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Décisions

Cass. 1re civ., 16 janvier 2016, n° 18-10.603

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Cass. 1re civ. n° 18-10.603

15 janvier 2016

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Simon Y... a consenti à l'association L'Incitation à la création
(IAC) une donation portant sur quatorze de ses oeuvres, en précisant, par lettre du 5 mars 1987
adressée au vice-président de celle-ci, que « ces oeuvres ne pourront en aucun cas être
revendues et qu'elles ne pourront être utilisées que pour des accrochages ou des expositions à
caractère non commercial et non publicitaire » ; que Simon Y... est décédé le [...] , laissant pour
lui succéder son épouse, Mme X..., bénéficiaire de l'attribution intégrale en toute propriété des
biens meubles et immeubles dépendant de la communauté universelle, ainsi que de l'usufruit des
droits patrimoniaux d'auteur, et ses cinq enfants issus de leur union, Daniel, Jean-Marc, André,
Pierre et Anna (les consorts Y...), qui ont reçu la nue-propriété de ces droits et le droit moral ;
qu'ayant découvert, en novembre 2012, que l'oeuvre « [...] », incluse dans cette donation, allait
faire l'objet d'une vente aux enchères publiques à la requête de la société Total lubrifiants, et que
le débiteur saisi n'était pas l'association IAC mais M. A..., son président depuis 1988, Mme X... a
fait procéder, avant la vente, à une saisie-revendication, puis a assigné l'association IAC, M. A...
et la société Total lubrifiants en révocation de la donation pour inexécution fautive des charges ;
que ses enfants sont intervenus volontairement à l'instance ;
Sur le deuxième et le troisième moyens du pourvoi principal et les deux moyens du pourvoi
incident, ci-après annexés :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui
ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, qui est recevable :
Vu les articles 953 et 954 du code civil ;
Attendu que l'action en révocation d'une donation pour inexécution des charges peut être
intentée par le donateur ou ses héritiers ;
Attendu que, pour dire que Mme X... est dépourvue de qualité pour agir en révocation de la
donation et en conséquence déclarer irrecevables ses demandes, l'arrêt relève que celle-ci
sollicite la révocation de la donation au motif que la volonté de son époux tenant à l'absence de
revente des oeuvres ou à leur exposition n'a pas été respectée ; qu'il énonce que ces charges
invoquées ne relèvent pas, par leur nature, de la propriété matérielle des supports des oeuvres et
ne peuvent être assimilées à des charges grevant des donations portant sur des biens matériels,
mais relèvent du droit moral de l'artiste, peu important que l'association n'ait pas été investie du
moindre droit d'auteur ; qu'il en déduit que Mme X... agit donc afin que soit respecté le droit moral
de Simon Y..., lequel a été dévolu à ses enfants ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la donation portait sur des biens corporels, dont l'action en
révocation pour inexécution de charges engagée par Mme X... tendait à la restitution, la cour
d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que Mme X... est dépourvue de qualité pour
agir en révocation de la donation et en conséquence déclare irrecevables ses demandes, l'arrêt
rendu le 22 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en
conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit
arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. A... et l'association L'Incitation à la création aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à
Mme X..., MM. Daniel, Jean-Marc, André et Pierre Y... et à Mme Anna Y... la somme globale de 3
000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera
transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président
en son audience publique du seize janvier deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent
arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme
X..., MM. Daniel, Jean-Marc, André et Pierre Y... et Mme Anna Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait dit que Mme X... Y... était
dépourvue de qualité pour agir en révocation de la donation et en conséquence déclaré
irrecevables ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la qualité à agir de Mme Y... :
Que Mme Y... sollicite la révocation de la donation au motif que la volonté de son époux tenant à
l'absence de revente des oeuvres ou à leur exposition n'a pas été respectée ;
Que ces charges invoquées ne relèvent pas, par leur nature, de la propriété matérielle des
supports des oeuvres ; qu'elles ne peuvent être assimilées à des charges grevant des donations
portant sur des biens matériels ;
Qu'elles relèvent du droit moral de l'artiste, peu important que l'association n'ait pas été investie
du moindre droit d'auteur ;
Que Mme Y... agit donc afin que soit respecté le droit moral de Simon Y... ;
Que le droit moral de Simon Y... a été dévolu à ses enfants ;
Que Mme Y... n'a donc pas qualité à agir ; que sa demande est irrecevable » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la recevabilité de l'action de Mme X... Y... :
Que l'article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur a seul le droit de
divulguer son oeuvre ; que sous réserve des dispositions de l'article L. 132-24, il détermine le
procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci ;
Qu'en l'espèce, dans son écrit du 5 mars 1987, confirmant son don à l'association l'IAC de
l'ensemble des oeuvres qu'il avait réalisées pour Renault Art et Industrie, Simon Y... en précisant
« j'ai bien noté que ces oeuvres ne pourront en aucun cas être revendues, et qu'elles ne pourront
être utilisées que pour des accrochages ou des expositions à caractère non commercial et non
publicitaire », a lui-même fixé les conditions de divulgation de ses oeuvres ;
Qu'en demandant la révocation de la donation, Mme X... Y... qui invoque cette clause entend
faire respecter la volonté de l'artiste, c'est-à-dire son droit moral, et non pas son droit patrimonial ;
Qu'or, le droit moral de l'artiste a été dévolu exclusivement aux cinq enfants de Simon Y..., de
sorte que Mme X... Y... n'a pas la qualité pour faire constater la violation de la clause figurant
dans l'écrit du 5 mars 1987 de Simon Y... ;
Que les enfants Y... titulaires du droit moral sont intervenus volontairement à l'instance ; qu'ils ont
qualité pour agir » ;
ALORS QUE l'action en révocation d'une donation pour cause d'inexécution de ses conditions,
constitue un droit patrimonial du donateur qui se transmet à ses héritiers ; qu'il en va ainsi quel

que soit l'objet de la condition stipulée par le donateur ; qu'en l'espèce, pour considérer que Mme
X... Y... , veuve de Simon Y..., était dépourvue de qualité pour agir en révocation de la donation,
consentie par celui-ci, pour cause d'inexécution de ses conditions tenant notamment à l'absence
de revente des oeuvres données, la cour d'appel a retenu que les charges de la donation ne
relèveraient pas, « par leur nature, de la propriété matérielle des supports des oeuvres », mais «
du droit moral de l'artiste » dont elle n'est pas titulaire ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a
violé, par fausse application, l'article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle, et, par refus
d'application, les articles 953 et 954 du code civil.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la révocation de la donation à l'oeuvre intitulée « [...] », et
d'avoir rejeté la demande des consorts Y... tendant à voir ordonner la révocation de l'ensemble
de la donation du 5 mars 1987 de Simon Y... à l'association l'Incitation à la Création (I.A.C) ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la clause :
Qu'aux termes de l'article 953 du code civil, la donation ne peut être révoquée que pour « cause
d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite » ;
Que toute donation peut être révoquée en cas d'inexécution des charges dont elle est grevée ;
Qu'un don manuel est donc susceptible d'être révoqué même qualifié de définitif ;
Que Simon Y..., dans son courrier du 5 mars 1987, a donné à titre définitif les oeuvres et a « bien
noté » qu'elles ne pourront être revendues et ne pourront être utilisées qu'à certaines fins ;
Qu'ainsi, Simon Y... a donné les oeuvres mais « bien noté » leur absence de revente et leur
utilisation possible mais limitée ;
Que cette manifestation de volonté du donateur est corroborée par la destination initiale des
oeuvres – cédées à une structure ad hoc de la Régie Renault – et par les courriers précités dans
lesquels il rappelle son refus de toute spéculation ;
Qu'il ressort donc de ce courrier que le don était subordonné à l'absence d'exploitation à des fins
commerciales et à l'absence de revente ;
Que la donation litigieuse était ainsi assortie de charges ;
Qu'une donation est révocable si la charge dont elle est grevée et qui n'a pas été exécutée
constitue la cause impulsive et déterminante de la libéralité ;
Que Simon Y... n'a pas inséré dans l'acte une clause de révocation de plein droit ; qu'il appartient
au juge d'apprécier au vu des circonstances si la révocation doit être prononcée ;
Que l'absence de revente et l'interdiction d'accrochages ou d'expositions à des fins commerciales
ou publicitaires constituaient, à la lecture de ce courrier et de celui du galériste, une cause
impulsive et déterminante de la remise des oeuvres à l'association ;
Que la première charge est de ne pas revendre les oeuvres ; que cette charge est limitée à la
seule « revente » ; que leur cession ou remise à titre gratuit voire de prêt ne constitue pas une
violation de cette charge ;
Qu'il n'est nullement établi que l'association a « revendu » ces oeuvres à M. A... ou à sa
Fondation ; que l'exposition de celles-ci sous le nom de la Fondation A... ne caractérise donc pas
une inexécution de cette condition ;
Que seules deux oeuvres, les deux monochromes, sont susceptibles, au vu des conclusions des
parties, d'avoir fait l'objet d'une inexécution de cette charge ;
Qu'une simple intention de vendre est insuffisante à caractériser cette inexécution ;
Que, quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... ;
Qu'il a fait l'objet d'une saisie et d'une tentative de vente forcée par la société Total bénéficiant
d'un titre exécutoire à l'encontre de M. A... ;
Que la « revente » n'est pas limitée à la cession volontaire par l'association ; que la vente du bien
à la suite d'une saisie peut caractériser une inexécution de la charge ;
Que M. A... n'a pas contesté la saisie ;
Que toutefois, le tableau a été saisi sans appréhension courant 2004 parmi environ 200 oeuvres ;
que le bien a été emporté en septembre 2012, huit ans après, parmi d'autres pour être vendu aux
enchères ;

