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Décisions

ADLC, 4 mai 2011, n° 11-DCC-62

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle conjoint de La Boîte à Outils SAS, filiale du groupe SAMSE, d’un actif de la société Mr Bricolage SA

ADLC n° 11-DCC-62

3 mai 2011

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 22 mars 2011, déclaré complet le 31 mars 2011, relatif à la prise de contrôle conjoint de La Boîte à Outils SAS et de Mr Bricolage SA sur un fonds de commerce d’articles de bricolage situé à Amphion-Publier (74), formalisée par un contrat de cession de fonds de commerce en date du 9 février 2011 au profit de la société DEDB créée à cet effet;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. La société Mr Bricolage SA est la société mère du groupe Mr Bricolage (ci-après « Mr Bricolage »), elle est détenue à hauteur de 26,2 % par les membres de la famille Tabur, à 35,3 % par la société par actions simplifiée SIMB, à 5,4 % par la société en commandite par actions SIFA et à 1 % par la société par actions simplifiée SIFI. Le reste du capital est détenu par le public, Mr Bricolage étant coté, depuis le 24 janvier 2011, au compartiment B de la bourse de Paris (NYSE-EURONEXT). SIMB est elle-même contrôlée à 100 % par l’ANPF, société anonyme qui est intégralement détenue par l’ensemble des adhérents du réseau Mr Bricolage. SIFI est contrôlée à 100 % par SIMB. SIFA est contrôlée majoritairement par SIMB et ANPF. Le groupe Mr Bricolage intervient dans le secteur de la distribution spécialisée d’articles et de matériels de bricolage, jardinage et de matériaux de construction par l’intermédiaires d’un réseau de grandes surfaces de bricolage (ci-après « GSB »). Son activité est organisée autours de deux pôles : l’exploitation de magasins intégrés d’une part et les services aux réseaux de magasins adhérents, notamment de référencement, d’autre part.

2. En France, Mr Bricolage exploite un réseau de 602 points de vente opérant sous différentes enseignes: « Mr Bricolage » (394 magasins dont 84 sont intégrés), « Les Briconautes/Les Jardinautes » (153 magasins dont 4 sont intégrés) et « Catena », « Super Catena » (environ 50 magasins dont est prévu le passage progressif sous enseigne « Mr Bricolage »). Le groupe est également présent hors de France via un réseau de 52 magasins.

3. La société La Boîte à Outils SAS est une filiale de la société SAMSE, holding du groupe SAMSE, actif dans les secteurs du négoce généraliste et spécialiste de matériaux de construction et de la distribution de matériels de bricolage. Le groupe SAMSE compte 26 enseignes et un réseau de 262 points de vente répartis dans le sud-est de la France. Le capital de la société SAMSE est détenu à 50,6 % par la holding Dumont Investissement, elle-même contrôlée par les salariés de SAMSE et à 21,2 % par la société CRH Pic. Les 28,2 % restant du capital de SAMSE correspondent à des actions cotées sur Euronext. SAMSE détient, directement ou indirectement, des participations dans 25 sociétés dont 7 sont actives dans le secteur du négoce généraliste de matériaux.

4. La société La Boîte à Outils SAS (ci-après « La Boîte à Outils ») exploite un réseau de magasins distribuant de l’outillage et des matériaux de construction pour le bâtiment et l’habitat dans le secteur du bricolage et du jardinage d’une part et dans le secteur du négoce d’autre part. Ce réseau est exploité sous deux enseignes : « La Boîte à Outils » (9 magasins) et « L’Entrepôt du bricolage » (16 magasins).

5. Pour les besoins de l’opération, une société par actions simplifiée nommée « DEDB SAS » ainsi qu’une société filiale détenue à 100 % par celle-ci, « DEDB Magasins », ont été créées le 9 février 2011 par Mr Bricolage et La Boîte à Outils qui en détiendront chacun 50 % du capital. Par un contrat de cession de fonds de commerce sous conditions suspensives en date du même jour, DEDB Magasins a acquis auprès d’une filiale de Mr Bricolage, SADEF, le fonds de commerce d’articles de bricolage situé à Amphion-Publier (74) et exploité actuellement sous l’enseigne « Mr Bricolage ».

