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Décisions

Cass. com., 12 février 1991, n° 89-16.669

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Defontaine

Rapporteur :

M. Grimaldi

Avocat général :

M. Patin

Avocats :

Me Spinosi, SCP Vier et Barthélemy

Aix-en-Provence, du 21 mars 1989

21 mars 1989

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, et sur le second moyen, réunis :

Attendu, selon l'arrêt déféré (Aix-en-Provence, 21 mars 1989), que la société Travaux, bâtiments et entretien (l'entrepreneur principal), titulaire d'un marché de travaux conclu avec la société L'Huilerie l'abeille (le maître de l'ouvrage), a sous-traité deux des lots de ce marché à la société Compagnie générale de travaux hydrauliques (SADE) le 28 avril 1986 ; que les 2 et 16 mai 1986, elle a, en application de la loi du 2 janvier 1981, cédé à la société Crédit du Nord (la banque) les créances qu'elle détenait contre le maître de l'ouvrage pour les deux lots sous-traités ; que la banque a notifié ces cessions au maître de l'ouvrage, respectivement les 6 et 15 mai 1986 ; que le 5 juin 1986, l'entrepreneur principal a été déclaré en redressement judiciaire ; que le 30 juin 1986, la SADE a mis l'entrepreneur principal en demeure de lui payer ses factures, et a adressé copie de cette lettre au maître de l'ouvrage, en vue d'exercer contre ce dernier l'action directe ;

Attendu que la banque reproche à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui a déclaré son opposition à paiement inopposable à la SADE et, par suite, condamné le maître de l'ouvrage à payer le sous-traitant, alors, selon le pourvoi, que, de première part, l'exigence du cautionnement personnel et solidaire est prévue à peine de nullité du sous-traité ; que l'arrêt, qui constate l'absence de cautionnement personnel et solidaire et fait droit néanmoins à l'action directe du sous-traitant, a omis de tirer les conséquences légales qui s'imposaient de ses propres constatations, en violation de l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 ; alors, de deuxième part, que la convention d'escompte de créances professionnelles du 20 mai 1985 avait expressément exclu de son champ d'application les créances correspondant à des travaux sous-traités ; que, par suite, l'exigence de l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 était sans objet à l'égard de la banque et n'avait pas à être respectée par cette dernière ; qu'en décidant le contraire l'arrêt, qui a refusé de donner effet à la convention du 20 mai 1985, a violé l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975 et les articles 1134 et 1165 du Code civil ; alors, de troisième part, que l'arrêt, qui a relevé que non seulement le Crédit du Nord était de bonne foi, mais encore qu'il avait pris la précaution d'obtenir dans la convention du 20 mai 1985 l'engagement du cédant de s'abstenir de lui céder des créances ayant fait l'objet de prestations sous-traitées, et a cependant refusé de donner effet à la croyance légitime de la banque dans le caractère régulier de la cession de créances professionnelles, en déclarant inopposable à la société SADE cette cession opérée en fraude des droits de la banque, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'imposaient de ses propres constatations au regard de l'article 13-1 de la loi du 31 décembre 1975 ; et alors, enfin, qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il y était d'ailleurs invité par les conclusions d'appel du Crédit du Nord, si au moment de la conclusion du contrat l'entrepreneur principal avait fait accepter son sous-traitant SADE et agréer les conditions de paiement du contrat de sous-traitance par

la société Huilerie l'abeille, l'arrêt a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1975 ;

Mais attendu, en premier lieu, que si, selon les articles 3 et 14 de la loi du 31 décembre 1975, il appartient à l'entrepreneur principal de faire accepter chaque sous-traitant par le maître de l'ouvrage et d'obtenir une caution personnelle et solidaire pour garantir le paiement de toutes les sommes dues par lui au sous-traitant, la violation de ces dispositions ne peut être invoquée ni par l'entrepreneur principal, ni par les créanciers de cet entrepreneur qui n'ont pas plus de droits que lui ;

Attendu, en second lieu, qu'après avoir constaté que " les créances cédées se rapportent aux travaux sous-traités à la SADE ", l'arrêt retient que " les cessions litigieuses sont donc intervenues en violation des dispositions de l'article 13-1 de la loi du 31 décembre 1975 puisqu'il n'est pas allégué qu'elles ont été opérées avec fourniture préalable et par écrit du cautionnement solidaire visé à l'article 14 de cette loi " ; que la cour d'appel en a exactement déduit, peu important l'existence d'une convention d'escompte liant l'entrepreneur principal à la banque et l'absence de faute de cette dernière, qu'elles doivent, " pour cette seule raison ", être déclarées inopposables à la SADE ;

D'où il suit que les moyens sont, l'un et l'autre, sans fondement ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.