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Décisions

Cass. 1re civ., 8 novembre 2017, n° 16-18.017

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Avocat :

SCP Hémery et Thomas-Raquin

Paris, du 16 oct. 2015

16 octobre 2015

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 octobre 2015), que M. X..., illustrateur d'un jeu de cinquante-sept cartes divinatoires dénommé " L'Oracle de la Triade ", et son éditeur, la société Editions du Gange, estimant que le jeu de cartes dénommé " L'Oracle de Babylone " et le livre qui lui est consacré sous le titre " Cours complet sur l'Oracle de Babylone ", reproduisaient leurs illustrations, ont assigné en contrefaçon M. Y..., auteur de celui-ci, et la société Quo Vadis diffusion, éditrice du jeu et de l'ouvrage ;

Attendu que M. X... et la société Les Editions du Gange font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que les oeuvres de l'esprit et leurs caractéristiques originales peuvent être désignées et décrites par référence, dans les conclusions, à des pièces précisément identifiées ; qu'en retenant que « les appelants ne proposent pas de décrire ni a fortiori de démontrer dans leurs dernières écritures devant la cour, pas plus qu'ils ne l'ont fait devant le tribunal, en quoi en l'espèce les différents éléments qui caractérisent les dessins et le jeu qu'ils revendiquent seraient originaux et traduiraient un parti pris esthétique et l'empreinte de la personnalité de l'auteur, en dehors de considération d'ordre général ou d'appréciations personnelles sur les activités et/ ou la teneur du travail de ce dernier » quand, pour décrire les caractéristiques originales du jeu « L'Oracle de la Triade » et des illustrations de ses cartes, Les Editions du Gange et M. X... se référaient expressément dans leurs conclusions d'appel à une nouvelle pièce n° 43 intitulée « Descriptif des caractéristiques originales des 57 cartes de " L'Oracle de la Triade " par Dominike X... », reprenant et détaillant une à une toutes les caractéristiques originales du jeu et des illustrations de ses cartes dont la protection était revendiquée, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en retenant que les appelants se seraient abstenus de toute description des caractéristiques originales du jeu et des cartes de celui-ci sur lesquels étaient revendiqués des droits d'auteur sans s'expliquer sur la nouvelle pièce n° 43 produite en cause d'appel dans laquelle M. X... procédait à un descriptif détaillé des caractéristiques originales des cinquante-sept cartes du jeu de « L'Oracle de la Triade » et à laquelle les appelants se référaient expressément dans leurs conclusions d'appel pour caractériser l'originalité des oeuvres revendiquées, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que les oeuvres de l'esprit et leurs caractéristiques originales peuvent être désignées et décrites par référence, dans les conclusions, à des pièces précisément identifiées ; qu'en retenant que « les appelants ne proposent pas de décrire ni a fortiori de démontrer dans leurs dernières écritures devant la cour, pas plus qu'ils ne l'ont fait devant le tribunal, en quoi en l'espèce les différents éléments qui caractérisent les dessins et le jeu qu'ils revendiquent seraient originaux et traduiraient un parti pris esthétique et l'empreinte de la personnalité de l'auteur, en dehors de considération d'ordre général ou d'appréciations personnelles sur les activités et/ ou la teneur du travail de ce dernier » quand, pour décrire les caractéristiques originales du jeu « L'Oracle de la Triade » et des illustrations de ses cartes, Les Editions du Gange et M. X... se référaient expressément dans leurs conclusions d'appel à une pièce n° 40 intitulée « Manuscrit dactylographié Le Symbolisme de l'Oracle de la Triade de Dominike X..., 1993 », reprenant et détaillant une à une toutes les caractéristiques originales du jeu et des illustrations de ses cartes dont la protection était revendiquée, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en retenant que les appelants se seraient abstenus de toute description des caractéristiques originales du jeu et des cartes de celui-ci sur lesquels étaient revendiqués des droits d'auteur sans s'expliquer sur la pièce n° 40 produite en cause d'appel dans laquelle M. X... procédait à un descriptif détaillé des caractéristiques originales des cinquante-sept cartes du jeu de « L'Oracle de la Triade » et à laquelle les appelants se référaient expressément dans leurs conclusions d'appel pour caractériser l'originalité des oeuvres revendiquées, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que les oeuvres de l'esprit et leurs caractéristiques originales peuvent être désignées et décrites par référence, dans les conclusions, à des pièces précisément identifiées ; qu'en l'espèce, pour décrire les caractéristiques originales du jeu « L'Oracle de la Triade » et des illustrations de ses cartes, Les Editions du Gange et M. X... se référaient expressément dans leurs conclusions d'appel à une pièce n° 4 intitulée « Livre L'Oracle de la Triade de Dominike X... (Editions du Gange, 1999) », expliquant les raisons qui l'ont amené à créer son jeu et à le concevoir suivant des caractéristiques originales ; qu'en retenant que, pour décrire les oeuvres revendiquées et leurs caractéristiques originales, Les Editions du Gange et M. X... « ne peuvent pas plus se référer utilement à un ouvrage du même auteur », la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

6°/ que le juge doit en toutes circonstances observer lui-même et faire observer le principe du contradictoire ; qu'en retenant que Les Editions du Gange et M. X... ne pouvaient pas se référer utilement à l'ouvrage de M. X... pour justifier des caractéristiques originales de son jeu et des illustrations des cartes, la cour d'appel, qui a relevé d'office ce moyen sans inviter les parties à s'en expliquer préalablement, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

7°/ que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; qu'il appartient aux juges du fond de rechercher si l'oeuvre revendiquée porte l'empreinte de la personnalité de son auteur et si elle est, en conséquence, protégeable par le droit d'auteur ; qu'en retenant, au contraire, « qu'il n'appartient pas à la cour d'examiner elle-même les divers éléments revendiqués en dehors de toute description par les appelants de chacun d'eux dans leurs écritures » et en s'abstenant, en conséquence, de rechercher si chacune des cartes de jeu et le jeu revendiqués étaient originaux, la cour d'appel n'a pas rempli son office en violation de l'article 12 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'il incombe à celui qui agit en contrefaçon de droits d'auteur d'identifier, dans ses écritures, les caractéristiques de l'oeuvre qui portent, selon lui, l'empreinte de la personnalité de son auteur et, partant, d'établir que l'oeuvre remplit les conditions requises pour être investie de la protection légale ;

Et attendu qu'ayant constaté que les écritures de la société Les Editions du Gange et de M. X... comportaient des considérations d ‘ ordre général sur la teneur du travail de ce dernier et ne précisaient pas en quoi les caractéristiques des dessins et du jeu revendiqués reflétaient un parti pris esthétique portant l'empreinte de la personnalité de M. X..., la cour d'appel a retenu, à bon droit, sans violer le principe de la contradiction, qu'il ne lui appartenait pas de dégager elle-même, à partir des diverses pièces versées aux débats, la combinaison des caractéristiques qui pourrait être éligible à la protection par le droit d'auteur ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.