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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 4, 19 novembre 2010, n° 10/18444

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

LA SOCIÉTÉ AGV GROUPE Spa

Défendeur :

LAURA MICHELE ANTONA NEE FOURRE

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Monsieur Jacques LAYLAVOIX

Conseillers :

Madame Catherine BOUSCANT, Monsieur David PEYRON

Avocats :

Me. Gabriella SAGARRIGA VISCONTI, Me. Xavier DAUSSE

Paris, du 23 juin 2010

23 juin 2010

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Jacques LAYLAVOIX, président et par Mlle Fatia HENNI, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise.

Vu le jugement prononcé le 23 juin 2010 par le tribunal de commerce de Paris, qui, saisi sur assignation délivrée le 27 avril 2009 à la requête de Mme Laura Antona aux fins de voir condamner la société AGV à reprendre 18 fauteuils de maquillage acquis auprès de cette société et à lui payer les sommes de 5 253,25 euros en remboursement du prix payé au titre de la facture du 22 février 2007, 6 500 euros au titre des frais supplémentaires engagés pour le remplacements des fauteuils défectueux, 2 085,12 euros au titre des frais de remplacement des accoudoirs défectueux, 450 euros au titre des frais de montage et de démontage, 7 500 euros à titre de dommages et intérêts et 6000 euros au titre de l'article 700 du CPC, a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société de droit italien AGV Group SPA et a condamné cette société aux dépens ;

Vu le contredit motivé, déposé au greffe le 7 juillet 2010 et soutenu à l'audience par la société AGV Group SPA, qui :

- soutient que le contrat de vente internationale conclu avec Mme Antona est soumis aux dispositions du règlement CE N°44/2001 qui prévoit en son article 2 que les personnes domicilées sur le territoire d'un état membre sont attraites devant les juridictions de cet état, que la compétence du tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit s'exécuter, prévue par l'article 5 du même règlement, doit être déterminée au regard de l'application des règles de la convention de Vienne du 11 avril 1980, à laquelle le contrat en cause est assujeti, qu'en vertu de l'article 31 de cette convention l'obligation de livraison lui incombant s'est réalisée au moment de la remise des marchandises au transporteur, la société Aviotir, soit à Scandiano en Italie,

- ajoute que les parties ont entendu régler la vente en faisant application de l'incoterm CIP ou en port payé, entrant dans la catégorie des ventes au départ, qui déterminent les conditions de livraison de la marchandise et le moment du transfert du risque entre le vendeur et l'acheteur, qu'ainsi le vendeur n'assume pas les risques du transport qui sont supportés par l'acheteur dés la livraison de la marchandise au premier transporteur, qu'elle a donc rempli son obligation de livraison lorsqu'elle a remis les sièges au transporteur,

- demande à la cour de dire que le tribunal de commerce de Paris n'est pas compétent pour se prononcer sur la demande de Mme Antona, d' "infirmer" le jugement, de renvoyer Mme Antona à mieux se pourvoir dans la tribunal de Reggio Emilia en Italie et de la condamner aux dépens de première instance ainsi qu'au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du CPC ;

Vu les conclusions soutenues à l'audience par le conseil de Mme Laura Antona, qui excipe de l'application de l'article 5 du réglement CE n°44/2001, prétend que l'obligation incombant au vendeur est de livrer la chose convenue au point convenu, que l'opération de transfert des frais et des risques consistant en la remise des biens au transporteur, déterminée par l'incoterm, ne caractérise pas la prestation du vendeur, que la livraison des biens était fixée sur le territoire français et qui demande à la cour de débouter la société AGV Group SPA de son exception d'incompétence territoriale, de dire que le tribunal de commerce de Paris est compétent pour connaître du litige et de condamner la société AGV Group SPA aux dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 6000 euros en application de l'article 700 du CPC ;

Considérant qu'en application de l'article 5 du règlement du Conseil n°44/2001, une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite dans un autre Etat membre, en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée et, sauf convention contraire, le lieu d'exécution de l'obligation, qui sert de base à la demande, est pour la vente de marchandises, le lieu d'un Etat membre où, en vertu du contrat, les marchandises ont été ou auraient du être livrées ;

Considérant que l'article 31 de la convention de Vienne du 11 avril 1980, ratifiée par la France et l'Italie, dispose en son paragraphe a) que, si le vendeur n'est pas tenu de livrer les marchandises en un autre lieu particulier, son obligation de livraison consiste, lorsque le contrat de vente implique un transport de marchandises, à remettre les marchandises au premier transporteur pour transmission à l'acheteur ;

Que Mme Antona ne prétend pas que les parties ont, par convention, écarté l'application de la convention de Vienne ; qu'au contraire, elle précise que tel n'est pas le cas ;

Qu' il ne ressort pas des documents contractuels versés aux débats que la société AGV avait l'obligation de livrer les fauteuils commandés dans un lieu particulier, de telle sorte que l'obligation de livraison de cette société consistait bien en la remise de ces fauteuils au transporteur, soit dans son établissement de Scansano en Italie ;

Que la référence faite dans ces documents à l'incoterm en port payé ou CIP, correspondant à une vente au départ, même si les incoterms ont pour objet le transfert des risques, confirme encore que l'obligation de livraison de la société AGV est celle qui est définie par le paragraphe a) de l'article 31 de la convention de Vienne ;

Que l'obligation servant de support à la demande en justice de Mme Antona étant l'obligation principale de la société AGV de livrer les fauteuils commandés, la juridiction compétente pour trancher le litige est la juridiction italienne ;

Qu'il y a lieu en conséquence de faire droit au contredit ;

Considérant que Mme Antona supportera les frais du contredit ainsi que les dépens de la procédure devant le tribunal de commerce de Paris ; qu'il n'y a pas lieu en équité d'allouer à l'une ou l'autre des parties une indemnité sur le fondement de l'article 700 du CPC ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Fait droit au contredit,

Déclare fondée l'exception d'incompétence,

Dit que le tribunal de commerce de Paris est incompétent pour examiner le litige,

Renvoie les parties à mieux se pourvoir,

Dit que Mme Antona supportera le cas écheant les frais du contredit ainsi que les dépens de la procédure de première instance,

Déboute les parties de leurs demandes respectives formées sur le fondement de l'article 700 du CPC.