6. Les statuts de la société DEDB précisent que la société a pour objet principal l’acquisition et l’exploitation, directement ou indirectement, de magasins de vente au détail de produits de bricolage sous l’enseigne « L’Entrepôt du bricolage » ou « La Boîte à Outils ». Aux termes de ces mêmes statuts et du pacte d’actionnaires de la société DEDB, en dates du 9 février 2011, cette dernière est composée d’un comité de surveillance composé de [Confidentiel]. Les décisions stratégiques relatives à la société y seront prises [Confidentiel]. Au regard de ce qui précède, Mr Bricolage et La Boîte à Outils exerceront conjointement le contrôle du fonds de commerce « Mr Bricolage » situé route des Vignes Rouges à Amphion-Publier (74), via la société DEDB, et sa filiale DEDB Magasins

7. En ce qu’elle se traduit par le passage d’un contrôle exclusif exercé par Mr Bricolage, via SADEF, à un contrôle conjoint exercé par Mr Bricolage et La Boîte à Outils, via DEDB Magasins, sur le fonds de commerce « Mr Bricolage » situé route des Vignes Rouges à Amphion-Publier (74), l’opération notifiée constitue une concentration au sens de l’article L.430-1 du code de commerce.

8. Chacune des entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total hors taxes sur le plan mondial de plus de 150 millions (Mr Bricolage : 547,46 millions d’euros pour l’exercice clos au 31 décembre 2009; groupe SAMSE : 910,76 millions d’euros pour le même exercice). Chacune réalise, en France, un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (Mr Bricolage : 538,74 millions d’euros ; le groupe SAMSE réalise l’intégralité de son chiffre d’affaires en France). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au point I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

9. Les parties exercent leurs activités dans le secteur du commerce de détail d’articles de bricolage à destination des particuliers. La pratique décisionnelle1, tant communautaire que nationale distingue généralement deux marchés principaux dans ce secteur :

- le marché aval de la distribution sur lequel les entreprises du secteur du commerce de détail d’articles de bricolage, de décoration et de jardinage sont en contact, en tant que fournisseurs avec les consommateurs finals ;

- les marchés amont de l’approvisionnement sur lesquels des entreprises, en tant que clients, sont en contact avec les fabricants d’articles de bricolage, de décoration et de jardinage.

 

A. LE MARCHÉ AVAL DE LA DISTRIBUTION D’ARTICLES DE BRICOLAGE

1. LES MARCHES DE SERVICES

10. Dans la décision Leroy Merlin/Brico, la Commission européenne2 ne s’est pas prononcée sur une exacte définition des marchés de la vente au détail de produits de décoration, bricolage et jardinage. Si elle a envisagé la possibilité de segmenter les marchés selon les groupes de produits et les canaux de distribution, elle a mené l’analyse concurrentielle sur le marché de la distribution d’articles de bricolage, décoration et de jardinage dans le réseau des GSB, en précisant que des différences (croissance en taux de vente dans le canal des GSB, concurrentes en présence…) pouvaient être constatées selon les Etats membres considérés.

11. La pratique décisionnelle des autorités de concurrence nationales3 a retenu un marché pertinent de la distribution au détail d’articles de bricolage et d’amélioration de l’habitat4 commercialisés par des grandes surfaces spécialisées dans le bricolage (« GSB ») dont la taille dépasse 300 m2, qui disposent généralement d’un nombre de références supérieur à 10 000 unités et s’adressent à une clientèle quasi exclusivement composée de particuliers.5

