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Décisions

CA Basse-Terre, 1re ch. civ., 26 octobre 2020, n° 19/00857

BASSE-TERRE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Sapat (SARL)

Défendeur :

Filia Maif (SA), Groupama Antilles Guyane (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Fourcade

Conseillers :

Mme Gabrielle, Mme Defoy

Avocats :

Me Nathey, Me Roth, Me Daninthe, Me Barre Aujoulat

TGI Pointe à Pitre, du 9 mai 2019, n° 18…

9 mai 2019

FAITS ET PROCÉDURE

La société SAPAT exploite un garage automobile lieudit [...] (Guadeloupe). Elle est assurée au titre de sa responsabilité civile professionnelle auprès de la compagnie GROUPAMA ANTILLES GUYANE.

En juin 2013, L... D... épouse U... a confié à la société SAPAT SARL son véhicule de marque Renault Clio immatriculé [...] , en vue de réparation des roulements des roues arrière.

Le 10 juin 2013, vers 15 heures, [...] ), le véhicule automobile appartenant à L... D..., conduit par E... Q..., préposé de la société SAPAT, quittait un chemin de terre et s'engageait sur la route nationale, lorsqu'il entrait en collision avec le véhicule automobile immatriculé [...], conduit par I... A... et assuré auprès de la compagnie d'assurances MAIF, lequel avait entrepris d'effectuer un dépassement.

L'expert mandaté par la compagnie GROUPAMA a procédé à l'expertise le 17 juin 2013 et a conclu que le véhicule était techniquement réparable, mais économiquement irréparable, le coût de la réparation se chiffrant à 6 344,30 euros, et sa valeur de remplacement à 2 295 euros.

Par lettre du 28 juin 2013, la compagnie GROUPAMA a soumis à L... D... l'option prévue aux articles L 371-1 et suivants du code de la route, laquelle n'a pas répondu dans le délai de 30 jours.

Le 24 octobre 2013, L... D... a fait retour du chèque d'un montant de 2 295 euros transmis par lettre datée du 9 septembre 2013 par la société SAPAT qui l'invitait également à récupérer son véhicule et a revendiqué le paiement de la somme de 5 000 euros.

Par ordonnance du 16 mai 2014, le président du tribunal de grande instance de Pointe à Pitre, saisi le 14 février 2014 par L... D..., après avoir écarté la demande de la société SAPAT en paiement des frais de réparation et de gardiennage, a ordonné une expertise du véhicule automobile.

L'expert judiciairement désigné a achevé les opérations expertales par un rapport daté du 20 avril 2015 et a confirmé les conclusions de l'expert d'assurance en précisant que le préjudice de jouissance concernait la période du 12 juin 2013 au 20 avril 2015.

Par acte d'huissier en date du 30 septembre 2016, L... D... a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Pointe à Pitre en paiement de la somme de 6 500 euros au titre du coût des réparations, celle de 35 610 euros au titre de la privation de jouissance du 12 juin 2013 au 12 septembre 2016, outre une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, demandes qui ont été écartées par ordonnance en date du 9 décembre 2016

Suivant ordonnance en date du 30 juin 2017, le juge des référés du tribunal de grande instance de Pointe à Pitre, saisi par L... D... le 11 avril 2017, a condamné la société SAPAT à payer à L... D... une provision de 2 295 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice matériel et une provision de 10 000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice de jouissance.

Le 2 octobre 2017, la société SAPAT a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 20 novembre 2017, le premier président de la cour d'appel de Basse-Terre a rejeté la demande d'arrêt de l'exécution de présentée par la société SAPAT, laquelle avait interjeté appel le 2 octobre 2017.

Le 10 janvier 2018, le premier président a ordonné la radiation de l'affaire du rôle des affaires en cours de la cour pour défaut d'exécution de la décision de premier ressort.

*****

Suivant actes d'huissier en date des 25 et 31 janvier 2018, la société SAPAT a assigné L... D..., I... A..., le groupement d'intérêt économique GROUPAMA ANTILLES GUYANE (Groupama) et la société FILIA-MAIF SA devant le tribunal de grande instance de POINTE À PITRE à titre principal en indemnisation des frais de garde pour la conservation du véhicule et subsidiairement en garantie de toute condamnation prononcée à son encontre.

