ADLC, 14 mars 2013, n° 13-DCC-34
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
relative à la prise de contrôle exclusif de la société Novatrans par le Groupe Charles André
L’Autorité de la concurrence,
Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 7 février 2013, relatif à la prise de contrôle exclusif de la société Novatrans par le Groupe Charles André, formalisée par une offre ferme d’acquisition d’actions en date du 24 septembre 2012 ;
Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;
Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;
Adopte la décision suivante :
I. Les entreprises concernées et l’opération
1. La société Charles André SAS est la société mère d’un ensemble de filiales formant le Groupe Charles André (ci-après « GCA »), détenue à 100 % par la société Fimholog, holding familiale ne détenant pas d’autres participations de nature contrôlante. GCA est actif dans les secteurs du transport routier et de la logistique de produits en vrac, de la logistique automobile, de l’organisation de transport intermodal, du lavage intérieur de citernes et de l’hôtellerie-restauration en Europe et au Maroc.
2. La société Novatrans est actuellement détenue à hauteur de 96,67 % de son capital par la société EIH, contrôlée par le Groupe SNCF. La société Novatrans et ses filiales (ci-après « Novatrans ») exercent une activité d’opérateur de transport combiné rail-route sur des lignes domestiques et internationales.
3. L’opération, formalisée par une offre ferme d’acquisition d’actions du 24 septembre 2012, consiste en l’acquisition de la totalité des actions et des droits de vote de la SNCF dans Novatrans, sous divers conditions. Cette offre a été acceptée par le comité des engagements de la SNCF le 25 septembre 2012 et par le conseil d’administration de Novatrans le 26 septembre 2012. Conformément aux termes de cette offre ferme, un contrat de cession des actions de Novatrans a été finalisé entre les parties et signé le 21 février 2013.
4. En ce qu’elle se traduit par la prise de contrôle exclusif de Novatrans par GCA, l’opération notifiée constitue une opération de concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.
5. Les entreprises concernées ont réalisé ensemble un chiffre d’affaires hors taxes consolidé sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros au dernier exercice clos (Fimholog : 937,09 millions d’euros1 ; Novatrans : 86,76 millions d’euros au 31 décembre 2011). Chacune de ces entreprises a réalisé, en France, un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (Fimholog incluant Anvil Finance : 782,7 millions d’euros ; Novatrans : 61,57 millions d’euros). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatifs à la concentration économique.
II. Délimitation des marchés pertinents
6. Le transport intermodal consiste à acheminer une marchandise dans une même unité de transport intermodal (UTI) ou un même véhicule routier en utilisant deux modes de transport ou plus. Le transport combiné est un transport intermodal dont les parcours principaux s’effectuent par rail, voies navigables ou mer et dont les parcours initiaux et/ou finaux se réalisent par route et sont les plus courts possibles.
7. Le transport combiné rail-route peut être accompagné ou non accompagné. En mode non accompagné, les marchandises sont chargées au départ des usines ou des entrepôts dans des UTI (conteneurs, caisses mobiles, citernes ou semi-remorques adaptés au transport intermodal), puis acheminées par route vers un terminal de transport combiné. Les UTI sont alors chargées sur un train pour être transportées jusqu’au terminal d’arrivée. Après avoir été à nouveau transférées sur un ensemble routier, elles sont livrées à destination.
8. Novatrans propose des services de transport combiné rail-route non accompagné de marchandises. Novatrans est également gestionnaire de plusieurs terminaux de transport combiné. A ce titre, elle offre des prestations de chargement et déchargement d’UTI ainsi que diverses formalités administratives sur ces terminaux.
9. GCA est un opérateur de transport routier de marchandises, il est également organisateur de transport intermodal pour le compte de ses clients chargeurs et effectue des opérations de pré et post acheminement routier vers et à partir des terminaux de transport combiné. Ses activités se situent donc en aval de celles de la cible et les marchés seront délimités au titre des éventuels effets verticaux de l’opération.
