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Décisions

CA Toulouse, 3e ch., 14 novembre 2019, n° 19/00815

TOULOUSE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

CGEA de Toulouse Unedic

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beneix-Bacher

Conseillers :

M. Beauclair, M. Blanque-Jean

Avocats :

Me Laffont, Me Thulliez

TGI Montauban, du 10 janv. 2019, n° 18/0…

10 janvier 2019

FAITS

X… qui est agriculteur a été placé en redressement judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Montauban en date du 12 avril 2016. Un plan de redressement a été arrêté par décision du 18 avril 2017.

L'association CGEA AGS de Toulouse dispose d'une créance super privilégiée d'un montant de 8.062,74 €.

L'AGS a accordé des délais de paiement en 12 échéances mensuelles à compter du 18 avril 2017. X… a cessé le remboursement échelonné de la dette qui s'élève à 5.981,33€.

PROCEDURE

Par assignation en date du 27 septembre 2018, l'association CGEA de Toulouse a saisi le juge des référés du Tribunal de grande instance de Montauban sur le fondement de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile pour obtenir la condamnation de X… au paiement provisionnel de la somme de 5 981,33 € ainsi que celle de 1000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 10 janvier 2019, le juge a :

- dit n'y avoir lieu à référé,

- débouté les parties des demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné CGEA aux dépens.

Par déclaration en date du 12 février 2019, l'association CGEA de Toulouse a interjeté appel de l'ordonnance en critiquant l'ensemble de ses dispositions.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

L'association CGEA de Toulouse, dans ses dernières écritures en date du 3 avril 2019 demande à la cour au visa de l'article L. 626-20 du code de commerce et de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile de réformer la décision et en conséquence :

- condamner X… à régler immédiatement et sans plus aucun délai, par provision vu l'urgence, la somme de 5.981,33 €, représentant le solde de la créance super privilégiée de l'AGS,

- condamner X… au paiement d'une somme de 1.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner X… aux entiers frais et dépens de l'instance.

Elle fait valoir que’ :

- l'article L. 626-20 du code de commerce dispose que la créance superprivilégiée est hors plan, ainsi, l'article R. 662-3 du même code ne s'applique pas en l'espèce, ce qui autorise l'association CGEA à demander le paiement de sa créance devant le juge des référés,

- la somme de 5981,33 € due est exigible depuis le jugement d'homologation du plan de redressement,

- X… n'a remboursé que très partiellement sa dette et n'a jamais respecté les délais pourtant exceptionnellement accordés.

X… , dans ses dernières écritures en date du 2 mai 2019 demande à la cour au visa de l'article 809 alinéa 2 du code de procédure civile de':

- confirmer l'ordonnance de référé en date du 12 février 2019 en toutes ses dispositions.

Subsidiairement,

- dire et juger irrecevable la demande du CGEA,

- déclarer incompétent le juge des référés au profit du Tribunal de grande instance de Montauban statuant en matière de redressement judiciaire.

En tout état de cause,

- condamner le CGEA au paiement de la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le CGEA aux entiers frais et dépens.

Il soutient que':

- le code de commerce dispose que seul le Tribunal de commerce est compétent pour connaître des conséquences de l'éventuelle inexécution du plan et du montant de la créance de la CGEA,

- l'article L. 626-27 du code de commerce prévoit que seul le commissaire à l'exécution du plan a qualité à agir en paiement des termes du plan à l'exclusion des créanciers.

L'ordonnance de clôture a eu lieu le 16 septembre 2019.

MOTIVATION

L'exception de compétence au profit du Tribunal de grande instance de Montauban statuant en matière de redressement judiciaire n'a pas été soulevée in limine litis ; elle est donc irrecevable.

L'article L. 626-20 du code de commerce, cité au soutien de la demande de l'appelant, dispose que ces créances superprivilégiées ne peuvent faire l'objet de remise et de délais sans l'accord des créanciers.

Et l'article L. 626-6 autorise les créanciers détenteurs de créances super privilégiées à accorder des délais de grâce dans le cadre d'un plan de sauvegarde.

En l'espèce, la CGEA de Toulouse subrogée dans les droits des salariés a accepté de figurer au plan adopté suivant jugement du Tribunal de grande instance de Montauban du 18 avril 2017, en accordant un rééchelonnement sur 12 mois, dont elle reconnaît également qu'il a reçu un début d'exécution.

L'article L. 626-27 du code de commerce dispose que': «'En cas de défaut de paiement des dividendes par le débiteur, le commissaire à l'exécution du plan procède à leur recouvrement conformément aux dispositions arrêtées. Il y est seul habilité ... »

Le commissaire à l'exécution du plan est donc seul compétent pour connaître du paiement des créances inscrites dans le plan. Ce monopole résulte du fait que l'action participe de l'intérêt collectif des créanciers et qu'il relève des attributions du commissaire à l'exécution du plan de percevoir les dividendes et les répartir entre les créanciers.

Ainsi, le créancier n'a pas qualité pour agir en recouvrement des dividendes du plan. La nature super privilégiée de la créance de la CGEA de Toulouse ne lui permet pas de déroger à ce monopole.

La CGEA de Toulouse n'ayant pas qualité pour agir, son action devant le juge des référés est irrecevable.

Dans ces conditions, l'ordonnance sera infirmée dès lors qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé, ce qui suppose un examen de l'affaire au fond alors que l'appelant ne dispose pas du droit d'agir qui constitue une fin de non-recevoir.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Déclare irrecevable l'exception d'incompétence au profit du tribunal de grande instance de Montauban.

- Infirme l'ordonnance du juge des référés du Tribunal de grande instance de Montauban en date du 10 janvier 2019 en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

- Déclare l'association CGEA AGS de Toulouse irrecevable à agir.

- Vu l'article 700 du code de procédure civile condamne l'association CGEA de Toulouse à payer à X… la somme de 500 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

- Condamne l'association CGEA AGS de Toulouse aux dépens de première instance et d'appel.