12. S’agissant de l’inclusion des négociants en matériaux de construction dans le marché pertinent, les autorités de concurrence ont noté que la frontière entre le marché du négoce de matériaux et de la distribution au détail d’articles de bricolage n’est pas étanche, le degré de substitution entre ces deux canaux distincts dépendant fortement de la stratégie des différents réseaux de négociants. La pratique a relevé qu’en premier lieu, certains particuliers, appartenant à la catégorie dite des « bricoleurs lourds », capables de réaliser des travaux de construction conséquents et ayant des attentes proches de celles des professionnels, s’approvisionnent auprès des négociants en matériaux de construction ; qu’en second lieu, de nombreux négoces cherchent à atteindre une clientèle de particuliers en s’adaptant à leurs attentes, avec une ouverture le samedi ou une implantation dans des zones commerciales d’hypermarchés ; qu’enfin, ces négociants ont ouvert des « libres-services » bricolage spécifiquement destinés aux particuliers. Il convient par conséquent de tenir compte de la pression concurrentielle exercée sur les parties à l’opération par les négociants en matériaux de construction, au cas par cas et en fonction de la situation de chaque marché géographique retenu, pour apprécier les effets de la présente opération. La pratique a ainsi retenu dans certains cas la pression concurrentielle des négociants en matériaux de construction disposant d’une surface libre service dédiée au bricolage d’une superficie supérieure à 300m2 et étant ouverts le samedi, afin de détecter ceux étant plus orientés vers les activités grand public

13. En l’espèce, les parties estiment que le point de vente objet de l’opération subit une pression concurrentielle émanant de négociants en matériaux, ouverts le samedi, et dont les activités ciblent une clientèle de particuliers bien qu’ayant une surface libre service dédiée au bricolage réduite, d’une superficie située entre 100 et 300m2.

14. Au cas d’espèce, et la présente opération ne portant que sur un point de vente, la question d’inclure dans l’analyse les négociants en matériaux, ouverts le samedi, ayant une surface libre service dédiée au bricolage d’une superficie inférieure à 300m2, peut être laissée ouverte, l’analyse demeurant inchangée que ces derniers soient ou non pris en compte.

 

2. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE

15. Comme l’ont relevé plusieurs décisions de la Commission européenne, du ministre de l’économie et de l’Autorité de la concurrence, les marchés géographiques relatifs aux secteurs du commerce de détail sont de dimension essentiellement locale, leur délimitation pouvant dépendre de nombreux facteurs, en particulier la taille des magasins et la nature des produits commercialisés.

16. La Commission a précisé que dans le cas de magasins spécialisés en articles de bricolage, de décoration et de jardinage, l’étendue des zones de chalandise est très variable en fonction de la taille du magasin, de sa localisation, du référencement et des habitudes de consommation des ménages concernés6. Elle a, de ce fait, retenu des zones de chalandise de l’ordre de 20 km7, tout en précisant que leur étendue pouvait varier dans le cas où des zones de chalandises se recouvrent, dans la mesure où ces recouvrements assurent une continuité des conditions dans lesquelles s’exerce la concurrence sur ces zones.

17. La pratique des autorités nationales de concurrence8 corrobore ces ordres de grandeur, le ministre comme l’Autorité de la concurrence ayant retenu une zone d’attractivité de l’ordre de 15 à 20 minutes en voiture pour les GSB de dimension moyenne (2 000 à 3 000 m2) et une zone pouvant aller jusqu’à 30 minutes en voiture pour les points de vente beaucoup plus importants en superficie, ou présentant une taille relativement plus élevée par rapport aux concurrents immédiats, ou bien encore se trouvant à proximité d’un hypermarché particulièrement attractif. La pratique décisionnelle antérieure a également relevé que certains magasins d’une surface supérieure à 5 000 m2 pouvaient drainer une clientèle située dans une zone de chalandise de 40 minutes en voiture9.

18. L’analyse concurrentielle sera donc menée sur une zone de 20 à 30 minutes en voiture autour du point de vente d’Amphion-Publier (74) d’une surface de 3 155 m2, en tenant compte des caractéristiques particulières de la zone, du degré de pression concurrentielle que les magasins de la zone sont susceptibles d’exercer les uns sur les autres au regard de leur taille et de la distance, en temps de trajet, qui les sépare.

