Cass. com., 26 février 2013, n° 11-22.531
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
M. Fédou
Avocat général :
M. Carre-Pierrat
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin
Donne acte à M. X...de ce qu'il reprend l'instance en qualité de liquidateur de la société Cosmetic collections-soins et parfums ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 mai 2011) et les productions, que la société par actions simplifiée Y... parfumerie cosmétique (la société BPC), aujourd'hui dénommée Cosmetic collections-soins et parfums, faisait partie du groupe Y... à la tête duquel se trouvait une holding, la Société financière Y... (la holding SFB) ; que M. Z..., membre de la société Audit Conseil Union, était le commissaire aux comptes des deux sociétés ; que le 4 août 2006, la totalité des titres représentant le capital de la société BPC a été cédée pour un euro ; que reprochant au commissaire aux comptes d'avoir contrevenu à ses obligations professionnelles en ne révélant pas l'existence de graves manquements commis sous la gestion des anciens dirigeants et à l'occasion d'opérations concernant notamment les sociétés BBC, EBB, BTA et Batical, la société Cosmetic collections-soins et parfums a fait assigner M. Z...et la société Audit Conseil Union en dommages-intérêts ; que la société Cosmetic collections-soins et parfums a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, M. X...étant désigné en qualité de liquidateur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable en appel la demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Audit Conseil Union au titre de la cession à la société BPC de la créance en compte courant détenue par Mme Y... dans la société BBC pour 67 000 euros, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte des conclusions de première instance de la SAS Cosmetic collections-soins et parfums qu'elle avait demandé à être indemnisée par la SA Audit Conseil Union, au titre d'opérations sur les comptes courants des sociétés BBC et EBB, d'une somme globale de 440 988, 03 euros qui incluaient le rachat par la société BPC d'une créance en compte courant détenue par Mme Y... dans la société BBC pour un montant de 67 000 euros ; qu'en considérant que la demande indemnitaire afférente à ce rachat, formulée en appel pour cette même somme de 67 000 euros, n'aurait pas été formée en première instance, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de première instance de la SAS Cosmetic Collection-soins et parfums en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'en toute hypothèse, sont recevables en appel les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union au titre de l'acquisition, par la société BPC, d'une créance en compte courant de Mme Betty Y... dans la société BBC pour 67 000 euros, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire n'était pas virtuellement comprise dans la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance pour un montant de 440 988, 03 euros au titre d'opérations sur les comptes courants des sociétés BBC et EBB, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
3°/ qu'en toute hypothèse, sont recevables en appel les prétentions qui sont le complément des demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union au titre de l'acquisition, par la société BPC, d'une créance en compte courant de Mme Betty Y... dans la société BBC pour 67 000 euros, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire ne venait pas compléter la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance pour un montant de 440 988, 03 euros au titre d'opérations sur les comptes courants des sociétés BBC et EBB, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que dès lors qu'il ne peut se déduire des conclusions de première instance de la société Cosmetic collections-soins et parfums que la demande en paiement de la somme de 67 000 euros était incluse dans la somme globale de 440 988, 03 euros réclamée au titre d'opérations sur les comptes courants des sociétés BBC et EBB, c'est sans dénaturer ces conclusions que la cour d'appel a statué comme elle a fait ;
Et attendu, en second lieu, que la société Cosmetic collections-soins et parfums n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que les conditions d'application de l'article 566 du code de procédure civile auraient été réunies, la cour d'appel n'avait pas à effectuer des recherches qui ne lui étaient pas demandées ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable en appel la demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Audit Conseil Union au titre de la cession à la société BPC de la créance en compte courant détenue par M. Y... dans la holding SFB pour 102 000 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que sont recevables en appel les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union au titre de l'acquisition, par la société BPC, d'une créance en compte courant de M. Laurent Y... dans la holding SFB pour 102 000 euros, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire n'était pas virtuellement comprise dans la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance pour un montant de 440 988, 03 euros au titre d'opérations sur les comptes courants de sociétés tierces, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en toute hypothèse, sont recevables en appel les prétentions qui sont le complément des demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union au titre de l'acquisition, par la société BPC, d'une créance en compte courant de M. Laurent Y... dans la holding SFB pour 102 000 euros, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire ne venait pas compléter la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance pour un montant de 440 988, 03 euros au titre d'opérations sur les comptes courants de sociétés tierces, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la société Cosmetic collections-soins et parfums n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que les conditions d'application de l'article 566 du code de procédure civile auraient été réunies, la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer des recherches qui ne lui étaient pas demandées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable en appel la demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Audit Conseil Union au titre de la cession à la société BPC de la créance en compte courant détenue par la holding SFB dans la société BTA pour 617 000 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que sont recevables en appel les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union au titre de l'acquisition, par la société BPC, d'une créance en compte courant de la holding SFB dans la société BTA pour 617 000 euros, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire n'était pas virtuellement comprise dans la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance pour un montant de 459 828 euros au titre de l'acquisition et de la revente de titres de la société BTA et de l'acquisition de créances en compte courant de cette même société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en toute hypothèse, sont recevables en appel les prétentions qui sont le complément des demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union au titre de l'acquisition, par la société BPC, d'une créance en compte courant de la holding SFB dans la société BTA pour 617 000 euros, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire ne venait pas compléter la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance pour un montant de 459 828 euros au titre de l'acquisition et de la revente de titres de la société BTA et de l'acquisition de créances en compte courant de cette même société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la société Cosmetic collections-soins et parfums n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que les conditions d'application de l'article 566 du code de procédure civile auraient été réunies, la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer des recherches qui ne lui étaient pas demandées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable en appel la demande de dommages-intérêts formée à l'encontre de la société Audit Conseil Union pour une somme de 548 550 euros au titre du défaut de respect par la holding SFB de la délégation de loyers prévue dans le cadre de la convention de sous-location conclue avec la société BPC concernant le bâtiment d'exploitation situé à Chaulnes donné en " lease back " à la holding SFB par la société Batical, alors, selon le moyen :