L... D... a reconventionnellement sollicité le paiement d'une indemnité au titre de la privation de jouissance.

Par jugement en date du 9 mai 2019, le tribunal de grande instance de Pointe à Pitre a :

- rejeté les fins de non-recevoir soulevées par L... D..., I... A... et la société FILIA-MAIF,

- débouté la société SAPAT de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société SAPAT à régler à L... D... la somme de 10 000 EUROS au titre de son préjudice de jouissance, dont il convient de déduire la provision que la société SAPAT a été condamnée à lui verser aux termes de l'ordonnance de référé par le tribunal de grande instance de Pointe à Pitre le 30 juin 2017,

- condamné la société SAPAT à régler la somme de 1 500 euros à L... D..., celle de 1 000 euros à I... A... et la société FILIA-MAIF et celle de 800 euros à la société GROUPAMA ANTILLES-GUYANE sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société SAPAT à supporter les entiers dépens,

- accordé à Maître K... X... le droit de recouvrer directement contre la société SAPAT les dépens dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision,

Le 21 juin 2019, la société SAPAT SARL a interjeté appel de cette décision.

Respectivement les 19 et 23 septembre 2019 et 2 octobre 2019, L... D... épouse U..., I... A..., la société FILIA-MAIF et la société GROUPAMA ANTILLES GUYANE ont constitué avocat.

L'ordonnance de clôture, qui est intervenue le 28 juillet 2020 a fixé, en application de l'alinéa 3 de l'article 779 du code de procédure civile, le dépôt des dossiers des avocats à la cour le 21 septembre 2020, date à laquelle l'affaire a été mise en délibéré jusqu'au 9 novembre 2020, pour son prononcé par mise à disposition au greffe.

PRETENTIONS ET MOYENS

- L’APPELANTE :

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 20 septembre 2019 aux termes desquelles la société SAPAT SARL demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Pointe à Pitre en date du 21 juin 2019 sauf en ce qu'il a rejeté les fins de non-recevoir soulevées par L... D..., I... A... et la société FILIA-MAIF,

* à titre principal,

- dire que le dommage subi par le véhicule ne découle pas d'une faute dans le cadre des réparations sollicitées, qu'il est la conséquence directe de la collision survenue entre ce véhicule conduit par son préposé et le véhicule conduit par I... A..., que I... A... est responsable de l'accident survenu le 10 juin 2013 sur la commune [...] (Guadeloupe), que le préjudice de L... D... s'élève à la somme de 2295 euros, que L... D... a commis une faute en refusant de récupérer son véhicule,

- condamner L... D... à lui payer les sommes suivantes :

. 55 986 euros en remboursement des frais de garde

. 340 euros au titre du constat d'huissier

. 2 000 euros au titre des frais exposés dans l'instance mise à fin par l'ordonnance de référé du 30 juin 2017,

. 2 500 euros au titre des frais exposés dans le cadre de l'instance mise à fin par ordonnance du premier président en date du 29 novembre 2017,

. 2000 euros au titre des frais exposés dans le cadre de l'instance ayant abouti à l'ordonnance de radiation du 10 janvier 2018,

* à titre subsidiaire,

- dire que que le dommage est la conséquence directe de la collision survenue entre le véhicule de L... D... conduit par son préposé et le véhicule conduit par I... A..., que I... A... est responsable de l'accident survenu le 10 juin 2013 sur la commune [...] (Guadeloupe), qu'elle n'a commis aucune faute dans l'exécution du contrat de garagiste,

- condamner solidairement I... A..., L... D..., et la société FILIA-MAIF à la relever et la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre,

* en tout état de cause,

- condamner L... D..., I... A... et la société FILIA-MAIF à lui payer la somme de 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens exposés en premier ressort,

- condamner L... D..., I... A... et la société FILIA-MAIF à lui payer la somme de 6 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens exposés en cause d'appel, dont distraction au profit de la SELARL JURINAT,

- dire la décision à intervenir commune à la société GROUPAMA ANTILLES GUYANE,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision,

- LES INTIMES :

