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Décisions

CA Paris, 4e ch. A, 18 octobre 2006, n° D20060093

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Modascoop (SARL)

Défendeur :

Vivarte (SA), Créations Rivers (SA)

CA Paris n° D20060093

17 octobre 2006

Vu l'appel interjeté, le 13 juillet 2005, par la société MODASCOOP d'un jugement rendu, le 13 mai 2005, par le tribunal de commerce de Bobigny qui :

- a rejeté sa demande de nullité du procès-verbal du 4 février 2003, de l'enregistrement des modèles FUN et FRESH et dit qu'elle s'est livrée à des actes de contrefaçon et de concurrence loyale à l'encontre de la société VIVARTE,

- lui a fait interdiction de détenir et de vendre les produits contrefaits sous astreinte de 100 euros par paire de chaussure dont la détention ou la vente aura été constatée postérieurement à la signification du jugement, cette astreinte étant provisoire,

- a ordonné la confiscation et la remise à la société VIVARTE de tous les modèles contrefaisants détenus par l'appelante au jour du jugement,

- l'a condamnée à payer à la société VIVARTE la somme de 30.000 euros au titre du préjudice de contrefaçon, la société VIVARTE étant déboutée du surplus de ses demandes,

- l'a condamnée à payer à la société CREATION RIVERS la somme de 30.000 euros au titre du préjudice de concurrence déloyale, déboutant du surplus de ses demandes,

- a débouté les parties de leur demande de publication du jugement dans la presse,

- a ordonné l'exécution provisoire sans constitution de garantie,

- l'a condamnée à payer aux sociétés VIVARTE et CREATIONS RIVERS la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 7 juin 2006, aux termes desquelles la société MODASCOOP, poursuivant l'infirmation du jugement déféré, demande à la Cour de :

- déclarer nul le procès-verbal de constat du 4 février 2003 et non probant le procès- verbal de constat du 8 avril 2004,

- déclarer la société VIVARTE irrecevable en son action en contrefaçon sur le fondement des droits de modèle ou des droits d'auteur à défaut de preuve d'être titulaire des droits revendiqués,

- dire que la société VIVARTE et la société CREATION RIVERS n'apportent pas la preuve des faits allégués et les débouter de l'intégralité de leurs prétentions,

- déclarer nul le modèle de chaussure n° 014696 du 8 août 2001 et le modèle de semelle de chaussures n° 014696 du 8 août 2001,

- à titre subsidiaire,

- dire que le modèle querellé n'est pas la contrefaçon du modèle de chaussure et du modèle de semelle opposés et débouter la société VIVARTE de l'intégralité de ses prétentions,

- dire que les modèles en cause ne sont pas protégés par le droit d'auteur et, en conséquence, débouter la société VIVARTE de l'ensemble de ses prétentions fondées sur la contrefaçon de ces deux modèles,

- dire que la société CREATION RIVERS n'apporte pas la preuve de faits de concurrence déloyale distincts des faits de contrefaçon, par ailleurs allégués et la débouter, en conséquence, de l'intégralité de ses prétentions,

- à titre plus subsidiaire,

- juger qu'il n'est pas justifié du préjudice allégué et ne retenir par impossible qu'une condamnation à dommages-intérêts purement symbolique,

- condamner la société VIVARTE et la société CREATION RIVERS à lui payer une indemnité de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'en tous les dépens de première instance et d'appel ;

Vu les ultimes conclusions utiles, en date du 27 mars 2006, par lesquelles la société VIVARTE et la société CREATION RIVERS, poursuivant la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société MODASCOOP de ses exceptions de procédure et fins de non-recevoir, et en ce qu'il a retenu que la société MODASCOOP s'est rendue coupable de contrefaçon au préjudice de la société VIVARTE et de concurrence déloyale au préjudice de la société CREATION RIVERS, demandent, par voie d'appel incident, à la Cour de :

- condamner la société MODASCOOP, en réparation du préjudice qu'elle a causé à la société VIVARTE par la contrefaçon de modèles dont elle s'est rendue coupable à son égard, au paiement d'une indemnité de 100.000 euros,

- condamner la société MODASCOOP, en réparation du préjudice qu'elle a causé à la société CREATION RIVERS par la concurrence déloyale dont elle s'est rendue coupable à son égard, au paiement de la somme de 150.000 euros à titre provisionnel,

- faire injonction à la société MODASCOOP de produire, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, sous la forme de documents certifiés par son commissaire aux comptes, l'ensemble des bons de commande, l'état des stocks, les factures de revente, les bons de livraison concernant les produits contrefaisants (portant notamment les références 4021 et 1331),