1°/ que sont recevables en appel les prétentions qui étaient virtuellement comprises dans les demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union pour une somme de 548 550 euros au titre du défaut de respect par la holding SFB de la délégation de loyers prévue dans la convention de sous-location conclue avec la société BPC concernant le bâtiment d'exploitation de Chaulnes, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire n'était pas virtuellement comprise dans la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance au titre des sommes versées par la société BPC à la holding SFB dans le cadre de la convention de sous-location du bâtiment de Chaulnes pour 534 458 euros et au titre de la perte par la société BPC de la propriété commerciale sur ce local, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
2°/ qu'en toute hypothèse, sont recevables en appel les prétentions qui sont le complément des demandes soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle en appel la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums à l'encontre de la SA Audit Conseil Union pour une somme de 548 550 euros au titre du défaut de respect par la holding SFB de la délégation de loyers prévue dans la convention de sous-location conclue avec la société BPC concernant le bâtiment d'exploitation de Chaulnes, sans rechercher si une telle prétention indemnitaire ne venait pas compléter la demande de dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums en première instance au titre des sommes versées par la société BPC à la holding SFB dans le cadre de la convention de sous-location du bâtiment de Chaulnes pour 534 458 euros et au titre de la perte par la société BPC de la propriété commerciale sur ce local, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 566 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la société Cosmetic collections-soins et parfums n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que les conditions d'application de l'article 566 du code de procédure civile auraient été réunies, la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer des recherches qui ne lui étaient pas demandées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable la demande de dommages-intérêts formée par la société Cosmetic collections-soins et parfums et de l'avoir rejetée au fond, alors, selon le moyen, que les juges du fond ne peuvent statuer au fond sur une demande qu'ils ont préalablement déclarée irrecevable ; qu'en rejetant, au fond, la demande en dommages-intérêts formée par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums pour un montant de 548 550 euros au titre de l'opération de « lease back » conclue entre la holding SFB et la société Batical concernant le bâtiment d'exploitation de Chaulnes au motif que cette opération n'aurait pas été réalisée au préjudice des intérêts de la société BPC, quand elle avait préalablement déclaré irrecevable comme nouvelle en appel cette demande en dommages-intérêts, la cour d'appel a commis un excès de pouvoir en violation de l'article 122 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt se borne, dans son dispositif, à déclarer recevables en appel les demandes de dommages-intérêts en réparation des préjudices allégués au titre des cessions des titres BTA et des comptes courants dans les sociétés EBB et BBC et à déclarer irrecevables les autres demandes, sans statuer au fond sur celles-ci ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le sixième moyen :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté les demandes de dommages-intérêts formées par la société Cosmetics collections-coins et parfums en réparation des préjudices subis au titre des cessions à la société BPC des titres détenus par M. Y... et la holding SFB dans la société BTA pour 731 755 euros et au titre de la cession à la société BPC des comptes courants détenus par M. Y... dans les sociétés BBC et EBB pour 191 000 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que le commissaire aux comptes commet une faute dès lors qu'il n'informe pas les associés, dans son rapport spécial sur les conventions réglementées, des anormalités comptables et financières entachant ces opérations ; qu'en affirmant que la responsabilité de la SA Audit Conseil Union ne pourrait être engagée du fait que la SAS Cosmetic collections-soins et parfums ne justifiait pas de ce que l'acquisition par la société BPC des titres détenus par M. Laurent Y... et la holding SFB dans la société BTA et des comptes courants de M. Laurent Y... dans les sociétés BBC et EBB aurait compromis la continuité de l'exploitation ou aurait été constitutive d'un abus de bien social, sans rechercher s'il n'incombait pas à la SA Audit Conseil Union d'informer les associés de la société BPC, dans son rapport spécial relatant ces opérations réglementées, de la disproportion existant entre le montant de ces acquisitions et celui des capitaux propres de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que ne figure pas, dans le rapport spécial établi le 13 mai 2004 par la SA Audit Conseil Union sur les conventions réglementées conclues au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2003, l'acquisition par la société BPC des titres détenus par la holding SFB dans la société BTA pour un montant de 182 939 euros ; qu'en affirmant néanmoins que le commissaire aux comptes avait visé dans ce rapport toutes les conventions critiquées par la SAS Cosmetic collections-soins et parfums dont faisait partie cette convention de rachat des titres détenus par la holding SFB dans la société BTA, la cour d'appel a dénaturé ce rapport spécial du 13 mai 2004 en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'article L. 227-10 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que le commissaire aux comptes présente aux associés un rapport sur les conventions intervenues directement ou par personne interposée entre la société et son président, l'un de ses dirigeants, l'un de ses actionnaires disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 % ou, s'il s'agit d'une société actionnaire, la société la contrôlant au sens de l'article L. 233-3 du même code ; que ce texte ajoute que les conventions non approuvées produisent néanmoins leurs effets, à charge pour la personne intéressée et éventuellement pour le président et les autres dirigeants d'en supporter les conséquences dommageables pour la société ; qu'il en résulte qu'à les supposer démontrés, les manquements dans la présentation de son rapport spécial reprochés au commissaire aux comptes, dont il n'était pas soutenu qu'ils étaient à l'origine de la perte d'une chance de ne pas approuver les conventions litigieuses, n'ont pu être la cause du préjudice né de la conclusion de ces conventions ; que par ce motif de pur droit, suggéré par la défense, substitué à ceux critiqués, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.