 

B. LE MARCHÉ AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT

1. LES MARCHÉS DE PRODUITS

19. Le marché amont de l’approvisionnement comprend la vente de produits de bricolage, de jardinage et de matériaux par les producteurs à des clients professionnels intermédiaires que sont les grossistes et les centrales d’achat ou de référencement. Compte tenu du fait que, d’une manière générale, les producteurs fabriquent des produits ou groupes de produits particuliers et ne sont techniquement pas en mesure de se reconvertir facilement dans la fabrication d’autres produits sans coûts conséquents, une répartition par groupes de produits a été envisagée par la pratique décisionnelle, tant nationale que communautaire10, qui a opéré une segmentation entre les groupes de produits suivants : décoration, revêtements de murs, sols, carrelage, outillage, quincaillerie et rangement, électricité et luminaires, équipements sanitaires, matériaux de construction, menuiserie, jardinage.

20. La Commission européenne a également envisagé, tout en laissant la question ouverte, que certains marchés de l’approvisionnement puissent également être définis en fonction des canaux de distribution, de telle sorte que l’approvisionnement du secteur du commerce de détail spécialisé pourrait constituer un marché autonome, distinct de l’approvisionnement des négociants11. Les parties notifiantes estiment que tel est le cas en l’espèce.

21. Toutefois, ces questions peuvent être laissées ouvertes, l’analyse demeurant inchangée à l’occasion de la présente opération.

2. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE

22. En raison des caractéristiques de la distribution, il a été précédemment retenu par la pratique décisionnelle une dimension au moins nationale des marchés de l’approvisionnement. Il convient toutefois de relever qu’il existe, dans certains cas, des négociations qui sont menées au niveau local ou international.

23. En l’espèce, les négociations d’approvisionnement sont menées au niveau national.

24. En tout état de cause, la question de la délimitation géographique exacte des marchés de l’approvisionnement peut rester ouverte, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurant inchangées, quelle que soit la délimitation retenue.

 

III. Analyse concurrentielle

1. LE MARCHÉ AVAL DE LA DISTRIBUTION DARTICLES DE BRICOLAGE

25. La filiale commune exploitant le point de vente, cible de l’opération, a pour objectif le développement d’un concept de distribution dit de « soft discount », offrant des produits et matériaux liés à la construction, l’aménagement, l’équipement et la décoration de la maison et du jardin à des prix bas, répondant à des besoins de proximité et accompagnés de services et de conseil. Ce concept sera exploité dans des magasins de taille moyenne, entre 2 000 et 3 000 m2, sous l’une des enseignes du groupe SAMSE, « L’Entrepôt du bricolage » ou « La Boîte à Outils ». S’agissant des effets horizontaux, sur une zone de 20 à 30 minutes en voiture autour du point de vente d’Amphion-Publier (74), le magasin exploité conjointement par Mr Bricolage et SAMSE, sous l’enseigne « La Boîte à Outils » ou « L’Entrepôt du bricolage », aura une part de marché de 21,5 %.

26. Mr Bricolage dispose sur cette zone de deux magasins Les Briconautes, respectivement de 1 495 m2 (10,2 % de part de marché) situé à Thonon-les-Bains et de 1 000 m2 (6,8 % de part de marché), situé à Vinzier. Le groupe SAMSE dispose lui sur la zone d’un magasin de négoce de matériaux de 700 m2 avant l’opération, soit 4,8 % du marché.

27. Le magasin exploité conjointement par les parties sera confronté, outre les magasins exploités par ses mères, à la pression concurrentielle de Bricorama (surface de 6 000 m2 - 40,9 % de parts de marché), Quincaillerie Dubouloz (surface de 980 m2 - 6,7 % de parts de marché) et Quincaillerie Magretti (surface de 945 m2 - 6,4 % de parts de marché).