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans cinq journaux ou périodiques, aux frais de la société MODASCOOP, et au choix de la société VIVARTE et de la société CREATION RIVERS et ce, au besoin à titre de complément de dommages-intérêts, le coût de chaque insertion ne devant pas dépasser 5.000 euros HT,

- condamner la société MODASCOOP à leur payer la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;

I - Sur la procédure :

Considérant que, par conclusions de procédure en date du 5 septembre 2006, la société MODASCOOP demande que soient rejetées comme tardives les conclusions signifiées le 1(er) septembre 2006 par la société intimée, ainsi que les pièces communiquées le même jour ;

Considérant, en droit, qu'il résulte de la combinaison des articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile que le respect du principe de la contradiction impose que, pour pouvoir assurer la loyauté des débats, les parties se fassent connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense ;

Considérant, en l'espèce, que les sociétés intimées ont, le 1(er) septembre 2006, répliqué aux écritures de l'appelante, signifiées le 7 juin 2006, soit trois jours avant que ne soit prononcée l'ordonnance de clôture, ne mettant pas ainsi à même la société appelante d'y répliquer, alors qu'il lui était loisible de signifier ses conclusions à une date permettant à la partie adverse d'y répliquer utilement, d'autant qu'elles versent aux débats de nouvelles pièces, dont certaines ont plus de deux ans ;

Qu'en agissant ainsi la société VIVARTE et la société CREATION RIVERS ont manqué à leur obligation de loyauté dans la conduite de la procédure et ont porté atteinte aux droits de la défense en faisant échec au principe de la contradiction ;

Qu'il s'ensuit que doivent être rejetées des débats les conclusions signifiées le 1(er) septembre 2006 et les pièces 33 à 41 communiquées le même jour ;

II - Sur le fond :

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il suffit de rappeler que :

- la société VIVARTE est titulaire :

- d'un modèle de chaussure dénommé FUN, déposé le 8 août 2001, enregistré sous le n° 01 4696 et publié, le 27 novembre 2002, au BOPI sous les n° 684 418 et 684 211,

- d'un modèle de semelle dénommé FRESH, déposé le 8 août 2001, enregistré sous le n° 01 4697 et publié, le 4 janvier 2002, au BOPI sous les n° 649 082 et 649 083,

- la société CREATION RIVERS, filiale de la société VIVARTE, exploite, en vertu d'un contrat de licence, la marque PATAUGAS concernant des chaussures composées notamment de la semelle FRESH et commercialise également le modèle FUN comportant aussi ce modèle de semelle,

- à la fin de l'année 2002, à l'occasion de la présentation des collections Printemps/Eté 2003, la société CREATION RIVERS a eu la surprise de constater que la société MODASCOOP offrait à la vente des chaussures constituant, selon elle, l'imitation du modèle FUN,

- le 4 février 2003, elle a fait procéder, après autorisation du président du tribunal de commerce de Bobigny, à un constat d'huissier de justice dans les locaux de la société MODASCOOP,

- ayant par ailleurs constaté la contrefaçon, toujours selon les intimées, de son modèle de semelle FRESH par la société MODASCOOP, elles ont fait procéder, le 8 avril 2004, à un constat d'achat, dans un magasin à l'enseigne VICTOR'S à Chateauroux, d'une paire de chaussures référencée AMAZONE,

- c'est dans ces circonstances, que la société VIVARTE et la société CREATION RIVERS ont engagé la présente procédure en contrefaçon et concurrence déloyale à l'encontre de la société MODASCOOP ;

1) Sur la titularité des droits de la société VIVARTE sur les modèles litigieux :

Considérant que la société MODASCOOP soutient que la société VIVARTE ne serait pas recevable en son action dès lors qu'elle n'établirait pas la titularité de ses droits sur les modèles litigieux ;

Mais, considérant que, d'une part, elle justifie du dépôt, sous son nom, de ces modèles auprès de l'INPI et que, d'autre part, selon l'article L. 113-1 du Code de la propriété intellectuelle, la qualité d'auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée, et que, en l'absence de revendication du ou des auteurs, l'exploitation de l'oeuvre par une personne morale sous son nom fait présumer que cette personne est titulaire, sur l'oeuvre, du droit de propriété intellectuelle de l'auteur ;

Et que, contrairement à l'argumentation de la société appelante, l'attestation de la styliste de la société VIVARTE ne met pas en cause la validité du dépôt des modèles litigieux et ne détruit pas la présomption prévue au texte précité ;

Qu'il s'ensuit que ce moyen qui n'est pas fondé sera rejeté et l'action en contrefaçon de la société VIVARTE déclarée recevable, de sorte que le jugement déféré sera confirmé ;

