Cass. 2e civ., 10 novembre 2005, n° 04-13.618
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dintilhac
Donne acte à M. Jacques X... et à Mme Camille Y... de leur reprise d'instance en qualité de légataires universels de Denise Y... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Z... a acquis, le 6 juin 1965, dans une galerie d'art, un tableau désigné comme étant l'oeuvre du peintre Y..., mort en 1960 ; qu'en 1997, souhaitant vendre ce tableau, M. Z... a sollicité l'avis de M. X..., auteur du catalogue raisonné de l'oeuvre du peintre, et de Denise Y..., veuve de l'artiste, titulaire du droit moral attaché à son oeuvre, et de Camille Y..., soeur de l'artiste ; que ses démarches étant demeurées vaines, M. Z... a obtenu, le 29 septembre 2000, la désignation, en référé, d'un expert qui a conclu à l'authenticité du tableau ; que M. Z... a assigné M. X... et Mmes Denise et Camille Y... devant le tribunal de grande instance en réparation du préjudice que leur refus lui avait fait subir et aux fins de condamnation de Mmes Y... à lui remettre un certificat d'authenticité et de M. X... à inclure le tableau dans son prochain catalogue ; que Denise Y... étant décédée le 1er juillet 2004, ses légataires à titre universel, Mme Camille Y... et M. X... ont repris l'instance ;
Sur le premier et le second moyen réunis :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que pour condamner Mmes Y... et M. X... in solidum à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que les prérogatives attachées au droit moral de l'auteur dont sont investis les ayants droit afin d'assurer la défense de l'oeuvre de celui-ci, pas plus qu'en l'espèce, l'autorité reconnue et revendiquée par les intimés sur la connaissance de cette oeuvre ne leur confèrent un pouvoir discrétionnaire sur l'authentification de celle-ci ; que Mmes Y... ne sont pas fondées à soutenir que c'est à bon droit qu'elles émettent l'avis que le tableau n'est pas authentique, dès lors qu'elles se bornent à invoquer leur conscience, sans avancer le moindre élément propre à justifier leur opinion, alors que celle-ci se trouve contredite par les conclusions motivées de l'expert ; que M. X... a d'abord omis de donner son avis sur l'authenticité de l'oeuvre qui lui était soumise alors qu'il était l'auteur du catalogue raisonné de l'oeuvre de l'artiste auquel celle-ci était attribuée, puis a refusé d'expliquer ses réserves sur cette attribution devant l'expert judiciairement commis et, enfin, a maintenu que le tableau n'est pas authentique sans former de critique précise et argumentée contre l'avis de cet expert et refusé d'envisager de l'inclure dans l'oeuvre répertoriée de l'artiste ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater que Mmes Y... et M. X... avaient agi avec mauvaise foi ou une légèreté blâmable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 février 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.