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Décisions

CA Bordeaux, 1re ch. civ., 4 avril 2022, n° 19/02685

BORDEAUX

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Diatan 2000 (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Potée

Conseillers :

M. Braud, Mme Vallée

TGI Bordeaux, 5e ch., du 26 mars 2019, n…

26 mars 2019

Ali O., propriétaire d'un véhicule Opel Zafira immatriculé CQ-841-YG, l'a confié, à la suite d'une panne de son moteur, à la société Atelier d'Occapel afin que celle-ci remplace le moteur du véhicule, la pompe à injection étant fournie par Ali O. acquise d'occasion auprès de la société Diatan 2000, outre un levier de vitesse.

Le 20 novembre 2013, une facture a été émise pour un montant de 1 992,56 euros toutes taxes comprises.

À l'occasion d'une nouvelle panne, Ali O. s'est retourné contre la société Atelier d'Occapel laquelle a décliné sa responsabilité.

Par ordonnance en date du 21 novembre 2014, le juge des référés du tribunal d'instance de Bordeaux a désigné Pascal L., expert judiciaire, pour examiner le véhicule, décrire les désordres et donner tout élément sur la responsabilité et le préjudice.

Par ordonnance en date du 11 septembre 2015, le juge des référés a rendu communes les opérations d'expertise à la société Diatan 2000.

Le 1er décembre 2015, l'expert judiciaire a déposé son rapport.

Par exploit en date du 27 mai 2016, Ali O. a assigné devant le tribunal de grande instance de Bordeaux la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel et la société par actions simplifiée Diatan 2000 en réparation.

La société civile professionnelle S.-B. est intervenue volontairement en qualité de mandataire liquidateur de la société Atelier d'Occapel.

Par jugement contradictoire en date du 26 mars 2019, le tribunal a :

' Déclaré recevable l'intervention volontaire de la société civile professionnelle S.-B. en sa qualité de liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel ;

' Déclaré irrecevables les demandes d'Ali O. dirigées contre la SCP S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel ;

' Débouté Ali O. de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la société par actions simplifiée Diatan 2000 ;

' Condamné Ali O. à payer à la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel la somme de 288 euros au titre de factures ;

' Débouté la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel du surplus de sa demande ;

' Débouté la société par actions simplifiée Diatan 2000 de sa demande en dommages et intérêts contre Ali O. ;

' Déclare irrecevable la demande en dommages et intérêts de la société par actions simplifiée Diatan 2000 contre la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel ;

' Condamné Ali O. à payer à la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel et à la société par actions simplifiée Diatan 2000 la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Condamné Ali O. aux dépens y compris les frais d'expertise judiciaire qui seront recouvrés conformément à la législation sur l'aide juridictionnelle.

Par déclaration du 14 mai 2019, Ali O. a interjeté appel du jugement contre la société Diatan 2000 et la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de l'Atelier d'Occapel.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 14 août 2019, Ali O. demande à la cour de :

' Infirmer le jugement le jugement de première instance en ce qu'il a :

- Débouté Ali O. de l'intégralité de ses demandes dirigées contre la société par actions simplifiée Diatan 2000,

- Condamné Ali O. à payer à la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel la somme de 288 euros au titre de factures,

- Condamné Ali O. à payer à la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel et à la société par actions simplifiée Diatan 2000 la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné Ali O. aux dépens y compris les frais d'expertise judiciaire qui seront recouvrés conformément à la législation sur l'aide juridictionnelle ;

Statuant à nouveau

' Débouter la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de l'A. D. O. Atelier d'Occapel ainsi que la société Diatan 2000 de l'ensemble de leurs demandes dirigées contre Ali O. ;

' Condamner la société Diatan 2000 à verser à Ali O. la somme de 5 000 euros correspondant à la part de l'indemnisation de l'ensemble de ses préjudices pouvant être mis à la charge de la société Diatan 2000 ;

' Condamner la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de l'A. D. O. Atelier d'Occapel ainsi que la société Diatan 2000 à verser à Ali O. la somme de 1 000 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' Condamner la société civile professionnelle S.-B. en qualité de mandataire liquidateur de l'A. D. O. Atelier d'Occapel ainsi que la société Diatan 2000 aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 10 octobre 2019, la société par actions simplifiée Diatan 2000 demande à la cour de :

' Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Bordeaux en sa 5e chambre le 26 mars 2019 en ce qu'elle a débouté Ali O. et la société Atelier d'Occapel de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Diatan 2000 ;

En conséquence,

' Débouter Ali O. et la société Atelier d'Occapel de leurs demandes, fins et conclusions à l'encontre de la société Diatan 2000 ;

' Condamner Ali O. et toute partie succombante à payer à la société Diatan 2000 la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 au titre des frais irrépétibles ;

' Le condamner aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 1er octobre 2019, la société civile professionnelle Jean Denis S. - Bernard B. mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises près les tribunaux de la cour, prise en sa qualité de liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel, demande à la cour de :