A. LES MARCHES DE SERVICES
1. LE MARCHÉ DU TRANSPORT COMBINE RAIL-ROUTE NON ACCOMPAGNÉ
10. A l’occasion de la décision n°09-DCC-54 du 16 octobre 2009 autorisant la prise de contrôle de Novatrans par une filiale du Groupe SNCF, l’Autorité de la concurrence a retenu un marché pertinent du transport combiné non accompagné de marchandises (ci-après « TCRR »). L’Autorité a examiné successivement la substituabilité du TCRR avec les modes alternatifs de transport de marchandises tels que le transport ferroviaire conventionnel de marchandises (dit « fret conventionnel »), le transport combiné rail-route accompagné, le transport combiné maritime et le transport routier de marchandises. Il ressort de cet examen que ces différentes solutions de transport de marchandises ne sont pas ou faiblement substituables avec le TCRR du fait notamment de la nature des marchandises transportées, la spécificité des équipements et terminaux requis par chacun de ces types de transport et des attentes des clients finaux selon chacun des modes utilisés.
11. L’Autorité a envisagé de segmenter plus finement le marché du TCRR selon la nature des marchandises transportées, notamment pour les matières dangereuses, soumises à déclaration, et les produits réfrigérés dont le transport nécessite que les UTI soient raccordées à une source électrique2. La question avait cependant été laissée ouverte.
12. Les parties considèrent qu’une segmentation du marché selon le type de produits transportés n’est pas pertinente au motif que les opérateurs de TCRR, tel que Novatrans, n'organisent pas de transport spécialisé selon le type de marchandises mais offrent leurs prestations de transport combiné sans distinguer les marchandises transportées.
13. En l’espèce toutefois, la question de l’existence de marchés distincts concernant le TCRR de matières dangereuses et de produits sous température dirigée peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit l’hypothèse retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.
2. LES SERVICES DE TERMINAUX DE TRANSPORT COMBINE
14. Les terminaux de transport combiné sont des sites de chargement et de déchargement des UTI, comportant une zone de contrôle des entrées et des sorties de camions ainsi que des zones de manutention. Les terminaux comprennent une ou plusieurs cours à l’intérieur desquelles les opérateurs de transport combiné entreposent et/ou transbordent les UTI des camions vers le train ou inversement. Ces terminaux sont donc nécessaires aux opérateurs de transport combiné pour l’exercice de leur activité.
15. En France, la plupart des terminaux de transport combiné appartiennent à Réseau Ferré de France (ci-après « RFF »), le gestionnaire du réseau ferré national. RFF loue ces terminaux aux opérateurs de transport combiné par le biais de conventions d’occupation du domaine public. La plupart du temps, l’opérateur de transport combiné gestionnaire du terminal assure lui-même les prestations relatives à l’exploitation du terminal. Toutefois, il peut avoir recours aux services d’un opérateur de terminal indépendant.
16. Dans la décision n°09-DCC-54, l’Autorité, après avoir rappelé la pratique décisionnelle et la jurisprudence française et communautaire relative aux terminaux de transport, a conclu que les services de terminaux de transport combiné constituaient un marché distinct. Elle a relevé que la fourniture du terminal de transport combiné et les services correspondants sont généralement groupés au sein d’un contrat de prestation de services unique qui comprend l’occupation du terminal, la manutention des UTI et diverses prestations administratives.
17. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de l’examen de la présente opération. Novatrans étant gestionnaire de plusieurs terminaux de transport combiné, l’analyse sera donc menée sur un tel marché au titre des éventuels effets verticaux de l’opération.
3. LE TRANSPORT ROUTIER DE MARCHANDISES
18. Les autorités de concurrence, tant nationale que communautaire, ont envisagé plusieurs segmentations du marché du transport routier de marchandises en fonction du type d’offres de transport proposées, de la nature des produits transportés ou de leur mode de conditionnement3.