28. La pression concurrentielle émane également, ainsi que le suggèrent les parties notifiantes, de trois magasins de négoces de matériaux, bien qu’offrant une surface de libre service dédiée au bricolage inférieure à 300 m2 : il s’agit de deux magasins Gedimat, à Margencel et Evian-les-Bains, et d’un Bigmat, situé à Thonon-les-Bains. Leur prise en compte dans le marché pertinent ne modifie pas l’analyse puisqu’ils représentent ensemble 2,6 % de parts de marché.

29. Il convient de souligner également la présence d’un magasin Leroy Merlin d’une surface de 10 990 m2 à Ville-la-Grand qui, bien qu’il soit situé à 37 minutes en voiture d’Amphion-Publier, est suffisamment attractif pour constituer une alternative aux points de vente des parties.

30. S’agissant du risque de coordination des sociétés mères, le contrôle conjoint est susceptible d’inciter les maisons mères à coordonner leurs activités sur les marchés sur lesquels elles restent simultanément présentes. En l’espèce, Mr Bricolage et SAMSE seront toutes les deux actives sur le marché de la distribution d’articles de bricolage, de décoration et de jardinage. Conformément à la pratique décisionnelle de la Commission européenne, reprise par les autorités de concurrence nationales12, un tel risque est probable lorsque les trois conditions cumulatives suivantes sont réunies : le risque de coordination doit avoir un lien de causalité direct avec la création de l'entreprise commune, la coordination doit être suffisamment vraisemblable et la coordination doit avoir un effet sensible sur la concurrence.

31. En l’espèce, un tel risque de coordination semble peu vraisemblable dans la mesure où les sociétés mères exploitent des enseignes dont les positionnements commerciaux sont différents.

32. En tout état de cause, si les deux sociétés mères et la cible devaient être considérées ensemble, elles représenteraient 43,3 % du marché. Toutefois, le magasin Bricorama d’une surface de 6 000 m2 (40,9 % de part de marché) est de nature à exercer une pression concurrentielle sur les points de vente des parties. De plus, le magasin Leroy Merlin d’une surface de 10 990 m2 situé à Ville-la-Grand est suffisamment attractif pour constituer une alternative aux points de vente des parties.

33. L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché aval de la distribution d’articles de bricolage sur la zone considérée autour du point de vente d’Amphion-Publier.

 

2. LE MARCHÉ AMONT DE LAPPROVISIONNEMENT

34. S’agissant des marchés amont de l’approvisionnement, l’opération, limitée à un magasin, n’est pas susceptible de renforcer significativement la puissance d’achat de La Boîte à Outils, sous les enseignes de laquelle le point de vente sera exploité après l’opération, tous produits confondus ou par grands groupes de produits. La situation demeure inchangée pour Mr Bricolage, sous l’enseigne de laquelle était exploité le fonds de commerce avant l’opération.

35. Les parties étant simultanément présentes sur le marché national de l’approvisionnement pour leur compte propre, elles pourraient être incitées à coordonner leurs stratégies d’approvisionnement notamment via notamment le référencement de leurs fournisseurs communs et le pouvoir de négociation dont elles pourraient bénéficier à l’égard de ces derniers. Toutefois, cette incitation est plus probable pour le seul approvisionnement de leurs réseaux de commerce de détail. Or, si l’on considère leurs positions sur le marché de l’approvisionnement des seules GSB, distinct de celui de négociants, les parties représentent ensemble [10-20] % de parts d’achats toutes familles de produits confondus. La dissymétrie des parts d’achats des deux sociétés mères pour l’approvisionnement de leurs réseaux de distribution respectifs ([5-10] % pour Mr Bricolage, [0-5] % pour le groupe SAMSE) permet d’écarter la vraisemblance et l’effet sensible sur la concurrence d’une éventuelle coordination.

