Cass. 1re civ., 5 mai 1987, n° 85-15.392
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Fabre
Rapporteur :
M. Barat
Avocat général :
M. Dontenwille
Avocats :
Me Boullez, SCP Nicolas, Massé-Dessen et Georges
Joint, en raison de la connexité les pourvois n°s 85-15.392 et 85-16.155 ; .
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que Marie A..., est décédée le 9 juin 1977, laissant M. Gérard Y..., son second mari commun en biens légalement et donataire de la plus forte quotité disponible et les trois enfants issus de son premier mariage, Francis, Paulette et Camille X... ; que par acte notarié du 20 juillet 1977, M. Y... a déclaré opter pour que la donation s'exécute pour un quart en propriété et trois quarts en usufruit et que cette déclaration a été acceptée par les consorts X... ; qu'il dépend de l'indivision, notamment deux immeubles d'habitation sis à Toulouse, l'un rue des Cinq Clous appartenant en propre à la de cujus et l'autre rue du Pont-Guilhéméry, faisant partie de la communauté des époux Z... ; que pour parvenir au partage en nature de ces immeubles, l'arrêt attaqué a ordonné une mesure d'instruction pour procéder à la division verticale de l'immeuble de la rue du Pont-Guilhéméry, établir l'état descriptif de division et proposer un règlement de copropriété ; que la même décision a dit, en outre, que M. Y... ne serait pas tenu de rapporter à la masse successorale les fruits qu'il a perçus ou percevra ;
Sur le second moyen, pris en ses diverses branches du pourvoi n° 85-16.155 :
Attendu que M. Francis X... reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que M. Y... ne serait pas tenu de rapporter à la masse successorale les fruits qu'il a perçus ou percevra, alors que, d'une part, les fruits et revenus des biens indivis accroissent à l'indivision sauf l'exception prévue par l'article 1005 du Code civil en la seule faveur du légataire universel, alors que, d'autre part, le conjoint survivant bénéficiaire d'une donation entre époux de la plus large quotité disponible n'est pas, selon le moyen, un légataire universel ayant vocation éventuelle à recueillir l'intégralité de la succession, alors que, de troisième part, la déclaration d'option du conjoint survivant, même acceptée par les cohéritiers réservataires, ne pouvait être assimilée à la demande en justice tendant à la délivrance du legs à titre universel de la quotité disponible et alors qu'enfin, M. Y... n'ayant nullement prétendu être légataire universel ni invoqué l'article 1005 du Code civil, la cour d'appel aurait statué hors des limites du débat telles que fixées par les conclusions des parties et violé le principe de la contradiction en retenant d'office le moyen tiré du texte précité, sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations ;
Mais attendu, d'une part, que le donataire de l'universalité des biens à venir est assimilé à un légataire universel et que la donation ou le legs de la quotité disponible est une donation ou un legs universel ; qu'il s'ensuit que M. Y..., conjoint survivant, gratifié de la plus large quotité disponible entre époux et ayant opté pour que cette libéralité s'exécute pour un quart en propriété et pour trois quarts en usufruit, a vocation à recueillir les fruits et revenus de la totalité des biens composant la succession, en application de l'article 1005 du Code civil ; que M. Y... avait demandé implicitement le bénéfice de ce texte sur lequel les autres parties étaient en mesure de s'expliquer sans que les juges du fond soient tenus de les inviter à le faire ;
Et attendu, d'autre part, que la demande en délivrance de legs n'étant soumise à aucune forme particulière, c'est à bon droit que la cour d'appel a décidé que la déclaration d'option, souscrite dans l'année du décès et acceptée par les héritiers réservataires, s'analysait en une demande en délivrance du legs et en produisait tous les effets, donnant à M. Y... le droit de recueillir les fruits et revenus des biens légués à compter du jour du décès ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
Le rejette ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi N° 85-15.392 et sur le premier moyen du pourvoi n° 85-16.155, réunis :
Vu les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer seulement sur ce qui est demandé ;
Attendu que M. Y... sollicitait l'attribution préférentielle de l'immeuble de la rue du Pont-Guilhéméry en sa totalité et que les consorts X... en demandaient la licitation ; qu'en ordonnant d'office la division de cet immeuble sous un régime de copropriété alors que cette modalité de partage n'était sollicitée par aucune des parties, la cour d'appel a statué sur ce qui n'était pas demandé et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné la division de l'immeuble de la rue du Pont-Guilheméry à Toulouse avec institution d'un régime de copropriété, l'arrêt rendu, le 17 avril 1985, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.