19. S’agissant du type d’offres proposé, quatre segmentations ont été envisagées par la pratique décisionnelle4 selon qu’il s’agit de (i) transport dédié (location de camions avec chauffeurs à des chargeurs, qui gardent ainsi la maîtrise de l’organisation des livraisons, dans un périmètre géographique réduit), (ii) transport routier par camion complet (le camion est affrété directement par les chargeurs dans le cadre de contrats traités opération par opération), (iii) transport par lot ou groupes de lots (collecte des produits, éventuellement auprès de plusieurs clients, dans une zone géographique déterminée, regroupement et acheminement vers les destinataires d’une même région) et de (iv) messagerie (transport d’envois constitués de colis d’au moins trois tonnes, provenant de différents chargeurs et adressés à différents destinataires).
20. Par ailleurs, des marchés spécifiques ont été identifiés pour certains produits particuliers. La pratique décisionnelle a ainsi envisagé l’existence d’un marché du transport routier de marchandises sous température dirigée5 et du transport routier de matières dangereuses6.
21. Il a également envisagé de distinguer le transport routier de marchandises conditionnées de celui des marchandises en vrac7.
22. En l’espèce toutefois, la question de la délimitation précise du marché du transport routier de marchandises peut être laissée ouverte, dans la mesure où quelle que soit l’hypothèse retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées.
B. LES MARCHES GEOGRAPHIQUES
23. S’agissant de la délimitation géographique du marché du transport combine rail-route non accompagné, l’Autorité de la concurrence privilégie une approche selon les points d’origine et de destination, c'est-à-dire ligne par ligne, tout en laissant la question ouverte quant à une éventuelle délimitation entre le trafic domestique d’une part et le trafic transfrontalier d’autre part8. Au cas d’espèce, la question peut être laissée ouverte, l’analyse demeurant inchangée quelle que soit l’hypothèse retenue.
24. S’agissant des services de terminaux de transport combiné, compte tenu de la faible substituabilité entre deux terminaux, la pratique décisionnelle nationale considère que chaque terminal doit être considéré comme étant un marché pertinent9. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de l’examen de la présente opération.
25. S’agissant du transport routier de marchandises, la pratique décisionnelle10 considère généralement que les marchés du transport routier de marchandises revêtent une dimension nationale, malgré une tendance à l’européanisation. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de l’examen de la présente opération.
III. Analyse concurrentielle
26. L’opération ne donne lieu à aucun chevauchement d’activité entre les parties, toutefois elle permet à GCA, transporteur routier, d’intégrer la fonction d’opérateur de transport combiné. Par conséquent, il convient d’évaluer les éventuels effets de cette intégration verticale.
27. En effet, une concentration verticale peut restreindre la concurrence en rendant plus difficile l’accès aux marchés sur lesquels la nouvelle entité sera active, voire en évinçant potentiellement les concurrents ou en les pénalisant par une augmentation de leurs coûts. Ce verrouillage peut viser les marchés aval, lorsque l’entreprise intégrée refuse de vendre un intrant à ses concurrents en aval (verrouillage du marché des intrants) ou les marchés amont lorsque la branche aval de l’entreprise intégrée refuse d’acheter les produits des fabricants actifs en amont et réduit ainsi leurs débouchés commerciaux (verrouillage de l’accès à la clientèle). Cependant, la pratique décisionnelle des autorités de concurrence écarte en principe les risques de verrouillage lorsque la part de l’entreprise issue de l’opération sur les marchés concernés ne dépasse pas 30 %.
28. En l’espèce, GCA, en tant que transporteur routier, est un client de Novatrans sur les marchés du TCRR et des services liés aux terminaux de transport combiné.
29. Néanmoins, même si GCA décidait de ne plus faire appel aux services des entreprises de TCRR concurrentes de Novatrans, l’accès de celles-ci à la clientèle des transporteurs routiers n’en serait pas pour autant compromis, dans mesure où la position de GCA sur le marché du transport routier, quelles que soient les segmentations retenues, est bien inférieure à 30 %. Tout risque de verrouillage de l’accès à la clientèle peut donc être écarté.
