ADLC, 10 février 2011, n° 11-DCC-24
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
relative à la prise de contrôle exclusif de la société Superfos Industries A/S par la société RPC Group Plc
L’Autorité de la concurrence,
Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 16 décembre 2010 et déclaré complet le 27 janvier 2010, relatif à l’acquisition de la société Superfos Industries A/S par la société RPC Group Plc, formalisée par un contrat de cession d’actions en date du 16 décembre 2010 ;
Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;
Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;
Adopte la décision suivante :
I. Les entreprises concernées et l’opération
1. RPC Group Plc (ci-après « RPC ») est une société de droit anglais active dans le secteur de la fabrication de matériaux d’emballage en plastique. RPC est cotée à la bourse de Londres et est détenue principalement par Aberforth Partners LLP (13,5 %), Axa SA (9,2 %), North Atlandic Value LLP (6,9 %), Legal & General Group PLC (6 %), SVG Investment Managers Ltd (5 %). Les principales décisions stratégiques de RPC sont prises par son conseil d’administration qui se compose d’administrateurs indépendants nommés et désignés par les administrateurs eux-mêmes et approuvés par l’assemblée des actionnaires, au sein de laquelle aucun actionnaire ne détient la majorité. Aucun des actionnaires ne détient de droit de veto et RPC n’a connaissance d’aucun pacte d’actionnaires. Par conséquent, RPC n’est contrôlée par aucun de ses actionnaires. En France, RPC dispose de cinq sites de production et fabrique des matériaux de conditionnement en plastique.
2. Superfos Industries A/S (ci-après « Superfos ») est une société de droit danois active dans le secteur du développement, de la production et de la vente d’emballages en plastiques moulés par injection. Superfos est détenue à hauteur de 32,6 % par la société de droit suédois Ratos AB, à hauteur de 51,2 % par les fonds Industri Kapital 1997 Limited Partnership I, II, II et IV représentés par la société de gestion Industri Kapital 1997 Limited, constituée selon les lois de l’Etat de Jersey, les 16 % restants étant répartis au sein d’actionnaires minoritaires. Superfos est présente dans l’ensemble de l’Europe. En France, elle détient 100 % du capital de Superfos La Genête et de Superfos Besançon, qui produisent et fournissent principalement des seaux, des petits récipients et des conteneurs en plastique.
3. L’opération, formalisée par un contrat de cession d’actions en date du 16 décembre 2010, consiste en l’acquisition par RPC de l’intégralité des actions de Superfos. L’opération notifiée se traduit donc par la prise de contrôle exclusif de Superfos par RPC, et constitue à ce titre une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.
4. Les entreprises concernées ont réalisé ensemble un chiffre d’affaires hors taxes consolidé sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros en 2009 (RPC : 738,6 millions d’euros ; Superfos : 324 millions d’euros). Chacune de ces entreprises a réalisé, en France, un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (RPC : […] millions d’euros ; Superfos : […] millions d’euros). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.
II. Délimitation des marchés pertinents
A. MARCHÉ DE PRODUITS
5. En France, RPC fournit principalement (i) des produits moulés par injection destinés à l’industrie cosmétiques, à la restauration et à l’industrie pharmaceutique, (ii) des produits thermoformés destinés à la restauration, l’industrie pharmaceutique et l’industrie alimentaire, principalement pour les produits laitiers, (iii) des produits moulés par soufflage destinés notamment aux produits chimiques et alimentaires. Superfos a pour seule activité la fabrication de conditionnements en plastique moulés par injection soit principalement des seaux de plus d’un litre (destinés notamment aux peintures, aliments pour animaux domestiques, produits laitiers et autres segments alimentaires), des conteneurs à parois parallèles de plus d’un litre (destinés notamment aux peintures et revêtements) et, dans une moindre mesure, de petits récipients pour certains segments alimentaires, notamment les produits laitiers.
6. La pratique décisionnelle européenne considère que, dans l’industrie de l’emballage, la concurrence s’exerce sur plusieurs marchés distincts en fonction du matériau d’emballage utilisé et de l’usage auquel le produit d’emballage est destiné. La Commission a ainsi retenu un marché des conditionnements en plastique à parois fines destinés aux produits laitiers tels que yaourt, crème, crème glacée ou margarine. Sur ce marché, la Commission a notamment conclu à la substituabilité des différentes matières plastiques, tant du point de vue de la demande que de l’offre. En revanche, elle a relevé le coût élevé de la substitution d’une technique de fabrication à une autre, laissant cependant ouverte la question de la délimitation précise du marché pertinent1.
7. Les parties font valoir que les caractéristiques des conditionnements en plastique, et notamment leur forme, leur volume et leur rigidité, diffèrent en fonction des technologies de production utilisées, à savoir le thermoformage, le moulage par injection et le moulage par soufflage.