' Confirmer la décision rendue le 26 mars 2019 par le tribunal de grande instance de Bordeaux en ce qu'il a débouté Ali O. et la société Diatan 2000 de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions, en ce qu'elles étaient dirigées à l'encontre de la société S.-B., ès qualités de liquidateur de la société Atelier d'Occapel ;

' Confirmer également la décision en ce qu'elle a condamné Ali O. à régler à la société Atelier d'Occapel une somme de 188 euros au titre de factures impayées, outre 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens ;

' Infirmer uniquement la décision précitée en ce qu'elle a rejeté les demandes indemnitaires formulées par la société civile professionnelle S.-B. en lien avec l'abandon du véhicule d'Ali O. sur sa propriété pendant plus de quatre ans, statuant de nouveau en cause d'appel ;

Vu les dispositions des anciens articles 1147 et suivants du code civil et, subsidiairement, les dispositions des anciens articles 1382 et suivants du code civil,

' Condamner Ali O. au paiement d'une somme de 4 590,40 euros correspondant aux frais de gardiennage depuis l'immobilisation du véhicule jusqu'au 8 avril 2015 ;

' Condamner Ali O. à régler à la concluante une indemnité de 5 568 euros correspondant aux frais de gardiennage depuis le 8 avril 2015 jusqu'au 8 novembre 2016 ;

' Condamner Ali O. à régler à la concluante une somme de 3 568 euros correspondant aux frais de gardiennage entre le 8 novembre 2016 et le 4 octobre 2017;

' Condamner Ali O. in solidum avec toute partie succombante à régler à la société S.-B. une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens d'appel ;

À titre subsidiaire,

' Condamner Ali O. in solidum avec la société Diatan 2000 à régler à la société Atelier d'Occapel une somme totale de 13 526,40 euros titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre d'une perte de jouissance, et surtout économique et financière en lien avec l'abandon d'un véhicule sur sa propriété entre le 26 novembre 2013 et le 4 octobre 2017 ;

' Condamner Ali O. in solidum avec la société Diatan 2000 à régler à la société concluante une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2022 et l'audience fixée au 21 février 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'Ali O. contre la société Diatan 2000 :

Ali O. sollicite la condamnation de la société Diatan 2000 à lui verser une somme de 5 000 euros en indemnisation de la part de son préjudice de jouissance qui peut être mise à la charge de cette dernière. Au soutien de sa demande, il fait état d'un vice caché affectant la pompe à injection vendue par la société Diatan 2000, et invoque le bénéfice des dispositions du code de la consommation relatives à la garantie légale de conformité.

L'expert judiciaire a constaté des « dégradations internes moteur très importantes, et nécessitant son remplacement, suite à dévissage total de l'écrou central de fixation de la pompe d'injection ».

Sur la cause de la panne après la réparation de l'Atelier d'Occapel, il conclut que « les dégradations internes moteur très importantes, et nécessitant à nouveau son remplacement, sont consécutives à un desserrage de l'écrou central de fixation de la pompe d'injection exclusivement ».

Il est de jurisprudence constante que le vice caché résulte d'un défaut rendant la chose impropre à sa destination normale (1re Civ., 14 mai 1996, no 94-13.921), alors que la non-conformité résulte de la délivrance d'une chose autre que celle qui fait l'objet de la vente (1re Civ., 12 mai 2011, no 10-13.739).

En l'espèce, le desserrage de l'écrou central qui affectait la pompe à injection achetée le 13 novembre 2013 ne correspond pas à une non-conformité mais s'analyse en un vice.

C'est à l'acquéreur exerçant l'action en garantie des vices cachés qu'il appartient de rapporter la preuve de l'existence et de la cause des vices qu'il allègue (1re Civ., 12 juil. 2007, no 05-10.435), ainsi que du caractère antérieur à la vente du défaut constaté (1re Civ., 26 janv. 2012, no 10-20.785).

Le rapport d'expertise indique :

« Effectivement, la méthodologie de montage du constructeur Opel (annexes 12) indique que la dépose/repose de la pompe d'injection ne nécessite aucune intervention sur l'écrou central de pompe d'injonction et, de fait, nous l'avons constaté lors de la deuxième réunion technique contradictoire du 2 novembre 2015 (cf. photo 16)

« De même, la dépose de la pompe d'injection effectuée par Diatan 2000 ne nécessitait nullement une intervention sur l'écrou central de pompe d'injection. »

L'homme de l'art précise qu'il n'était pas en mesure de déterminer techniquement « le dernier intervenant sur cet écrou central ; son desserrage est techniquement possible en phase de dépose, comme en phase de repose ».

