Cass. com., 12 janvier 1988, n° 85-12.556
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Baudoin
Rapporteur :
M. Peyrat
Avocat général :
M. Cochard
Avocats :
M. Boullez, SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, SCP de Chaisemartin
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué que la société Usinor a confié à la société Beliard Crughton et Cie (société Beliard) les études, les fournitures, le transport, le montage et les essais d'un réseau de distribution de gaz ; que la société Beliard a sous-traité l'exécution de certains lots à la société Mac Gregor Comarain et Cie (société Mac Gregor) ; qu'elle a cédé ses créances sur la société Usinor à différentes banques, parmi lesquelles le Crédit commercial de France ; que la société Mac Gregor, invoquant l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 a mis en demeure les syndics du règlement judiciaire de la société Beliard de lui verser une somme représentant le montant de ses travaux et a adressé copie de cette mise en demeure à la société Usinor, maître de l'ouvrage ; qu'à la requête de la société Usinor la somme que celle-ci restait devoir à la société Beliard au titre du marché a été consignée entre les mains d'un séquestre ; que la société Mac Gregor a assigné la société Usinor, la société Beliard et les banques cessionnaires de créances pour voir ordonner que le séquestre lui verse la somme représentant le montant de ses travaux ; que le Crédit commercial de France a contesté la recevabilité de l'action directe exercée par la société Mac Gregor à l'encontre de la société Usinor et a soutenu que celle-ci était une entreprise publique, au sens de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1975, qui n'était justiciable que de la procédure de paiement direct prévue au titre II de cette loi ;
Attendu que, pour déclarer recevable l'action intentée par la société Mac Gregor, la cour d'appel a relevé que la société Usinor n'était pas une société nationalisée et que, s'il était constant que l'Etat avait pris une participation de 90 % dans son capital, il n'en demeurait pas moins qu'elle conservait un pourcentage d'actionnaires privés suffisant pour que ceux-ci ne soient pas réduits à jouer un rôle purement passif au sein des organes délibérants qu'en tant que société commerciale de droit privé elle continuait d'être cotée en bourse, que rien n'établissait que ses règles de fonctionnement fussent exorbitantes du droit commun et qu'il s'agissait d'une société d'économie mixte dont le caractère public n'était pas évident ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs et dès lors que la proportion des capitaux publics par rapport aux capitaux privés dans le capital de la société Usinor donnait à l'Etat le contrôle effectif de celle-ci, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui résultaient de ses propres constatations et a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième et troisième branches du premier moyen, ni sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE l'arrêt rendu le 10 janvier 1985, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens