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Décisions

ADLC, 15 avril 2016

AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE

relative à la prise de contrôle conjoint d’un fonds de commerce de détail à dominante alimentaire sous enseigne E. Leclerc par les époux Bernard aux côtés de l’Association des Centres Distributeurs E. Leclerc

ADLC

14 avril 2016

L’Autorité de la concurrence,

Vu le dossier de notification adressé complet au service des concentrations le 14 mars 2016 et relatif à la prise de contrôle conjoint d’un fonds de commerce de détail à dominante alimentaire sous enseigne E. Leclerc par les époux Bernard aux côtés de l’Association des Centres Distributeurs E. Leclerc, formalisée par un compromis de cession de fonds de commerce en date du 25 février 2016 ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence, et notamment ses articles L. 430-1 à L. 430-7 ;

Adopte la décision suivante :

I. Les entreprises concernées et l’opération

A. LES ENTREPRISES CONCERNÉES

1. LES ACQUÉREURS ET LA CIBLE

1. Les époux Bernard détiennent à hauteur de […] % la holding Soludis, qui détient elle-même, directement et indirectement la société Rixdis 2, en cours de constitution, et les sociétés Alcoba Distribution, Blotzdis et Saint Louis Brico (ci-après, « le groupe Bernard »), ces dernières exploitant trois hypermarchés sous enseignes E. Leclerc et Brico E. Leclerc situés à Blotzheim (68) et Saint-Louis (68).

2. L’Association des Centres Distributeurs E. Leclerc (ci-après, l’« ACDLec ») est l’organe stratégique du mouvement E. Leclerc, dont sont adhérentes toutes les personnes physiques qui dirigent les sociétés d’exploitation de magasins E. Leclerc. L’ACDLec détermine notamment les conditions d’agrément au mouvement E. Leclerc et signe les contrats d’enseigne dont doivent être titulaires les exploitants de magasins de commerce de détail E. Leclerc.

3. Le magasin cible est un supermarché, exploité sous enseigne E. Leclerc, situé à Rixheim (68). Il comprend un fonds de commerce de détail à dominante alimentaire, d’une surface de 969 m2, qui appartient à la société Rixdis, contrôlée par la holding Hypercoop et l’ACDLec.

2. LE CONTRÔLE DES ENTITÉS CONCERNÉES

4. Il est soutenu dans la notification de l’opération que l’ACDLec n’exerce aucun contrôle sur Soludis et n’exercera aucun contrôle sur le fonds de commerce cible après l’opération. Ce dernier serait donc exclusivement contrôlé par les époux Bernard et l’opération notifiée consisterait en la prise de contrôle exclusif du fonds de commerce cible par les époux Bernard, par l’intermédiaire de la holding Soludis et de la société Rixdis 2, créée à cet effet.

5. Néanmoins, à l’issue de l’opération, la société Rixdis 2, qui procédera à l’acquisition du fonds de commerce cible sera détenue par la holding Soludis, ces deux sociétés étant conjointement contrôlées par l’ACDLec et les époux Bernard. En effet, comme l’Autorité de la concurrence l’a relevé dans de précédentes décisions1, les obligations que l’ACDLec fait peser sur les sociétés d’exploitation de magasins E. Leclerc, telles que les sociétés Soludis et Rixdis 2, lui permettent d’exercer une influence déterminante sur celles-ci. Cette analyse de l’influence déterminante exercée par l’ACDLec est transposable à la présente opération au vu des différents documents contractuels liant Rixdis 2 et Soludis à l’ACDLec.

6. En premier lieu, l’ACDLec constitue une entreprise au sens des dispositions de l’article L. 430-1 du code de commerce dans la mesure où elle exerce une activité économique consistant notamment, d’après les dispositions de ses statuts2 , à (i) définir la politique d’enseigne, (ii) protéger et promouvoir le panonceau « Centre Distributeur E. Leclerc », (iii) contrôler soit pour elle-même, soit pour le compte de toute société commerciale groupant les centres distributeurs E. Leclerc, les conditions de la gestion de ces dernières ou des centres E. Leclerc qui en sont associés et (iv) contribuer à la création de tout organisme de nature à favoriser l’activité, la solidarité et la sécurité de ses adhérents.