A) Sur la validité des constats :

Considérant que la société MODASCOOP soutient, en premier lieu, que le procès-verbal d'huissier de justice, dressé le 4 février 2003, serait nul ; qu'elle fait valoir à cette fin, d'abord, que l'autorisation donnée, sur le fondement de l'article 145 du nouveau Code de procédure civile, par le président du tribunal de commerce, l'aurait été en violation des dispositions de l'article 146 du nouveau Code de procédure civile, dès lors que la requérante a engagé à l'aveuglette une recherche de preuve sans disposer du moindre indice d'une faute de son préjudice, de sorte que la mesure autorisée aurait visé à suppléer la carence des sociétés appelantes ;

Mais considérant que, d'une part, les sociétés intimées justifient que, contrairement aux allégations de la société MODASCOOP, leur requête était accompagnée de pièces justificatives et que, d'autre part, il lui appartenait, si elle contestait le bien-fondé de la mesure ordonnée, de saisir, en application des dispositions de l'article 496, al 2, du Code précité, le juge ayant rendu l'ordonnance critiquée pour en demander la rétractation ;

Considérant que, en second lieu, la société MODASCOOP conteste la valeur probante du procès-verbal de constat d'achat, établi le 8 avril 2004, motif pris que le constat critiqué ne mentionne pas que Christian C, salarié de la société LA HALLE qui dépend du groupe VIVARTE, serait rentré dans le magasin exploité sous l'enseigne VICTOR'S pour acquérir les modèles argués de contrefaçon, les mains vides ; que, en outre, l'huissier de justice n'a pas personnellement constaté la présence du produit dans le magasin ;

Mais considérant qu'il est justifié par la production du ticket de caisse, émis par le magasin VICTOR'S de Chateauroux le 8 avril 2004, date du constat, de la réalité de l'achat d'une paire de chaussures sous la référence 4021 BEIGE, dont il est, par ailleurs, établi qu'elle correspond précisément à la référence et à la couleur du modèle de la société MODASCOOP, argué de contrefaçon ;

Qu'il s'ensuit que ces moyens qui ne sont pas fondés, seront rejetés et le jugement déféré confirmé ;

B) Sur la contrefaçon :

Considérant que la société VIVARTE invoque, au soutien de son action en contrefaçon, la protection instituée par les Livres I, III et IV du Code de la propriété intellectuelle ;

Considérant que, s'agissant du modèle de chaussures FUN, la société VIVARTE le caractérise de la manière suivante :

- une semelle en caoutchouc beige ;

- une tige tricolore, dont les deux côtés s'étendent de part et d'autre de leur ligne de jonction droite, orientée selon l'axe longitudinal de la chaussure et soulignée d'une double surpiqûre apparente,

- la présence sur le pourtour supérieur de la trépointe, de surpiqures de couleur crème,

- la présence d'un contrefort souple au niveau du talon pouvant être rabattu à plat ;

Considérant que, pour s'opposer à l'action en contrefaçon engagée à son encontre, la société MODASCOOP conteste, d'abord, la validité du modèle dont la société VIVARTE est propriétaire, en invoquant leur défaut de nouveauté et d'originalité et en soutenant que ce modèle s'inscrirait dans un genre ni appropriable, ni protégeable ;

Mais considérant que, en premier lieu, la société VIVARTE ne revendique pas la protection d'un genre mais d'un modèle propre caractérisé par la combinaison des éléments précédemment rappelés ;

Considérant que, en second lieu, les pièces produites par la société appelante ne sont pas de nature à justifier l'existence, par elle alléguée, d'antériorités de toutes pièces reproduisant les caractéristiques précitées ;

Qu'en effet, les modèles KIPLING, LACOSTE et CAMPORT, produits aux débats par la société MODASCOOP, s'ils présentent les uns ou les autres des éléments semblables à ceux caractérisant le modèle FUN de la société VIVARTE, force est de constater, qu'aucun de ces modèles ne l'antériorise à l'identique ; que, notamment, ces modèles présentent tous une semelle différente et sont dépourvus de contreforts arrières rabattables ;

Que c'est tout aussi vainement que la société appelante prétend qu'elle aurait mis sur le marché, en septembre 2001, un modèle, référence 4021, qui serait de nature à antérioriser le modèle litigieux dès lors que les pièces qu'elle produit sont toutes postérieures au 8 août 2001, date du dépôt du modèle FUN ; que, en outre, il résulte de l'examen comparatif auquel s'est livré la Cour, que les modèles opposés ne sont pas identiques ;

