ADLC, 11 mars 2011, n° 11-DCC-36
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Top Info par le groupe Computacenter
L’Autorité de la concurrence,
Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 17 février 2011, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Top Info SAS et ses 7 filiales par le groupe Computacenter, formalisée par la signature, en date du 14 février 2011, d’un protocole de cession d’actions entre Compatucenter SA et Financière Top Info SA ;
Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;
Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;
Adopte la décision suivante :
I. Les entreprises concernées et l’opération
1. Computacenter est une société anonyme de droit français qui fournit, grâce à un réseau de 16 agences réparties sur l’ensemble du territoire national, des produits et services d’infrastructures informatiques à des organisations et entreprises publiques et privées. Son capital est détenu à 99 % par Computacenter Plc, société de droit anglais et tête du groupe Computacenter. Ce dernier, implanté dans cinq pays européens, est spécialisé dans la fourniture de services d’infrastructures informatiques.
2. Top Info SAS, société par actions simplifiée de droit français, est la société mère de 7 sociétés françaises (Top Info Ouest, Top Info Sud Est, Top Info Centre, Top Info Technologies, Top Info System, Top Info Défense et Logival), l’ensemble constituant le groupe Top Info. Celui-ci est spécialisé dans la vente et la distribution de produits et services informatiques auprès des entreprises publiques et privées et développe essentiellement ses activités en région parisienne et dans les agglomérations de Lille et de Lyon.
3. L’opération, formalisée par un protocole de cession d’actions signé le 14 février 2011, porte sur l’acquisition, par Computacenter SA, de la totalité des actions de la société Top Info SAS et de ses 7 filiales auprès de la société Financière Top Info, actuellement actionnaire du groupe Top Info. En ce qu’elle entraîne l’acquisition du contrôle exclusif de ce dernier par le groupe Computacenter, l’opération notifiée est une opération de concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.
4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (groupe Computacenter : 2,8 milliards d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2009 ; le groupe Top Info : 125 millions d’euros pour la même période). Deux au moins de ces entreprises réalisent en France un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (groupe Computacenter : 360 millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2009 ; groupe Top Info : 124 millions d’euros pour la même année). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.
II. Délimitation des marchés pertinents
5. Les parties à la présente opération interviennent simultanément dans le seul secteur informatique. Le groupe Computacenter commercialise des produits et services d’infrastructures informatiques. Le groupe Top Info réalise la quasi-totalité de son chiffre d’affaires dans l’activité de revente de produits informatiques, le solde de son activité correspondant à quelques services de mise en oeuvre et de support de solutions informatiques accessoires à la vente des produits. Dès lors, dans le cadre de l’examen de cette opération, seule l’activité de distribution de matériel informatique fera l’objet d’une analyse concurrentielle.
A. LES MARCHÉS DE PRODUITS ET SERVICES
6. Le secteur de la distribution de matériel informatique qui regroupe notamment la vente d’ordinateurs fixes et portables, la vente de logiciels d’exploitation, de bureautique, de périphériques et d’accessoires multimédia, ainsi que les services d’installation et d’utilisation directement liés à ces équipements, fait intervenir plusieurs catégories d’acteurs.
7. En amont, les constructeurs vendent leurs produits soit directement aux distributeurs, soit, le plus souvent, à des grossistes, dont le rôle est de disposer d’une large gamme de produits informatiques et de fournir ceux-ci à leurs clients distributeurs dans des délais très courts. Il peut également arriver que le constructeur s’adresse directement aux clients finals. En aval, trois catégories de distributeurs au détail se distinguent : les grandes et moyennes surfaces généralistes et spécialisées (par exemple Carrefour, Auchan, Boulanger, Fnac, etc.) ; les revendeurs à valeur ajoutée (les « value-added resellers » ou VARS qui intègrent leurs propres logiciels au matériel acheté en gros en vue de leur revente) ; les distributeurs spécialisés pour les clients professionnels (« corporate resellers »).
8. Tant la Commission européenne que l’Autorité de la concurrence ont distingué le marché de la vente en gros de produits informatiques aux distributeurs du marché de la vente de produits informatiques au détail, du fait des différences dans les délais de livraison, dans les capacités logistiques et dans l’étendue de la gamme de produits offerts1.
9. Au sein de la distribution au détail, la pratique décisionnelle a retenu l’existence de trois segments distincts correspondant aux trois catégories d’acteurs : les grandes surfaces, les revendeurs à valeur ajoutée et les distributeurs spécialisés pour les professionnels2. Il a aussi été envisagé une segmentation plus fine de la distribution au détail, en fonction du type de matériel vendu, en distinguant (i) les micro-ordinateurs, serveurs et ordinateurs portables, (ii) les imprimantes et cartouches, (iii) les logiciels et (iv) les accessoires et autres périphériques3.
10. Au cas d’espèce, les parties sont simultanément actives sur le seul segment de la distribution spécialisée pour les professionnels et proposent tout type de matériel informatique. En l’espèce, la question d’une subdivision plus fine des marchés peut être laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit l’hypothèse retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.
B. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES
11. S’agissant du marché géographique, les autorités de concurrence, dans les décisions précitées, ont considéré que le marché de la distribution au détail de matériel informatique était au moins de dimension nationale, dans la mesure où les distributeurs intervenaient sur une base nationale et les produits s’adressaient à des professionnels nationaux.
12. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de la présente opération.
III. L’analyse concurrentielle
13. Sur un marché français de la distribution de commodités informatiques à des professionnels estimé, par la partie notifiante, à hauteur de 5,6 milliards d’euros pour l’année 2009, les groupes Computacenter et Top Info ont présenté respectivement des parts de marché de 6,4 % et 2,2 %, soit une part cumulée de 8,6 %. Avec plus de quinze entreprises présentant un chiffre d’affaires individuel annuel de plus de 100 millions d’euros, le marché apparaît fortement concurrentiel. La position des parties sera notamment concurrencée par SCC (14,1 % du marché), Dell (10,2 %), Econom (6,5 %), Nextiraone (5,7 %), Spie Communications (4,9 %), Axians (4,4 %).
14. S’agissant d’une éventuelle segmentation du marché par type de matériel vendu, les parts de marché des parties seraient les suivantes :
- marché des micro-ordinateurs, portables, écrans et serveurs : respectivement 10 % et 4,9 % pour Computacenter et Top Info, soit une part cumulée de moins de 15 % ;
- marché des imprimantes : respectivement 3,8 % et 1 % pour Computacenter et Top Info, soit une part cumulée de 4,8 % ;
- marché des logiciels et systèmes de stockage : respectivement 2,5 % et 0,2 % pour Computacenter et Top Info, soit une part cumulée de 2,7 %.
15. Par ailleurs, compte tenu de la modeste part de marché des parties à l’opération sur les marchés de la distribution au détail, l’opération n’est pas de nature à créer ou renforcer une puissance d’achat sur le marché amont de l’approvisionnement en commodités informatiques auprès des constructeurs et des grossistes.
16. Dès lors l’opération n’est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence sur les marchés de la distribution de matériel informatique.
DÉCIDE
Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 11-0021 est autorisée.
NOTES :
1 Voir notamment la décision M. 1179 Tech Data / Computer 2000 du 3 juin 1998 de la Commission européenne, et les décisions de l’Autorité de la concurrence n°09-DCC-39 du 4 septembre 2009 et 10-DCC-127 du 23 septembre 2010
2Voir notamment la décision n°09-DCC-39 du 4 septembre 2009 précitée.
3 Voir notamment la décision n°09-DCC-39 du 4 septembre 2009 précitée