Cass. soc., 9 mai 2006, n° 04-48.042
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bailly
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 22 janvier 2004), que M. X... de Heaulme a été engagé par la société Quai d'Orsay le 18 juin 1998, en qualité de directeur de la stratégie et de la création ; que le 5 octobre 1999, la société Quai d'Orsay a été mise en liquidation judiciaire, et que le 17 octobre 1999, M. X... de Heaulme a été licencié pour motif économique avec dispense d'exécuter son préavis ;
qu'à la suite d'un différend relatif au calcul de son indemnité de préavis, l'AGS, invoquant que M. X... de Heaulme avait perdu la qualité de salarié après avoir remplacé le président du conseil d'administration de la société en mai 1999 a demandé la répétition des sommes avancées au titre des créances salariales postérieures à cette date ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir fait droit à cette demande alors, selon la première branche du moyen, que le conseil d'administration élit parmi ses membres un président qui assume sous sa responsabilité la direction générale de la société ; qu'en l'espèce, pour estimer que M. X... de Heaulme avait remplacé M. Y... aux fonctions de président du conseil d'administration de la société Quai d'Orsay à compter du 31 mai 1999, la cour d'appel retient que M. Y... n'avait pas gardé la qualité de gérant et avait dû faire nommer en remplacement un mandataire pour exercer ses droits attachés aux fonctions de représentant de la société Quai d'Orsay, et que M. X... de Heaulme était le destinataire de tous les éléments juridiques comptables sociaux de la société et qu'il a donc eu la responsabilité des bilans postérieurement après la démission de M. Y... ; qu'en se prononçant sur ces seuls éléments, à l'exclusion de toute décision du conseil d'administration désignant M. X... de Heaulme en qualité de président, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 110 de la loi du 24 juillet 1966, devenu l'article L. 225-47 du Code de commerce ;
Mais attendu qu'appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a relevé que M. X... de Heaulme a effectivement remplacé le président du conseil d'administration après la démission de ce dernier, peu important que les dispositions de l'article L. 225-47 du Code de commerce n'aient pas été observées ; que le moyen n'est pas fondé en sa première branche ;
Et sur les deuxième et troisième branches du moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir fait droit aux demandes de restitution de l'AGS alors, selon les deuxième et troisième branches du moyen :
1 ) que le salarié nommé aux fonctions de président du conseil d'administration ne perd pas le bénéfice de son contrat de travail ;
qu'en l'espèce, la cour d'appel qui retient que M. X... de Heaulme n'avait plus la qualité de salarié de la société Quai d'Orsay dont il était devenu le président du conseil d'administration à compter du mois de mai 1999, a violé l'article 93 de la loi du 24 juillet 1966 (article L. 225-22 du Code de commerce) ;
2 ) que c'est à celui qui soutient qu'il a été mis fin au contrat de travail par la nomination du salarié d'en rapporter la preuve ; qu'en retenant que M. X... de Heaulme n'apportait aucun élément contraire tant sur la subordination que sur ses fonctions techniques exercées à l'exception de sa rémunération, et en en déduisant que l'intéressé avait perdu sa qualité de salarié à compter de sa désignation en mai 1999 comme président du conseil d'administration de la société Quai d'Orsay, la cour d'appel a renversé le fardeau de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;
Mais attendu que si, en l'absence de novation, le contrat de travail d'un salarié qui devient mandataire social et qui cesse alors d'exercer des fonctions techniques dans un état de subordination à l'égard de la société est suspendu pendant la durée de ce mandat, il résulte des constatations des juges du fond, qui n'ont pas inversé la charge de la preuve, qu'après avoir été nommé président du conseil d'administration de la société dont il était jusqu'alors le salarié, M. X... de Heaulme avait cessé d'être subordonné à la société, du fait des pouvoirs dont il était investi, et d'exercer des fonctions techniques ;
qu'elle en a exactement déduit qu'il ne pouvait invoquer une créance de salaires, pour une période correspondant à la durée de son mandat social ;
Que le moyen n'est pas fondé en ses deux dernières branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.