sera pas constatée si M. Hervé MATRAS s'acquie des causes des deux commandements de payer délivrés le 24 avril 2007 dans un délai expirant le 1er mars 2008 ;

Constate que M. MATRAS s'est libéré dans les condions fixées ci-dessus et qu'il est à jour du règlement de ses loyers au 29 mai 2008 ;

En conséquence,

Dit que la clause résolutoire visée dans les commandements du 24 avril 2007 pour non-paiement des arriérés de loyers n'a pas joué ;

Rejee la demande tendant à l'acquision de la clause résolutoire insérée dans les baux avec toutes conséquences de droit, formée par la société civile de construcon VILLA DURMAR ;

Dit n'y avoir lieu à applicaon de l'arcle 700 du code de procédure civile au profit de la société civile de construcon VILLA DURMAR en cause d'appel ;

Condamne M. Hervé MATRAS aux dépens d'appel dont recouvrement dans les condions prévues par l'arcle 699 du code de procédure civile.