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Décisions

Cass. 3e civ., 17 février 2010, n° 08-19.357

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Philippot

Rapporteur :

M. Assié

Avocat général :

M. Bruntz

Avocats :

Me Spinosi, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Cass. 3e civ. n° 08-19.357

16 février 2010

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 145-14 et L. 145-28 du code de commerce, ensemble l'article L. 145-16 du même code et les articles 1108 et 1134 du code civil ;

Attendu que le bailleur peut refuser le renouvellement du bail ; que, toutefois, le bailleur doit, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement ; qu'aucun locataire pouvant prétendre à une indemnité d'éviction ne peut être obligé de quitter les lieux avant de l'avoir reçue ; que jusqu'au paiement de cette indemnité, il a droit au maintien dans les lieux aux conditions et clauses du contrat de bail expiré ;

Attendu selon l'arrêt attaqué (Bastia, 18 juin 2008) que, par acte du 16 septembre 1996, les consorts X..., propriétaires de locaux à usage commercial donnés à bail à la société Pompa, lui ont délivré congé pour le 1er avril 1997, avec offre de renouvellement ; qu'un jugement du 17 octobre 2000, confirmé par un arrêt du 2 septembre 2003, a fixé le prix du bail renouvelé ; que par acte du 30 novembre 2000, réitéré les 22 décembre 2000 et 4 janvier 2001, les consorts X... ont informé le locataire de leur "décision irrévocable de refuser le renouvellement du bail" ; que, par acte authentique du 17 janvier 2001, la société Pompa, placée en liquidation judiciaire et représentée par son liquidateur, a cédé son fonds de commerce à la société ASC ; que cette dernière a assigné les consorts X... aux fins, pour le cas où leur refus de renouvellement du bail serait validé, d'obtenir paiement d'une indemnité d'éviction ;

Attendu que pour rejeter cette demande et dire la société ASC occupante sans droit ni titre des locaux, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que si l'acquéreur d'un droit au bail bénéficie du droit au renouvellement de ce bail et du droit au paiement d'une indemnité d'éviction, c'est à la condition que la cession soit régulière et opposable au bailleur, que l'exercice par les consorts X... de leur droit de rétractation a eu pour effet le non renouvellement du bail, lequel a pris fin à la date du 1er avril 2007, que le bail commercial n'existait donc plus à la date du 17 janvier 2001 à laquelle la société Pompa a cédé son fonds de commerce à la société ASC, que la vente d'un droit au bail inexistant était donc sans objet et doit être annulée par application des dispositions de l'article 1108 du code civil et qu'en raison de l'effet rétroactif de cette nullité, la société ASC, qui n'a jamais eu la qualité de locataire, ne peut bénéficier de l'indemnité d'éviction due uniquement au locataire évincé et occupe sans droit ni titre les locaux ;

Qu'en statuant ainsi alors que, sauf clause contraire incluse dans l'acte, toute cession de fonds de commerce emporte cession de la créance d'indemnité d'éviction due au cédant et du droit au maintien dans les lieux et que cette cession peut valablement intervenir jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit que les consorts X... ont exercé leur droit de rétractation conformément aux dispositions de l'article L. 145-57 du code de commerce, débouté la société ASC de sa demande d'annulation des actes extra-judiciaire déclarés les 30 novembre et 22 décembre 2000 et 4 janvier 2001 et déclaré le congé opposable à la société ASC, l'arrêt rendu le 18 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bastia, autrement composée.