8. Le thermoformage implique le formage et le façonnage par chauffage de feuilles plates de plastique. Les applications possibles pour les conditionnements en plastique thermoformés sont limitées, compte tenu de leurs parois fines et de leur caractère peu résistant, et ceux-ci sont principalement utilisés sous forme de petits récipients (d’un litre maximum) et tubes destinés au secteur alimentaire, notamment les produits laitiers. En outre, ce procédé de fabrication est peu coûteux (les parties estiment que les coûts de production d’un récipient thermoformé de 250 ml sont en moyenne inférieurs de [20-30] % à ceux d’un produit comparable moulé par injection). Par ailleurs, les machines et le savoir faire nécessaires à la fabrication des produits thermoformés sont différents des autres techniques de production.
9. Le moulage par injection consiste en l’injection de plastique fondu liquide dans un moule qui détermine la forme du produit final. Il donne la possibilité de fabriquer des produits à parois plus ou moins rigides et épaisses et permet d’élaborer une gamme de produits plus large que le thermoformage en termes de volume (250 ml à 50 litres), de forme et de finition. Ces conditionnements peuvent être à la fois destinés au secteur alimentaire ou non alimentaire. Compte tenu de ces caractéristiques, les produits de plus d’un litre sont essentiellement moulés par injection.
10. Enfin, le moulage par soufflage consiste à placer dans un moule un récipient préformé en plastique et à l’étendre par injection d’air comprimé. Cette technologie est principalement utilisée pour la production de conditionnement creux à parois fines et à goulot étroit (bouteilles et bidons). Les parties estiment que le coût du moulage par injection est environ [20-30] % supérieur au moulage par soufflage.
11. Par conséquent, les parties considèrent que les produits de conditionnement en plastique doivent être segmentés en fonction de leur procédé de fabrication, chaque marché pouvant être à nouveau subdivisé en fonction de la forme et du volume du produit en question, les parties distinguant entre les conditionnements de plus et de moins d’un litre. Elles en concluent que l’opération n’emporte aucun chevauchement d’activité puisque les parties fabriquent simultanément des petits récipients en plastique à usage alimentaire, mais selon des procédés de fabrication différents (thermoformage pour RPC, moulage par injection pour Superfos).
12. Les arguments fournis par les parties sont essentiellement fondés sur des considérations relatives à la substituabilité du point de vue de l’offre. L’absence de substituabilité des produits concernés en fonction de la demande, soit en raison de différences d’usage déterminées par les procédés de fabrication utilisées, soit en fonction de différences de coût, ne ressort cependant pas clairement des informations fournies par les parties.
13. En toute hypothèse, il n’est pas nécessaire de se prononcer définitivement sur la délimitation exacte des marchés en cause dans le cas d’espèce puisque les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurent inchangées quelle que soit la segmentation retenue. En l’espèce, l’analyse concurrentielle sera donc menée sur deux segmentations. La première, suggérée par les parties, consistera à examiner les effets de l’opération sur des marchés distincts selon le procédé de fabrication utilisé et le volume des produits. La seconde consistera à examiner les effets découlant du chevauchement d’activité des parties sur des marchés délimités en fonction des volumes et de la destination des produits, à savoir dans les segments regroupant tous les conditionnements en plastique de moins d’un litre et, au sein de cette catégorie, les petits conditionnements en plastique destinés à l’industrie laitière.
B. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE
14. La pratique décisionnelle a laissé ouverte la question de la délimitation géographique des marchés concernés. En l’espèce, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur leur délimitation exacte, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurant inchangées. L’analyse de la présente opération sera donc menée dans l’hypothèse la plus défavorable aux parties, à savoir au niveau national.
III. Analyse concurrentielle
15. Dans les marchés segmentés en fonction des procédés de fabrication et du volume des produits, les activités des parties ne se chevauchent pas puisque RPC est essentiellement active dans la fabrication de produits de conditionnement par thermoformage et Superfos dans la fabrication de produits de conditionnement par moulage par injection. Il convient de noter que RPC fabrique également des produits en plastique par moulage par injection, à savoir des étuis destinés à l’industrie cosmétique (étuis pour rouge à lèvres et mascaras), des verres destinés à l’industrie de la restauration et des inhalateurs destinés à l’industrie pharmaceutique. Néanmoins, soit il ne s’agit pas de produits de conditionnement, soit, en ce qui concerne l’industrie cosmétique, la spécificité des produits en cause exclut toute substituabilité avec les produits fabriqués par Superfos.
16. L’opération n’entrainera donc aucun chevauchement d’activité, les positions des parties se présentant comme suit :
18. Dans l’hypothèse où les différentes technologies de production ne seraient pas retenues comme un critère de délimitation pertinent des marchés concernés, les activités des parties se chevauchent sur le segment des conditionnements en plastique de moins d’un litre, et plus précisément sur ceux destinés à l’industrie laitière. La part de marché cumulée des parties sur ces segments reste cependant limitée, et n’excède pas [5-10] % sur la délimitation la plus fine retenue.
19. Par conséquent, l’opération envisagée n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence et ce, quelle que soit la segmentation retenue.
DECIDE
Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 10-0226 est autorisée.
NOTES :
1 Décision de la Commission européenne n° IV/M.1400 du 1er février 1999, Rexam/PLM.
2 Les parties n’ont pas été en mesure de fournir des parts de marché sur les segments de moins d’un litre et plus d’un litre.