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Décisions

ADLC, 11 juillet 2012, n° 12-DCC-94

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle exclusif de la société Lagasse Communications et Industries par le groupe Eolane

ADLC n° 12-DCC-94

10 juillet 2012

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé au service des concentrations le 10 avril 2012 et déclaré complet le 6 juin 2012, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Lagasse Communications et Industries par le groupe Eolane, formalisée par une offre de reprise des actifs en date du 15 mars 2012 déposée par la société Financière de l’Ombrée, tête du groupe Eolane ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. Financière de l’Ombrée, est une société holding à la tête du groupe Eolane, dont le capital est réparti entre la société SGR (85 %) et onze actionnaires minoritaires (15 %), le capital de la société SGR étant lui-même détenu par des personnes physiques. Le groupe Eolane est principalement actif dans la conception, l’étude, l’industrialisation et la fabrication en sous-traitance de produits électroniques destinés à des professionnels, intervenant notamment dans le domaine de la défense, de l’aéronautique, de l’automobile, des télécommunications et du secteur ferroviaire. Le groupe Eolane a également une activité de sourcing de composants en Asie, de vente de systèmes de personnalisation de cartes en plastique et de vente de systèmes de mesure et de visualisation d’objets nanométriques.

2. La société anonyme Lagasse Communications et Industries est une entreprise spécialisée dans la conception, l’étude, l’industrialisation et la fabrication en sous-traitance de produits électroniques destinés à des professionnels et dans les services de réparation de produits grand public, tels que des appareils téléphoniques.

3. L’opération, formalisée par une offre de reprise en date du 15 mars 2012 déposée auprès du tribunal de commerce de Quimper dans le cadre d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la cible, porte sur l’acquisition de la quasi-totalité des actifs de la société Lagasse Communications et Industries par la société Financière de l’Ombrée, tête du groupe Eolane. En ce qu’elle entraîne l’acquisition du contrôle exclusif des actifs de la société Lagasse Communications et Industries par le Groupe Eolane, l’opération notifiée est une opération de concentration au sens de l’article L.430-1 du code de commerce.

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (groupe Eolane : 212,6 millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2010 ; Lagasse Communications et Industries : 63,2 millions d’euros pour le même exercice). Deux au moins de ces entreprises réalisent en France un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (groupe Eolane : 156 millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2010; Lagasse Communications et Industries : 57,5 millions d’euros pour le même exercice). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

A. LES MARCHES DE PRODUITS ET SERVICES

5. Les parties à la concentration sont simultanément actives dans l’industrialisation et la fabrication en sous-traitance de produits d’électronique à destination de professionnels intervenant notamment dans le domaine ferroviaire, de l’aéronautique, de l’industrie automobile et des télécommunications.

6. Selon la pratique décisionnelle européenne1, les services de production électronique (Electronic Manufacturing Services ou « EMS ») recouvrent l’ensemble des services liés à la fabrication de produits électroniques pour le compte d’équipementiers (Original Equipment Manufacturer ou « OEM »), à savoir la conception des produits, la sélection et la fourniture de composants, le prototypage, la production et l’assemblage, la réalisation d’essais, l’analyse des défaillances, la logistique, la distribution et le service après vente.

7. La Commission européenne considère que les services de production électronique sous-traités à des tiers constituent un marché pertinent2. Elle a aussi envisagé, sans trancher définitivement la question, de segmenter le marché en fonction des produits ou services finaux dans lesquels les produits fabriqués en sous-traitance sont incorporés3 : automobile, télécommunications, aéronautique, défense, biens de consommation courante, informatique, matériel médical, etc. Cette distinction se justifierait par l’existence d’une spécialisation de plus en plus grande des fournisseurs.

8. La partie notifiante estime que les entreprises sous-traitant des services de production électronique ont la capacité d’offrir une large gamme de services et d’adapter leur offre à la demande de leurs clients, sans avoir à acquérir de nouvelles unités de production. Elles ont la possibilité de fabriquer des équipements électroniques pour différents secteurs, tels que l’aéronautique, la médecine ou les télécommunications, les produits étant fabriqués au moyen de procédés similaires, notamment par assemblage de cartes de circuit imprimé. Elle conteste ainsi la pertinence d’une segmentation selon la destination finale du produit ou service considéré.

9. Au cas d’espèce, la question de la délimitation précise de ce marché sera laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit l’hypothèse retenue, l’analyse concurrentielle demeurera inchangée.

 

B. LE MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE

10. La Commission européenne4 a considéré que les marchés de services de production électronique étaient au moins de dimension européenne, voire mondiale. La partie notifiante estime de même que les clients sur ces marchés organisent leurs approvisionnements à l’échelle mondiale, les coûts de transport et de douane demeurant peu élevés.

11. Au cas d’espèce, la question de la dimension géographique du marché sera laissée ouverte dans la mesure où, quelle que soit l’hypothèse retenue, l’analyse concurrentielle demeurera inchangée.

 

III. L’analyse concurrentielle

12. Selon les données communiquées par les parties, le marché européen de la sous-traitance électronique a été estimé à un peu moins de 28 milliards d’euros en 2011.

13. Sur le marché global des services de production électronique, les parties ont estimé leurs parts de marchés cumulées à 1,1 % (0,9 % pour le groupe Eolane et 0,2 % pour Lagasse Communications et Industries).

14. Dans l’hypothèse d’une segmentation du marché selon la destination finale des produits sous-traités, les activités des parties se chevauchent sur le seul segment des produits destinés à l’industrie des « communications ». Les parties ont estimé leur part de marché sur ce segment à moins de 2 %.

15. Par ailleurs, les parties recensent de nombreux opérateurs concurrents sur ces marchés, notamment des acteurs puissants d’envergure mondiale tels que Foxconn (part de marché entre 15 et 20 %), Flextronics (entre 15 et 20 %), Jabil (environ 5 et 10 %), ou des acteurs internationaux de taille plus modeste tels que Zollner, Celestica, Enics (part de marché respective comprise entre 1 et 5 %).

16. Dès lors, compte tenu des éléments qui précèdent, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés concernés.

 

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 12-056 est autorisée.

 

NOTES :

1 Décision de la Commission européenne n° M.5140 du 24/06/2008 ; décision n° M.4766 du 28/08/2007 ; décision n° M.3583 du 28/10/2004.

2 Décision de la Commission européenne n° M.5140 précitée.

3 Décisions n°5140 et n°4766 précitées.

4 Décisions n°5140 et n°4766 précitées.