30. En revanche, Novatrans représentait, sur la base des données de trafic 201, entre 60 % et 70 % de l’offre sur le marché du TCRR domestique, en excluant les marchandises sous température dirigée. Même si, à l’occasion de la présente opération, une restructuration du plan de transport de Novatrans prévoit l’arrêt de l’exploitation de certaines lignes, Novatrans devrait rester le leader du marché. Ses principaux concurrents sont T3M (24 %), Combiwest (4 %) et dans une moindre mesure, Froidcombi (10 %), ce dernier étant davantage spécialisé sur le TCRR de marchandises sous température dirigée.
31. Il convient donc d’examiner si l’opération peut avoir pour effet de priver les transporteurs routiers concurrents de GCA d’un accès aux services de Novatrans, ou de les défavoriser par des conditions d’accès discriminatoires (verrouillage du marché des intrants). Une telle stratégie ne serait cependant pas dans l’intérêt de GCA.
32. En effet, l’activité de Novatrans repose sur la demande émanant des transporteurs routiers et la position de GCA sur un marché global du transport routier de marchandises est de l’ordre de 1,25 % de part de marché. Avant l’opération, GCA ne représentait que 4 % du chiffre d’affaires de Novatrans. Dans ce contexte, un traitement discriminatoire des transporteurs routiers concurrents de GCA aurait surtout pour effet de compromettre tout retour à la rentabilité de Novatrans, et de mettre à la charge de GCA des pertes insupportables.
33. La majorité des clients ayant répondu au test de marché mené à l’occasion de l’opération considère d’ailleurs qu’une stratégie d’éviction est peu probable. Certains estiment que la réduction du plan de transport de Novatrans est un élément susceptible de permettre le renforcement de la concurrence. Un client considère qu’au regard de la situation financière dégradée de Novatrans, sa reprise par GCA est une opportunité de maintenir une alternative à T3M, seul véritable opérateur de TCRR concurrent et également verticalement intégré avec un groupe de transport routier.
34. Il ressort de l’instruction qu’après l’opération, la nouvelle entité n’aura pas d’incitation à limiter l’accès des transporteurs routiers à l’offre de services de TCRR de Novatrans. L’analyse du marché du TCRR ligne par ligne n’est pas de nature à modifier cette conclusion.
35. S’agissant du marché des services de terminaux de transport combiné, la même analyse peut y être transposée, ces prestations étant étroitement liées à celles du service de TCRR. Il convient d’ajouter que Novatrans, gestionnaire de onze des vingt terminaux de transport combiné existants avant l’opération, n’en exploitera plus que sept à l’issue de celle-ci, permettant un éventuel renforcement de la capacité de développement d’opérateurs alternatifs.
36. S’agissant du marché du TCRR transfrontalier, la position de Novatrans est moins importante que sur le marché domestique, de l’ordre de 14 % en valeur et 18 % en volume, et tout risque de verrouillage peut donc être écarté.
37. Dès lors, l’opération n’est pas susceptible de porter atteinte à la concurrence par le biais d’effets verticaux sur les marchés concernés.
IV. Les restrictions accessoires
38. L’offre ferme d’acquisition des actions Novatrans faite par GCA le 24 septembre 2012 et le contrat de cession signé le 21 février 2013 comportent certaines modalités de réalisation, dépourvues de caractère suspensif. Selon les termes du contrat de cession, ces engagements préalables, impliquant à la fois l’acheteur et le vendeur, doivent intervenir au plus tard à la date de réalisation de l’opération. Parmi ceux-ci figure un accord entre GCA et la SNCF (article 4.5 du contrat de cession), en application duquel le Groupe SNCF, par l’intermédiaire de sa branche Fret SNCF et/ou sa filiale VFLI, assurera les besoins de traction ferroviaire de Novatrans de manière exclusive, pendant une durée de cinq ans et ce, à un prix dont l’évolution est déterminée par les parties dans le cadre de l’accord.
