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Décisions

Cass. 1re civ., 4 juin 1991, n° 88-16.373

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Jouhaud

Rapporteurs :

M. Fouret, M. Kuhnmunch

Avocat général :

Mme Flipo

Avocats :

Me Blanc, SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, Me Guinard, Me Roger, SCP Boré et Xavier

Rouen, du 31 mai 1988

31 mai 1988

Met hors de cause, sur leur demande, la compagnie d'assurances la Préservatrice foncière, M. X... et l'entreprise Giraud en ce qui concerne tant le pourvoi principal des souscripteurs du Lloyd's de Londres que le pourvoi incident de M. Y... ;

Donne acte aux souscripteurs du Lloyd's de Londres de leur désistement partiel portant sur le troisième moyen de leur pourvoi ;

Attendu que M. Y... a confié la construction de sa maison individuelle, achevée en 1975, à deux entreprises, dont la Société normande d'agencement et de charpente (SNAC) pour les travaux de charpente et de bois ; que, des désordres étant apparus en 1983, le maître de l'ouvrage a assigné ces entreprises en réparation ; que le tribunal de grande instance, faisant siennes les conclusions du rapport de l'expertise judiciairement ordonnée, a condamné la SNAC à payer à M. Y... le coût des travaux préconisés par l'expert ; que la SNAC, mise entre-temps en règlement judiciaire, ayant fait appel, le maître de l'ouvrage a assigné en intervention les souscripteurs du Lloyd's de Londres, garantissant cette société ; que la cour d'appel les a condamnés à indemniser M. Y... au lieu et place de la SNAC, sous déduction d'une franchise de 3 000 francs ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal formé par les souscripteurs du Lloyd's de Londres :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fait droit à l'action directe de M. Y... contre l'assureur de la SNAC alors que, selon le moyen, les juges d'appel ont violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile en déclarant que l'expertise lui était opposable bien que cet assureur, cité en intervention forcée en appel, n'ait pas figuré aux opérations d'une expertise ordonnée au cours d'une instance à laquelle il n'avait pas été partie ;

Mais attendu que la décision judiciaire qui condamne un assuré à raison de sa responsabilité constitue pour l'assureur, qui a garanti celle-ci dans ses rapports avec la victime, la réalisation, tant dans son principe que dans son étendue, du risque couvert et que l'assureur, appelé à la procédure en un temps où il peut encore discuter les conclusions de l'expert, ne peut, sauf en cas de fraude de la part de l'assuré, soutenir que l'expertise ne lui est pas opposable ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par M. Y..., dont l'examen est préalable à celui du second moyen du pourvoi principal :

Attendu qu'il est reproché à la cour d'appel d'avoir déclaré opposable au maître de l'ouvrage une franchise figurant au contrat souscrit par la SNAC auprès des souscripteurs du Lloyd's de Londres alors que, selon le moyen, cette franchise stipulée dans un contrat d'assurance obligatoire au titre de l'article L. 141-1 du Code des assurances est inopposable au tiers lésé en application des articles L. 241-1, L. 243-8 et A. 243-1 de ce Code ainsi que de son annexe I ;

Mais attendu que si, selon ces derniers articles, insérés dans le Code des assurances par la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978, la franchise n'est pas opposable au bénéficiaire de l'indemnité, il résulte de l'article 14 de cette loi que ces dispositions ne sont applicables qu'aux contrats relatifs aux chantiers dont la déclaration réglementaire d'ouverture a été établie postérieurement au 1er janvier 1979 ; que le moyen ne peut être accueilli dès lors que le certificat de conformité dressé à l'achèvement des travaux a été délivré le 11 avril 1975 ;

REJETTE le premier moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a limité à 3 000 francs le montant de la franchise prévue dans le contrat d'assurance conclu entre la SNAC et les souscripteurs du Lloyd's de Londres, l'arrêt rendu le 31 mai 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims.