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Décisions

Cass. 3e civ., 4 février 2004, n° 02-19.147

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

Mme Lardet

Avocat général :

M. Cédras

Avocats :

Me Bouthors, SCP Boutet

Cass. 3e civ. n° 02-19.147

3 février 2004

Donne acte à la société Gestion DS du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Palladium France ;

Sur le moyen unique :

Vu les articles 14 et 15 de la loi du 31 décembre 1975, ensemble l'article 1275 du Code civil ;

Attendu qu'à peine de nullité du sous-traité, les paiements de toutes les sommes dues par l'entrepreneur au sous-traitant, en application de ce sous-traité, sont garantis par une caution personnelle et solidaire obtenue par l'entrepreneur d'un établissement qualifié, agréé dans des conditions fixées par décret ; que cependant, la caution n'aura pas lieu d'être fournie si l'entrepreneur délègue le maître de l'ouvrage au sous-traitant dans les termes de l'article 1275 du Code civil, à concurrence du montant des prestations exécutées par le sous-traitant ;

que sont nuls et de nul effet, quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui auraient eu pour effet de faire échec à ces dispositions ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 30 mai 2001 et 25 juin 2002), que la société Immobilière Papillon, maître de l'ouvrage, ayant chargé la société Dezellus, depuis lors en redressement judiciaire, des travaux de réhabilitation de logements, celle-ci a sous-traité les lots "revêtements de sols" et "peintures faïences" à la société Décoration de Sousa frères, devenue société Gestion DS, le contrat stipulant le paiement du sous-traitant par le maître de l'ouvrage "dans les conditions précisées par une délégation de paiement selon modèle" ; que, préalablement, la société Dezellus avait fait accepter le sous-traitant par le maître de l'ouvrage et agréer ses conditions de paiement prévoyant le règlement par l'entrepreneur des sommes dues par lettre de change sur relevé ; qu'après avoir vainement mis en demeure l'entrepreneur principal de la régler et notifié cette mise en demeure au maître de l'ouvrage, la société Gestion DS a assigné ce dernier en paiement d'une somme à titre de solde du prix de ses travaux sur le fondement de la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ;

Attendu que pour rejeter la demande, l'arrêt du 25 juin 2002 retient que la société Gestion DS n'a pas tenté de mettre en oeuvre le mode de paiement par délégation "coché" à l'article 6 du sous-traité et n'en a pas exigé le respect, mais a accepté le paiement par lettre de change ; qu'elle ne peut soutenir qu'elle ne bénéficiait pas d'une délégation de paiement alors que cette garantie était expressément prévue à son profit ; qu'elle ne peut davantage prétendre que cette délégation n'a pas été acceptée par le maître de l'ouvrage, alors qu'après en avoir réclamé le bénéfice le 5 novembre 1996 en sollicitant la suspension des paiements envers l'entreprise Dezellus à concurrence des sommes qui lui restaient dues, le maître de l'ouvrage a adressé le 12 novembre à cette entreprise un courrier l'informant de la suspension du paiement "représentant le solde du décompte définitif établi le 10 septembre 1996" ; que le sous-traitant ne caractérise aucune faute à l'encontre du maître de l'ouvrage dont il recherche vainement la responsabilité alors que par sa propre carence, il se trouve à l'origine de son préjudice ;

Qu'en statuant ainsi, sans constater l'accord du maître de l'ouvrage lors de la conclusion du sous-traité pour la délégation de paiement proposée par l'entrepreneur principal, et alors que le sous-traitant ne pouvait pas renoncer aux droits que lui confère l'article 14 de la loi du 31 décembre 1975, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'aucun moyen n'étant dirigé contre l'arrêt du 30 mai 2001 ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 30 mai 2001 ;

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 juin 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.