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Décisions

Cass. 1re civ., 3 novembre 1993, n° 92-13.342

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. de Bouillane de Lacoste

Rapporteur :

Mme Delaroche

Avocat général :

M. Lesec

Avocats :

SCP Matteï-Dawance, Me Garaud

Poitiers, du 29 janv. 1992

29 janvier 1992

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 160 du nouveau Code de procédure civile et le principe de la contradiction ;

Attendu que, le 28 février 1978, Mme Z... a subi, à la polyclinique de La Rochelle, une hystérectomie pour cancer du col de l'utérus, pratiquée par M. A..., chirurgien ; que, présentant des troubles et phénomènes imputés à une récidive de ce cancer, elle a subi, le 25 mars 1980, au Centre hospitalier universitaire de Poitiers, une nouvelle intervention pratiquée par M. Y..., chirurgien, qui a procédé à une réimplantation urétéro-vésicale ; que Mme Z... a continué à souffrir, notamment de douleurs pré et post-mictionnelles intenses nécessitant l'administration d'antalgiques majeurs et la mise en place d'un cathéter péridural avec réservoir de morphine ; que, le 19 janvier 1987, lors d'un examen au scanner, un corps étranger a été découvert dans la vessie ; qu'il a été extrait et analysé, et est apparu comme étant les restes calcifiés d'une compresse chirurgicale ; que Mme Z... a recherché la responsabilité de M. A... devant le tribunal de grande instance de La Rochelle, et a, par ailleurs, engagé une action contre le Centre hospitalier de Poitiers devant le tribunal administratif de cette ville ; que ces deux juridictions ont désigné le même expert, M. X... ; que, dans l'instance opposant Mme Z... à M. A..., l'expert a déposé son rapport le 14 juin 1988 en concluant que la compresse avait été probablement oubliée par M. Y... ; que, dans l'instance engagée devant le tribunal administratif, il a déposé, le 11 avril 1989, un second rapport aux termes duquel il concluait qu'il était plus probable que le corps étranger avait été oublié avant l'intervention de M. Y... ; que M. A... a invoqué l'inopposabilité, à son égard, de ce second rapport ; que l'arrêt attaqué a retenu sa responsabilité ;

Attendu que, pour condamner M. A... à réparer le préjudice subi par Mme Z..., l'arrêt a retenu que la deuxième juridiction saisie avait pris le soin de désigner le même expert, que celui-ci, en fait, avait procédé à une " mission unique ", et que son deuxième rapport avait été régulièrement communiqué à M. A..., qui avait eu tout loisir de le critiquer dans ses écritures ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle relevait, par ailleurs, que l'évolution des conclusions de l'expert au cours de ses missions successives s'expliquait en raison d'éléments nouveaux communiqués postérieurement au rapport que celui-ci avait déposé devant le Tribunal, ce dont il résultait que M. A... n'avait pas été en mesure de présenter à l'expert ses observations au cours d'une discussion contradictoire, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 janvier 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.