Cass. 1re civ., 5 mars 1968
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Blin
Rapporteur :
M. Ausset
Avocat général :
M. Lindon
Avocats :
Me Caen, Me Garaud
SUR LE PREMIER MOYEN PRIS EN SES DEUX BRANCHES :
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR DECIDE QUE LE PEINTRE SALVADOR Z... NE SAURAIT ETRE CONSIDERE COMME CO-AUTEUR DE L'OEUVRE LYRIQUE LA DAME A... ET LE CHEVALIER ROMAIN, ET DU BALLET GALA, AUX MOTIFS QUE L'ENSEMBLE DESDITES OEUVRES FORMERAIT UN TOUT INDIVISIBLE, INDEPENDANT DES DECORS ET COSTUMES PEINTS OU DESSINES PAR LUI ;
QUE, D'UNE PART, SELON LE POURVOI, INDEPENDAMMENT DE LA CONFECTION DE CES DECORS ET COSTUMES, LE PEINTRE AURAIT PARTICIPE, PAR SES EFFORTS CREATEURS A L'ELABORATION DE L'OEUVRE COMMUNE, EN EN INVENTANT L'ESPRIT, LA MANIERE, ET CERTAINS THEMES, DONT CELUI DE GALA, AINSI QU'IL ETAIT EXPOSE DANS DES CONCLUSIONS DEMEUREES SANS REPONSE ;
QU'IL EST SOUTENU, D'AUTRE PART, QUE SALVADOR Z... ETAIT ENCORE LE CREATEUR DE TOUS LES ELEMENTS PICTURAUX DE LA PRODUCTION DE CETTE OEUVRE COMMUNE, QUI ETAIT UN SPECTACLE MUSICAL PICTURAL ET CHOREGRAPHIQUE, SE DIFFERENCIANT DES OEUVRES LYRIQUES ET DES BALLETS DE TYPE CLASSIQUE, EN CE QU'IL AJOUTAIT A LA MUSIQUE, AUX PAROLES ET A LA DANSE, DES ELEMENTS PICTURAUX, JOUANT UN ROLE ESSENTIEL, COMME EN TEMOIGNAIT LE TITRE DONNE AU SPECTACLE, QUALIFIE D'OPERA-BALLET SCARLATTI-DALI ;
MAIS ATTENDU, QUE, REPONDANT AUX CONCLUSIONS PRETENDUMENT DELAISSEES, LA COUR A TOUT D'ABORD SOULIGNE QUE LA DAME A... ET LE CHEVALIER ROMAIN, A ETE TIRE, PAR LE COMPOSITEUR CONFALONIERI, D'UN INTERMEDE COMIQUE ECRIT EN 1714 PAR SCARLATTI ;
QUE GALA EST UN BALLET DONT LA CHOREGRAPHIE EST DE MAURICE X..., ET LA MUSIQUE DE CONFALONIERI, ECRITE EN HOMMAGE A SCARLATTI ;
QUE, RECHERCHANT ENSUITE LA PORTEE ET LES LIMITES DES CONVENTIONS INTERVENUES, ELLE A CONSTATE QUE PAR LETTRE DU 3 MARS 1960, SALVADOR Z..., PRESSENTI PAR LE REPRESENTANT DE LA SOCIETE ALVOX CORPORATION DE NEW YORK A ACCEPTE DE FOURNIR CINQ AQUARELLES ET QUATRE COSTUMES, POUR UNE CREATION DE SCARLATTI, MOYENNANT LE PRIX DE 30000 DOLLARS, LA REALISATION SCENIQUE RESTANT ENTIEREMENT A LA CHARGE DE LA SOCIETE ALVOX ;
QUE, DANS L'EXERCICE DE LEUR POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION DES ELEMENTS DE LA CAUSE, LES JUGES DU SECOND DEGRE ONT DEDUIT DE CES CONSTATATIONS QU'EN DEHORS DE CERTAINS DECORS ET COSTUMES, SEULS ELEMENTS FOURNIS PAR SALVADOR Z..., ET QUI ONT UN CARACTERE ACCESSOIRE, LES OEUVRES REPRESENTEES AVAIENT LEUR VALEUR PROPRE, ET QU'AINSI LE DEMANDEUR ETAIT MAL FONDE EN SA PRETENTION D'ETRE CONSIDERE COMME CO-AUTEUR DE L'OEUVRE COMMUNE ;