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 8 novembre 2019 par lesquelles L... D... épouse U... sollicite de voir :

- infirmer la décision entreprise et déclarer prescrites les demandes au titre de frais de gardiennage antérieurs au 25 janvier 2016,

- dire que la société SAPAT n'apporte pas la preuve d'un contrat de dépôt à titre onéreux,

- confirmer en conséquence la décision entreprise et débouter la société SAPAT de ses demandes au titre d'un contrat de gardiennage,

- réformer la décision entreprise et condamner la société SAPAT à lui payer la somme de 35 610 euros correspondant à la privation de jouissance du véhicule durant 1187 jours du 12 juin 2013 au 12 septembre 2016,

- débouter la société SAPAT de ses demandes de remboursement de frais irrépétibles obtenus dans le cadre d'autres procédures,

- condamner la société SAPAT à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- condamner la société SAPAT aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 28 novembre 2019 aux termes desquelles la société GROUPAMA ANTILLES GUYANE sollicite de voir :

- débouter la société SAPAT de sa demande de déclaration d'arrêt commun,

- condamner la société SAPAT à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens,

Vu les dernières conclusions remises au greffe le 10 décembre 2019 en vertu desquelles I... A... et la société FILIA MAIF demandent à la cour de :

- déclarer irrecevable et mal fondée la demande formée par la société SAPAT,

- constater la faute du conducteur, salarié de la société SAPAT,

- condamner GROUPAMA à leur payer la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens, à recouvrer dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que liminairement, il sera constaté que même si aucun ordre de réparation n'a été signé entre L... D... et le garagiste, la société SAPAT, il n'est pas contesté que celle-ci a confié son véhicule automobile à ce garagiste pour réparation des roulements des roues arrière et ainsi dans le cadre d'un contrat d'entreprise ;

Qu'il ressort du rapport d'expertise judiciaire, sans autre contestation que l'origine des dommages sur le véhicule automobile n'est pas imputable à l'intervention du garagiste, mais à l'accident de la circulation survenue avant la livraison du véhicule à son propriétaire ;

Que l'expert mandaté par l'assureur, qui a procédé le 17 juin 2013 avant travaux à un examen technique de l'automobile mis en circulation le 25 juin 2002 et présentait un kilométrage de 101 015 km, a fait état d'un point de choc de forte intensité situé à l'avant, sur un angle de 0o (ou 360o), lequel a provoqué des déformations dans la zone avant, et avant latéral droit ; qu'il a relevé des critères de dangerosité lié à la déformation importante de la carrosserie, en ses infrastructure, superstructure, châssis et cadre, ainsi que la déformation qualifiée également d'importante liaisons au sol telles les berceau, éléments de suspension, essieu, fourche et roue ; que sur la base d'une immobilisation théorique de 4 jours, le véhicule n'était néanmoins pas économiquement réparable, le coût de la réparation s'élevant à 6 344,30 euros et sa valeur de remplacement chiffrée à 2 295 euros ;

Sur la perte de jouissance

Attendu le garagiste qui reçoit un véhicule aux fins de réparation est tenu des obligations d'un dépositaire jusqu'à la restitution de celui-ci et répond, en conséquence, de la détérioration, de la perte ou du vol de ce véhicule ou des effets qui lui ont été confiés, jusqu'à la restitution de celui-ci ou à la mise en oeuvre dans les délais requis de la procédure particulière prévue par la loi du 31 décembre 1903 sur la vente de certains objets abandonnés, sauf à rapporter la preuve de son absence de faute ou d'une cause étrangère ; que son obligation s'analyse ici en une obligation de moyen renforcée ;

Que la société SAPAT soutient qu'il n'a commis aucune faute dès lors que la responsabilité de l'accident est imputable à I... A..., lequel a effectué une manoeuvre de dépassement imprudente et téméraire, en empiétant sur la voie de gauche réservée à la circulation en sens inverse ;

