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Décisions

Cass. 3e civ., 3 novembre 2021, n° 20-20.739

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Teiller

Rapporteur :

Mme Aldigé

Avocats :

Me Le Prado, SCP Le Griel, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Aix-en-Provence, du 5 mars 2020

5 mars 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 mars 2020), la société Marseille aménagement, propriétaire de locaux commerciaux donnés à bail à la société France mode, lui a signifié un refus de renouvellement, avec offre de paiement d'une indemnité d'éviction.

2. La société Marseille aménagement a cédé les locaux loués à la SCI La Canebière (la SCI).

3. La société France mode a assigné en paiement d'une indemnité d'éviction la société Marseille aménagement, aux droits de laquelle vient la Société locale d'équipement et d'aménagement de l'aire métropolitaine, et la SCI.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. La société France mode fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnité d'éviction à la valeur du droit au bail, alors « que l'indemnité due au locataire commerçant évincé doit comprendre la valeur marchande du fonds si l'éviction entraîne la perte de ce fonds ; qu'en retenant, au titre d'indemnité d'éviction, la seule valeur du droit au bail, sans relever que le fonds de commerce de la société France mode était transférable, en l'état des conclusions de la société France mode qui invoquait l'absence de transfert du fonds, et après avoir elle-même constaté que l'expert avait énoncé que « les frais de déménagement n'étaient à envisager que dans le cas d'un transfert de fonds, ce qui n'était pas le cas », la cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 145-14 du code de commerce :

6. Selon ce texte, l'indemnité d'éviction est égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement et comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre.

7. Pour fixer l'indemnité d'éviction à la valeur du droit au bail, l'arrêt, après avoir constaté que l'expert judiciaire estime que le fonds n'est pas transférable, retient que l'indemnité d'éviction ne saurait être appréciée exclusivement à partir de l'activité de vente en détail de vêtements dans les locaux loués et que, faute pour la société France mode de communiquer les éléments comptables détaillés permettant d'apprécier la part des ventes réalisées en gros au regard de l'activité de vente en détail et celles réalisées grâce au site internet, celle-ci ne permet pas à la cour de fixer une indemnité d'éviction à la valeur marchande du fonds de commerce.

8. En statuant ainsi, en refusant de rechercher la valeur marchande du fonds de commerce, alors qu'elle avait retenu le caractère non transférable de celui-ci, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe l'indemnité principale d'éviction due par la société France mode à la somme 247 000 euros.