Cass. com., 11 décembre 2019, n° 18-11.195
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Célice, Texidor et Périer, Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Didier et Pinet, SCP Ortscheidt
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société X... BTP services auscultation, aux droits de laquelle vient la société X... BTP services (la société X...) a confié à la Société française de transports B... frères (la société B...), commissionnaire de transport, l'organisation du transport, de La Réunion en métropole, de deux remorques ; que celles-ci ont été détruites le 12 décembre 2009 dans l'incendie de l'entrepôt où elles avaient été déposées par la société Magasins et aires de stockages (MAS Réunion), dans l'attente de leur embarquement, incendie qui a pris naissance dans la cellule occupée par la société Comptoirs français d'outre-mer (la société Coframer) ; que le 9 décembre 2010, la société X... et son assureur, la société Axa France IARD (la société Axa) ont assigné la société B... et son assureur, la société Helvetia assurances, la société MAS Réunion et son assureur, la société Allianz IARD (la société Allianz), la société Coframer et son assureur, la Caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de La Réunion, en réparation du préjudice résultant de la destruction des deux remorques ; que par actes séparés du 10 décembre 2010, la société B... et son assureur ont assigné la société Necotrans, à qui la société B... soutenait avoir sous-traité l'organisation du transport des remorques, la société MAS Réunion et son assureur, en garantie des éventuelles condamnations à réparer le préjudice subi par la société X... et en réparation du préjudice résultant de la perte des marchandises empotées dans un conteneur, qui a été détruit dans l'incendie du 12 décembre 2009, et dont la société B... devait assurer le transport pour le compte de plusieurs commettants ; qu'en cours d'instance, la société Necotrans ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, ses administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires sont intervenus volontairement ;
Sur la recevabilité du premier moyen du pourvoi principal, contestée par la société B... et son assureur :
Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation, sur l'avis de M. Lavigne, avocat général, et après débats à l'audience publique du 12 mars 2019, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Duval-Arnould, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre ;
Attendu que la société X... et son assureur font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes à l'encontre des sociétés MAS Réunion, Coframer et B... et de leurs assureurs au titre de la destruction des remorques ;
Attendu que, dans son dispositif, la cour d'appel s'est bornée à rejeter les demandes dirigées contre les sociétés MAS Réunion et Coframer et leurs assureurs ; qu'il s'ensuit qu'en ce qu'il vise la société B... et son assureur le moyen n'est pas recevable, comme critiquant une omission de statuer qui peut être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile et ne donne pas lieu à ouverture à cassation ;
Sur le même moyen, en ce qu'il est dirigé contre les sociétés MAS Réunion et Coframer et leurs assureurs, qui est recevable :
Délibéré par la première chambre civile de la Cour de cassation dans les mêmes conditions que le premier moyen du pourvoi principal ;
Vu les articles 455 et 954, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu que, s'il n'expose pas succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens, le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de la société X... et de son assureur, la cour d'appel s'est prononcée au visa de leurs conclusions déposées le 12 juin 2014 ;
Qu'en statuant ainsi, sans se référer aux nouvelles conclusions déposées le 10 mars 2015 par la société X... et son assureur qui répondaient aux conclusions déposées entre-temps, d'une part, par la société Necotrans, en contestant le caractère de force majeure de l'incendie tiré de son origine inconnue, d'autre part, par la société Allianz, assureur de la société MAS Réunion, en déniant tout lien contractuel avec celle-ci, et sans exposer ces moyens, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu les articles 31 et 126 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevable la demande formée par la société B... et son assureur contre les sociétés Necotrans et Allianz, ce dernier en qualité d'assureur de la société MAS Réunion, au titre de la perte du conteneur, l'arrêt, après avoir énoncé que le commissionnaire de transport ne peut agir à titre principal contre ses substitués que s'il a désintéressé la victime du dommage, retient que la société B... et son assureur, qui n'avaient pas qualité à agir au jour de l'introduction de la demande, n'apportaient pas la preuve de l'indemnisation effective des ayants droit à la marchandise avant le 12 décembre 2010, date à laquelle était acquise la prescription annale, de sorte que la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir n'a pas été régularisée avant l'expiration du délai pour agir ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnisation des ayants droit à la marchandise par le commissionnaire de transport relève de son intérêt à agir contre ses substitués, dont le défaut pouvait être régularisé jusqu'à ce que le juge statue, la cour d'appel a violé les texte susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare la société X... BTP services auscultation et la société Axa France IARD recevables en leurs demandes et en ce qu'il met hors de cause la société Necotrans et les organes de la procédure collective ouverte à son encontre, l'arrêt rendu le 16 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.