Que les demandes formées à l'égard de I... A... et son assureur la société FILIA MAIF de la société SAPAT, tiers au contrat souscrit entre eux, s'inscrivent dans le délai de droit commun de la responsabilité extracontractuelle, assortie d'une prescription quinquennale ayant pour point de départ, la réalisation du dommage, soit l'accident en date du 10 juin 2013; que dès lors, l'action engagée à ce titre les 25 et 31 janvier 2018 par la société SAPAT à l'égard de ceux–ci n'est pas entachée de prescription et est dès lors recevable ; que dans le cadre de cette action, ces derniers sont également recevables en leurs demandes à l'égard de l'assureur de la société GROUPAMA, la société GROUPAMA ; que cette dernière ne peut donc être mise hors de cause ;

Que ceci étant, il ressort du constat amiable signé par E... Q..., préposé de la société SAPAT et [...] que le 10 juin 2013, vers 15 heures, lieudit [...] ), le véhicule automobile appartenant à L... D..., conduit par E... Q..., préposé de la société SAPAT, sortait, selon les mentions portées au titre des circonstances "d'un parking, un lieu privé, un chemin de terre" et s'engageait sur la route nationale, lorsqu'il entrait en collision avec le véhicule automobile immatriculé [...], conduit par I... A... et assuré auprès de la compagnie d'assurances MAIF, lequel selon les mentions descriptives, "doublait et empiétait sur une voie réservée à la circulation en sens inverse"; que les dégâts sur les deux véhicules étaient tous deux situés à l'avant ; que le croquis établi par les deux conducteurs établit que le véhicule confié au garagiste se trouvait pour partie sur cette dernière voie et sur le bas côté ;

Que l'expert mandaté par l'assureur, qui a procédé le 17 juin 2013 avant travaux à un examen technique de l'automobile appartenant à L... D... confirme un point de choc de forte intensité situé effectivement à l'avant, sur un angle de 0o (ou 360o) ;

Que s'agissant des priorités de passage, débouchant d'une route à partir d'un accès non ouvert à la circulation publique, un chemin de terre ou une aire de stationnement, il appartenait au préposé de la société SAPAT, conformément aux dispositions de l'article R415-9 du code de la route, de céder le passage à tout autre véhicule circulant sur la route ouverte à la circulation publique, de ne s'y engager qu'après s'être assuré qu'il pouvait le faire sans danger et à une vitesse suffisamment réduite pour lui permettre un arrêt sur place ; que ce faisant, dès lors qu'elle n'était pas interdite sur cette portion de route en ligne droite et sa vitesse lui permettait d'effectuer le dépassement dans un temps suffisamment bref, I... A... était en revanche quant à lui en droit d'effectuer la manoeuvre de dépassement ;

Qu'aucune pièce versée aux débats ne démontrent les allégations de la société SAPAT quant à une "manoeuvre de dépassement imprudente et téméraire" de la part de celui-ci ; que dès lors, au regard des priorités de passage, la cause de l'accident se trouve dans le comportement de son préposé lequel quittant une zone non ouverte à la circulation publique, devait laisser la priorité de passage aux véhicules circulant sur la voie publique où il s'engageait ; que par suite, ses prétentions, tant principale, que subsidiaires en garantie à l'égard de I... A... et de son assureur - ces dernières au demeurant ne donnant lieu à aucun moyen dans la discussion de ses écritures conformément à l'alinéa 3 de l'article 954 du code de procédure civile - seront rejetées et la décision à ce titre sera confirmée ;

Que la faute de E... Q... entraîne la responsabilité de la société du fait de son préposé, l'employeur étant seul responsable, lorsque celui-ci conduit un véhicule dans le cadre de ses fonctions, ce qui n'est pas contesté ici ;

Que dès lors que la société SAPAT ne rapporte pas la preuve de son absence de faute ou d'une cause étrangère, elle demeure tenue de ses obligations à l'égard de son cocontractant L... D... et lui doit indemnisation de tout dommage survenu avant livraison ou jusqu'à la mise en oeuvre dans les délais requis de la procédure particulière prévue par la loi du 31 décembre 1903 sur la vente de certains objets abandonnés;

Que L... D... ne revendique plus désormais que la réparation d'un préjudice liée à la perte de jouissance du 12 juin 2013 au 12 septembre 2016, sur la base du coût de location d'un véhicule, soit pour 1187 jours une indemnité de 35 610 euros;