Que la vigilance de M. A... a pu être surprise ;
Que, s'agissant d'une oeuvre aussi connue, sa vente aux enchères publiques aurait été connue
de tous ;
Qu'en outre, au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens ;
Qu'enfin, il est constant que l'association a contesté la nouvelle saisie diligentée par la société
Total portant sur les autres oeuvres de Simon Y... ;
Qu'il ressort de ces éléments que le silence gardé ne caractérise pas une violation de la charge
précitée de nature à justifier la révocation de la donation ;
Qu'en ce qui concerne le « [...] » ce tableau a été donné à l'association ;
Qu'il n'est pas en sa possession ;
Qu'il lui appartient donc de justifier qu'elle a respecté, le concernant, la clause lui faisant
interdiction de le vendre et que son absence résulte d'autres motifs ;
Qu'elle ne verse aucune pièce à cet égard ;
Qu'elle n'a donc pas respecté la charge de sa donation ;
Que, compte-tenu des termes dénués d'équivoque de la condition et de l'importance attachée par
M. Y... à l'absence de spéculation, cette violation justifie la révocation de la donation ;
Que toutefois, la révocation peut n'être que partielle ;
Que la révocation sera donc limitée, au titre de la violation de la clause précitée, à ce tableau ;
Qu'en ce qui concerne la charge aux termes de laquelle les oeuvres « ne pourront être utilisées
que pour des accrochages ou des expositions à caractère non commercial et non publicitaire »
que les termes employés ne contraignent pas le donataire à utiliser les oeuvres à des expositions
mais lui interdisent de les utiliser à des fins commerciales ou publicitaires ;
Que les consorts Y... ne font pas état d'une telle utilisation ;
Que l'association n'a donc pas violé cette clause ;
Que la prétendue inactivité de l'association ou la violation alléguée de ses statuts ne
caractérisent pas une violation de la charge de la donation ;
Que la présence d'oeuvres données dans le salon de M. A... ou dans des expositions de la
fondation Jean A... ne constituent pas davantage une violation des charges, précises, stipulées
dans la donation ;
Que par conséquent, aucune autre charge que celle interdisant la revente n'a été violée ;
Que par conséquent, seule la révocation de la donation du « [...] » sera prononcée » ;
1°/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, les
consorts Y..., l'association IAC et M. A... s'accordaient sur le fait qu'en cas de reconnaissance de
l'inexécution partielle des conditions de la donation, la révocation pleine et entière de celle-ci
s'ensuivrait ; qu'après avoir constaté que l'association I.A.C. n'avait « pas respecté la charge de
sa donation », la cour d'appel en a pourtant ordonné la « révocation partielle » et non totale ;
qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE, subsidiairement, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et
observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, à supposer qu'elle n'aurait pas
modifié l'objet du litige en prononçant la révocation partielle de la donation, la cour d'appel aurait
alors relevé d'office le moyen pris de ce que « la révocation peut n'être que partielle » (arrêt, p.
22, § 10), sans provoquer les observations des parties, en violation de l'article 16 du code de
procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, l'inexécution partielle des conditions d'une donation
emporte sa révocation totale dès lors qu'elle est telle que le donateur n'aurait pas contracté s'il
avait prévu cette inexécution ; que dès lors, le juge ne saurait maintenir partiellement une
donation sans avoir recherché si le donateur l'aurait effectivement maintenue dans cette mesure
s'il avait envisagé l'inexécution partielle commise par le donataire ; qu'en l'espèce, après avoir
constaté la violation de la charge de la donation s'agissant de l'oeuvre « [...] », la cour d'appel a
retenu que « la révocation peut n'être que partielle » pour en déduire immédiatement que « la
révocation sera donc limitée, au titre de la violation de la clause précitée, à ce tableau » (arrêt p.
22, § 10 et 11) ; qu'en déduisant ainsi le caractère partiel de la révocation du seul constat de

l'inexécution partielle de la charge, quand il lui appartenait de rechercher si le donateur aurait
effectivement maintenu la donation des autres oeuvres s'il avait envisagé l'inexécution commise
par l'association donataire, la cour d'appel a violé les articles 953 et 954 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE AU PRECEDENT)
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la révocation de la donation à l'oeuvre intitulée « [...] », et
d'avoir rejeté la demande des consorts Y... tendant à voir ordonner la révocation de la donation
de l'oeuvre intitulée « [...] » ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la clause :
Qu'aux termes de l'article 953 du code civil, la donation ne peut être révoquée que pour « cause
d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite » ;
Que toute donation peut être révoquée en cas d'inexécution des charges dont elle est grevée ;
Qu'un don manuel est donc susceptible d'être révoqué même qualifié de définitif ;
Que Simon Y..., dans son courrier du 5 mars 1987, a donné à titre définitif les oeuvres et a « bien
noté » qu'elles ne pourront être revendues et ne pourront être utilisées qu'à certaines fins ;
Qu'ainsi, Simon Y... a donné les oeuvres mais « bien noté » leur absence de revente et leur
utilisation possible mais limitée ;
Que cette manifestation de volonté du donateur est corroborée par la destination initiale des
oeuvres – cédées à une structure ad hoc de la Régie Renault – et par les courriers précités dans
lesquels il rappelle son refus de toute spéculation ;
Qu'il ressort donc de ce courrier que le don était subordonné à l'absence d'exploitation à des fins
commerciales et à l'absence de revente ;
Que la donation litigieuse était ainsi assortie de charges ;
Qu'une donation est révocable si la charge dont elle est grevée et qui n'a pas été exécutée
constitue la cause impulsive et déterminante de la libéralité ;
Que Simon Y... n'a pas inséré dans l'acte une clause de révocation de plein droit ; qu'il appartient
au juge d'apprécier au vu des circonstances si la révocation doit être prononcée ;
Que l'absence de revente et l'interdiction d'accrochages ou d'expositions à des fins commerciales
ou publicitaires constituaient, à la lecture de ce courrier et de celui du galériste, une cause
impulsive et déterminante de la remise des oeuvres à l'association ;
Que la première charge est de ne pas revendre les oeuvres ; que cette charge est limitée à la
seule « revente » ; que leur cession ou remise à titre gratuit voire de prêt ne constitue pas une
violation de cette charge ;
Qu'il n'est nullement établi que l'association a « revendu » ces oeuvres à M. A... ou à sa
Fondation ; que l'exposition de celles-ci sous le nom de la Fondation A... ne caractérise donc pas
une inexécution de cette condition ;
Que seules deux oeuvres, les deux monochromes, sont susceptibles, au vu des conclusions des
parties, d'avoir fait l'objet d'une inexécution de cette charge ;
Qu'une simple intention de vendre est insuffisante à caractériser cette inexécution ;
Que, quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... ;
Qu'il a fait l'objet d'une saisie et d'une tentative de vente forcée par la société Total bénéficiant
d'un titre exécutoire à l'encontre de M. A... ;
Que la « revente » n'est pas limitée à la cession volontaire par l'association ; que la vente du bien
à la suite d'une saisie peut caractériser une inexécution de la charge ;
Que M. A... n'a pas contesté la saisie ;
Que toutefois, le tableau a été saisi sans appréhension courant 2004 parmi environ 200 oeuvres ;
que le bien a été emporté en septembre 2012, huit ans après, parmi d'autres pour être vendu aux
enchères ;
Que la vigilance de M. A... a pu être surprise ;
Que, s'agissant d'une oeuvre aussi connue, sa vente aux enchères publiques aurait été connue
de tous ;
Qu'en outre, au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens ;