39. La partie notifiante estime que ce contrat devrait être considéré comme une restriction accessoire à l’opération au motif que « ce contrat et sa durée sont en effet directement liés et nécessaires à la réalisation de l’opération puisque ils font partie des engagements préalables qui ont été pris par la SNCF et qui constituent pour GCA une condition sine qua non de la réalisation de l’opération notifiée ». Elle indique que « cette condition préalable est pour GCA une condition nécessaire à la réalisation de l’opération au vu du poids que représente l’achat de traction ferroviaire dans la structure de coûts et la construction du prix des services de TCRR de Novatrans », et ajoute que « si l’Autorité devait considérer que le contrat de traction ferroviaire conclu entre Novatrans et la SNCF, et notamment sa durée, emportait une restriction de concurrence, elle devrait alors constater son caractère accessoire à la concentration ».
40. Il convient donc d’examiner si ce contrat d’approvisionnement constitue une restriction directement liée et nécessaire à la réalisation de la concentration.
41. Au préalable, il convient de noter que la communication de la Commission européenne sur les restrictions accessoires précise que « les critères de lien direct et de nécessité sont objectifs par nature. Des restrictions ne sont pas directement liées et nécessaires à la réalisation d'une concentration simplement parce que les parties les considèrent comme telles »11. Ainsi, « il ne suffit pas qu'un accord ait été conclu dans le même contexte ou au même moment que l'opération de concentration mais qu’elles se rapportent, d'un point de vue économique, à la transaction principale et visent à permettre une transition en douceur entre l'ancienne structure de l'entreprise et la nouvelle après l'achèvement de l'opération de concentration ».
42. La signature d’un contrat d’approvisionnement peut s’avérer nécessaire afin de maintenir la continuité d'approvisionnement après la scission d'une ancienne entité économique. A cet égard, la communication de la Commission précise que « la cession d'une entreprise ou d'une partie d'entreprise peut, dans de nombreux cas, entraîner la rupture des relations traditionnelles d'achat et de livraison ayant existé auparavant du fait de l'intégration des activités au sein de l'entité économique du vendeur. Pour permettre, dans des conditions raisonnables, la scission de l'entité économique du vendeur et le transfert partiel des actifs à l'acquéreur, il est souvent nécessaire de maintenir les liens existants ou d'établir des liens similaires entre le vendeur et l'acquéreur pour une période transitoire. Cet objectif est normalement atteint par l'imposition d'obligations d'achat et de livraison au vendeur et/ou à l'acquéreur de l'entreprise ou de la partie d'entreprise. Compte tenu de la situation particulière résultant de la scission de l'entité économique du vendeur, de telles obligations peuvent être reconnues comme directement liées et nécessaires à la réalisation de la concentration. Elles peuvent jouer en faveur du vendeur ou de l'acquéreur, en fonction des circonstances particulières du cas d'espèce » (point 32).
43. Cependant, la communication de la Commission précise que « les obligations, tant de livraison que d'achat, (…) prévoyant l’exclusivité ou conférant un statut privilégié au fournisseur ou à l’acheteur ne sont, en revanche, pas nécessaires à la réalisation de la concentration » (point 34). Elle ajoute que « la durée des obligations d'achat et de livraison doit cependant être limitée à la période nécessaire pour remplacer la relation de dépendance par une position autonome sur le marché. Les obligations d'achat ou de livraison destinées à garantir les quantités fournies antérieurement peuvent par conséquent se justifier pour une période transitoire de cinq ans au maximum » (point 33).
44. En l’espèce, le contrat prévoit une exclusivité d’approvisionnement, pour les besoins en traction ferroviaire de Novatrans, au profit de la SNCF12. Si l’obligation de fourniture de services de traction de la SNCF à Novatrans peut être considérée comme directement liée et nécessaire à la réalisation de la concentration, en revanche, aucune obligation d’approvisionnement exclusif pesant sur GCA ne parait nécessaire pour assurer la continuité d'approvisionnement de Novatrans et donc objectivement justifiée. Conformément aux engagements pris par la SNCF devant l’Autorité de la concurrence à l’occasion de l’acquisition de Novatrans en 200913 les besoins en traction ferroviaire de Novatrans étaient satisfaits par le biais de mises en concurrence entre les différents opérateurs de traction. Ainsi, en 2010, 2011 et 2012, Euro Cargo Rail a répondu et remporté des lots dans le cadre de ces appels d’offres, même si l’essentiel des lots ont été remporté par des filiales de la SNCF. Novatrans pouvait donc diversifier ses approvisionnements avant l’opération.