36. La même analyse peut être menée en opérant une segmentation par famille de produits, la part d’achat cumulée des parties dans l’approvisionnement de produits issus des catégories définies précédemment est inférieure à 10 %, à l’exception de celles du jardinage, de la décoration et des équipements sanitaires et de chauffage où elle est respectivement de [10-20] %, [10-20] % et [10-20] %. La part d’achat du groupe SAMSE ([…] magasins) est faible et, pour la plupart des marchés, inférieure à [0-5] %. De plus, sur ces marchés de l’approvisionnement des GSB, des acteurs tels qu’Adeo ou Kingfisher jouissent de positions fortes permettant de contrebalancer un éventuel pouvoir de marché résultant de la coordination de Mr Bricolage et de La Boîte à Outils dans leurs approvisionnements.

37. Si l’on considère le marché global de l’approvisionnement, incluant la part d’achat des négociants, la position de groupe SAMSE, toutes familles de produits confondus, reste marginale ([0-5] %) et celle de Mr Bricolage, absent du marché du négoce, est diluée et estimée à [5-10] %. De plus, il est peu vraisemblable que les parties puissent coordonner leurs comportements sur un marché global de l’approvisionnement incluant la demande des GSB et celles des négociants. Au sein même du groupe SAMSE, les achats d’approvisionnement réalisés pour le compte du commerce au détail et pour l’activité de négoce ne sont ni centralisés, ni globalisés. Les parties expliquent que l’activité de négoce a des exigences d’approvisionnement différentes de l’activité de commerce de détail notamment en termes de volumes, de conditionnement de produits, de modes de livraison et de stockage. Ces éléments et les positions respectives des parties ne sont pas de nature à rendre plausible un risque de coordination sur un marché global de l’approvisionnement.

38. En conséquence, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés amont de l’approvisionnement.

 

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 11-0032 est autorisée.

 

NOTES :

1 COMP/M.2898 – Leroy Merlin/Brico, Lettres du ministre de l’économie du 29 août 2002, Mr Bricolage/Tabur et du 7 avril 2004, Leroy Merlin/Domaxel ; Décision de l’Autorité de la Concurrence n°10-DCC-01 du 12 janvier 2010.

2 COMP/M.2898 – Leroy Merlin/Brico

3 Lettres du ministre de l’économie du 29 août 2002, Mr Bricolage/Tabur et du 7 avril 2004, Leroy Merlin/Domaxel ; décision de l’Autorité de la Concurrence n°10-DCC-01 du 12 janvier 2010.

4 Articles qui ont pour caractéristiques de répondre aux besoins du consommateur pour l’aménagement, l’entretien et la rénovation du logement et du jardin.

5 Sont donc exclues du marché, les magasins de proximité, les GSA, ainsi que les grandes surfaces spécialisées dans la jardinerie, ces dernières vendant très peu (1500 références en moyenne) voire aucun article de bricolage.

6 COMP/M.2898 Leroy Merlin/Brico

7 COMPM.1333, Kingfisher/Castorama

8 Lettres du ministre de l’économie du 29 août 2002, Mr Bricolage/Tabur et du 7 avril 2004, Leroy Merlin/Domaxel ; décision de l’Autorité de la Concurrence n°10-DCC-01 du 12 janvier 2010

9 Décision n°10-DCC-01 précitée.

10 COMP/M.2898 Leroy Merlin/Brico, lettres du ministre de l’économie du 29 août 2002, Mr Bricolage/Tabur et du 7 avril 2004, Leroy Merlin/Domaxel ; décision de l’Autorité de la Concurrence n°10-DCC-01 du 12 janvier 2010 précitées.

11 COMP/M.2898 et lettre du ministre de l’économie du 7 avril 2004 précitées.

12 Voir l’avis du Conseil de la concurrence n°07-A-09 du 2 août 2007, les décisions du ministre de l’économie n°C2007-27 du 28 août 2007 et C2006-45 du 10 août 2006, la décision de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-119 du 17 septembre 2010