Qu'enfin, il est constant que l'association a contesté la nouvelle saisie diligentée par la société
Total portant sur les autres oeuvres de Simon Y... ;
Qu'il ressort de ces éléments que le silence gardé ne caractérise pas une violation de la charge
précitée de nature à justifier la révocation de la donation ;
(...)
Que par conséquent, aucune autre charge que celle interdisant la revente n'a été violée ;
Que par conséquent, seule la révocation de la donation du « [...] » sera prononcée » ;
1°/ ALORS QUE le contrat de vente est formé dès qu'on est convenu de la chose et du prix,
quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ;
qu'en l'espèce, ainsi que la cour d'appel l'a elle-même rappelé, les consorts Y... invoquaient la
violation de la condition de non-revente stipulée par le donateur, en raison de « la vente du « [...]
» à M. D... ce qui résulte des conclusions de celui-ci et d'un avoir mentionné sur une facture à
l'en-tête personnelle de M. A... portant sur un autre tableau » et précisaient « que M. A... n'a pu
honorer la vente car le tableau était saisi » (arrêt, p. 12, § 6) ; que pour écarter la révocation de la
donation de cette oeuvre, la cour d'appel a retenu « qu'une simple intention de vendre est
insuffisante à caractériser cette inexécution » et que « quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a
pas été vendu à M. D... » (arrêt, p. 21, § 9 et 10) ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'était
invoquée non pas une « simple intention de vendre » l'oeuvre mais sa vente effective et parfaite
dont la livraison n'avait pas été honorée, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, en
violation des articles 953 et 954 du code civil, ensemble l'article 1583 du même code ;
2°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, la tentative du donataire de violer la charge d'une donation
justifie sa révocation dès lors qu'elle s'est concrétisée par des actes tendant directement à cette
violation, et que ce résultat n'a été évité qu'en raison de circonstances indépendantes de la
volonté du donataire ; qu'en l'espèce, les exposants faisaient précisément valoir que M. A...,
président de l'association donataire, avait vendu à M. Philippe D... l'oeuvre « [...] », et que cette
vente n'avait pas été honorée pour la seule raison que l'oeuvre avait été « saisie par Total
Lubrifiants » (conclusions des exposants, p. 20, § n°46) ; que pour écarter la révocation de la
donation de cette oeuvre, la cour d'appel a affirmé « qu'une simple intention de vendre est
insuffisante à caractériser cette inexécution » de la charge en sorte que, « quels qu'en soient les
motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... » (arrêt, p. 21, § 9 et 10) ; qu'en statuant ainsi,
cependant que ces motifs étaient de nature à justifier la révocation de la donation dès lors que
les actes du donataire tendaient directement à la vente de l'oeuvre et que seules des
circonstances extérieures avaient évité sa conclusion, la cour d'appel a violé les articles 953 et
954 du code civil ;
3°/ ALORS QUE manque à ses obligations le donataire qui, tenu de faire respecter la condition
de non-revente de l'oeuvre dont il a été gratifié, n'accomplit aucune diligence à cette fin ; qu'un tel
comportement caractérise une négligence fautive justifiant la révocation de la donation ; qu'en
l'espèce, ainsi que la cour d'appel l'a rappelé, les consorts Y... reprochaient à l'association
donataire et à son président d'avoir « laissé saisir puis mettre en vente le « [...] » » sans avoir
accompli « aucune diligence pour empêcher cette vente pendant huit ans » (arrêt, p. 12, § 8) ;
que pour écarter la révocation de la donation de cette oeuvre, la cour d'appel a retenu que « la
vigilance de M. A... a pu être surprise » lorsque « le bien a été emporté en septembre 2012, huit
ans après, parmi d'autres pour être vendu aux enchères », que cette vente « aurait été connue
de tous », « qu'au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens » et que « l'association a contesté la nouvelle
saisie diligentée par la société Total portant sur les autres oeuvres » (arrêt, p. 21, antépénult. § à
p. 22, § 3) ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen pris de la négligence fautive de la
donataire qui, durant les huit années ayant précédé la vente aux enchères, n'avait accompli
aucune diligence pour l'éviter, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux
Conseils, pour M. A... et de l'association L'Incitation à la création
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné la révocation de la donation portant sur l'oeuvre
intitulée « [...] » et d'AVOIR en conséquence condamné l'association L'incitation à la création et
M. A... in solidum à verser à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et
Mme Anna Y... épouse Z... la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE en ce qui concerne le « [...] », ce tableau a été donné à l'association ; qu'il
n'est pas en sa possession ; qu'il lui appartient donc de justifier qu'elle a respecté, le concernant,
la clause lui faisant interdiction de le vendre et que son absence résulte d'autres motifs ; qu'elle
ne verse aucune pièce à cet égard ; qu'elle n'a donc pas respecté la charge de sa donation ; que,
compte tenu des termes dénués d'équivoque de la condition et de l'importance attachée par M.
Y... à l'absence de spéculation, cette violation justifie la révocation de la donation ; que la
révocation peut n'être que partielle ; que la révocation sera donc limitée, au titre de la violation de
la clause précitée, à ce tableau ;
ALORS QU'il incombe au demandeur à l'action en révocation d'une donation pour inexécution
d'une obligation mise à la charge du donataire de rapporter la preuve de cette inexécution ; qu'en
retenant en l'espèce, pour ordonner la révocation de la donation, par Simon Y..., de son oeuvre
intitulée « [...] », que l'association donataire ne justifiait pas avoir respecté l'interdiction qui lui était
faite de procéder à sa revente, quand il appartenait aux demandeurs à l'action en révocation
d'établir qu'elle avait violé cette interdiction, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en
violation de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131
du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'association L'incitation à la création et M. A...
in solidum à verser à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et Mme Anna
Y... épouse Z... la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE compte tenu des moyens soulevés par l'association qui conteste en être
détenteur, la restitution du tableau « [...] » est impossible ; que le bien a été évalué à la somme
de 400 000 euros ; que l'association sera condamnée à verser cette somme ; qu'il appartient aux
appelants de démontrer que ce non-respect de la charge est également imputable à M. A... ; que
les conclusions, dans une autre procédure, de M. D..., ne peuvent engager M. A... ; que M. A...
était le président de l'association ; que des oeuvres données à l'association ont été apportées à
sa fondation ; que des oeuvres se sont trouvées à son domicile personnel ; que M. A... a ainsi
exercé personnellement sur les oeuvres données par Simon Y... des prérogatives excédant
celles d'un président d'association ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que le non-
respect de la condition est également dû à un fait personnel de M. A... ; qu'il sera donc
condamné, in solidum avec l'association, au paiement de cette somme ;
ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en
l'espèce, les consorts Y... ne sollicitaient, dans leurs conclusions d'appel, la condamnation in
solidum de l'association L'incitation à la création et de M. A... à verser la somme de 400 000
euros en réparation du préjudice résultant de la disparition du « [...] » qu'au seul profit de Mme
X... veuve Y... ; qu'en condamnant in solidum l'association L'incitation à la création et M. A... à
verser cette somme à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et Mme
Anna Y... épouse Z..., bien que ceux-ci n'aient formulé à leur profit aucune demande sur ce point,

la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de
procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2019:C100030

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Simon Y... a consenti à l'association L'Incitation à la création
(IAC) une donation portant sur quatorze de ses oeuvres, en précisant, par lettre du 5 mars 1987
adressée au vice-président de celle-ci, que « ces oeuvres ne pourront en aucun cas être
revendues et qu'elles ne pourront être utilisées que pour des accrochages ou des expositions à
caractère non commercial et non publicitaire » ; que Simon Y... est décédé le [...] , laissant pour
lui succéder son épouse, Mme X..., bénéficiaire de l'attribution intégrale en toute propriété des
biens meubles et immeubles dépendant de la communauté universelle, ainsi que de l'usufruit des
droits patrimoniaux d'auteur, et ses cinq enfants issus de leur union, Daniel, Jean-Marc, André,
Pierre et Anna (les consorts Y...), qui ont reçu la nue-propriété de ces droits et le droit moral ;
qu'ayant découvert, en novembre 2012, que l'oeuvre « [...] », incluse dans cette donation, allait
faire l'objet d'une vente aux enchères publiques à la requête de la société Total lubrifiants, et que
le débiteur saisi n'était pas l'association IAC mais M. A..., son président depuis 1988, Mme X... a
fait procéder, avant la vente, à une saisie-revendication, puis a assigné l'association IAC, M. A...
et la société Total lubrifiants en révocation de la donation pour inexécution fautive des charges ;
que ses enfants sont intervenus volontairement à l'instance ;
Sur le deuxième et le troisième moyens du pourvoi principal et les deux moyens du pourvoi
incident, ci-après annexés :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui
ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, qui est recevable :
Vu les articles 953 et 954 du code civil ;
Attendu que l'action en révocation d'une donation pour inexécution des charges peut être
intentée par le donateur ou ses héritiers ;
Attendu que, pour dire que Mme X... est dépourvue de qualité pour agir en révocation de la
donation et en conséquence déclarer irrecevables ses demandes, l'arrêt relève que celle-ci
sollicite la révocation de la donation au motif que la volonté de son époux tenant à l'absence de
revente des oeuvres ou à leur exposition n'a pas été respectée ; qu'il énonce que ces charges
invoquées ne relèvent pas, par leur nature, de la propriété matérielle des supports des oeuvres et
ne peuvent être assimilées à des charges grevant des donations portant sur des biens matériels,
mais relèvent du droit moral de l'artiste, peu important que l'association n'ait pas été investie du
moindre droit d'auteur ; qu'il en déduit que Mme X... agit donc afin que soit respecté le droit moral
de Simon Y..., lequel a été dévolu à ses enfants ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la donation portait sur des biens corporels, dont l'action en
révocation pour inexécution de charges engagée par Mme X... tendait à la restitution, la cour
d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que Mme X... est dépourvue de qualité pour
agir en révocation de la donation et en conséquence déclare irrecevables ses demandes, l'arrêt
rendu le 22 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en
conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit
arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. A... et l'association L'Incitation à la création aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à
Mme X..., MM. Daniel, Jean-Marc, André et Pierre Y... et à Mme Anna Y... la somme globale de 3
000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera
transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président
en son audience publique du seize janvier deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent
arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme
X..., MM. Daniel, Jean-Marc, André et Pierre Y... et Mme Anna Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait dit que Mme X... Y... était
dépourvue de qualité pour agir en révocation de la donation et en conséquence déclaré
irrecevables ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la qualité à agir de Mme Y... :
Que Mme Y... sollicite la révocation de la donation au motif que la volonté de son époux tenant à
l'absence de revente des oeuvres ou à leur exposition n'a pas été respectée ;
Que ces charges invoquées ne relèvent pas, par leur nature, de la propriété matérielle des
supports des oeuvres ; qu'elles ne peuvent être assimilées à des charges grevant des donations
portant sur des biens matériels ;
Qu'elles relèvent du droit moral de l'artiste, peu important que l'association n'ait pas été investie
du moindre droit d'auteur ;
Que Mme Y... agit donc afin que soit respecté le droit moral de Simon Y... ;
Que le droit moral de Simon Y... a été dévolu à ses enfants ;
Que Mme Y... n'a donc pas qualité à agir ; que sa demande est irrecevable » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la recevabilité de l'action de Mme X... Y... :
Que l'article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur a seul le droit de
divulguer son oeuvre ; que sous réserve des dispositions de l'article L. 132-24, il détermine le
procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci ;
Qu'en l'espèce, dans son écrit du 5 mars 1987, confirmant son don à l'association l'IAC de
l'ensemble des oeuvres qu'il avait réalisées pour Renault Art et Industrie, Simon Y... en précisant
« j'ai bien noté que ces oeuvres ne pourront en aucun cas être revendues, et qu'elles ne pourront
être utilisées que pour des accrochages ou des expositions à caractère non commercial et non
publicitaire », a lui-même fixé les conditions de divulgation de ses oeuvres ;
Qu'en demandant la révocation de la donation, Mme X... Y... qui invoque cette clause entend
faire respecter la volonté de l'artiste, c'est-à-dire son droit moral, et non pas son droit patrimonial ;
Qu'or, le droit moral de l'artiste a été dévolu exclusivement aux cinq enfants de Simon Y..., de
sorte que Mme X... Y... n'a pas la qualité pour faire constater la violation de la clause figurant
dans l'écrit du 5 mars 1987 de Simon Y... ;
Que les enfants Y... titulaires du droit moral sont intervenus volontairement à l'instance ; qu'ils ont
qualité pour agir » ;
ALORS QUE l'action en révocation d'une donation pour cause d'inexécution de ses conditions,
constitue un droit patrimonial du donateur qui se transmet à ses héritiers ; qu'il en va ainsi quel

que soit l'objet de la condition stipulée par le donateur ; qu'en l'espèce, pour considérer que Mme
X... Y... , veuve de Simon Y..., était dépourvue de qualité pour agir en révocation de la donation,
consentie par celui-ci, pour cause d'inexécution de ses conditions tenant notamment à l'absence
de revente des oeuvres données, la cour d'appel a retenu que les charges de la donation ne
relèveraient pas, « par leur nature, de la propriété matérielle des supports des oeuvres », mais «
du droit moral de l'artiste » dont elle n'est pas titulaire ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a
violé, par fausse application, l'article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle, et, par refus
d'application, les articles 953 et 954 du code civil.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la révocation de la donation à l'oeuvre intitulée « [...] », et
d'avoir rejeté la demande des consorts Y... tendant à voir ordonner la révocation de l'ensemble
de la donation du 5 mars 1987 de Simon Y... à l'association l'Incitation à la Création (I.A.C) ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la clause :
Qu'aux termes de l'article 953 du code civil, la donation ne peut être révoquée que pour « cause
d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite » ;
Que toute donation peut être révoquée en cas d'inexécution des charges dont elle est grevée ;
Qu'un don manuel est donc susceptible d'être révoqué même qualifié de définitif ;
Que Simon Y..., dans son courrier du 5 mars 1987, a donné à titre définitif les oeuvres et a « bien
noté » qu'elles ne pourront être revendues et ne pourront être utilisées qu'à certaines fins ;
Qu'ainsi, Simon Y... a donné les oeuvres mais « bien noté » leur absence de revente et leur
utilisation possible mais limitée ;
Que cette manifestation de volonté du donateur est corroborée par la destination initiale des
oeuvres – cédées à une structure ad hoc de la Régie Renault – et par les courriers précités dans
lesquels il rappelle son refus de toute spéculation ;
Qu'il ressort donc de ce courrier que le don était subordonné à l'absence d'exploitation à des fins
commerciales et à l'absence de revente ;
Que la donation litigieuse était ainsi assortie de charges ;
Qu'une donation est révocable si la charge dont elle est grevée et qui n'a pas été exécutée
constitue la cause impulsive et déterminante de la libéralité ;
Que Simon Y... n'a pas inséré dans l'acte une clause de révocation de plein droit ; qu'il appartient
au juge d'apprécier au vu des circonstances si la révocation doit être prononcée ;
Que l'absence de revente et l'interdiction d'accrochages ou d'expositions à des fins commerciales
ou publicitaires constituaient, à la lecture de ce courrier et de celui du galériste, une cause
impulsive et déterminante de la remise des oeuvres à l'association ;
Que la première charge est de ne pas revendre les oeuvres ; que cette charge est limitée à la
seule « revente » ; que leur cession ou remise à titre gratuit voire de prêt ne constitue pas une
violation de cette charge ;
Qu'il n'est nullement établi que l'association a « revendu » ces oeuvres à M. A... ou à sa
Fondation ; que l'exposition de celles-ci sous le nom de la Fondation A... ne caractérise donc pas
une inexécution de cette condition ;
Que seules deux oeuvres, les deux monochromes, sont susceptibles, au vu des conclusions des
parties, d'avoir fait l'objet d'une inexécution de cette charge ;
Qu'une simple intention de vendre est insuffisante à caractériser cette inexécution ;
Que, quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... ;
Qu'il a fait l'objet d'une saisie et d'une tentative de vente forcée par la société Total bénéficiant
d'un titre exécutoire à l'encontre de M. A... ;
Que la « revente » n'est pas limitée à la cession volontaire par l'association ; que la vente du bien
à la suite d'une saisie peut caractériser une inexécution de la charge ;
Que M. A... n'a pas contesté la saisie ;
Que toutefois, le tableau a été saisi sans appréhension courant 2004 parmi environ 200 oeuvres ;
que le bien a été emporté en septembre 2012, huit ans après, parmi d'autres pour être vendu aux
enchères ;

