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Décisions

Cass. soc., 1 février 2011, n° 10-20.953

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Collomp

Rapporteur :

Mme Morin

Avocat général :

M. Weissmann

Avocats :

Me Foussard, SCP Odent et Poulet

TI Paris 19e, du 13 juill. 2010

13 juillet 2010

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris 19e, 13 juillet 2010) que M. X... a été engagé, en avril 2003, en qualité de directeur administratif, financier et informatique de la société Azelis France SAS qui a fusionné le 31 décembre 2009 avec sa société mère, la société Azelis Holding SA, pour donner naissance à la société Azelis France ; que l'intéressé avait été nommé directeur général de la société Azelis Holding SA par résolution de l'assemblée générale du 23 septembre 2009 pour une durée d'un an, avec un préavis de démission de six mois ; qu'à la suite d'un différend sur la stratégie de la nouvelle société, M. X... a par lettre du 5 avril 2010 donné sa démission de son mandat de directeur général de la société ; qu'il a été désigné délégué syndical par la fédération CFTC-CMTE du secteur chimie, le 25 mai 2010 ; que la société Azelis France, qui avait engagé à son encontre une procédure de licenciement, avec mise à pied conservatoire, a contesté cette désignation en alléguant, d'une part, que la démission de l'intéressé de son mandat de directeur général n'avait pu prendre effet qu'à l'issue du préavis de six mois prévu statutairement de sorte qu'il avait toujours cette qualité lorsqu'il a été désigné délégué syndical et, d'autre part, que cette désignation était frauduleuse ;

Sur le premier moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Attendu que la société fait grief au jugement de valider la désignation de M. X... comme délégué syndical, alors, selon le moyen :

1°/ que si la démission du dirigeant produit en principe effet dès qu'elle a été portée à la connaissance de la société, les statuts peuvent soumettre ses effets au respect d'un délai de préavis ; qu'eu égard aux perturbations qu'est susceptible de provoquer la démission du dirigeant, et à la nécessité pour la société de se réorganiser, pour mettre en place un nouveau dirigeant, une durée de six mois, quelle que soit la durée du mandat, ne peut être regardée comme illicite, même si elle restreint la possibilité du dirigeant de se désolidariser de la direction de l'entreprise ; qu'en décidant le contraire, le juge du fond a violé les articles 6 et 1134 du code civil, L. 227-5, et L. 227-6 du code de commerce ;

2°/ qu'en s'abstenant de rechercher si un délai de préavis de six mois n'était pas justifié, indépendamment de la liberté du dirigeant, par l'impact de la démission sur le fonctionnement de la société et la nécessité de disposer d'un temps nécessaire pour se réorganiser, le régime du mandat devant être conçu en considération des besoins liés au bon fonctionnement de la société, le juge du fond a privé sa décision de base légale au regard des articles 6 et 1134 du code civil, L. 227-5 et L. 227-6 du code de commerce ;

3°/ qu'un contrat ne peut être rompu avant terme que sous réserve du respect d'un délai de préavis proportionné aux effets de la rupture anticipée ; que dès lors, à supposer que la stipulation des statuts, subordonnant la démission au respect d'un préavis de six mois, ait été illicite, le juge pouvait tout au plus, à titre de sanction, substituer un délai raisonnable à celui retenu par les statuts ; qu'en considérant qu'aucun préavis n'assortissait la démission, quand il pouvait tout au plus réduire le préavis à un délai raisonnable, le juge du fond a de nouveau violé les articles 6, 1134 et 1844-10 du code civil, ensemble les articles L. 235-1, L. 227-5 et L. 227-6 du code de commerce ;

4°/ que, subsidiairement, en ne répondant pas au moyen soulevé par la société Azelis France, tiré de ce qu'il résultait du procès-verbal du 23 septembre 2009 de l'associé unique, Azelis Holding France, portant désignation de M. X... sur le mandat social du directeur général que, compte tenu du terme fixé à ce mandat – à savoir la clôture des comptes sociaux au 30 juin 2010 –, la durée du préavis de la démission donné le 5 avril 2010 ne pouvait en réalité, au cas d'espèce, qu'être de trois mois et par suite d'une durée raisonnable, le juge du fond a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en application de l'article 2007 du code civil, la démission d'un dirigeant de société qui constitue un acte juridique unilatéral produit tous ses effets dès lors qu'elle a été portée à la connaissance de la société et que la méconnaissance de l'obligation statutaire de respecter un préavis peut seulement ouvrir droit à des dommages intérêts sauf pour le dirigeant démissionnaire à établir qu'il était dans l'impossibilité de continuer le mandat ;

D'où il suit que, par ce motif substitué, la décision du tribunal qui a constaté que M. X... avait notifié sa démission de son mandat de directeur général de la société le 5 avril 2010, avant sa désignation en qualité de délégué syndical le 25 mai 2010, se trouve légalement justifié ;

Et sur les deuxième et troisième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.