7. En second lieu, la détention par l’ACDLec d’un contrôle conjoint sur les sociétés Rixdis 2 et Soludis à l’issue de l’opération, ressort d’un faisceau d’indices reposant notamment sur la possibilité pour l’ACDLec d’intervenir dans la nomination et la révocation du président de ces sociétés et des membres de leur conseil de parrainage, dans la politique commerciale du magasin détenu par la société d’exploitation et sur les cessions d’actions de ces dernières. La possibilité d’intervenir dans la nomination et la révocation du président des sociétés Soludis et Rixdis 2

8. L’ACDLec disposera d’un droit de veto sur la nomination et l’exercice des fonctions du président des sociétés Rixdis 2 et Soludis. Les statuts3 de ces sociétés prévoient qu’un « conseil de parrainage »4 nomme à la majorité simple des membres du conseil et révoque5 à l’unanimité, le président de la société, alors que ce dernier « assume […] la direction générale de la société »

6. Le conseil de parrainage « est investi du pouvoir de contrôler la direction de la société »7 et les décisions concernant plusieurs questions stratégiques (décisions relatives aux emprunts, investissements, sûretés, création de sociétés, décisions de prendre ou de céder toutes participations directes ou indirectes minoritaires dans toutes sociétés à l’exception de celles liées au mouvement E. Leclerc, décisions concernant toutes opérations concernant l’immobilier) ne peuvent être prises par le président que sur autorisation du conseil de parrainage8. En outre, ce dernier « peut exiger à tout moment au cours de la vie sociale que le Président soumette à son appréciation : les budgets de la société ; les documents de gestion prévisionnelle ; les situations intercalaires »9.

9. Il ressort de ces stipulations que l’ACDLec est en mesure d’exercer, à travers les conseils de parrainage des différentes sociétés du groupe Bernard, un contrôle sur ces dernières. Les membres des conseils de parrainage, outre les époux Bernard et la centrale d’achats des centres distributeurs E. Leclerc Scapalsace, sont majoritairement des personnes physiques ou morales qui gèrent des sociétés exploitant un centre E. Leclerc, et sont donc liés à l’ACDLec par des contrats de panonceau. Ils ont conclu une convention de parrainage10 avec les époux Bernard pour les sociétés Soludis, Alcoba Distribution, Blotzdis et Saint Louis Brico qui leur octroie le statut de « parrains ». Les parrains apportent ainsi leur cautionnement aux époux Bernard dans le cadre de ladite convention qui indique que, en contrepartie, le parrainé s’engage notamment « à appliquer de la manière la plus scrupuleuse qui soit toutes les directives qui ont été données par le Mouvement E. Leclerc » 11. En outre, la convention de parrainage ne prévoit pas que les époux Bernard auront une influence sur l’évolution de la composition de ces sociétés12. Si la société Rixdis 2 n’a pas encore fait l’objet d’un avenant à la convention de parrainage applicable pour les autres sociétés du groupe, elle a toutefois vocation à s’affilier au mouvement E. Leclerc. En effet, les associés de Rixdis 2 sont les mêmes personnes que les parrains figurant dans la convention de parrainage. En outre, le projet de statuts de Rixdis 2 mentionne une affiliation obligatoire de la société au mouvement E. Leclerc13, un conseil de parrainage composé d’au moins trois associés dirigeants de centres E. Leclerc14 ainsi qu’un droit obligatoire d’usage de la marque E. Leclerc15, sans quoi la société sera dissoute.