Il conclut en conséquence que « le desserrage de l'écrou central de fixation de la pompe d'injection est consécutif à une intervention inappropriée lors de la dépose de la pompe d'injection par Diatan 2000, ou lors de la repose de la pompe d'injection par Atelier d'Occapel en date du 20 novembre 2013. »

Les débats d'appel et les pièces soumises à la cour n'apportent aucun élément nouveau de nature à remettre en cause les motifs par lesquels les premiers juges ont estimé qu'Ali O. échouait à prouver que le vice constaté ait été antérieur à la vente pour être imputable à la société Diatan 2000 plutôt qu'à l'Atelier d'Occapel. Le jugement critiqué sera confirmé en ce qu'il déboute Ali O. de ses demandes contre la société Diatan 2000.

Sur les demandes de la société S.-B. contre Ali O. :

1) Sur les frais de remorquage et de prise en charge d'un technicien :

La société S.-B. sollicite le payement d'une facture de remorquage du 26 novembre 2013, d'un montant de 156 euros toutes taxes comprises, et d'une facture du 8 avril 2015 correspondant à la prise en charge d'un technicien pour la réunion technique judiciaire du 20 mars 2015, d'un montant de 132 euros toutes taxes comprises.

Ali O. s'oppose à cette demande en considération de l'implication de l'Atelier d'Occapel, qu'il estime à tout le moins responsable de ne pas avoir contrôlé le bon fonctionnement de la pompe qu'il avait accepté d'installer.

L'appelant ne conteste cependant pas la bonne exécution des prestations facturées le 26 novembre 2013 et le 8 avril 2015, la faute par lui alléguée se rapportant à la réparation facturée le 20 novembre 2013. Le jugement querellé sera confirmé de ce chef.

2) Sur les frais de gardiennage :

Aux termes de l'article 1915 du code civil, le dépôt, en général, est un acte par lequel on reçoit la chose d'autrui, à la charge de la garder et de la restituer en nature.

Aux termes de l'article 1917 du même code, le dépôt proprement dit est un contrat essentiellement gratuit.

Toutefois, le contrat de dépôt d'un véhicule auprès d'un garagiste, accessoire à un contrat d'entreprise, est présumé fait à titre onéreux (Civ. 1re, 5 avr. 2005, no 02-16.926).

La société S.-B. sollicite le payement des frais de gardiennage du véhicule, à savoir à raison de 9,60 euros toutes taxes comprises par jour :

' 4 790,40 euros au titre d'une facture du 8 avril 2015 ;

' 5 568 euros pour la période du 8 avril 2015 au 8 novembre 2016 ;

' 3 168 euros pour la période du 8 novembre 2016 au 4 octobre 2017.

Il est constant qu'Ali O. a laissé sa voiture en dépôt à l'Atelier d'Occapel du 26 novembre 2013 au 4 octobre 2017 (pièce no 11 de l'appelant).

Ali O. fait la même objection à cette prétention de la société S.-B. qu'à la précédente, objection qui ne sera pas davantage retenue.

Il ne peut néanmoins être fait droit à la demande de payement de la facture du 8 avril 2015 en l'absence de preuve d'un accord préalable des parties sur le montant de la rémunération du dépositaire, comme l'a exactement jugé le tribunal. Quant à la période postérieure, la cour constate à l'instar des premiers juges que l'Atelier d'Occapel ne produit aucune facture y afférente.

Subsidiairement, l'Atelier d'Occapel sollicite ces sommes à titre de dommages et intérêts en compensation du préjudice de jouissance subi du fait de l'abandon du véhicule d'Ali O. sur sa propriété pendant plus de quatre ans.

Aux termes de l'article 1947 du code civil, la personne qui a fait le dépôt est tenue de rembourser au dépositaire les dépenses qu'il a faites pour la conservation de la chose déposée, et de l'indemniser de toutes les pertes que le dépôt peut lui avoir occasionnées.

Ali O. relève cependant que son véhicule a fait l'objet d'une vente aux enchères (pièce no 11 de l'appelant). Dans cette circonstance, il n'est pas démontré que le préjudice de jouissance subi par le dépositaire ne soit pas compensé par le prix retiré de la vente de la voiture. Le jugement critiqué sera donc confirmé en ce qu'il déboute la société S.-B. ès qualités du surplus de sa demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'appelant en supportera donc la charge.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Ali O. et la société S.-B., qui échouent en leurs appels respectifs, seront déboutés de leurs demandes présentées sur ce fondement.

Ali O. sera condamné à payer la somme de 1 000 euros à la société Diatan 2000 au titre des frais irrépétibles.

LA COUR, PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Déboute Ali O. et la société civile professionnelle Jean Denis S. - Bernard B. mandataires judiciaires à la liquidation des entreprises près les tribunaux de la cour, prise en sa qualité de liquidateur de la société à responsabilité limitée Atelier d'Occapel, de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Ali O. à payer la somme de 1 000 euros à la société Diatan 2000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Ali O. aux entiers dépens.