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Décisions

ADLC, 3 novembre 2011, n° 11-DCC-159

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle conjoint de la société Socadis par le groupe Carrefour

ADLC n° 11-DCC-159

2 novembre 2011

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 15 septembre 2011 et déclaré complet le 28 septembre 2011, relatif à l’acquisition du contrôle conjoint de la société Socadis par le groupe Carrefour, formalisée par un protocole d’accord, en date du 18 août 2011 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. Le groupe Carrefour est un groupe français de distribution à dominante alimentaire. En France, le groupe Carrefour exploite des hypermarchés sous enseignes Carrefour et des supermarchés sous enseignes Champion et Carrefour Market. Il exploite également des magasins de proximité sous enseignes Shopi, 8 à huit, Marché Plus, Sherpa, Proxi, et Carrefour City.

2. Le groupe familial Plane exploite au travers de ses filiales des magasins en franchise sous enseigne du groupe Carrefour. Il détient ainsi notamment l’intégralité du capital de Socadis, société par action simplifiée qui exploite un fonds de commerce à dominante alimentaire sous l’enseigne Carrefour Market, situé à Banyuls-sur-Mer (66). Le groupe Plane détient également 50 % du capital de Plamidis, société commune avec le groupe Carrefour, qui détient le solde du capital.

3. L’opération notifiée, formalisée par un protocole d’accord en date du 18 août 2011, consiste en l’acquisition par la société Plamidis de l’intégralité du capital de la société Socadis. En ce qu’elle se traduit par la prise de contrôle conjoint de la société Socadis par le groupe Carrefour aux côtés du groupe Plane, via leur filiale commune à parité Plamidis, l’opération notifiée est bien une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.

4. Les entreprises concernées exploitent plusieurs magasins de commerce de détail et réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 75 millions d’euros (groupe Carrefour : 90 milliards d’euros pour l’exercice clos au 31 décembre 2010 ; groupe Plane : 51,4 millions d’euros pour l’exercice clos le 30 septembre 2010). Les entreprises concernées réalisent en France dans le secteur du commerce de détail un chiffre d’affaires supérieur à 15 millions d’euros (groupe Carrefour : 34,9 milliards d’euros pour l’exercice clos au 31 décembre 2010 ; groupe Plane : la totalité du chiffre d’affaires mentionné ci-dessus est réalisé en France dans le secteur du commerce de détail). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle relatifs au commerce de détail mentionnés au point II de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. La présente opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Selon la pratique constante des autorités nationale et communautaire de la concurrence, deux catégories de marchés peuvent être délimitées dans le secteur de la distribution à dominante alimentaire. Il s’agit, d’une part, des marchés « aval », de dimension locale, qui mettent en présence les entreprises de commerce de détail et les consommateurs pour la vente de biens de consommation et, d’autre part, des marchés « amont » de l’approvisionnement des entreprises de commerce de détail en biens de consommation courante, de dimension nationale.

 

A. MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION

1. LES MARCHÉS DE SERVICE

6. En ce qui concerne la vente au détail des biens de consommation courante, les autorités de concurrence, tant communautaire que nationale, ont distingué six catégories de commerce en utilisant plusieurs critères, notamment la taille des magasins, leurs techniques de vente, leur accessibilité, la nature du service rendu et l’ampleur des gammes de produits proposés : (i) les hypermarchés, (ii) les supermarchés, (iii) le commerce spécialisé, (iv) le petit commerce de détail, (v) les maxi discompteurs, (vi) la vente par correspondance.

7. Les supermarchés sont usuellement définis comme des magasins à dominante alimentaire d’une surface légale de vente inférieure à 2 500 m² et supérieure à 400 m².

8. En l’espèce, la société Socadis exploite un magasin sous l’enseigne Carrefour Market et occupe aujourd’hui une surface de vente de 1 320 m², il rentre donc dans la catégorie des supermarchés.

2. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE

9. Dans ses décisions récentes relatives à des opérations concernant des hypermarchés ou des supermarchés, l’Autorité de la concurrence a rappelé qu’en fonction de la taille des magasins concernés, les conditions de la concurrence devaient s’apprécier sur deux zones différentes :

- un premier marché où se rencontrent la demande des consommateurs d’une zone et l’offre des hypermarchés auxquels ils ont accès en moins de 30 minutes de déplacement en voiture et qui sont, de leur point de vue, substituables entre eux ;

- un second marché où se rencontrent la demande de consommateurs et l’offre des supermarchés et formes de commerce équivalentes situés à moins de 15 minutes de temps de déplacement en voiture. Ces dernières formes de commerce peuvent comprendre, outre les supermarchés, les hypermarchés situés à proximité des consommateurs et les magasins discompteurs.

10. D’autres critères peuvent néanmoins être pris en compte pour évaluer l’impact d’une concentration sur la situation de la concurrence sur les marchés de la distribution de détail, ce qui peut conduire à affiner, au cas d’espèce, les délimitations usuelles présentées ci-dessus.

11. En l’espèce, le magasin concerné entrant dans la catégorie des supermarchés, l’analyse concurrentielle sera menée sur le seul marché incluant les supermarchés, hypermarchés et commerces de proximité et discompteurs situés dans un rayon de 15 minutes autour de Banyuls-sur-Mer.

 

B. MARCHÉS AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT

12. En ce qui concerne les marchés de l’approvisionnement, la Commission européenne a retenu l’existence de marchés de dimension nationale par grands groupes de produits, délimitation suivie par les autorités nationales.

13. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de la présente opération.

 

III. Analyse concurrentielle

A. MARCHÉ AVAL DE LA DISTRIBUTION A DOMINATION ALIMENTAIRE

14. Le supermarché exploité par la cible se trouve dans la zone de chalandise de Banyuls-sur-Mer (66).

15. Sur le marché comprenant les supermarchés et formes de commerce équivalentes situés dans une zone de chalandise de 15 minutes en voiture autour de Banyuls-sur-Mer, le magasin sous l’enseigne Carrefour Market exploité par la cible représente 30 % des surfaces de vente. Un autre magasin, exploité sous enseigne Carrefour City, figure dans cette zone et y représente 7 % des surfaces de vente. A l’issue de l’opération, la part de marché du groupe Carrefour sera donc de 37 %.

16. Ces magasins font actuellement face à la concurrence d’un supermarché du groupe Système U, exploité sous enseigne Super U, détenant 27 % des surfaces de vente, d’un magasin de hard-discount exploité sous enseigne Dia, détenant 21 % des surfaces de vente, et d’un magasin de hard-discount du groupe Lidl, détenant 15 % des surfaces de vente.

17. Par conséquent, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés en cause.

 

B. MARCHÉ AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT

18. En ce qui concerne les marchés amont de l’approvisionnement il convient d’indiquer que l’opération est limitée à un magasin ne représentant qu’une partie marginale du chiffre d’affaires réalisé par le groupe Carrefour en France. L’acquisition du contrôle conjoint de la société Socadis n’est donc pas susceptible de renforcer significativement la puissance d’achat du groupe Carrefour, tous produits confondus comme par grands groupes de produits. Le renforcement est d’autant plus mineur que, préalablement à l’opération, le point de vente objet de l’opération notifiée s’approvisionnait déjà quasi exclusivement auprès des entrepôts du groupe Carrefour ou des fournisseurs référencés Carrefour.

19. Par conséquent, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence tant sur le marché aval que sur le marché amont de la distribution.

 

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 11-0165 est autorisée.