Considérant qu'il se déduit de ces éléments que le modèle FUN, en l'absence d'antériorités de toutes pièces, répond donc au critère de nouveauté et que, même à supposer que les éléments qui le composent, soient effectivement connus et que pris séparément ils appartiennent au fond commun de la babouche, en revanche, leur combinaison, telle que revendiquée par la société VIVARTE, confère à ce modèle, dès lors que l'appréciation portée par la Cour doit s'effectuer de manière globale, en fonction de l'aspect d'ensemble produit par la combinaison des divers éléments le caractérisant, et non par l'examen de chacun de ceux-ci pris individuellement, une physionomie propre qui traduit un parti pris esthétique qui porte l'empreinte de la personnalité de son auteur ;

Considérant qu'il s'ensuit que le modèle FUN bénéficie de la protection instituée tant par le livre I que le livre V du Code de la propriété intellectuelle, de sorte que le jugement déféré sera confirmé ;

Considérant que, s'agissant du modèle de semelle FRESH, la société VIVARTE le caractérise de la manière suivante :

- sous sa partie supérieure de faible épaisseur qui épouse le contour latéral de la trépointe de couleur brune, son talon comporte une paroi verticale qui, vers l'avant, se prolonge de chaque côté selon une courbe en retrait par rapport à la partie supérieure précitée de faible hauteur et orientée en direction de la plante du pied,

- sa partie avant présente, sous la partie supérieure précitée et venue également en retrait par rapport à la zone correspondant à la plante du pied, une surépaisseur creusée de trois stries visibles latéralement,

- sa partie inférieure montre, au niveau sensiblement de la plante du pied, une zone légèrement surélevée à partir de laquelle deux lignes courbes concaves rejoignent, d'une part, le talon et, d'autre part, la partie avant ;

Considérant que la société MODASCOOP conteste la validité de ce modèle en invoquant également un défaut de nouveauté et d'originalité ;

Mais considérant que les documents verses aux débats par la société appelante ne sauraient constituer une antériorité de toutes pièces ;

Qu'en effet, la semelle du modèle TRIPPEN, si elle présente certains des éléments caractéristiques de la semelle litigieuse, certains de ceux-ci n'y sont pas reproduits et, en tout cas, leurs combinaisons ne sont en rien similaires ; qu'il en est de même du modèle de semelle NOCERA, dérivé du modèle TRIPPEN ;

Considérant que, la Cour faisant expressément référence à la motivation précédemment développée quant aux conditions posées pour qualifier la nouveauté et l'originalité d'un modèle, il convient de retenir que le modèle FRESH de la société VIVARTE, étant nouveau et original, bénéficie de la protection instituée par les livres I et V du Code de la propriété intellectuelle ;

Que le jugement déféré sera donc confirmé ;

2) Sur la contrefaçon :

A) Du modèle FUN :

Considérant que, pour apprécier l'existence de la contrefaçon alléguée, il appartient à la Cour de procéder à la comparaison des modèles FUN de la société VIVARTE et AMAZONE, référencé 4331, de la société MODASCOOP ;

Considérant qu'il résulte de cette comparaison que, contrairement aux allégations de la société appelante, le modèle argué de contrefaçon reproduit à l'identique les éléments caractéristiques, constitutifs de la nouveauté et de l'originalité du modèle FUN, dans leur combinaison, à savoir la tige tricolore, l'empeigne bicolore (bleu ciel et blanc) dont les deux moitiés sont séparées par une surpiqûre couleur crème, la couture piquée couleur crème sur le pourtour de la chaussure et le contrefort souple au niveau du talon, pouvant être rabattu à plat ;

Que les différences invoquées par la société appelante, tenant principalement à la coupe de pied en V avec une fente, sont sans effet sur la contrefaçon à défaut d'affecter la même impression d'ensemble visuelle qui se dégage des modèles opposés et qui est de nature à engendrer un risque de confusion dans l'esprit d'un consommateur moyennement attentif qui ne les a pas en même temps sous les yeux ;

Qu'il s'ensuit que le modèle AMAZONE de la société MODASCOOP contrefait le modèle Fun de la société VIVARTE, de sorte que le jugement déféré sera confirmé ;

B) Du modèle FRESH :

Considérant qu'il résulte de la comparaison des modèles opposés, auquel la Cour s'est livrée, que les caractéristiques originales du modèle de semelle FRESH ne sont pas reprises dans le modèle de la société MODASCOOP, argué de contrefaçon ;