10. Plus généralement, seuls les membres de l’ACDLec (ou les sociétés d’exploitation qu’ils dirigent) peuvent exploiter un magasin sous enseigne E. Leclerc, adhérer au Galec ou à une société coopérative d’approvisionnement générale du mouvement E. Leclerc, ou être parrain d’un autre adhérent de l’ACDLec, ce statut supposant d’être titulaire d’un contrat de panonceau (ou d’enseigne) signé avec l’ACDLec16, octroyant le droit d’usage de l’enseigne E. Leclerc. Dans la mesure où l’ACDLec n’est pas tenue d’accorder ce droit d’usage de l’enseigne E. Leclerc, ni de justifier ses éventuels refus17 et où elle peut retirer ce droit d’usage de l’enseigne E. Leclerc en application des stipulations du contrat d’enseigne ou de panonceau qui lui laissent une très large marge d’appréciation18, l’ACDLec peut contrôler la désignation du président, mais aussi celle des membres des conseils de parrainage des sociétés Soludis et Rixdis 2.

L’intervention dans la politique commerciale des sociétés d’exploitation.

11. L’ACDLec19 impose, dans les contrats de panonceau, dans la charte des adhérents du mouvement E. Leclerc20 et dans des directives, diffusées par ses délégués régionaux qui s’assurent de leur bonne application21, deux séries d’obligations. Ces obligations limitent fortement l’autonomie des adhérents dans la conduite de leur politique commerciale. En l’espèce, ces obligations s’imposent à M. Bernard en tant que président de Soludis et Rixdis 2 ainsi que signataire, avec l’ACDLec, de contrats de panonceau22.

12. En premier lieu, l’association reçoit communication de tous documents nécessaires à l’appréciation de l’exploitation commerciale des magasins par leurs dirigeants. Les adhérents doivent ainsi adresser chaque année leur bilan et compte d’exploitation ainsi que, mensuellement, le chiffre d’affaires du mois précédent23.

13. En deuxième lieu, l’ACDLec impose également, dans les contrats de panonceau, des obligations lui conférant un rôle déterminant pour la stratégie commerciale des magasins. Ces contrats prévoient en effet notamment que les adhérents ne peuvent appliquer des marges supérieures à celles pratiquées pour les ventes en gros et que, dans tous les cas, les adhérents s’engagent « à ne jamais appliquer une marge supérieure à celles recommandées par l’ACDLec »24. Or, la fixation du taux de marge est l'élément essentiel qui conditionne la rentabilité commerciale d'une enseigne de la grande distribution. La charte des adhérents de l’ACDLec prévoit expressément que chaque adhérent est tenu de respecter la politique de prix du mouvement E. Leclerc qui constitue « un des éléments essentiels de l’appartenance à l’ACDLec. […] L’objectif d’indice moyen à atteindre pour assurer la compétitivité générale de l’enseigne est de […]. Tout adhérent doit tendre à l’objectif fixé et en tout état de cause avoir un indice exhaustif à l’OPUS inférieur à […]. Le non-respect de cette règle de prix entraîne la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire, un avertissement de l’ACDLec sanctionne tout dépassement, trois avertissements consécutifs pouvant entraîner la radiation de l’association »25. Il s’ensuit qu’en pratique, l’ACDLec est effectivement en mesure de corriger la politique commerciale des sociétés d’exploitation de magasins E. Leclerc.

14. De plus, les contrats de panonceau imposent aux adhérents des obligations encadrant précisément leur approvisionnement et leurs investissements26. Les sociétés sont également tenues de ne pas exploiter ou diriger toute autre entreprise commerciale27, alors même qu’elle aurait une activité analogue. Outre ces obligations imposées par l’ACDLec dans les contrats de panonceau, les membres de l’ACDLec sont tenus de respecter les obligations prévues par la charte des adhérents du mouvement E. Leclerc28 et par des directives déclinant la politique d’enseigne élaborée par le comité stratégique de l’ACDLec29, et diffusées par ses délégués régionaux30. Tout manquement à ces obligations est susceptible de justifier le retrait du droit d’usage de l’enseigne E. Leclerc31. La possibilité d’intervenir sur les cessions d’actions des sociétés d’exploitation

15. Les différentes dispositions statutaires ou stipulations contractuelles applicables rendent difficiles la cession d’actions de Soludis et Rixdis 2 à une personne étrangère au mouvement E. Leclerc.

