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Décisions

Cass. crim., 13 février 1969, n° 68-90.076

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Cass. crim. n° 68-90.076

12 février 1969

SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 425 ET SUIVANTS DU CODE PENAL, DE LA LOI DU 11 MARS 1957, DES ARTICLES 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE POUR ACQUITTER LE PREVENU DU CHEF DE CONTREFACON EN MATIERE ARTISTIQUE, L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A REFUSE A DES DESSINS LA PROTECTION DE LA LOI, AUX MOTIFS QUE LE GENRE REPRESENTATIF DE L'HUMANISATION DES ANIMAUX NE PEUT FAIRE L'OBJET D'UNE CONTREFACON, QUE LE DESSINATEUR REVELE UN SOUCI PLUS COMMERCIAL QUE D'ORIGINALITE ET NE REPOND PAS AUX CONDITIONS DE LA LOI SUR LA PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE QUI EXIGE DES CREATIONS ORIGINALES TANT EN CE QUI CONCERNE L'IDEE SERVANT DE BASE QUE SA MISE EN OEUVRE PAR UN PROCEDE NOUVEAU;

ALORS QUE LA PROTECTION LEGALE EST ACCORDEE MEME A UN GENRE CONNU ET A DES PROCEDES DEJA UTILISES ET INDEPENDAMMENT DE TOUTE UTILISATION COMMERCIALE, DES LORS QUE L'OEUVRE TEMOIGNE D'UN TRAVAIL DE L'ESPRIT PERSONNEL A SON AUTEUR, D'UNE FORME PARTICULIERE EXPRIMANT LA PERSONNALITE DE CELUI-CI;

QU'EN RAISON DE SON ERREUR SUR LE SENS ET LE BUT DE LA LOI, L'ARRET ATTAQUE N'A PAS JUSTIFIE L'INFIRMATION DU JUGEMENT DE PREMIERE INSTANCE QUI AVAIT TRES JUSTEMENT CONSTATE QUE LES DESSINS LITIGIEUX TEMOIGNAIENT D'UNE ORIGINALITE PARTICULIERE LES DISTINGUANT DES OEUVRES DU MEME GENRE";

VU LESDITS ARTICLES;

ATTENDU QU'AUX TERMES DE L'ARTICLE 2 DE LA LOI DU 11 MARS 1957 CONCERNANT LA PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE, LES DISPOSITIONS DE CE TEXTE PROTEGENT LES DROITS DES AUTEURS SUR TOUTES LES OEUVRES DE L'ESPRIT, QUELS QU'EN SOIENT LE GENRE, LA FORME D'EXPRESSION, LE MERITE OU LA DESTINATION;

ATTENDU QUE X... A ETE CONDAMNE, PAR LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, POUR CONTREFACON DE DESSINS HUMORISTIQUES REPRODUITS SUR DES CARTES POSTALES;

QUE L'ARRET ATTAQUE ENONCE QUE LES PREMIERS JUGES ONT RELEVE, A JUSTE TITRE, LE COMPORTEMENT INDELICAT DU PREVENU, CE DERNIER AYANT EXIGE QUE LES ARTISTES CHARGES DE REALISER LES ILLUSTRATIONS IMITENT LES DESSINS DONT Y... DIT Z... EST L'AUTEUR, AFIN DE CREER UNE CONFUSION DANS L'ESPRIT DES ACHETEURS;

QU'EN OUTRE L'ARRET RAPPELLE, SANS LE DENIER, UN MOTIF DU JUGEMENT CONSTATANT QUE LES ANIMAUX DESSINES PAR Y... PRESENTENT UNE ORIGINALITE PARTICULIERE "PAR LEURS FORMES, PAR LEURS ATTITUDES ET PAR LES SITUATIONS, OU ILS EVOLUENT";

QUE, TOUTEFOIS, LA COUR D'APPEL A PRONONCE LA RELAXE DE X..., AUX MOTIFS QUE LE GENRE ADOPTE PAR Y..., CONSISTANT A REPRESENTER DES ANIMAUX QUI ONT LE COMPORTEMENT DES HUMAINS, "NE PEUT FAIRE L'OBJET D'UNE CONTREFACON", ET QUE CE DESSINATEUR A REVELE, "PAR LA BANALITE DES REFLEXIONS QU'IL PRETE AUX ANIMAUX ET PAR L'INDIGENCE DE SES LEGENDES, PLUS DE SOUCI COMMERCIAL QUE D'ORIGINALITE";

QUE, DES LORS, SON OEUVRE NE PEUT BENEFICIER DE LA PROTECTION PREVUE PAR LA LOI;

ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS LES JUGES D'APPEL ONT MECONNU LES DISPOSITIONS DU TEXTE DONT ILS DEVAIENT FAIRE APPLICATION;

QU'EN EFFET LES TERMES DE L'ARTICLE 2 PRECITE DE LA LOI DU 11 MARS 1957 NE PERMETTAIENT PAS A LA COUR DE SE FONDER SUR LA FORME D'EXPRESSION CHOISIE PAR L'AUTEUR DE CES DESSINS, NI SUR LA VALEUR ARTISTIQUE OU SUR LA DESTINATION "COMMERCIALE" DE SON OEUVRE POUR LUI REFUSER LE BENEFICE DE LA PROTECTION ACCORDEE PAR L'ARTICLE 1ER DE CETTE LOI A TOUTE CREATION DE L'ESPRIT;

QU'IL S'ENSUIT QU'EN DECIDANT COMME IL L'A FAIT L'ARRET A VIOLE LES TEXTES VISES AU MOYEN;

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE L'ARRET ATTAQUE DE LA COUR D'APPEL DE PARIS, EN DATE DU 7 DECEMBRE 1967, MAIS SEULEMENT EN CE QU'IL A STATUE SUR L'ACTION CIVILE, TOUTES AUTRES DISPOSITIONS DUDIT ARRET ETANT EXPRESSEMENT MAINTENUES, ET, POUR QU'IL SOIT STATUE A NOUVEAU, CONFORMEMENT A LA LOI, DANS LES LIMITES DE LA CASSATION AINSI PRONONCEE : RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL D'AMIENS