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Décisions

ADLC, 23 juillet 2013, n° 13-DCC-88

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle exclusif de la société Carrard Services par la société TFN Propreté

ADLC n° 13-DCC-88

22 juillet 2013

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification, adressé au service des concentrations le 29 mai 2013, et déclaré complet le 19 juin 2013, relatif à la prise de contrôle de la société Carrard Services par la société TFN Propreté, réalisée en application [confidentiel] ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les parties au cours de l’instruction ;

Adopte la décision suivante :

 

I. Les entreprises concernées et l’opération

A. LES ENTREPRISES CONCERNÉES

1. La société TFN Propreté est une filiale du groupe Atalian dont la société de tête, EAB Finances est contrôlée exclusivement par Monsieur [X]. Le groupe Atalian est actif dans le secteur des services de nettoyage industriel et plus généralement des services liés aux bâtiments et aux services généraux (propreté, facility management, sécurité, bâtiment, espaces verts).

2. La société Carrard Services est une filiale du groupe Vebego. Elle est active dans le secteur du nettoyage industriel et dans le secteur des travaux dits spéciaux qui sont des prestations de services qui relèvent soit du nettoyage industriel, soit de travaux de second oeuvre dans le secteur du bâtiment (concernant notamment l’habillage ou les réseaux d’alimentation divers).

3. L’opération, qui a été réalisée en application, [confidentiel], consiste en l’acquisition par TFN Propreté de l’intégralité du capital et des droits de vote de Carrard Services. En ce qu’elle entraîne la prise de contrôle exclusif de Carrard Services par TFN Propreté, l’opération constitue une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.

4. Les entreprises concernées réalisent ensemble un chiffre d’affaires total sur le plan mondial de plus de 150 millions d’euros (groupe Atalian : 1,17 milliard d’euros pour l’exercice clos le 31 août 2012 ; Carrard Services : 93 millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2012). Chacune de ces deux entreprises réalisent en France un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros (groupe Atalian : 1,04 milliard d’euros pour l’exercice clos le 31 août 2012 ; Carrard Services : 93 millions d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 2012). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne revêt pas une dimension communautaire. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au I de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatives à la concentration économique.

 

II. Délimitation des marchés pertinents

5. Le groupe Atalian et la société Carrard Services sont simultanément présents dans les secteurs du nettoyage industriel et des travaux de second oeuvre dans le secteur du bâtiment.

 

A. LES MARCHÉS DU NETTOYAGE INDUSTRIEL

1. LES MARCHÉS DE SERVICES

6. La pratique décisionnelle1 considère que les services de nettoyage industriel doivent être distingués des autres services aux entreprises. Ces services incluent les « prestations de nettoyage industriel à destination de tous types d’entreprises (industriel, tertiaire) et pour tous types de surfaces à nettoyer (locaux, usines, etc.) »2.

7. La pratique décisionnelle a envisagé de retenir une distinction, au sein du marché du nettoyage industriel, entre les services de nettoyage des « locaux professionnels à vocation administrative ou commerciale » (« nettoyage classique ») et ceux « consistant dans le nettoyage d’installations industrielles, d’outils de production, de machines et de cuves » (« nettoyage technique ou spécifique »). La question de l’existence d’une telle distinction a néanmoins été laissée ouverte.

8. Au sein des services de nettoyage technique, la pratique décisionnelle3 a identifié un éventuel marché distinct du nettoyage en milieu hospitalier (les services en milieu hospitalier consistent dans le nettoyage de blocs opératoires, des chambres médicalisées, des instruments et des machines), du fait des exigences spécifiques de ce secteur, notamment en termes d’hygiène, de qualification du personnel et de matériel nécessaire.

9. Au cas d’espèce, la question de la définition exacte des marchés du nettoyage industriel peut être laissée ouverte dans la mesure où quelle que soit la définition retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeurent inchangées.

 

2. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

10. La pratique décisionnelle considère que les marchés du nettoyage industriel sont tout au plus de dimension nationale et plus probablement de dimension locale. Le département ou la région ont précédemment été retenus pour mener des analyses locales, à l’exception de la région Île-de-France, qui a été examinée comme un marché géographique pertinent spécifique4.

11. Au cas d’espèce, la question de la délimitation exacte des marchés peut être laissée ouverte dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées. L’analyse concurrentielle sera menée au niveau national, au niveau départemental et dans la région Île-de-France.

 

B. LES MARCHÉS DE TRAVAUX DE SECOND OEUVRE DANS LE SECTEUR DU BÂTIMENT

1. LES MARCHÉS DE PRODUITS ET DE SERVICES

12. Parmi les travaux relatifs aux bâtiments, la pratique décisionnelle5 distingue les travaux de gros oeuvre, qui concernent la structure du bâtiment (notamment fondations, murs, couverture) des travaux de second oeuvre qui concernent l’habillage et les équipements de la structure du bâtiment (notamment réseaux d’alimentation divers, isolation).

13. La pratique décisionnelle6 envisage des segmentations du marché des travaux de second oeuvre en fonction (i) du type de clientèle (professionnels ou particuliers), (ii) de l’usage du bâtiment (bâtiments résidentiels ou non résidentiels), voire (iii) du métier (travaux de peinture, de plâtrerie, de menuiserie, de construction de plafonds, de cloisons).

