Cass. 3e civ., 30 mars 1994, n° 92-16.535
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 mars 1992), que, par deux marchés distincts, la société Peinture Normandie a été chargée par la société Wilhelem Ile-de-France d'exécuter, en sous-traitance, les travaux de peinture dans des immeubles construits respectivement pour le compte de l'Office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Paris (Ophlm) et de la société civile immobilière Jules Guesde ; que le premier chantier, pour lequel le sous-traitant bénéficiait du paiement direct, ayant pris du retard et donné lieu à des difficultés par suite de la non-transmission par l'entrepreneur principal au maître de l'ouvrage d'une situation de travaux restée impayée, le sous-traitant a mis en demeure l'entrepreneur principal de transmettre son décompte au maître de l'ouvrage ; qu'ayant résolu le second sous-traité pour non-commencement des travaux convenus, la société Wilhelem Ile-de-France a assigné la société Peinture Normandie pour faire constater la carence de cette société et la régularité de la résolution, et obtenir la mainlevée de la saisie-arrêt pratiquée par le sous-traitant entre les mains du maître de l'ouvrage, ainsi que la réparation du préjudice subi sur le premier marché et la compensation entre le solde restant dû par l'entrepreneur principal et le montant de condamnation réclamée contre le sous-traitant ; que ce dernier a conclu à la nullité du second sous-traité, faute de fourniture par l'entrepreneur principal de la caution bancaire exigée par l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975, et à la condamnation de l'entrepreneur principal au paiement des travaux exécutés et d'une indemnité de résiliation ;
Attendu que la société Peinture Normandie fait grief à l'arrêt d'ordonner à la société Wilhelem Ile-de-France de ne transmettre à l'Ophlm le décompte qu'elle lui avait adressé que pour le solde du prix des travaux à l'exclusion du montant des pénalités de retard, alors, selon le moyen, " qu'en retenant, pour réduire le décompte litigieux de 668 885,40 francs à 468 885,40 francs, que la présomption d'acceptation des pièces justificatives servant de base au paiement direct ne s'appliquerait qu'aux justificatifs des prestations sous-traitées et non pas aux pénalités incluses par le sous-traitant dans son envoi recommandé, la cour d'appel a ajouté au texte une condition qu'il ne contient pas et, partant, a violé l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975 " ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu que la présomption de l'article 8 de la loi du 31 décembre 1975 ne s'appliquait qu'aux pièces justificatives de l'exécution des prestations sous-traitées ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 ;
Attendu qu'à peine de nullité du sous-traité, les paiements de toutes les sommes dues par l'entrepreneur au sous-traitant, en application de ce sous-traité, sont garantis par une caution personnelle et solidaire obtenue par l'entrepreneur d'un établissement qualifié ;
Attendu que, pour rejeter le moyen tiré de la nullité du sous-traité concernant le chantier de Levallois-Perret opposée par le sous-traitant à la demande de l'entrepreneur principal, tendant à faire constater la résolution de ce sous-traité et à obtenir le paiement de dommages-intérêts, l'arrêt retient que l'entrepreneur n'est pas tenu de fournir caution avant le début des travaux et que le sous-traitant ne pouvait plus invoquer la nullité d'un contrat qu'il n'avait pas exécuté et qui était résolu avant qu'il ne puisse se prévaloir du défaut de caution ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a écarté le moyen tiré de la nullité du second sous-traité, a dit qu'il avait été résolu et a condamné la société Peinture Normandie à payer à ce titre des dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 26 mars 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.