Cass. 1re civ., 16 mars 2004, n° 99-12.015
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Lemontey
Rapporteur :
M. Gridel
Avocat général :
M. Sainte-Rose
Avocats :
SCP Richard, SCP Bachellier et Potier de la Varde
Donne acte à la société HLM de la Guadeloupe du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le Groupement d'assurances nationales ;
Attendu que la société Habitation à loyer modéré de la Guadeloupe (la société HLM), désireuse d'édifier un immeuble, a chargé l'architecte Rudy X... de l'élaboration des plans et de l'obtention du permis de construire, lequel fut refusé ; qu'ultérieurement, la commune ayant souhaité la reprise du projet, M. Y..., ancien directeur de la société HLM, agissant pour la société de construction REM, gérée par M. Z..., a obtenu de Mme A..., veuve X..., la remise des calques ; que M. B..., architecte de la société REM, les a copiés pour bâtir l'immeuble ; que la société HLM a été déboutée par l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 26 octobre 1998) de sa demande en condamnation in solidum de la société REM, de Mme X... et de MM. Z... et Y... d'avoir à lui payer la somme de 359 308,61 francs, montant des honoraires initialement versés par elle à Rudy X... ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société HLM fait grief à la cour d'appel, d'une part, de n'avoir pas recherché si Rudy X... et elle-même n'étaient pas convenus de céder à celle-là la propriété de l'oeuvre, dont le prix était inclus dans la somme de 358 308,61 francs, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 131-2 du Code de la propriété intellectuelle, et, d'autre part, d'avoir méconnu que celui qui a commandé une oeuvre de l'esprit est présumé à l'égard des tiers en avoir acquis le droit d'exploitation, violant ainsi l'article L. 113-1 du même Code ;
Mais attendu, d'abord, que le louage d'ouvrage n'emportant, aux termes de l'article L. 111-1, du Code de la propriété intellectuelle, aucune dérogation à la jouissance du droit de propriété intellectuelle de l'auteur, la preuve d'une cession de ses droits d'exploitation doit être établie par convention expresse et conclue dans les conditions de l'article L. 131-3 ; que la société HLM n'a pas démontré ni même allégué qu'en l'espèce, la rémunération convenue avait correspondu à un tel transfert, ni quelles en avaient été les limites arrêtées ; qu'ensuite, si une divulgation ou exploitation sous son propre nom font présumer la propriété de l'oeuvre, il n'en va pas de même de sa simple commande, l'arrêt relevant l'absence d'utilisation des plans par la société HLM ; d'où il suit que les griefs sont inopérants ;
Et sur les deux dernières branches du moyen :
Attendu que sont encore reprochées, par fausse application de l'article L. 111-1 du Code de la propriété intellectuelle, la méconnaissance de ce que les dispositions légales relatives à la preuve des contrats d'exploitation des droits patrimoniaux de l'auteur ne concernent que les rapports de celui-ci et de son contractant et l'abstention de rechercher si, en falsifiant les plans remis par Rudy X... à la société HLM et en les utilisant en vue d'un ouvrage identique à celui envisagé par elle et devant être implanté sur le même site, les défendeurs n'avaient pas commis une faute quasi-délictuelle lui causant le préjudice de mettre son projet à néant ;
Mais attendu qu'ayant relevé que Rudy X... avait conservé l'entière propriété des plans litigieux, ce dont il résultait que la société REM ne pouvait y prétendre en rien et que leur communication par la veuve ne lui créait aucun préjudice réparable, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.