14. Au cas d’espèce, la question de la définition exacte des marchés de travaux de second oeuvre peut être laissée ouverte dans la mesure où les conclusions de l’analyse concurrentielle resteront inchangées.

 

2. LES MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

15. La pratique décisionnelle communautaire et nationale7 considère que les marchés de travaux relatifs aux bâtiments peuvent avoir une dimension nationale. La pratique décisionnelle nationale8 a en outre envisagé, dans le cas particulier des travaux de second oeuvre, des marchés de dimension régionale en raison du nombre important d’acteurs locaux.

16. Au cas d’espèce, la question de la délimitation exacte des marchés peut être laissée ouverte dans la mesure où quelle que soit la délimitation retenue, les conclusions de l’analyse concurrentielle demeureront inchangées. L’analyse sera menée au niveau national et au niveau de la région Ile-de-France, seule région dans laquelle les activités des parties à l’opération se chevauchent.

 

III. Analyse concurrentielle

17. L’opération entraîne des chevauchements d’activités entre les parties sur les marchés du nettoyage industriel et sur les marchés de travaux de second oeuvre dans le secteur du bâtiment, sur lesquels il convient de mener une analyse des effets horizontaux.

 

A. LES MARCHÉS DU NETTOYAGE INDUSTRIEL

18. Les activités des parties se chevauchent sur le marché du nettoyage industriel, ainsi que sur les segments du nettoyage classique, du nettoyage technique et du nettoyage technique hospitalier.

19. Au niveau national, la part de marché cumulée des parties sur les marchés du nettoyage industriel sera inférieure à [10-20] % et l’incrément inférieur à [0-5] %, quelle que soit la segmentation des marchés retenue. De plus, sur ces marchés, les parties seront confrontées à la concurrence de nombreux concurrents tels qu’ONET (qui représente [5-10] % du marché du nettoyage industriel), ISS ([5-10] % du marché du nettoyage industriel), GSF ([0-5] % du marché du nettoyage industriel) et Elior (qui représente [10-20] % du sous-segment de marché du nettoyage technique en milieu hospitalier).

20. Au niveau local, dans les 60 départements et en région Ile de France, où le groupe Atalian et la société Carrard Services sont simultanément présents, la part de marché cumulée des parties n’excèdera pas [10-20] %, quel que soit le segment concerné sur les marchés du nettoyage industriel (classique, technique ou en milieu hospitalier). Parmi les concurrents précités ONET, ISS et GSF sont également présents sur l’ensemble de ces départements.

21. L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés de services de nettoyage industriel.

 

B. LES MARCHÉS DE TRAVAUX DE SECOND OEUVRE DANS LE SECTEUR DU BATIMENT

22. Au niveau national, sur le marché des travaux de second oeuvre dans le secteur du bâtiment, Carrard Services et le groupe Atalian détiennent une part de marché cumulée inférieure à [0-5] %. Sur des marchés segmentés par (i) type de clientèle, (ii) usage du bâtiment ou (iii) type de métier, la part de marché cumulée des parties est inférieure à [0-5] %, quelle que soit la segmentation retenue. De plus, sur ces marchés, les parties seront confrontées à la concurrence de groupes tels que Vinci, Bouygues ou Eiffage, ainsi que de nombreux concurrents locaux.

23. Au niveau local, la part de marché cumulée des parties sur le marché des travaux de second oeuvre en région Ile-de-France, seule région dans laquelle les activités des parties se chevauchent, est inférieure à [0-5] %. Sur des marchés segmentés par (i) type de clientèle, (ii) usage du bâtiment ou (iii) type de métier, la part de marché cumulée des parties est inférieure à [0-5] %, quelle que soit la segmentation retenue.

24. L’opération n’est donc pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés des travaux de second oeuvre dans le secteur du bâtiment.

 

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 13-056 est autorisée.

 

NOTES :

1 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n°12-DCC-108 du 30 juillet 2012 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe TEP par le groupe Samsic et n°12-DCC-68 du 23 mai 2012 relative à l’acquisition de la SAS Ansamble par le groupe Elior.

2 Voir notamment la lettre C2008-88 du 11 septembre 2008 aux conseils de la société Samsic relative à une concentration dans le secteur du nettoyage industriel et les décisions de l’Autorité de la concurrence n°12-DCC-108 et n°12-DCC-68 précitées précitées.

3 Voir la décision de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-76 du 9 juillet 2010 relative à la prise de contrôle de la société Sin & Stes par le groupe Elior.

4 Voir la décision de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-76 du 9 juillet 2010 relative à la prise de contrôle de la société Sin & Stes par le groupe Elior.

5 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-82 du 28 juillet 2010 relative à la prise de contrôle exclusif du groupe Faceo par Vinci Energies, n°10-DCC-05 du 21 janvier 2010 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Cari Holding par la société Fayat, la lettre du ministre de l’économie, des finances et de l’emploi du 15 novembre 2007 aux conseils de la société Spie Batignolles SA, relative à une concentration dans le secteur des travaux de finition du bâtiment (C2007-132).

6 Voir notamment les décisions de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-82 et 10-DCC-05 précitées et la décision du ministre n°C2007-132 précitée.

7 Voir notamment la décision de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-05 précitée et la décision de la Commission européenne n°COMP/M.3864, FIMAG / Züblin du 14 octobre 2005.

8 Voir notamment la décision de l’Autorité de la concurrence n°10-DCC-05 précitée et la décision du ministre n°C2007-132.