Livv
Décisions

ADLC, 11 octobre 2011, n° 11-DCC-152

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle du groupe Mariteam par la société Perceva

ADLC n° 11-DCC-152

10 octobre 2011

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 14 septembre 2011 et déclaré complet le 27 septembre 2011 relatif à l’acquisition par la société Perceva du groupe Mariteam, formalisée par un « term sheet » signé le 17 août 2011 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. Perceva est une société de gestion de portefeuille agréée par l’AMF, dont l’axe principal d’investissement est le soutien et l’accompagnement d’entreprises françaises devant faire face à des environnements opérationnels ou financiers complexes. Perceva assure actuellement la gestion du FCPR France Special Situations Fund I et contrôle les sociétés Trailor ACTM International (fabrication de semi-remorques), Dalloyau (gastronomie et pâtisserie) et Shark (casques de moto).

2. La société GS Invest est à la tête d’un groupe de société (le « groupe Mariteam »), actuellement contrôlé par M. Selva. La principale activité du groupe est le mareyage, à savoir l’achat dans des criées d’espèces fraîchement débarquées en vue de leur tri, de leur allotissement puis de leur conditionnement. Les autres activités du groupe concernent la transformation et le conditionnement des produits de la mer, ainsi que la logistique et la fourniture des restaurants en produits de la mer.

3. L’opération envisagée consiste en l’acquisition de l’intégralité des titres de GS Invest par le FCPR France Special Situations Fund I, via une société créée à cet effet. En ce qu’elle se traduit par la prise de contrôle exclusif du groupe Mariteam par le Perceva, l’opération notifiée constitue une opération de concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (Perceva : […] millions d’euros pour l’exercice clos le 31 mars 2011 ; groupe Mariteam : […] millions d’euros pour l’exercice clos le 30 juin 2010). Chacune réalise en France un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (Perceva : […] millions d’euros pour l’exercice clos le 31 mars 2011 ; groupe Mariteam : […] millions d’euros pour l’exercice clos le 30 juin 2010). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au point I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Le groupe Mariteam est présent sur le marché de la distribution de produits de la mer, tandis que Perceva intervient notamment, via Dalloyau, en tant que traiteur, activité au titre de laquelle il est amené à s’approvisionner en produits de la mer. Il convient donc d’examiner ces marchés au titre de l’analyse des effets verticaux de l’opération.

6. En premier lieu, s’agissant des activités du groupe Mariteam, la pratique décisionnelle relève l’existence d’un marché de la distribution en gros de produits de la mer frais (ou « produits aquatiques »), c’est-à-dire de poissons, coquilles et crustacés. Au sein de cette activité, la pratique décisionnelle a eu l’occasion d’écarter la pertinence d’une éventuelle segmentation en fonction de la nature des produits vendus, dans la mesure où les offreurs comme les demandeurs (grandes et moyennes surfaces, entreprises de la restauration commerciale et de la restauration collective, poissonniers et traiteurs) proposent à la fois des poissons, coquilles et crustacés et ne sont donc pas spécialisés dans la vente d’un type de produit en particulier1.

7. La partie notifiante suggère de segmenter le marché de la distribution en gros de produits de la mer frais par canal de distribution, en distinguant la restauration hors foyer (« RHF »), des GMS et de l’industrie agroalimentaire. De plus, la partie notifiante distingue, au sein de la RHF, la distribution auprès des cafés, hôtels et restaurants (« CHR »), seul segment sur lequel la cible intervient. En tout état de cause, la question de la délimitation exact du marché de la distribution en gros de produits de la mer frais peut être laissée ouverte en l’absence de problème concurrentiel.

8. En ce qui concerne la délimitation géographique du marché, la pratique décisionnelle, sans trancher définitivement la question, suggère que la distribution en gros de produits de la mer frais revêt une dimension régionale. Le marché d’intérêt national de Rungis, par exemple, dans lequel s’approvisionne Dalloyau, représente 50 % des produits frais consommés dans la région Ile-de-France2.

9. En second lieu, s’agissant des activités de Dalloyau, la pratique décisionnelle envisage l’existence d’un marché des traiteurs-organisateurs de réceptions dans lequel les opérateurs proposent, outre la préparation de produits gastronomiques, des services dédiés à la conception et réalisation d’événements. Ils peuvent ainsi prendre en charge une partie de la logistique événementielle, le service à table des plats et fournir des moyens humains et matériel dont ils assurent le transport. Leurs prestations sont destinées à une clientèle composée aussi bien de professionnels que de particuliers3.

10. En ce qui concerne la délimitation géographique de ce marché, la pratique envisage une dimension nationale dans la mesure où ses principaux acteurs opèrent sur l’ensemble du territoire français, tout en relevant l’existence d’un nombre significatif de traiteurs organisateurs de réceptions exerçant leurs activités au niveau régional4. En tout état de cause, la question de la délimitation d’un marché des traiteurs organisateurs de réceptions peut être laissée ouverte en l’absence de problème concurrentiel.

 

III. Analyse concurrentielle

11. L’opération n’entraîne aucun chevauchement horizontal d’activités puisque l’acquéreur ne détient aucune participation contrôlante, directement ou indirectement, dans des sociétés présentes dans le même secteur d’activité que le groupe Mariteam.

12. En revanche, Perceva, par le biais de Dalloyau, intervient sur un marché situé en aval des activités de la cible. Or une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l’accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. La pratique décisionnelle des autorités de la concurrence écarte cependant en principe ces risques de verrouillage lorsque la part de l’entreprise issue de l’opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.

13. En l’espèce, les activités des parties restent inférieures à ce seuil. En effet, la partie notifiante estime que les activités du groupe Mariteam représentent [10-20] % du marché de la distribution de produits de la mer frais aux CHR dans le quart Sud-Ouest de la France, et [0-5] % en Bretagne. De la même manière, sans être capable de fournir une estimation de la part de marché de la cible en Ile-de-France, la partie notifiante relève que le chiffre d’affaires réalisé par Les Viviers du Diben, seule filiale du groupe Mariteam active dans cette région, y représente un part de marché négligeable.

14. Enfin, la partie notifiante estime que les activités de Dalloyau représentent moins de [0-5] % du marché des traiteurs-organisateurs de réceptions au niveau national, et inférieure à [0-5] % dans la seule Ile-de-France. Au demeurant, cette société s’approvisionne en produits de la mer frais uniquement au marché d’intérêt national de Rungis, au sein duquel la société Les Viviers du Diben n’a aucune activité.

15. Au vu de ces éléments, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence par le biais d’effets verticaux.

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 11-0162 est autorisée.

 

NOTES :

1 Lettre du ministre de l’Économie du 21 juin 2004 au conseil de la société Charly Guennec Entreprises relative à une concentration dans le secteur alimentaire ; décision du Conseil de la concurrence n° 11-D-03 du 15 février 2011 relative à des pratiques mises en oeuvre dans le secteur du commerce de gros des fruits et légumes et produits de la mer frais.

2 Id.

3 Décision de l’Autorité de la concurrence n° 11-DCC-137 du 15 septembre 2011 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Lenôtre SA par la société Sodexo SA.

4 Id.