16. S’agissant des cessions d’actions, plusieurs obligations prévues dans les statuts de Soludis et Rixdis 2 y font obstacle :

- toute cession totale ou partielle d’actions dont un associé est titulaire doit faire l’objet d’une « offre préalable de cession aux associés »32; et - si les autres associés n’ont pas manifesté leur volonté d’acquérir les actions dans un délai de deux ans après la présentation de l’offre préalable de cession, le cédant peut contracter avec un tiers, sous réserve de notifier la cession à chacun des associés, qui disposent alors d’un délai de 30 jours pour indiquer s’ils entendent exercer leur droit de préemption. A défaut de réponse dans ce délai, ils sont réputés avoir renoncé à acquérir les actions cédées33.

17. Au total, il ressort de l’ensemble de ce qui précède, et notamment de la possibilité pour l’ACDLec d’intervenir dans l’administration et la politique commerciale, ainsi que sur les cessions d’actions de Soludis et Rixdis 2, que l’ACDLec dispose de la possibilité d’exercer une influence déterminante sur celles-ci.

B. L’OPÉRATION

18. L’opération, formalisée par un compromis de cession de fonds de commerce en date du 25 février 2016, consiste en l’acquisition par la société Soludis, via la société Rixdis 2, du fonds de commerce de détail à dominante alimentaire exploitant un supermarché sous enseigne E. Leclerc à Rixheim (68). La société Rixdis 2, en cours de constitution et destinée à détenir le fonds de commerce cible de la présente opération, sera une société par action simplifiée dans le cadre de dispositions conformes aux statuts-types E. Leclerc décrits ci-dessus, adhérente de l’ACDLec et titulaire d’un contrat de panonceau E. Leclerc par l’intermédiaire de M. Bernard, son président. La centrale d’achat des centres distributeurs E. Leclerc Scapalsace et les sociétés d’exploitation Aldis, Bruyères Distribution, Chaumondis, Lure Distribution, Sodecco et Soladi détenant chacune une action au sein du capital de la société Rixdis 2, au titre du parrainage décrit dans les développements précédents, l’ACDLec sera en mesure d’exercer un contrôle conjoint sur la nouvelle société et le fonds de commerce cible.

19. En ce qu’elle se traduit par la prise de contrôle conjoint du magasin cible par les époux Bernard aux côtés de l’ACDLec, l’opération constitue une concentration au sens de l’article L. 430-1 du code de commerce.

20. Les entreprises concernées exploitent des magasins de commerce de détail et réalisent ensemble un chiffre d’affaires total hors taxes sur le plan mondial de plus de 75 millions d’euros (mouvement E. Leclerc : […] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 201434 ; groupe Bernard : […] d’euros pour l’exercice clos au 31 janvier 2015 ; le fonds de commerce cible : […] d’euros pour l’exercice clos le 31 mars 2015). Deux au moins de ces entreprises réalisent en France un chiffre d’affaires supérieur à 15 millions d’euros dans le secteur du commerce de détail (mouvement E. Leclerc : […] d’euros pour l’exercice clos le 31 décembre 201435 ; le groupe Bernard : […] d’euros pour l’exercice clos au 31 janvier 2015). Compte tenu de ces chiffres d’affaires, l’opération ne relève pas de la compétence de l’Union européenne. En revanche, les seuils de contrôle mentionnés au II de l’article L. 430-2 du code de commerce sont franchis. Cette opération est donc soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du code de commerce relatives aux concentrations économiques.

II. Délimitation des marchés pertinents

A. LES MARCHÉS AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT

1. MARCHÉS DE PRODUITS

21. En ce qui concerne les marchés de l’approvisionnement, la Commission européenne36 a retenu l’existence de marchés de dimension nationale par grands groupes de produits, délimitation suivie par les autorités nationales37.