Que la victime a droit à la réparation intégrale de son préjudice ; que le dommage causé par la perte de jouissance du véhicule automobile durant la période de réparation est quant à lui établi en son principe ; que toutefois, pour justifier du surplus de ses réclamations indemnitaires, il lui incombe de justifier que la période de perte de jouissance du véhicule soit celle directement corrélée avec les conséquences de l'accident ;

Qu'en l'espèce, ainsi qu'il l'a été rappelé, l'expert mandaté par la compagnie GROUPAMA a procédé à l'expertise le 17 juin 2013 et a conclu que le véhicule, mis en circulation le 25 juin 2002 et présentant un kilomètrage de 101 015 km, était économiquement irréparable, le coût de la réparation, dont la durée théorique était de 4 journées, se chiffrant à 6 344,30 euros, et sa valeur de remplacement à 2 295 euros ; que dès le 28 juin 2013, la procédure prévue aux articles L 371-1 et suivants du code de la route a été engagée par la compagnie GROUPAMA, en soumettant l'option à L... D... soit d'accepter la cession du véhicule contre versement de remplacement à dire d'expert soit de faire procéder à la réparation; que cette dernière n'ayant pas répondu dans le délai de 30 jours et n'a pas pour autant de mettre en oeuvre la procédure applicable aux véhicules économiquement irréparables, en le faisant réparer ; que néanmoins, la société SAPAT lui avait transmis le 9 septembre 2013 un chèque d'un montant de 2 295 euros correspondant à la valeur de remplacement du véhicule dont celle-ci lui a retour du chèque le 24 octobre 2013 en revendiquant le paiement d'un somme de 5 000 euros ; que ce ne sera que par assignation du 14 février 2014, L... D... saisira le juge des référés pour voir ordonner une expertise, lequel confirmera dans un rapport du 20 avril 2015 les conclusions de l'expert d'assurance en ce que le véhicule, au regard de la nature, de l'âge, du kilomètrage, des dégradations constatées et du coût des réparations (environ 6 500 euros), était économiquement non réparable ;

Qu'il sera rappelé que ce n'est que lorsque le coût de remise en état ne dépasse pas la valeur vénale du véhicule, que dans le cadre des dispositions des articles prévue aux articles L 371-1 et suivants du code de la route, l'assureur a l'obligation de verser une indemnité égale au coût des réparations ; que L... D... a fait le choix de refuser la valeur de remplacement du véhicule, sans pour autant volontairement mettre en oeuvre la procédure applicable aux véhicules économiquement irréparables ni engager immédiatement une procédure judiciaire ; que dès lors, la période de perte de jouissance sera déterminée en fonction de la date de l'accident et de l'échéance de la période d'observation le 28 juillet 2013, soit une durée de 46 jours ;

Que sur ce point, elle ne verse qu'un devis de location de véhicule de 30 euros par jour, lequel peut néanmoins servir de base d'appréciation à son préjudice à ce titre ; que ce dernier sera chiffrée à la somme totale de 1 380 euros ; que sur ce point, la décision de première instance sera infirmée ;

Sur les frais de gardiennage

Attendu que le contrat de dépôt d'un véhicule auprès d'un garagiste existe, en ce qu'il est l'accessoire du contrat d'entreprise, indépendamment de tout accord de gardiennage ;

Que le contrat de dépôt d'un véhicule auprès d'un garagiste, accessoire à un contrat d'entreprise, est présumé fait à titre onéreux ;

Que s'agissant du montant, le contrat présumé à titre onéreux étant ici antérieur au 1er octobre 2016, le juge du fond, à défaut de fixation par les parties, peut fixer la rémunération du dépositaire à condition de préciser les éléments retenus ;

Attendu que la société SAPAT sollicite le paiement de frais de gardiennage à hauteur la somme de 55 986 euros du 15 septembre 2013 au 5 décembre 2017 se décomposant en 1 720 jours au prix unitaire de 30 euros, véhicule automobile qui est toujours dans son entreprise; que L... D... soulève la prescription biennale au titre du paiement de ses frais ;

