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Décisions

ADLC, 11 juillet 2013, n° 13-DCC-87

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle exclusif de la Compagnie Européenne de Prestations Logistiques par ID Logistics Group SA

ADLC n° 13-DCC-87

10 juillet 2013

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 13 juin 2013, relatif à la prise de contrôle exclusif de la Compagnie Européenne de Prestations Logistiques par ID Logistics Group SA, et formalisée par un protocole de restructuration signé le 12 juin 2013 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

1. ID Logistics Group SA est la société de tête du groupe ID Logistics, spécialisé dans les services logistiques en France et à l’international. Le groupe propose une offre intégrée de logistique, incluant des prestations de transport, d’entreposage et de services à valeur ajoutée. Ses activités couvrent ainsi l’ensemble de la chaîne de distribution. La société ID Logistics Group SA, cotée à NYSE Euronext Paris, est contrôlée exclusivement par monsieur Hémar qui détient directement et indirectement […] % du capital social et […] % des droits de vote.

2. Compagnie Européenne de Prestations Logistiques (ci-après « CEPL ») est la holding opérationnelle du groupe CEPL qui est un prestataire français de services logistiques, spécialisé notamment dans la préparation de commande de produits hétérogènes. L’intégralité du capital de CEPL est actuellement détenue par la société Compagnie Financière de Logistique (ci-après « CFL »), elle-même contrôlée par Arcapita Bank B.S.C, un investisseur basé à Bahrein.

3. En vertu du protocole de restructuration signé le 12 juin 2013, il est prévu que le groupe ID Logistics acquiert l’intégralité du capital et des droits de vote de CFL. En ce qu’elle se traduit par l’acquisition du contrôle exclusif de CEPL par ID Logistics, l’opération notifiée est une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (ID Logistics : […] d’euros pour le dernier exercice clos au 31 décembre 2012 ; CEPL : […] d’euros pour le dernier exercice clos au 31 août 2012). Deux au moins de ces entreprises réalisent en France un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (ID Logistics : […] d’euros pour le dernier exercice clos au 31 décembre 2012 ; CEPL : […] d’euros pour le dernier exercice clos au 31 août 2012). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatives à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

5. La présente opération emporte un chevauchement d’activités sur les marchés des services logistiques, les parties étant toutes deux actives dans ce secteur.

 

A. LES MARCHÉS DE PRODUITS

6. La pratique décisionnelle des autorités de concurrence a défini les services de logistique comme associant « les différents maillons d’une chaîne d’approvisionnement de marchandises entre un point d’origine et un point d’arrivée, et ce afin de gérer de manière optimale le flux et le stockage desdites marchandises. Cette activité peut s’assimiler à une offre globale, dans la mesure où elle combine un ensemble de services tels que, notamment, le stockage, l’inventaire des stocks, la prise de commande et le transport de marchandises en un temps et un lieu définis par le client »1.

7. Les autorités de concurrence communautaire et nationales ont envisagé l’existence de marchés distincts pour certains services logistiques compte tenu des spécificités de la chaîne de production au sein de laquelle interviennent ces prestations2. L’Autorité s’est ainsi interrogée sur l’existence de marchés de services logistiques spécifiques au secteur du commerce électronique3. Dans ce secteur, l’activité logistique intervient à différents stades du processus de distribution. On distingue ainsi : i) la logistique amont (approvisionnement, contrôle qualité, stockage, conditionnement, préparation de commandes, étiquetage, etc.) ; (ii) la logistique aval (livraison) ; et (iii) la gestion des flux retour (liée par exemple à l’exercice du droit de rétractation, au service après-vente ou au recyclage)4.

8. Dans sa décision n°13-DCC-08 du 16 janvier 2013, l’Autorité a considéré que les services logistiques amont propres au secteur du commerce électronique pouvaient constituer un marché distinct. L’Autorité a également envisagé de distinguer, au sein de ce marché, les opérateurs de logistique généralistes des opérateurs de logistique spécialisés dans le commerce électronique.

9. En l’espèce, les parties sont toutes deux prestataires de services logistiques, leur clientèle respective étant en partie constituée de plateformes de commerce électronique.

10. La question de la délimitation exacte des marchés de la logistique peu toutefois être laissée ouverte, les conclusions de l’analyse concurrentielle restant inchangées quelle que soit la délimitation retenue.

 

1. LA DÉLIMITATION GÉOGRAPHIQUE

11. Selon la pratique des autorités nationales et communautaire de concurrence5, les marchés des services logistiques sont de dimension nationale. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de la présente décision.

 

III. Analyse concurrentielle

12. Sur le marché global des services logistiques en France, estimé à plus de 6 milliards d’euros6, la part de marché du groupe ID Logistics à l’issue de l’opération sera d’environ [5-10] % (la part de marché de CEPL étant estimée à [0-5] %).

13. S’agissant des seuls services logistiques amont à destination des opérateurs du commerce électronique, ceux-ci représentent en France un chiffre d’affaires estimé à 400 millions d’euros7. Sur ce marché CEPL a réalisé un chiffre d’affaires estimé à 12,3 millions d’euros soit une part de marché d’environ [0-5] %. ID Logistics a pour sa part réalisé un chiffre d’affaires de 27 millions d’euros soit une part de marché d’environ [5-10] %. A l’issue de l’opération la nouvelle entité détiendra donc une part de marché de [10-20] %.

14. Le groupe ID logistiques restera par ailleurs confronté à la concurrence de nombreux opérateurs, tant sur le marché global des services logistiques que sur le segment de la logistique amont à destination du commerce électronique. Il convient notamment de noter la présence sur ces marchés d’opérateurs de taille importante tels que les groupes Géodis ou encore Norbert Dentressangle.

15. Par conséquent, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés concernés.

 

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 13-096 est autorisée.

 

NOTES :

1 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-48 du 2 juin 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Amonite SAS par la société Manuloc SA ; n°11-DCC-79 du 16 mai 2011 relative à la prise de contrôle conjoint de Transcosatal Finances par les sociétés Satar, Chabas et STEF-TFE Transport et n°12-DCC-53 du 12 novembre 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de certains actifs de la société Sernam Services SNC par la société Calberson SNC.

2 Voir par exemple le cas des produits « grand froid » dans la décision de l’Autorité n°11-DCC-79 précitée ainsi que le cas du tabac dans la décision M.3553 de la Commission européenne du 4 octobre 2004.

3 Voir la décision de l’Autorité de la concurrence n°13-DCC-08 du 16 janvier 2013 relative à la prise de contrôle exclusif d'Alpha Direct Services par Rakuten Europe.

4 Voir les paragraphes 103 à 112 de l’avis de l’Autorité de la concurrence n° 12-A-20 du 18 septembre 2012 relatif au fonctionnement concurrentiel du commerce électronique.

5 Voir par exemple la décision de l’Autorité de la concurrence n° 09-DCC-13 du 16 juin 2009 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Giraud CEE et Giraud Sidérurgie par la société Géodis ainsi que les décisions n° 12-DCC-153 et n°13-DCC-08 précitées.

6 Source : Supply Chain Magazine, mai 2012.

7 Source : Xerfi, «Logistique et e-commerce, Panorama de la chaîne e-logistique et analyse du jeu concurrentiel», avril 2011.