ATTENDU DES LORS, QUE LE PREMIER MOYEN NE PEUT QU'ETRE REJETE ;
ET SUR LE SECOND MOYEN :
ATTENDU QU'IL EST ENCORE REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR ESTIME QU'IL N'AVAIT PAS ETE PORTE ATTEINTE AU DROIT MORAL DE SALVADOR Z... EN TANT QU'AUTEUR DES COSTUMES ET DECORS DE L'OPERA-BALLET SCARLATTI-DALI, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, LE CREATEUR DE DECORS ET COSTUMES PEUT, EN VERTU DE SON DROIT MORAL, S'OPPOSER A CE QUE SON OEUVRE SOIT OFFERTE A LA VUE DU PUBLIC DANS DES CONDITIONS PROPRES A DONNER UNE IMAGE INEXACTE DE SA PENSEE, ET QU'IL EN EST AINSI, LORSQUE, COMME IL EST CONSTATE, DES DECORS ET COSTUMES SUPPLEMENTAIRES REALISES PAR DES TIERS, SONT PRESENTES CONCURREMMENT AU PUBLIC DANS UN MEME SPECTACLE, SURTOUT S'ILS SONT INSPIRES DE CEUX DU CREATEUR INITIAL, SANS SON AGREMENT, LA COUR D'APPEL NE POUVANT, SANS CONTRADICTION, CONSTATER CES ADJONCTIONS ET DENIER L'ATTEINTE PORTEE AU DROIT MORAL DE L'ARTISTE ;
MAIS ATTENDU D'UNE PART, QUE L'ARRET ATTAQUE RAPPELLE QUE, A LA SUITE DE LA PREMIERE REPRESENTATION DE LA DAME A... ET LE CHEVALIER ROMAIN, ET DE GALA, DONNEE A VENISE LE 22 AOUT 1961, LA SOCIETE ALVOX, DESIRANT DONNER PLUS D'AMPLEUR A CETTE REPRESENTATION, DEMANDA A SALVADOR Z... DE CREER D'AUTRES MAQUETTES DE DECORS, DES COSTUMES SUPPLEMENTAIRES, ET LE DESSIN D'UN RIDEAU DE SCENE, MAIS QUE LES PARTIES N'AYANT PU SE NETTRE D'ACCORD SUR LES PRIX DEMANDES PAR L'ARTISTE, LA SOCIETE FIT REALISER SON PROJET PAR D'AUTRES DECORATEURS ;
QU'ELLE CONSTATE, D'AUTRE PART, QUE SALVADOR Z... N'ALLEGUE PAS QU'UN DECOR OU UN COSTUME, PAR LUI DESSINE, AIT ETE MODIFIE, NI AIT ETE SUPPRIME SANS QUE LE PUBLIC EN AIT ETE AVERTI ;
QU'IL RELEVE ENFIN QUE L'ADJONCTION D'AUTRES DECORS OU COSTUMES, INSPIRES DE CEUX CREES PAR SALVADOR Z..., COMME IL EST INDIQUE AU PROGRAMME, SANS QUE SON OEUVRE AIT ETE MUTILEE, N'A PU AVOIR POUR CONSEQUENCE DE DONNER UNE IDEE INEXACTE DE CETTE OEUVRE ;
QUE DE CES CONSTATATIONS, ET SANS MECONNAITRE LE POUVOIR RECONNU A L'AUTEUR D'OEUVRES DE L'ESPRIT DE S'OPPOSER A TOUTE CORRECTION OU MODIFICATION SUSCEPTIBLE D'EN ALTERER LE CARACTERE, LA COUR D'APPEL A PU, SANS SE CONTREDIRE, DECIDER QU'EN L'ESPECE, IL N'AVAIT PAS ETE PORTE ATTEINTE AU DROIT MORAL DE SALVADOR Z... ;
QU'AINSI LE SECOND MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 11 MAI 1965 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.