Cass. com., 3 mai 1994, n° 91-21.003
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en mars 1986, M. X..., qui exerce une activité commerciale de solderie sous l'enseigne Gifi, est entré en relations avec la société TRP conseil (société TRP) en vue de la conception et de la réalisation de campagnes de publicité ; que les relations commerciales entre les parties se sont poursuivies jusqu'au mois de juillet 1988 où M. X... a pris l'initiative de leur rupture en annulant des commandes ; que la société TRP, soutenant que cette rupture était abusive et qu'elle avait subi un préjudice de ce fait, ainsi que du fait de l'utilisation de ses créations publicitaires par M. X... après la fin de leurs relations contractuelles, a assigné ce dernier en paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour décider que M. X... ne justifiait pas d'un motif grave et légitime qui l'aurait autorisé à rompre la convention l'unissant à la société TRP sans observer le délai de préavis de 6 mois prévu par le contrat type, l'arrêt énonce que " le motif grave qu'il invoque : absence d'accord, justifie une rupture sans préavis du contrat, alors, surtout, qu'aucun désaccord n'avait été invoqué sur ce point avant la rupture du contrat " ;
Attendu qu'en statuant par un tel motif, dont la teneur ne permet pas à la Cour de Cassation d'apprécier si M. X... avait méconnu ses obligations contractuelles envers la société TRP, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches :
Vu l'article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que les créations publicitaires ne sont protégées au titre de la propriété littéraire et artistique que pour autant qu'elles constituent des oeuvres de l'esprit au sens du Code susvisé ;
Attendu que, pour décider que la société TRP n'avait pas cédé à M. X... ses droits de propriété incorporelle sur le slogan " Gifi de tout à des prix fous " et sur le message musical réalisé dans le cadre de la campagne radiophonique, et que cette société subissait un préjudice du fait de l'utilisation abusive par M. X... ou " toute entreprise dérivée " de ses créations publicitaires, l'arrêt retient que le slogan " Gifi de tout à des prix fous " forme un tout, " que Gifi est connu sous cette dénomination qui résume remarquablement les activités de l'intéressé et que, dès lors qu'il y a eu rupture du contrat de publicité, base de cette dénomination, M. X... devait cesser d'utiliser, accolé ou à proximité de l'enseigne Gifi, la formule " de tout à des prix fous " ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si le slogan et le message musical litigieux avaient un caractère original en raison d'un apport personnel de l'auteur, n'a pas donné de base légale à sa décision du chef critiqué ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du troisième moyen, non plus que sur le quatrième moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit que la société TRP conseil devait bénéficier de l'application du contrat type, l'arrêt rendu le 12 novembre 1991, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.