Que la vigilance de M. A... a pu être surprise ;
Que, s'agissant d'une oeuvre aussi connue, sa vente aux enchères publiques aurait été connue
de tous ;
Qu'en outre, au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens ;
Qu'enfin, il est constant que l'association a contesté la nouvelle saisie diligentée par la société
Total portant sur les autres oeuvres de Simon Y... ;
Qu'il ressort de ces éléments que le silence gardé ne caractérise pas une violation de la charge
précitée de nature à justifier la révocation de la donation ;
Qu'en ce qui concerne le « [...] » ce tableau a été donné à l'association ;
Qu'il n'est pas en sa possession ;
Qu'il lui appartient donc de justifier qu'elle a respecté, le concernant, la clause lui faisant
interdiction de le vendre et que son absence résulte d'autres motifs ;
Qu'elle ne verse aucune pièce à cet égard ;
Qu'elle n'a donc pas respecté la charge de sa donation ;
Que, compte-tenu des termes dénués d'équivoque de la condition et de l'importance attachée par
M. Y... à l'absence de spéculation, cette violation justifie la révocation de la donation ;
Que toutefois, la révocation peut n'être que partielle ;
Que la révocation sera donc limitée, au titre de la violation de la clause précitée, à ce tableau ;
Qu'en ce qui concerne la charge aux termes de laquelle les oeuvres « ne pourront être utilisées
que pour des accrochages ou des expositions à caractère non commercial et non publicitaire »
que les termes employés ne contraignent pas le donataire à utiliser les oeuvres à des expositions
mais lui interdisent de les utiliser à des fins commerciales ou publicitaires ;
Que les consorts Y... ne font pas état d'une telle utilisation ;
Que l'association n'a donc pas violé cette clause ;
Que la prétendue inactivité de l'association ou la violation alléguée de ses statuts ne
caractérisent pas une violation de la charge de la donation ;
Que la présence d'oeuvres données dans le salon de M. A... ou dans des expositions de la
fondation Jean A... ne constituent pas davantage une violation des charges, précises, stipulées
dans la donation ;
Que par conséquent, aucune autre charge que celle interdisant la revente n'a été violée ;
Que par conséquent, seule la révocation de la donation du « [...] » sera prononcée » ;
1°/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, les
consorts Y..., l'association IAC et M. A... s'accordaient sur le fait qu'en cas de reconnaissance de
l'inexécution partielle des conditions de la donation, la révocation pleine et entière de celle-ci
s'ensuivrait ; qu'après avoir constaté que l'association I.A.C. n'avait « pas respecté la charge de
sa donation », la cour d'appel en a pourtant ordonné la « révocation partielle » et non totale ;
qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE, subsidiairement, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et
observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, à supposer qu'elle n'aurait pas
modifié l'objet du litige en prononçant la révocation partielle de la donation, la cour d'appel aurait
alors relevé d'office le moyen pris de ce que « la révocation peut n'être que partielle » (arrêt, p.
22, § 10), sans provoquer les observations des parties, en violation de l'article 16 du code de
procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, l'inexécution partielle des conditions d'une donation
emporte sa révocation totale dès lors qu'elle est telle que le donateur n'aurait pas contracté s'il
avait prévu cette inexécution ; que dès lors, le juge ne saurait maintenir partiellement une
donation sans avoir recherché si le donateur l'aurait effectivement maintenue dans cette mesure
s'il avait envisagé l'inexécution partielle commise par le donataire ; qu'en l'espèce, après avoir
constaté la violation de la charge de la donation s'agissant de l'oeuvre « [...] », la cour d'appel a
retenu que « la révocation peut n'être que partielle » pour en déduire immédiatement que « la
révocation sera donc limitée, au titre de la violation de la clause précitée, à ce tableau » (arrêt p.
22, § 10 et 11) ; qu'en déduisant ainsi le caractère partiel de la révocation du seul constat de

l'inexécution partielle de la charge, quand il lui appartenait de rechercher si le donateur aurait
effectivement maintenu la donation des autres oeuvres s'il avait envisagé l'inexécution commise
par l'association donataire, la cour d'appel a violé les articles 953 et 954 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE AU PRECEDENT)
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la révocation de la donation à l'oeuvre intitulée « [...] », et
d'avoir rejeté la demande des consorts Y... tendant à voir ordonner la révocation de la donation
de l'oeuvre intitulée « [...] » ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la clause :
Qu'aux termes de l'article 953 du code civil, la donation ne peut être révoquée que pour « cause
d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite » ;
Que toute donation peut être révoquée en cas d'inexécution des charges dont elle est grevée ;
Qu'un don manuel est donc susceptible d'être révoqué même qualifié de définitif ;
Que Simon Y..., dans son courrier du 5 mars 1987, a donné à titre définitif les oeuvres et a « bien
noté » qu'elles ne pourront être revendues et ne pourront être utilisées qu'à certaines fins ;
Qu'ainsi, Simon Y... a donné les oeuvres mais « bien noté » leur absence de revente et leur
utilisation possible mais limitée ;
Que cette manifestation de volonté du donateur est corroborée par la destination initiale des
oeuvres – cédées à une structure ad hoc de la Régie Renault – et par les courriers précités dans
lesquels il rappelle son refus de toute spéculation ;
Qu'il ressort donc de ce courrier que le don était subordonné à l'absence d'exploitation à des fins
commerciales et à l'absence de revente ;
Que la donation litigieuse était ainsi assortie de charges ;
Qu'une donation est révocable si la charge dont elle est grevée et qui n'a pas été exécutée
constitue la cause impulsive et déterminante de la libéralité ;
Que Simon Y... n'a pas inséré dans l'acte une clause de révocation de plein droit ; qu'il appartient
au juge d'apprécier au vu des circonstances si la révocation doit être prononcée ;
Que l'absence de revente et l'interdiction d'accrochages ou d'expositions à des fins commerciales
ou publicitaires constituaient, à la lecture de ce courrier et de celui du galériste, une cause
impulsive et déterminante de la remise des oeuvres à l'association ;
Que la première charge est de ne pas revendre les oeuvres ; que cette charge est limitée à la
seule « revente » ; que leur cession ou remise à titre gratuit voire de prêt ne constitue pas une
violation de cette charge ;
Qu'il n'est nullement établi que l'association a « revendu » ces oeuvres à M. A... ou à sa
Fondation ; que l'exposition de celles-ci sous le nom de la Fondation A... ne caractérise donc pas
une inexécution de cette condition ;
Que seules deux oeuvres, les deux monochromes, sont susceptibles, au vu des conclusions des
parties, d'avoir fait l'objet d'une inexécution de cette charge ;
Qu'une simple intention de vendre est insuffisante à caractériser cette inexécution ;
Que, quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... ;
Qu'il a fait l'objet d'une saisie et d'une tentative de vente forcée par la société Total bénéficiant
d'un titre exécutoire à l'encontre de M. A... ;
Que la « revente » n'est pas limitée à la cession volontaire par l'association ; que la vente du bien
à la suite d'une saisie peut caractériser une inexécution de la charge ;
Que M. A... n'a pas contesté la saisie ;
Que toutefois, le tableau a été saisi sans appréhension courant 2004 parmi environ 200 oeuvres ;
que le bien a été emporté en septembre 2012, huit ans après, parmi d'autres pour être vendu aux
enchères ;
Que la vigilance de M. A... a pu être surprise ;
Que, s'agissant d'une oeuvre aussi connue, sa vente aux enchères publiques aurait été connue
de tous ;
Qu'en outre, au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens ;