Qu'en effet, la société appelante relève avec pertinence que les modèles litigieux ne donnent pas la même impression visuelle du fait que, d'abord, la surépaisseur au talon du modèle argué de contrefaçon ne se présente pas sous la forme d'une goutte d'eau que, ensuite, la partie avant de la surépaisseur est d'un seul tenant et n'est pas séparée par une grande veine à partir du haut de la chaussure jusqu'au talon et que, enfin, la surépaisseur n'est pas creusée de stries larges en forme de dents ;

Qu'il s'ensuit que le risque de confusion allégué par la société VIVARTE n'étant pas démontré, le modèle de semelle de la société MODASCOOP ne contrefait pas le modèle FRESH, de sorte que le jugement déféré sera infirmé et la demande de la société intimée rejetée ;

3) Sur la concurrence déloyale et parasitaire :

Considérant que, contrairement au moyen de la société MODASCOOP selon lequel il ne saurait y avoir actes de concurrence déloyale faute de justifier de griefs distincts de ceux retenus au titre de la contrefaçon, ces actes constituent effectivement à l'égard de la société CREATION RIVERS, licenciée de la société VIVARTE, des actes de concurrence déloyale ;

Considérant que, s'agissant de la concurrence parasitaire, la société CREATION RIVERS fait valoir qu'elle a réalisé des investissements publicitaires considérables, de sorte que la société MODASCOOP se serait placée dans son sillage, non seulement en s'épargnant tout effort de création et de mise au point du modèle contrefaisant, mais aussi en bénéficiant des investissements réalisés ;

Mais considérant que les documents versés aux débats par la société VIVARTE concerne la gamme PATAUGAS, composée de multiples produits parmi lesquels le modèle FUN ne constitue qu'un élément ; qu'aucune précision n'est donnée quant aux investissements consacrés, tant au plan de la conception que des opérations publicitaires, à ce seul produit ;

Qu'il convient, en conséquence, de rejeter la demande de la société VIVARTE formée au titre de la concurrence parasitaire et d'infirmer, sur ce point, le jugement déféré ;

4) Sur les mesures réparatrices :

Considérant que la diffusion du modèle contrefaisant a, en banalisant la création originale, porté atteinte à la valeur patrimoniale du modèle en cause et, en outre, le caractère quasi-servile de la copie réalisée contribue indéniablement à avilir et à déprécier le modèle aux yeux de la clientèle qui ne pourra que s'en détourner ; qu'il résulte, en outre, des éléments de la procédure que plus de 6.000 paires de chaussures contrefaisantes ont été vendues ;

Que dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de faire droit à la demande de production sollicitée par les intimées, la Cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour fixer à la somme de 40.000 euros le montant des dommages et intérêts à allouer à la société VIVARTE au titre de la contrefaçon et à celle de 60.000 euros le montant des dommages et intérêt à allouer à la société CREATION RIVERS au titre de la concurrence déloyale ;

Considérant que, pour mettre fin aux actes illicites commis par la société appelante, il convient de confirmer les mesures d'interdiction et de confiscation ordonnées par le tribunal ;

Qu'il y a lieu, en outre, d'autoriser la mesure de publication sollicitée, suivant les modalités prévues au dispositif du présent arrêt ;

5) Sur les autres demandes :

Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que la société MODASCOOP ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ; que, en revanche, l'équité commande de la condamner, sur ce même fondement, à verser aux sociétés intimées une indemnité complémentaire de 10.000 euros ;

PAR CES MOTIFS

Rejette les conclusions signifiées le 1(er) septembre 2006 par les sociétés intimées et les pièces 33 à 41 communiquées le même jour,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne la contrefaçon et la concurrence déloyale et parasitaire relative au modèle de semelle FRESH, à la concurrence parasitaire du modèle FUN et aux dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau,

Dit que la société MODASCOOP n'a pas commis d'actes de contrefaçon et de concurrence déloyale et parasitaire du modèle de semelle FRESH,

Dit que la société MODASCOOP n'a pas commis d'actes de concurrence parasitaire du modèle de chaussure FUN,

Condamne la société MODASCOOP à payer à la société VIVARTE la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêt au titre de la contrefaçon du modèle de chaussure FUN,

Condamne la société MODASCOOP à payer à la société CREATION RIVERS la somme de 60.000 euros au titre des actes de concurrence déloyale du modèle de chaussure FUN,

Autorise la société VIVARTE et la société CREATION RIVERS à faire publier, en entier ou par extraits le présent arrêt, dans trois journaux ou revues de leur choix, aux frais de la société MODASCOOP, sans que le coût de chaque insertion n'excède la somme de 3.500 euros HT,

Condamne la société MODASCOOP à verser aux sociétés intimées une indemnité complémentaire de 10.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société MODASCOOP aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.