22. Il n’y a pas lieu de remettre en cause cette délimitation à l’occasion de la présente opération.

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

23. Du point de vue géographique, la pratique décisionnelle constante des autorités de concurrence considère que les marchés de l'approvisionnement sont de dimension nationale38.

24. Il n’y a pas lieu de remettre en cause la pratique décisionnelle dans le cadre de la présente opération.

B. LES MARCHÉS AVAL DE LA DISTRIBUTION DE DÉTAIL A DOMINANTE ALIMENTAIRE

1. MARCHÉS DE PRODUITS

25. En ce qui concerne la vente au détail des biens de consommation courante, la pratique décisionnelle39 distingue six catégories de commerce de détail de biens de consommation courante, en utilisant plusieurs critères, notamment la taille des magasins, leurs techniques de vente, leur accessibilité, la nature du service rendu et l’ampleur des gammes de produits proposés : (i) les hypermarchés (magasins à dominante alimentaire d’une surface légale de vente supérieure à 2 500 m²), (ii) les supermarchés (entre 400 et 2 500 m²), (iii) le commerce spécialisé, (iv) le petit commerce de détail (moins de 400 m²), (v) les maxi-discompteurs, (vi) la vente par correspondance. La pratique décisionnelle précise toutefois que les seuils de surfaces doivent être utilisés avec précaution, et peuvent être adaptés au cas d’espèce, car des magasins dont la surface est située à proximité d’un seuil, soit en-dessous, soit au-dessus, peuvent se trouver en concurrence directe avec les magasins d’une autre catégorie.

26. Les autorités de concurrence considèrent que, si chaque catégorie de magasin conserve sa spécificité, il existe une concurrence asymétrique entre certaines de ces catégories. Pour la province, elles distinguent ainsi40 : (i) un marché comprenant uniquement les hypermarchés, et (ii) un marché comprenant les supermarchés et les formes de commerce équivalentes (hypermarchés, hard-discount et magasins populaires) hormis le petit commerce de détail (moins de 400 m²).

27. En l’espèce, le point de vente cible exploité par la société Rixdis 2 sous enseigne E. Leclerc est un supermarché d’une surface de vente de 969 m². L’opération sera donc analysée sur le marché des supermarchés et formes de commerce équivalentes.

2. MARCHÉS GÉOGRAPHIQUES

28. Les autorités de concurrence ont examiné les effets de concentrations dans le secteur de la distribution de détail à dominante alimentaire au niveau local, correspondant à la zone de chalandise associée à chaque magasin, et dont l’étendue est fonction du temps de transport pour le consommateur.

29. L’Autorité de la concurrence a souligné que, pour les magasins dont la superficie est supérieure à 400 m², les conditions de la concurrence s’appréciaient sur deux zones différentes :

- un premier marché où se rencontrent la demande des consommateurs d’une zone et l’offre des hypermarchés auxquels ils ont accès en moins de 30 minutes de déplacement en voiture et qui sont, de leur point de vue, substituables entre eux,

- et un second marché où se rencontrent la demande de consommateurs et l’offre des supermarchés et formes de commerce équivalentes situés à moins de 15 minutes de temps de déplacement en voiture. Ces dernières formes de commerce peuvent comprendre, outre les supermarchés, les hypermarchés situés à proximité des consommateurs et les magasins discompteurs41.

30. L’Autorité considère que l’analyse concurrentielle ne porte que sur le second marché lorsque le magasin cible est un supermarché, le premier marché n’étant pris en compte que lorsque le magasin cible est un hypermarché42.

31. L’Autorité précise toutefois de façon constante que ces délimitations sont susceptibles d’évoluer au cas par cas, en fonction des caractéristiques de la zone locale, puisque d’autres critères peuvent être pris en compte pour évaluer l’impact d’une concentration sur la situation de la concurrence sur les marchés de la distribution de détail, ce qui peut conduire à affiner, au cas d’espèce, les délimitations usuelles présentées ci-dessus.

32. En l’espèce, compte tenu des caractéristiques du magasin cible, l’analyse portera sur la zone comprenant le supermarché cible et les magasins concurrents situés à moins de 15 minutes de temps de déplacement en voiture.

