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Décisions

Cass. 1re civ., 15 novembre 2010, n° 09-69.308

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Charruault

Avocats :

Me Spinosi, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Grenoble, du 23 juin 2009

23 juin 2009

Attendu que M. X..., anesthésiste-réanimateur, n'ayant pas repris, à l'issue d'un arrêt-maladie, ses activités au sein de la SA Clinique Saint-Charles (la clinique), à qui il était lié par un contrat d'exercice professionnel libéral en date du 17 mai 2001, a demandé la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l'établissement ; que la cour d'appel l'a débouté de sa demande mais a condamné la clinique à lui payer la somme de 45 734,71 euros représentant la valeur de cent actions qu'elle s'était engagée à lui racheter par la convention précitée, l'arrêt valant cession des dites actions ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'il avait unilatéralement résilié, sans motif légitime, la convention d'exercice professionnel libéral et de l'avoir, en conséquence, débouté de l'ensemble de ses demandes indemnitaires, alors selon le moyen, que :

1°/ en déboutant M. X... de sa demande en résolution judiciaire de son contrat d'exercice professionnel du 17 mai 2001 au motif qu'il lui appartenait de reprendre ses activités dès la fin de son arrêt maladie le 10 mars 2003 et de faire constater, seulement ensuite et en tant que de besoin, le non-respect par la Clinique Saint-Charles de ses obligations pour en tirer, le cas échéant, les conséquences qui s'imposaient, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si, en ne répondant pas à la demande d'explications que le M. X... avait formulée quant à la mise en place par la Clinique d'une équipe de trois anesthésistes équivalents temps plein conformément aux termes de la convention du 17 mai 2001, celle-ci ne l'avait pas mis dans l'impossibilité de reprendre ses activités dans des conditions sûres et conformes aux stipulations contractuelles et si, de ce fait, le refus du praticien de reprendre lesdites activités n'était pas justifié par une inexécution, par la Clinique Saint-Charles, de ses obligations contractuelles essentielles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;

2°/ en n'ayant pas recherché, comme elle y était pourtant invitée, si l'état dépressif de M. X..., qui avait entraîné son arrêt maladie du 9 novembre 2002 au 10 mars 2003, n'était pas imputable à un état de surmenage professionnel dû à la violation, par la Clinique Saint-Charles, de son obligation contractuelle essentielle de mettre en place une équipe de trois anesthésistes équivalents temps plein, et si, partant, pour cette seule raison, la rupture de la convention du 17 mai 2001 n'était pas, dès cette époque, déjà imputable à la Clinique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1184 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était saisie par M. X... qu'aux fins de voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat qu'il imputait au comportement de la clinique postérieurement à la réception de la lettre qu'il lui avait adressée le 8 avril 2003, a estimé que celui-ci ne démontrait pas qu'il se serait trouvé dans l'impossibilité d'effectuer ses prestations en raison d'une insuffisance d'anesthésistes imputable à la clinique et en a souverainement déduit qu'il était seul à l'origine de la résiliation unilatérale de la convention litigieuse ; qu'elle a par ce seul motif, justifié sa décision ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 225-206 du code de commerce, ensemble l'article 6 du code civil ;

Attendu que pour condamner la clinique à payer à M. X... une certaine somme au titre du rachat de cent actions, son arrêt valant cession des dites actions, la cour d'appel a retenu que les dispositions du code de commerce suivant lesquelles l'achat par une société anonyme de ses propres actions est autorisé dans les conditions et selon les modalités des articles L. 225-207 à L. 225-217 ne faisaient pas obstacle au respect par la SA Clinique Saint-Charles des obligations qu'elle avait contractées à l'égard de celui-ci et qu'il lui appartenait de se conformer aux dispositions légales sus-visées en mettant en oeuvre la procédure afférente ;

Attendu qu'en statuant ainsi alors qu'en vertu du premier de ces articles, le rachat par une société anonyme de ses propres actions n'est autorisé que dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles L. 225-207 à L. 225-17 du même code, dispositions impératives parmi lesquelles ne figure pas la situation dans laquelle la société anonyme se serait engagée envers un actionnaire à lui racheter des actions, la cour d'appel qui ne pouvait imposer aux actionnaires de mettre en oeuvre l'une des procédures prévues a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Clinique Saint-Charles à payer à M. X... la somme de 45 734,71 euros au titre du rachat de cent actions outre les intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 2004, l'arrêt valant cession des dites actions, l'arrêt rendu le 23 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble, autrement composée.