Qu'enfin, il est constant que l'association a contesté la nouvelle saisie diligentée par la société
Total portant sur les autres oeuvres de Simon Y... ;
Qu'il ressort de ces éléments que le silence gardé ne caractérise pas une violation de la charge
précitée de nature à justifier la révocation de la donation ;
(...)
Que par conséquent, aucune autre charge que celle interdisant la revente n'a été violée ;
Que par conséquent, seule la révocation de la donation du « [...] » sera prononcée » ;
1°/ ALORS QUE le contrat de vente est formé dès qu'on est convenu de la chose et du prix,
quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ;
qu'en l'espèce, ainsi que la cour d'appel l'a elle-même rappelé, les consorts Y... invoquaient la
violation de la condition de non-revente stipulée par le donateur, en raison de « la vente du « [...]
» à M. D... ce qui résulte des conclusions de celui-ci et d'un avoir mentionné sur une facture à
l'en-tête personnelle de M. A... portant sur un autre tableau » et précisaient « que M. A... n'a pu
honorer la vente car le tableau était saisi » (arrêt, p. 12, § 6) ; que pour écarter la révocation de la
donation de cette oeuvre, la cour d'appel a retenu « qu'une simple intention de vendre est
insuffisante à caractériser cette inexécution » et que « quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a
pas été vendu à M. D... » (arrêt, p. 21, § 9 et 10) ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'était
invoquée non pas une « simple intention de vendre » l'oeuvre mais sa vente effective et parfaite
dont la livraison n'avait pas été honorée, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, en
violation des articles 953 et 954 du code civil, ensemble l'article 1583 du même code ;
2°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, la tentative du donataire de violer la charge d'une donation
justifie sa révocation dès lors qu'elle s'est concrétisée par des actes tendant directement à cette
violation, et que ce résultat n'a été évité qu'en raison de circonstances indépendantes de la
volonté du donataire ; qu'en l'espèce, les exposants faisaient précisément valoir que M. A...,
président de l'association donataire, avait vendu à M. Philippe D... l'oeuvre « [...] », et que cette
vente n'avait pas été honorée pour la seule raison que l'oeuvre avait été « saisie par Total
Lubrifiants » (conclusions des exposants, p. 20, § n°46) ; que pour écarter la révocation de la
donation de cette oeuvre, la cour d'appel a affirmé « qu'une simple intention de vendre est
insuffisante à caractériser cette inexécution » de la charge en sorte que, « quels qu'en soient les
motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... » (arrêt, p. 21, § 9 et 10) ; qu'en statuant ainsi,
cependant que ces motifs étaient de nature à justifier la révocation de la donation dès lors que
les actes du donataire tendaient directement à la vente de l'oeuvre et que seules des
circonstances extérieures avaient évité sa conclusion, la cour d'appel a violé les articles 953 et
954 du code civil ;
3°/ ALORS QUE manque à ses obligations le donataire qui, tenu de faire respecter la condition
de non-revente de l'oeuvre dont il a été gratifié, n'accomplit aucune diligence à cette fin ; qu'un tel
comportement caractérise une négligence fautive justifiant la révocation de la donation ; qu'en
l'espèce, ainsi que la cour d'appel l'a rappelé, les consorts Y... reprochaient à l'association
donataire et à son président d'avoir « laissé saisir puis mettre en vente le « [...] » » sans avoir
accompli « aucune diligence pour empêcher cette vente pendant huit ans » (arrêt, p. 12, § 8) ;
que pour écarter la révocation de la donation de cette oeuvre, la cour d'appel a retenu que « la
vigilance de M. A... a pu être surprise » lorsque « le bien a été emporté en septembre 2012, huit
ans après, parmi d'autres pour être vendu aux enchères », que cette vente « aurait été connue
de tous », « qu'au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens » et que « l'association a contesté la nouvelle
saisie diligentée par la société Total portant sur les autres oeuvres » (arrêt, p. 21, antépénult. § à
p. 22, § 3) ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen pris de la négligence fautive de la
donataire qui, durant les huit années ayant précédé la vente aux enchères, n'avait accompli
aucune diligence pour l'éviter, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux
Conseils, pour M. A... et de l'association L'Incitation à la création
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné la révocation de la donation portant sur l'oeuvre
intitulée « [...] » et d'AVOIR en conséquence condamné l'association L'incitation à la création et
M. A... in solidum à verser à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et
Mme Anna Y... épouse Z... la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE en ce qui concerne le « [...] », ce tableau a été donné à l'association ; qu'il
n'est pas en sa possession ; qu'il lui appartient donc de justifier qu'elle a respecté, le concernant,
la clause lui faisant interdiction de le vendre et que son absence résulte d'autres motifs ; qu'elle
ne verse aucune pièce à cet égard ; qu'elle n'a donc pas respecté la charge de sa donation ; que,
compte tenu des termes dénués d'équivoque de la condition et de l'importance attachée par M.
Y... à l'absence de spéculation, cette violation justifie la révocation de la donation ; que la
révocation peut n'être que partielle ; que la révocation sera donc limitée, au titre de la violation de
la clause précitée, à ce tableau ;
ALORS QU'il incombe au demandeur à l'action en révocation d'une donation pour inexécution
d'une obligation mise à la charge du donataire de rapporter la preuve de cette inexécution ; qu'en
retenant en l'espèce, pour ordonner la révocation de la donation, par Simon Y..., de son oeuvre
intitulée « [...] », que l'association donataire ne justifiait pas avoir respecté l'interdiction qui lui était
faite de procéder à sa revente, quand il appartenait aux demandeurs à l'action en révocation
d'établir qu'elle avait violé cette interdiction, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en
violation de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131
du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'association L'incitation à la création et M. A...
in solidum à verser à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et Mme Anna
Y... épouse Z... la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE compte tenu des moyens soulevés par l'association qui conteste en être
détenteur, la restitution du tableau « [...] » est impossible ; que le bien a été évalué à la somme
de 400 000 euros ; que l'association sera condamnée à verser cette somme ; qu'il appartient aux
appelants de démontrer que ce non-respect de la charge est également imputable à M. A... ; que
les conclusions, dans une autre procédure, de M. D..., ne peuvent engager M. A... ; que M. A...
était le président de l'association ; que des oeuvres données à l'association ont été apportées à
sa fondation ; que des oeuvres se sont trouvées à son domicile personnel ; que M. A... a ainsi
exercé personnellement sur les oeuvres données par Simon Y... des prérogatives excédant
celles d'un président d'association ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que le non-
respect de la condition est également dû à un fait personnel de M. A... ; qu'il sera donc
condamné, in solidum avec l'association, au paiement de cette somme ;
ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en
l'espèce, les consorts Y... ne sollicitaient, dans leurs conclusions d'appel, la condamnation in
solidum de l'association L'incitation à la création et de M. A... à verser la somme de 400 000
euros en réparation du préjudice résultant de la disparition du « [...] » qu'au seul profit de Mme
X... veuve Y... ; qu'en condamnant in solidum l'association L'incitation à la création et M. A... à
verser cette somme à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et Mme
Anna Y... épouse Z..., bien que ceux-ci n'aient formulé à leur profit aucune demande sur ce point,

la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de
procédure civile.ECLI:FR:CCASS:2019:C100030