III. Analyse concurrentielle

A. MARCHÉ AMONT DE L’APPROVISIONNEMENT

33. En ce qui concerne le marché amont de l’approvisionnement, l’opération ne concerne qu’un seul magasin dont le montant des achats totaux représente une part extrêmement marginal du marché de l’approvisionnement. La puissance d’achat du mouvement E. Leclerc n’est donc pas susceptible d’être renforcée, tous produits confondus comme par catégories de produits.

B. MARCHÉ AVAL DE LA DISTRIBUTION A DOMINATION ALIMENTAIRE

34. En ce qui concerne le marché aval de la distribution, le magasin cible est un supermarché exploité sous enseigne E. Leclerc, d’une surface de 969 m² et situé à Rixheim (68).

35. Sur le marché comprenant les supermarchés et formes de commerce équivalentes situés dans une zone de 15 minutes en voiture autour du magasin cible situé 4 rue Saint-Jean à Rixheim (68), ce dernier représente [0-5] % des surfaces de ventes, tandis que l’hypermarché de la même enseigne présent sur la zone en représente [5-10] %. Les parts de marché de l’enseigne E. Leclerc sont donc de [5-10] % sur la zone concernée. Les deux magasins feront face à la concurrence de cinq enseignes différentes : Carrefour ([20-30] %), Auchan ([10-20] %), Systeme U ([10-20] %), Intermarché ([5-10] %) et Lidl ([5-10] %).

36. Par conséquent, l’opération n’est pas de nature à porter atteinte à la concurrence tant sur le marché aval de la distribution à dominante alimentaire, que sur le marché amont de l’approvisionnement dans la zone de Rixheim (68).

DECIDE

Article unique : L’opération notifiée sous le numéro 16-044 est autorisée.

NOTES

1 Voir les décisions de l’Autorité de la concurrence n°12-DCC-125 du 27 août 2012 relative à la prise de contrôle conjoint de 28 magasins de commerce de détail à dominante alimentaire par l'Union des Coopérateurs d'Alsace et l'Association des Centres Distributeurs E.Leclerc, n°13-DCC-12 du 28 janvier 2013 relative à la prise de contrôle conjoint des sociétés Nobladis et Sodirev par le groupe Cornac et l'Association des Centres Distributeurs E.Leclerc, n°13-DCC-112 du 19 août 2013 relative à la prise de contrôle exclusive de la société Hypercoop par l'Association des Centres Distributeurs E.Leclerc, n°14-DCC-16 du 12 février 2014 relative à la prise de contrôle conjoint d’un hypermarché sous enseigne E.Leclerc par les sociétés Licehold, Lihold et l’Association des Centres Distributeurs E.Leclerc, n°14- DCC-144, relative à la prise de contrôle conjoint de la société Phalsdis par la société Holding Sarredis aux côtés de l’Association des Centres Distributeurs E.Leclerc, n°14-DCC-196 du 24 décembre 2014 relative à la prise de contrôle conjoint d’un magasin de commerce de détail à dominante alimentaire par la société Blanc Mesnil Distribution aux côtés de l’Association des Centres Distributeurs E.Leclerc et n°16-DCC-18 du 5 février 2016 relative à la prise de contrôle conjoint de la société Sodipi par l’Association des Centres Distributeurs E.Leclerc aux côtés des époux Mouton.

2 Voir les dispositions de l’article 1er des statuts de l’ACDLec.

3 Les projets de statuts de la société Rixdis 2, en cours de constitution, et les statuts de Soludis correspondentaux « statuts-types » des sociétés par actions simplifiées approuvées par l’ACDLec (charte des adhérents du mouvement E.Leclerc, page 20).

4 Articles 13.2 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis.

5 Article 13.9 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis.

6 Article 13.3 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis.

7 Article 16.2 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis.

8 Article 13.5 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis.

9 Article 16.3 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis.

10 Les parties notifiantes ont communiqué la convention de parrainage et ses avenants concernant les sociétés Soludis, Alcoba Distribution, Blotzdis et Saint Louis Brico, signée par les époux Bernard et leurs parrains.