Que si la demande reconventionnelle présentée dans le cadre de l'instance en référé mise à fin par l'ordonnance de référé du 16 mai 2014 a consacré une interruption de la demande, il convient d'observer que ce n'est que par assignation en date du 25 janvier 2018, que la société SAPAT a réintroduit sa revendication ; qu'au regard du caractère continu du dépôt, les sommes antérieures au 16 mai 2016 sont donc concernées par la prescription ;

Que pour le surplus des frais postérieurs à la date du 16 mai 2016, il convient de rappeler que les frais de gardiennage sont dus à compter de la mise en demeure du déposant de récupérer le véhicule, au tarif porté à sa connaissance et sur la base du tarif affiché dans ses locaux à la vue de la clientèle ; que la société SAPAT se contente de produire une facture en date du 5 décembre 2017 comprenant l'entière période courant du 15 septembre 2013 jusqu'au 5 décembre 2017 ; qu'elle ne justifie ainsi ni de l'existence d'un tel tarif affiché dans les locaux de l'entreprise en vue de la clientèle, ni d'avoir préalablement mis en demeure L... D... en portant à sa connaissance le tarif de 30 euros par jour ; que son unique lettre datée du 9 septembre 2013, qui invite L... D... ne mentionne aucunement de telles conditions financières, alors que le véhicule se trouve stationné en extérieur, sans aucun moyen de protection ; que surabondamment, il sera observé que le garagiste, dont le chèque correspondant à la valeur de remplacement du véhicule lui a été fait retour, qui alors que le véhicule n'avait pas été retiré au bout de trois mois, n'a pas usé de la faculté dont il disposait en application de la loi du 31 décembre 1903, de solliciter par requête la possibilité de vendre aux enchères le véhicule et la conservé sans envoyer de mise en demeure de payer à sa cliente, n'est pas légitime à réclamer les dits frais de gardiennage pour la période postérieure ;

Qu'en conséquence, la société SAPAT sera déboutée de sa demande au titre des frais de gardiennage ;

Sur la demande au titre des frais de justice des instances précédentes et des frais de constat d'huissier

Attendu que le bénéfice de l'article 700 ne peut être demandé que pour les sommes exposées dans le cadre de l'instance où il est sollicité et non, pour les sommes exposées à l'occasion de procédure antérieure ; que dès lors, la société SAPAT qui de surcroît vient de défaillir à la présente procédure en ses divers moyens et prétentions, est infondée à revendiquer les frais qu'elle a exposé pour assurer sa défense dans les deux instances mises à fin par ordonnance du premier président de la cour d'appel en date du 30 juin 2018 ;

Que succombant dans la présente instance, sa demande de paiement des frais de constat d'huissier daté du 12 juin 2019 sera rejetée ;

Sur les mesures accessoires

Attendu qu'en application de l'article 696 du code de procédure civile, la société SAPAT, qui succombe, sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel, lesquels pourront être recouvrés par Alain ROTH et Ernest DANINTHE, avocats du barreau de la Guadeloupe, de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy conformément aux dispositions de l'article 699 de ce même code;

Qu’ayant contraint d'exposer aux intimés de nouveau frais en cause d'appel défense, il n'est pas inéquitable de la condamner à payer à L... D... une somme de 1 000 euros, une somme de 1 000 euros à I... A... et la société FILIA MAIF, ainsi que cette même indemnité à la société GROUPAMA, ce sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Que les dispositions de première instance seront sur ces points confirmées ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré du tribunal de grande instance de Pointe à Pitre en date du 9 mai 2019, sauf en ce qu'il a condamné la société SAPAT à régler à L... D... la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice de jouissance,

Statuant à nouveau sur la disposition infirmée et y ajoutant,

Condamne la société SAPAT à régler à L... D... la somme de 1 380 euros au titre de son préjudice de jouissance,

Déboute la société SAPAT de sa demande en paiement du coût du constat d'huissier de justice d'un montant de 340 euros,

Condamne la société SAPAT à payer en cause d'appel une somme de 1 000 € à L... D..., une somme de 1 000 euros à I... A... et la société FILIA MAIF, et enfin une somme de

1 000 euros à la société GROUPAMA en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société SAPAT aux dépens d'appel, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile par Ernest DANINTHE et Alain ROTH, avocats du barreau de la Guadeloupe, Saint-Martin et Saint-Barthélémy pour ceux dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision.