ADLC, 5 mars 2013, n° 13-DCC-29
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
relative à la prise de contrôle exclusif de la société Gobé SAS par la société Scopelec
L’Autorité de la concurrence,
Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 30 janvier 2013, relatif à la prise de contrôle de la société Gobé SAS par la société Scopelec, formalisée par un protocole de cession d’actions conclu entre Scopelec, Gobé et TDF le 18 janvier 2013 ;
Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;
Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;
Adopte la décision suivante :
I. Les entreprises concernées et l’opération
A. LES ENTREPRISES CONCERNÉES
1. La société Scopelec est une société coopérative ouvrière de production, soumise au contrôle fluctuant de ses actionnaires. Elle est à la tête du groupe Scopelec, qui est actif dans le secteur de l’installation et de la maintenance de réseaux de télécommunications (en particulier travaux d’infrastructures propres à la téléphonie mobile) et d’énergie, ainsi que dans le secteur de l’installation et de l’administration de réseaux et systèmes de communication data, télécom et vidéo.
2. Gobé SAS (ci-après, « Gobé ») est une société active dans le secteur de l’installation et de la maintenance de réseaux de télécommunications, spécialisée dans les travaux d’infrastructures propres à la téléphonie mobile. Elle est contrôlée par la société TDF.
3. L’opération, qui est formalisée par un protocole de cession d’actions signé entre Scopelec et TDF le 18 janvier 2013, consiste en l’acquisition par Scopelec de l’intégralité du capital et des droits de vote de Gobé.
4. En ce qu’elle entraîne la prise de contrôle exclusif de Gobé par Scopelec, l’opération constitue une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.
5. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (Scopelec : […] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2011 ; Gobé : […] d’euros pour l’exercice clos le 31 mars 2012). Chacune de ces deux entreprises réalisent en France un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (Scopelec : […] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2011; Gobé : […] d’euros pour l’exercice clos le 31 mars 2012). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatives à la concentration économique.
II. Délimitation des marchés pertinents
A. MARCHÉS DE PRODUITS
6. Scopelec et Gobé sont simultanément présentes dans le secteur de l’installation et de la maintenance de réseaux de télécommunications, qui constituent des prestations de services de génie.
7. S’agissant des prestations de génie, la pratique décisionnelle1 a retenu une segmentation entre le marché des prestations de génie électrique, dont font partie les prestations de services d’installation et de maintenance de réseaux de télécommunications, et les marchés des prestations de génie mécanique et de génie climatique. Au sein du génie électrique, la pratique décisionnelle2 a envisagé l’existence de trois segments distincts relatifs respectivement (i) aux télécommunications, (ii) aux sous-stations électriques, et (iii) aux lignes haute tension. Les parties ne sont simultanément présentes que sur les marchés des travaux de génie électrique relatifs aux télécommunications, et considèrent que ce segment constitue le marché pertinent. En tout état de cause, la pertinence d’une segmentation entre les différents types de travaux de génie électrique peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la segmentation retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle restent inchangées.
8. La pratique décisionnelle3 a par ailleurs considéré que le marché du génie électrique pouvait faire l’objet d’une segmentation en fonction du type de travaux, en distinguant entre les travaux de maintenance et les travaux d’installation. Conformément à la pratique décisionnelle4, les parties considèrent que les travaux d’installation incluent les prestations de services suivantes : conception, première installation de l’équipement, entretien, réparation et modernisation de l’infrastructure. La maintenance correspond à l’organisation de visites de contrôle périodiques.
9. De plus, la pratique décisionnelle5 a retenu l’existence d’une segmentation en fonction du type de clientèle, distinguant entre clientèle résidentielle et non résidentielle. Au sein de cette dernière la pratique décisionnelle a envisagé une segmentation entre les segments relatifs (i) aux infrastructures, (ii) à l’industrie et (iii) au tertiaire. Les parties relèvent qu’en ce qui concerne les clients non résidentiels, les travaux de génie électrique concernant l’installation et la maintenance de réseaux de télécommunication ne concernent que des travaux d’infrastructures.
10. Les parties suggèrent enfin que les marchés de l’installation et de la maintenance de réseaux de télécommunications soient segmentés en distinguant les travaux qui concernent l’installation et la maintenance d’équipements de communications électroniques radio, d’une part, et les travaux d’installation et de maintenance d’équipements de communications électroniques fixes, d’autre part. Elles justifient cette segmentation par le fait que ces deux types de travaux font l’objet d’appels d’offres distincts. Si une telle segmentation était retenue, les activités des parties ne se chevaucheraient pas. En effet, Scopelec est spécialisée dans les travaux d’installation et de maintenance d’équipements de communications électroniques fixes, tandis que Gobé est spécialisée dans l’installation et la maintenance d’équipements de communications électroniques radio.
11. En tout état de cause, la question de l’existence d’une telle segmentation peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la segmentation retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.
B. DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE
12. La pratique décisionnelle communautaire6 considère que les marchés de génie électrique et en particulier les marchés de travaux d’installation et de maintenance de réseaux de télécommunications, sont probablement de dimension nationale, du fait que les conditions d’exercice de la concurrence sur ces marchés sont similaires partout en France. Elle a néanmoins mené une analyse concurrentielle sur ces marchés au niveau régional en France et a laissé ouverte la question de la délimitation géographique exacte des marchés de génie électrique. De la même manière, la pratique décisionnelle nationale7 a considéré que ces marchés pouvaient avoir une dimension nationale ou régionale.
13. En tout état de cause, la question de la délimitation géographique exacte des marchés concernés par l’opération peut être laissée ouverte, dans la mesure où, quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.
III. Analyse concurrentielle
14. L’opération entraîne des chevauchements d’activités entre les parties sur les marchés suivants, qui correspondent à différents degrés de segmentation, et sur lesquels il convient de mener une analyse concurrentielle des effets horizontaux : le marché du génie électrique, le marché de l’installation et de la maintenance de réseaux de télécommunication, le marché de l’installation de réseaux de télécommunication, et le marché de la maintenance de réseaux de télécommunication.
A. MARCHÉ DU GÉNIE ÉLECTRIQUE
15. Sur le marché français du génie électrique, Scopelec détient une part de marché de [0-5] % et Gobé une part de marché de [0-5] %. A l’issue de l’opération, la part de marché cumulée des parties s’élèvera donc à [0-5] %. Au niveau régional, les parties représenteront moins de [0-5] % du marché du génie électrique dans chacune des régions où elles sont présentes simultanément, à savoir dans les régions Aquitaine, Ile-de France, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Rhône-Alpes.
16. Au regard des éléments précités, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence ni sur le marché français du génie électrique, ni sur les marchés régionaux sur lesquels les activités des parties se chevauchent.
B. MARCHÉ D’INSTALLATION ET DE MAINTENANCE DE RÉSEAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS
17. Sur le marché de l’installation et de la maintenance de réseaux de télécommunications, au niveau national ainsi que dans les régions dans lesquelles les activités des parties se chevauchent, les parts de marchés des parties à l’opération sont les suivantes :
18. Au niveau national comme au niveau régional, sur le marché de la fourniture de prestations de services d’installation et de maintenance de réseaux de télécommunications, les parties sont confrontées à la concurrence de très nombreux acteurs, parmi lesquels des groupes disposant de capacités financières importantes, tels que Vinci, Spie, GDF Suez, Bouygues et Eiffage. Ceux-ci, de même que de nombreux acteurs de dimension régionale ont la capacité de répondre aux appels d’offres et constituent une alternative concurrentielle aux offres de la nouvelle entité. Ainsi, au niveau national, Graniou, filiale du groupe Vinci, représente [5-10] % du marché, tandis que Sogetrel et Spie représentent chacun [5-10] % de celui-ci. Dans les régions Rhône-Alpes, Aquitaine et PACA, les parties à l’opération sont principalement concurrencées par ces opérateurs, ainsi que d’autres opérateurs importants comme Ineo, filiale du groupe GDF Suez, et Forclum, filiale du groupe Eiffage.
19. Au regard de ces éléments, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence, ni sur le marché français de l’installation et de la maintenance de réseaux de télécommunications, ni sur les marchés régionaux sur lesquels les activités des parties se chevauchent.
C. MARCHÉ DE L’INSTALLATION DE RÉSEAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS
20. Sur le marché de l’installation de réseaux de télécommunications, au niveau national ainsi que dans les régions dans lesquelles les activités des parties se chevauchent, les parts de marché des parties à l’opération sont les suivantes :
21. Tant au niveau régional qu’au niveau national, les parties sont confrontées sur les marchés d’installation de réseaux de télécommunications à la concurrence de nombreux acteurs de dimension nationale ou locale qui sont en mesure de répondre aux appels d’offres et de constituer une alternative concurrentielle aux offres de la nouvelle entité. Celle-ci devra notamment faire face au niveau national à la concurrence de Graniou ([5-10] % de parts de marché), de Sogetrel ([5-10] %) et de Spie ([5-10] %). Au niveau régional, les parties sont concurrencées par les mêmes opérateurs, ainsi que d’autres groupes importants comme Ineo, Forclum, Lanux, ETE, Constructel et Sogetrel.
22. Au regard de ces éléments, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence, ni sur le marché français de l’installation de réseaux de télécommunications, ni sur les marchés régionaux sur lesquels les activités des parties se chevauchent.
D. MARCHÉS DE MAINTENANCE DE RÉSEAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS
23. Sur le marché français de la maintenance de réseaux de télécommunications, Scopelec détient une part de marché de [0-5] % et Gobé, une part de marché de [0-5] %. Les parties détiennent donc une part de marché cumulée de [0-5] %. Leurs activités ne se chevauchent pas au niveau régional.
24. Au regard de ces éléments, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur le marché français de la maintenance de réseaux de télécommunications.
DECIDE
Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 13-012 est autorisée.
NOTES :
1 Voir les décisions de la Commission européenne du 31 août 2012, Vinci / EVT Business, COMP / M.6623 et du 26 mars 2010, Vinci / Cegelec, n° COMP / M.5701 ; la décision de l’Autorité de la concurrence n°09-DCC-30 du 29 juillet 2009 relative à l’acquisition des sociétés ETCM et GER2I Ensemblier par la société Eiffel Particiainsi que la lettre du ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi du 4 décembre 2008, aux conseils de la société Eiffage, relative à une concentration dans les secteurs de l’installation et de la maintenance multi-technique et des travaux de génie climatique (C2008-117), et la lettre du ministre de l’économie, des finances et de l’emploi du 5 octobre 2007, au conseil de la société Forclom, relative à une concentration dans le secteur de la maintenance d’installations industrielles
2 Voir notamment la décision de la Commission européenne n°COMP / M. 5701 précitée.
3 Voir notamment la décision de la Commission européenne n°COMP / M. 5701 précitée.
4 Voir notamment la décision de la Commission européenne n°COMP / M. 5701 précitée.
5 Voir notamment la lettre du ministre de l’économie et des finances C2008-17 précitée et les décisions de la Commission européenne n°COMP / M. 5701 et n°COMP / 6623 précitées.
6 Voir notamment les décisions de la Commission européenne n°COMP / M. 5701 et n° COMP / M. 6623précitées.
7 Voir la lettre du ministre de l’économie C2008-17 précitée.