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Décisions

Cass. 3e civ., 26 janvier 2000, n° 98-15.999

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

M. Villien

Avocat général :

M. Guérin

Avocats :

SCP Vier et Barthélemy, SCP Rouvière et Boutet

Nîmes, du 23 avr. 1998

23 avril 1998

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 23 avril 1998), qu'en 1992, la société Bricaillerie Investissement, aux droits de laquelle vient la société Bricorama, maître de l'ouvrage, a chargé la société Perspectives, entrepreneur principal, de la construction d'un bâtiment à usage commercial ; que cette dernière a sous-traité l'un des lots à la société l'Essor, société de travaux publics (société Essor) ; qu'après mise en liquidation judiciaire de la société Perspectives, qui avait été payée de l'intégralité de ses travaux, la société l'Essor a sollicité du maître de l'ouvrage le bénéfice de l'action directe prévue par la loi du 31 décembre 1975, ou subsidiairement des dommages-intérêts fondés sur l'article 14-1 de cette loi ;

Attendu que la société l'Essor fait grief à l'arrêt de rejeter ces demandes, alors, selon le moyen, d'une part, que le maître de l'ouvrage qui a connaissance de la présence d'un sous-traitant sur le chantier, a l'obligation de mettre en demeure l'entrepreneur principal de s'acquitter de ses obligations afin de faire agréer ce sous-traitant et ses conditions de paiement ; que tout manquement à cette obligation du maître de l'ouvrage est une faute quasi délictuelle à l'égard du sous-traitant, qu'elle prive de la possibilité d'exercer les droits d'un sous-traitant agréé ; qu'aucune obligation n'incombe au sous-traitant lui-même dans la mise en oeuvre de la procédure d'agrément de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 ; qu'en décidant que " faute de pouvoir justifier d'un préjudice, la perte évoquée de la chance ne peut ouvrir droit à réparation ", la cour d'appel a violé les articles 14-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 et 1382 et 1383 du Code civil ; d'autre part, que le maître de l'ouvrage qui commet une faute quasi délictuelle au regard des obligations de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, est tenu de réparer l'entier préjudice causé au sous-traitant, c'est-à-dire la perte des sommes qui lui restent dues par l'entrepreneur principal ; que cette indemnisation n'est pas subordonnée à l'existence d'une dette du maître de l'ouvrage à l'égard de l'entrepreneur principal, la faute quasi délictuelle devant être réparée de manière autonome et ne relevant pas des règles propres à l'action directe en matière d'indemnisation ; qu'en décidant que " l'action directe, dans les conditions où elle a été exercée, se serait avérée infructueuse ", la cour d'appel a de nouveau violé les articles 14-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 et 1382 et 1383 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant exactement relevé que le maître de l'ouvrage avait, aux termes de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, commis une faute en omettant de mettre l'entrepreneur principal en demeure de s'acquitter des obligations mises à sa charge par l'article 3 de ladite loi, privant ainsi le sous-traitant de la possibilité d'exercer l'action directe, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que le maître de l'ouvrage avait eu connaissance de l'existence du sous-traitant avant de payer l'entrepreneur principal, a pu retenir que cette omission du respect des prescriptions de l'article 14-1 n'était pas la cause du préjudice de la société l'Essor, dès lors que l'action directe se serait avérée infructueuse ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.