11 Voir page 6.1 de la convention de parrainage concernant les sociétés Soludis, Alcoba Distribution et Blotzdissignée par les époux Bernard.

12 Voir page 4 de la convention de parrainage concernant les sociétés Soludis, Alcoba Distribution,Blotzdis et Saint Louis Brico signée par les époux Bernard.

13 Préambule du projet de statuts de la société Rixdis 2

14 Article 14.1 du projet de statuts de la société Rixdis 2.

15 Préambule du projet de statuts de la société Rixdis 2.

16 L’article 6 des statuts de l’ACDLec prévoit notamment que « l’adhésion à l’association comporte obligatoirement signature du contrat dont les termes ont été arrêtés par le conseil d’administration et qui définit les conditions de l’attribution du panonceau Centre distributeur Leclerc à l’adhérent ».

17 Les statuts de l’ACDLec ne mentionnent, à cet égard, que des conditions préalables à l’adhésion, sans que l’ACDLec soit pour autant tenue d’accorder le droit d’usage de l’enseigne E.Leclerc si ces conditions sont réunies. Il en est de même de la charte des adhérents du mouvement E.Leclerc, qui ne mentionne également que des conditions préalables à l’adhésion.

18 Les contrats de panonceau comportent à cet égard des dispositions très larges, conférant un pouvoir étendu de retrait du droit d’usage de l’enseigne à l’ACDLec, puisqu’ils prévoient que la résiliation du contrat de panonceau est possible en cas d’« infraction aux présentes [dispositions du contrat de panonceau] ou aux Statuts ou Règlements Intérieurs de l’Association des Centres Distributeurs Leclerc ou de la société SC Galec, comme encore au cas où [le dirigeant de la société bénéficiant du contrat d’enseigne] commettrait une faute professionnelle ou commerciale de nature à causer un préjudice, même simplement moral, aux Centres Distributeurs Leclerc »(paragraphe VIII des contrats de panonceau de M. Bernard).

19 Voir notamment le préambule des statuts de l’ACDLec, dont le préambule prévoit que l’ACDLec doit tout particulièrement « contrôler, soit directement, soit pour elle-même, soit pour le compte de toute société commerciale groupant les Centres Distributeurs Leclerc, les conditions de la gestion desdits centres et de sa régularité au regard des principes de la Vraie Distribution et des lois et usages du commerce ».

20 La charte des adhérents du mouvement E.Leclerc prévoit notamment les obligations suivantes incombant aux adhérents du mouvement E.Leclerc : l’obligation de parrainage et l’obligation d’adopter des statuts de SAS dont le modèle a été validé par l’ACDLec, l’obligation de respecter la politique sociale du mouvement E.Leclerc, la limitation du nombre de points de vente pouvant être exploités par un adhérent et l’obligation de respecter la politique de prix du mouvement E.Leclerc.

21 Voir les dispositions de l’article 3 du règlement intérieur de l’ACDLec.

22 M.Bernard et son épouse sont titulaires de contrats de panonceau mentionnant l’exploitation des sociétés Blotzdis, Alcoba Distribution et Saint Louis Brico conclus le 20 décembre 2011 et le 18 mars 2015. Si les contrats de panonceau existant ne mentionnent pas l’exploitation de Rixdis 2, il ne fait pas de doute, que, tel qu’évoqué au point 9 de la présente décision, la société Rixdis 2 a vocation à être affiliée au mouvement E.Leclerc et à figurer à l’avenir sur le contrat de panonceau.

23 Voir notamment les dispositions de l’article 6 des statuts de l’ACDLec ainsi que les dispositions du paragraphe III des contrats de panonceau E.Leclerc de M. Bernard.