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Simon Y... a consenti à l'association L'Incitation à la création
(IAC) une donation portant sur quatorze de ses oeuvres, en précisant, par lettre du 5 mars 1987
adressée au vice-président de celle-ci, que « ces oeuvres ne pourront en aucun cas être
revendues et qu'elles ne pourront être utilisées que pour des accrochages ou des expositions à
caractère non commercial et non publicitaire » ; que Simon Y... est décédé le [...] , laissant pour
lui succéder son épouse, Mme X..., bénéficiaire de l'attribution intégrale en toute propriété des
biens meubles et immeubles dépendant de la communauté universelle, ainsi que de l'usufruit des
droits patrimoniaux d'auteur, et ses cinq enfants issus de leur union, Daniel, Jean-Marc, André,
Pierre et Anna (les consorts Y...), qui ont reçu la nue-propriété de ces droits et le droit moral ;
qu'ayant découvert, en novembre 2012, que l'oeuvre « [...] », incluse dans cette donation, allait
faire l'objet d'une vente aux enchères publiques à la requête de la société Total lubrifiants, et que
le débiteur saisi n'était pas l'association IAC mais M. A..., son président depuis 1988, Mme X... a
fait procéder, avant la vente, à une saisie-revendication, puis a assigné l'association IAC, M. A...
et la société Total lubrifiants en révocation de la donation pour inexécution fautive des charges ;
que ses enfants sont intervenus volontairement à l'instance ;
Sur le deuxième et le troisième moyens du pourvoi principal et les deux moyens du pourvoi
incident, ci-après annexés :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui
ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, qui est recevable :
Vu les articles 953 et 954 du code civil ;
Attendu que l'action en révocation d'une donation pour inexécution des charges peut être
intentée par le donateur ou ses héritiers ;
Attendu que, pour dire que Mme X... est dépourvue de qualité pour agir en révocation de la
donation et en conséquence déclarer irrecevables ses demandes, l'arrêt relève que celle-ci
sollicite la révocation de la donation au motif que la volonté de son époux tenant à l'absence de
revente des oeuvres ou à leur exposition n'a pas été respectée ; qu'il énonce que ces charges
invoquées ne relèvent pas, par leur nature, de la propriété matérielle des supports des oeuvres et
ne peuvent être assimilées à des charges grevant des donations portant sur des biens matériels,
mais relèvent du droit moral de l'artiste, peu important que l'association n'ait pas été investie du
moindre droit d'auteur ; qu'il en déduit que Mme X... agit donc afin que soit respecté le droit moral
de Simon Y..., lequel a été dévolu à ses enfants ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la donation portait sur des biens corporels, dont l'action en
révocation pour inexécution de charges engagée par Mme X... tendait à la restitution, la cour
d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que Mme X... est dépourvue de qualité pour
agir en révocation de la donation et en conséquence déclare irrecevables ses demandes, l'arrêt
rendu le 22 décembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en
conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit
arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. A... et l'association L'Incitation à la création aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à
Mme X..., MM. Daniel, Jean-Marc, André et Pierre Y... et à Mme Anna Y... la somme globale de 3
000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera
transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président
en son audience publique du seize janvier deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent
arrêt
Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme
X..., MM. Daniel, Jean-Marc, André et Pierre Y... et Mme Anna Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait dit que Mme X... Y... était
dépourvue de qualité pour agir en révocation de la donation et en conséquence déclaré
irrecevables ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la qualité à agir de Mme Y... :
Que Mme Y... sollicite la révocation de la donation au motif que la volonté de son époux tenant à
l'absence de revente des oeuvres ou à leur exposition n'a pas été respectée ;
Que ces charges invoquées ne relèvent pas, par leur nature, de la propriété matérielle des
supports des oeuvres ; qu'elles ne peuvent être assimilées à des charges grevant des donations
portant sur des biens matériels ;
Qu'elles relèvent du droit moral de l'artiste, peu important que l'association n'ait pas été investie
du moindre droit d'auteur ;
Que Mme Y... agit donc afin que soit respecté le droit moral de Simon Y... ;
Que le droit moral de Simon Y... a été dévolu à ses enfants ;
Que Mme Y... n'a donc pas qualité à agir ; que sa demande est irrecevable » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la recevabilité de l'action de Mme X... Y... :
Que l'article L. 121-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur a seul le droit de
divulguer son oeuvre ; que sous réserve des dispositions de l'article L. 132-24, il détermine le
procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-ci ;
Qu'en l'espèce, dans son écrit du 5 mars 1987, confirmant son don à l'association l'IAC de
l'ensemble des oeuvres qu'il avait réalisées pour Renault Art et Industrie, Simon Y... en précisant
« j'ai bien noté que ces oeuvres ne pourront en aucun cas être revendues, et qu'elles ne pourront
être utilisées que pour des accrochages ou des expositions à caractère non commercial et non
publicitaire », a lui-même fixé les conditions de divulgation de ses oeuvres ;
Qu'en demandant la révocation de la donation, Mme X... Y... qui invoque cette clause entend
faire respecter la volonté de l'artiste, c'est-à-dire son droit moral, et non pas son droit patrimonial ;
Qu'or, le droit moral de l'artiste a été dévolu exclusivement aux cinq enfants de Simon Y..., de
sorte que Mme X... Y... n'a pas la qualité pour faire constater la violation de la clause figurant
dans l'écrit du 5 mars 1987 de Simon Y... ;
Que les enfants Y... titulaires du droit moral sont intervenus volontairement à l'instance ; qu'ils ont
qualité pour agir » ;
ALORS QUE l'action en révocation d'une donation pour cause d'inexécution de ses conditions,
constitue un droit patrimonial du donateur qui se transmet à ses héritiers ; qu'il en va ainsi quel

