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Décisions

Cass. 1re civ., 25 mai 2005, n° 02-17.305

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ancel

Rapporteur :

Mme Marais

Avocat général :

M. Sarcelet

Avocats :

SCP Roger et Sevaux, SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier

Paris, du 12 avr. 2002

12 avril 2002

Sur les premier et troisième moyens réunis :

Vu l'article 1314 du Code civil et l'article 1er du décret des 19-24 juillet 1793 applicable en la cause ;

Attendu qu'il résulte du second de ces textes que la stipulation d'une vente pleine et entière, sans aucune réserve, de la propriété d'une oeuvre littéraire transmet à l'acquéreur la pleine et absolue propriété de l'oeuvre ainsi que l'ensemble des droits patrimoniaux d'auteur ;

Attendu qu'après avoir cédé par actes des 15 janvier 1900, 12 janvier 1901 et 30 mars 1902, à la société Editions littéraires et artistiques, aux droits de laquelle se trouve la société Albin Michel, les droits éditoriaux sur les trois romans "Claudine à l'école", "Claudine à Paris" et "Claudine s'en va", Henri X..., dit Y..., en a cédé, sans réserve, la pleine et entière propriété à cet éditeur par contrat du 19 octobre 1907 ; que, par acte du 20 juillet 1909, Sidonie Gabrielle Z... a ratifié cette convention après que la paternité sur les trois oeuvres lui eut été reconnue, précisant qu'elle n'entendait revendiquer aucun droit commercial sur celles-ci et que la cession pleine et entière qui avait été faite à la société par Y... ne pourrait faire l'objet, ni de sa part ni de celle de ses ayants cause, d'aucune revendication dans le présent et dans l'avenir ; qu'un litige oppose les consorts de A... des B..., héritiers de Z..., et la société Albin Michel sur le point de savoir si les contrats de 1907 et 1909 englobaient les droits d'exploitation audiovisuelle et phonographique et les extensions de la durée légale de protection des oeuvres intervenues dans un certain nombre de pays étrangers ;

Attendu que pour rejeter les prétentions de l'éditeur tendant à voir dire qu'il était cessionnaire de tous les droits d'exploitation, en tout pays, pour la durée des droits d'auteur et ses prolongations, et pour tous modes d'exploitation, fussent-ils inconnus au jour de la cession des oeuvres en cause, la cour d'appel a jugé, d'une part, qu'eu égard aux termes généraux du contrat, il apparaissait conforme à la commune intention des parties de retenir que la cession consentie par Z... valait "seulement pour la durée de sa propriété littéraire, c'est-à-dire toute la durée du monopole d'exploitation reconnu à l'auteur et ses ayants cause dans chacun des pays où les oeuvres étaient susceptibles d'être exploitées", d'autre part, qu'en ratifiant en 1909 la vente en "toute propriété, sans réserve d'aucune sorte" des trois ouvrages litigieux, Z... n'avait entendu céder que les modes d'exploitation prévus ou prévisibles desdites oeuvres lors de la signature de la cession ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la vente des oeuvres en 1907 emportait, en l'absence de toute limitation dans l'acte, la cession au profit de l'éditeur de tous les modes d'exploitation, fussent-ils alors inconnus, y compris le bénéfice des prolongations légales de protection dans les pays concernés par l'exploitation, la cour d'appel a méconnu la loi du contrat et violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions ayant limité la cession des oeuvres en cause au profit de l'éditeur quant aux modes d'exploitation et au bénéfice des prolongations légales de protection dans les pays concernés par l'exploitation, et les mesures qui en découlent, l'arrêt rendu le 12 avril 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.