24 Voir les dispositions du paragraphe III des contrats de panonceau E.Leclerc signés par M. Bernard.

25 Voir p. 17 de la charte des adhérents de l’ACDLec.

26 Voir les dispositions du paragraphe III des contrats de panonceau E.Leclerc signés par M. Bernard.

27 Voir les dispositions du paragraphe IV des contrats de panonceau E.Leclerc signés par M. Bernard.

28 Il s’agit notamment des obligations suivantes : obligation de parrainage et obligation d’adopter des statuts de SAS dont le modèle a été validé par l’ACDLec, obligation de respecter la politique sociale du mouvement E.Leclerc, limitation du nombre de points de vente pouvant être exploités par un adhérent et obligation de respecter la politique de prix du mouvement E.Leclerc.

29 Voir l’article 4 – « Elaboration de la politique d’enseigne » du règlement intérieur de l’ACDLec.

30 Voir les dispositions de l’article 3 – « Délégués régionaux » du règlement intérieur de l’ACDLec.

31 Voir en particulier les dispositions du paragraphe VIII des contrats de panonceau E.Leclerc signés par M. Bernard, ainsi que les dispositions de la page 17 de la charte des adhérents du mouvement E.Leclerc.

32 Voir les dispositions de l’article 12.2.4.1 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis

33 Voir les dispositions de l’article 12.2.4.2 du projet de statuts de Rixdis 2 et des statuts de Soludis

34 L’ACDLec exerçant un contrôle conjoint sur certains magasins à l’enseigne E.Leclerc, seul 50 % du chiffre d'affaires des magasins a été affecté à l’ACDLec aux fins du calcul du chiffre d'affaires, conformément aux dispositions des paragraphes 186 et 187 de la communication consolidée de la Commission.

35 L’ACDLec exerçant un contrôle conjoint sur certains magasins à l’enseigne E.Leclerc, seul 50 % du chiffre d'affaires des magasins a été affecté à l’ACDLec aux fins du calcul du chiffre d'affaires, conformément aux dispositions des paragraphes 186 et 187 de la communication consolidée de la Commission.

36 Voir par exemple les décisions de la Commission européenne M.1684, Carrefour / Promodès du 25 janvier 2000 ; et M.2115, Carrefour / GB, du 28 septembre 2000.

37 Voir notamment les décisions du ministre dans le secteur de la distribution de détail à dominante alimentaire : C2005-98 Carrefour/Penny Market du 10 novembre 2005, C2006-15 Carrefour/ Groupe Hamon du 14 avril 2006, C2007-172 relative à la création de l’entreprise commune Plamidis du 13 février 2008 et C2008-32 Carrefour/SAGC du 9 juillet 2008, ainsi que les décisions de l’Autorité de la concurrence n°11-DCC-45 du 18 mars 2011 relative à l’acquisition du contrôle exclusif du fonds de commerce de l’hypermarché Cora Desmarais par la société Sodex Desmarais, n°13-DCC-12 et n°13-DCC-112 précitées.

38 Voir notamment les décisions de la Commission COMP/M.1684 du 25 janvier 2000 et COMP/M.4096 du 4 mai 2006 précitées et les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 12-DCC-63 du 9 mai 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Guyenne et Gascogne SA par la société Carrefour SA et n°14-DCC-173 du 21 novembre 2014 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Dia France SAS par la société Carrefour France SAS.

39 Voir, par exemple, les décisions de l’Autorité de la concurrence n°12-DCC-63 du 9 mai 2012 précitée , n°13-DCC-90 du 11 juillet 2013 relative à la prise de contrôle exclusif de la société Monoprix par la société Casino Guichard-Perrachon, n°13-DCC-71 du 24 juin 2013 relative à la prise de contrôle exclusif du fonds de commerce de la société financière RSV par la société Carrefour et n°14-DCC-173 précitée.

40 Voir par exemple les décisions n°12-DCC-63, n°13-DCC-90 et n°14-DCC-173 précitées.

41 Voir les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 12-DCC-63, n°13-DCC-90 et n°14-DCC-173 précitées.

42 Voir la décision n°14-DCC-173 précitée.