45. L’argument de GCA selon lequel cet accord lui offre « une visibilité sur le principal élément de coût de l’activité du transport combiné (la traction ferroviaire) et d’avoir la garantie de remplir l’ensemble de ses obligations en termes de sécurité et de fiabilité » n’implique pas l’octroi d’une clause d’exclusivité au profit de la SNCF.
46. En conséquence, et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres éléments de l’accord, ce contrat d’approvisionnement exclusif en services de traction ne constitue pas une restriction directement liée et nécessaire à la réalisation de la présente opération. La décision ne fait donc pas obstacle à un examen de cet accord au titre des L.420-1 et 420-2 du code de commerce.
DECIDE
Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 12-217 est autorisée.
NOTES :
1 839,67 millions d’euros au 31 décembre 2011 pour la société Fimholog, auquel il convient d’ajouter le chiffre d’affaires de la société Anvil Finance, acquise postérieurement à cette date et dont le chiffre d’affaires s’élevait à 97,42 millions d’euros pour le même exercice (décision l’Autorité de la concurrence n°13-DCC-24)
2 Décision n°09-DCC-54 précitée
3 Voir notamment les lettres du ministre de l’économie n°C2005-36 du 6 janvier 2005, n°C2005-110 du 29 novembre 2005 et n°C2007-70 du 4 juillet 2007, ainsi les décisions de l’Autorité de la concurrence n°09-DCC-13 du 16 juin 2009 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Giraud CEE et Giraud Sidérurgie par Geodis. et 11-DCC-79 du 16 mai 2011 relative à la prise de contrôle conjoint de Transcosatal Finances par les sociétés Satar, Chabas et STEF-TFE Transport.
4 Voir notamment la décision du ministre n°C2005-36 précitée et la lettre du ministre de l’économie, des finances et de l’emploi n°C2007-70 du 4 juillet 2007, au président de la société Transalliance SA, relative à une concentration dans le secteur du transport routier de marchandises.
5 Lettre du ministre de l’économie, des finances et de l’industrie n°C2005-36 du 6 janvier 2006, au conseil de la société STEF-TFE, relative à une concentration dans le secteur de l’entreposage frigorifique.
6 Lettre du ministre d’Etat, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie n°C2004-85 en date du 2 septembre 2004 aux conseils de la société Charles André, relative à une concentration dans le secteur des transports routiers de produits pétroliers.
7 Voir notamment la lettre du Ministre de l’économie, des finances et de l’industrie n°C2005-110 en date du 29 novembre 2005 aux conseils de la société Norbert Dentressangle, relative à une concentration dans les secteurs du transport routier de marchandises et de la logistique.
8 Voir décision n° 09-DCC-54 précitée
9 Voir décision n°09-DCC-54
10 Voir notamment la décision de la Commission européenne IV/M.1405 TNT Post Group/Jet Services du 15 février 1999 et les décisions 09-DCC-13 et 11-DCC-79 précitées.
11 Cf. point 11 de la Communication 2005/C 56/03 du 5 mars 2005 relative aux restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation des opérations de concentration.
12 L’exclusivité porte sur les six lignes domestiques figurant au plan de transport 2013 de Novatrans. Elle ne porte pas sur les liaisons internationales ou sur les nouvelles liaisons domestiques qu’elle déciderait d’exploiter.
13 Voir la décision de l’Autorité n°09-DCC-54 du 16 octobre 2009 du 16 octobre 2009 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Novatrans par la société Transport et Logistique Partenaires SA.