que soit l'objet de la condition stipulée par le donateur ; qu'en l'espèce, pour considérer que Mme
X... Y... , veuve de Simon Y..., était dépourvue de qualité pour agir en révocation de la donation,
consentie par celui-ci, pour cause d'inexécution de ses conditions tenant notamment à l'absence
de revente des oeuvres données, la cour d'appel a retenu que les charges de la donation ne
relèveraient pas, « par leur nature, de la propriété matérielle des supports des oeuvres », mais «
du droit moral de l'artiste » dont elle n'est pas titulaire ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a
violé, par fausse application, l'article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle, et, par refus
d'application, les articles 953 et 954 du code civil.
DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la révocation de la donation à l'oeuvre intitulée « [...] », et
d'avoir rejeté la demande des consorts Y... tendant à voir ordonner la révocation de l'ensemble
de la donation du 5 mars 1987 de Simon Y... à l'association l'Incitation à la Création (I.A.C) ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la clause :
Qu'aux termes de l'article 953 du code civil, la donation ne peut être révoquée que pour « cause
d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite » ;
Que toute donation peut être révoquée en cas d'inexécution des charges dont elle est grevée ;
Qu'un don manuel est donc susceptible d'être révoqué même qualifié de définitif ;
Que Simon Y..., dans son courrier du 5 mars 1987, a donné à titre définitif les oeuvres et a « bien
noté » qu'elles ne pourront être revendues et ne pourront être utilisées qu'à certaines fins ;
Qu'ainsi, Simon Y... a donné les oeuvres mais « bien noté » leur absence de revente et leur
utilisation possible mais limitée ;
Que cette manifestation de volonté du donateur est corroborée par la destination initiale des
oeuvres – cédées à une structure ad hoc de la Régie Renault – et par les courriers précités dans
lesquels il rappelle son refus de toute spéculation ;
Qu'il ressort donc de ce courrier que le don était subordonné à l'absence d'exploitation à des fins
commerciales et à l'absence de revente ;
Que la donation litigieuse était ainsi assortie de charges ;
Qu'une donation est révocable si la charge dont elle est grevée et qui n'a pas été exécutée
constitue la cause impulsive et déterminante de la libéralité ;
Que Simon Y... n'a pas inséré dans l'acte une clause de révocation de plein droit ; qu'il appartient
au juge d'apprécier au vu des circonstances si la révocation doit être prononcée ;
Que l'absence de revente et l'interdiction d'accrochages ou d'expositions à des fins commerciales
ou publicitaires constituaient, à la lecture de ce courrier et de celui du galériste, une cause
impulsive et déterminante de la remise des oeuvres à l'association ;
Que la première charge est de ne pas revendre les oeuvres ; que cette charge est limitée à la
seule « revente » ; que leur cession ou remise à titre gratuit voire de prêt ne constitue pas une
violation de cette charge ;
Qu'il n'est nullement établi que l'association a « revendu » ces oeuvres à M. A... ou à sa
Fondation ; que l'exposition de celles-ci sous le nom de la Fondation A... ne caractérise donc pas
une inexécution de cette condition ;
Que seules deux oeuvres, les deux monochromes, sont susceptibles, au vu des conclusions des
parties, d'avoir fait l'objet d'une inexécution de cette charge ;
Qu'une simple intention de vendre est insuffisante à caractériser cette inexécution ;
Que, quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... ;
Qu'il a fait l'objet d'une saisie et d'une tentative de vente forcée par la société Total bénéficiant
d'un titre exécutoire à l'encontre de M. A... ;
Que la « revente » n'est pas limitée à la cession volontaire par l'association ; que la vente du bien
à la suite d'une saisie peut caractériser une inexécution de la charge ;
Que M. A... n'a pas contesté la saisie ;
Que toutefois, le tableau a été saisi sans appréhension courant 2004 parmi environ 200 oeuvres ;
que le bien a été emporté en septembre 2012, huit ans après, parmi d'autres pour être vendu aux
enchères ;

Que la vigilance de M. A... a pu être surprise ;
Que, s'agissant d'une oeuvre aussi connue, sa vente aux enchères publiques aurait été connue
de tous ;
Qu'en outre, au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens ;
Qu'enfin, il est constant que l'association a contesté la nouvelle saisie diligentée par la société
Total portant sur les autres oeuvres de Simon Y... ;
Qu'il ressort de ces éléments que le silence gardé ne caractérise pas une violation de la charge
précitée de nature à justifier la révocation de la donation ;
Qu'en ce qui concerne le « [...] » ce tableau a été donné à l'association ;
Qu'il n'est pas en sa possession ;
Qu'il lui appartient donc de justifier qu'elle a respecté, le concernant, la clause lui faisant
interdiction de le vendre et que son absence résulte d'autres motifs ;
Qu'elle ne verse aucune pièce à cet égard ;
Qu'elle n'a donc pas respecté la charge de sa donation ;
Que, compte-tenu des termes dénués d'équivoque de la condition et de l'importance attachée par
M. Y... à l'absence de spéculation, cette violation justifie la révocation de la donation ;
Que toutefois, la révocation peut n'être que partielle ;
Que la révocation sera donc limitée, au titre de la violation de la clause précitée, à ce tableau ;
Qu'en ce qui concerne la charge aux termes de laquelle les oeuvres « ne pourront être utilisées
que pour des accrochages ou des expositions à caractère non commercial et non publicitaire »
que les termes employés ne contraignent pas le donataire à utiliser les oeuvres à des expositions
mais lui interdisent de les utiliser à des fins commerciales ou publicitaires ;
Que les consorts Y... ne font pas état d'une telle utilisation ;
Que l'association n'a donc pas violé cette clause ;
Que la prétendue inactivité de l'association ou la violation alléguée de ses statuts ne
caractérisent pas une violation de la charge de la donation ;
Que la présence d'oeuvres données dans le salon de M. A... ou dans des expositions de la
fondation Jean A... ne constituent pas davantage une violation des charges, précises, stipulées
dans la donation ;
Que par conséquent, aucune autre charge que celle interdisant la revente n'a été violée ;
Que par conséquent, seule la révocation de la donation du « [...] » sera prononcée » ;
1°/ ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en l'espèce, les
consorts Y..., l'association IAC et M. A... s'accordaient sur le fait qu'en cas de reconnaissance de
l'inexécution partielle des conditions de la donation, la révocation pleine et entière de celle-ci
s'ensuivrait ; qu'après avoir constaté que l'association I.A.C. n'avait « pas respecté la charge de
sa donation », la cour d'appel en a pourtant ordonné la « révocation partielle » et non totale ;
qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE, subsidiairement, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et
observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, à supposer qu'elle n'aurait pas
modifié l'objet du litige en prononçant la révocation partielle de la donation, la cour d'appel aurait
alors relevé d'office le moyen pris de ce que « la révocation peut n'être que partielle » (arrêt, p.
22, § 10), sans provoquer les observations des parties, en violation de l'article 16 du code de
procédure civile, ensemble l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, l'inexécution partielle des conditions d'une donation
emporte sa révocation totale dès lors qu'elle est telle que le donateur n'aurait pas contracté s'il
avait prévu cette inexécution ; que dès lors, le juge ne saurait maintenir partiellement une
donation sans avoir recherché si le donateur l'aurait effectivement maintenue dans cette mesure
s'il avait envisagé l'inexécution partielle commise par le donataire ; qu'en l'espèce, après avoir
constaté la violation de la charge de la donation s'agissant de l'oeuvre « [...] », la cour d'appel a
retenu que « la révocation peut n'être que partielle » pour en déduire immédiatement que « la
révocation sera donc limitée, au titre de la violation de la clause précitée, à ce tableau » (arrêt p.
22, § 10 et 11) ; qu'en déduisant ainsi le caractère partiel de la révocation du seul constat de

l'inexécution partielle de la charge, quand il lui appartenait de rechercher si le donateur aurait
effectivement maintenu la donation des autres oeuvres s'il avait envisagé l'inexécution commise
par l'association donataire, la cour d'appel a violé les articles 953 et 954 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE AU PRECEDENT)
Il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la révocation de la donation à l'oeuvre intitulée « [...] », et
d'avoir rejeté la demande des consorts Y... tendant à voir ordonner la révocation de la donation
de l'oeuvre intitulée « [...] » ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la clause :
Qu'aux termes de l'article 953 du code civil, la donation ne peut être révoquée que pour « cause
d'inexécution des conditions sous lesquelles elle aura été faite » ;
Que toute donation peut être révoquée en cas d'inexécution des charges dont elle est grevée ;
Qu'un don manuel est donc susceptible d'être révoqué même qualifié de définitif ;
Que Simon Y..., dans son courrier du 5 mars 1987, a donné à titre définitif les oeuvres et a « bien
noté » qu'elles ne pourront être revendues et ne pourront être utilisées qu'à certaines fins ;
Qu'ainsi, Simon Y... a donné les oeuvres mais « bien noté » leur absence de revente et leur
utilisation possible mais limitée ;
Que cette manifestation de volonté du donateur est corroborée par la destination initiale des
oeuvres – cédées à une structure ad hoc de la Régie Renault – et par les courriers précités dans
lesquels il rappelle son refus de toute spéculation ;
Qu'il ressort donc de ce courrier que le don était subordonné à l'absence d'exploitation à des fins
commerciales et à l'absence de revente ;
Que la donation litigieuse était ainsi assortie de charges ;
Qu'une donation est révocable si la charge dont elle est grevée et qui n'a pas été exécutée
constitue la cause impulsive et déterminante de la libéralité ;
Que Simon Y... n'a pas inséré dans l'acte une clause de révocation de plein droit ; qu'il appartient
au juge d'apprécier au vu des circonstances si la révocation doit être prononcée ;
Que l'absence de revente et l'interdiction d'accrochages ou d'expositions à des fins commerciales
ou publicitaires constituaient, à la lecture de ce courrier et de celui du galériste, une cause
impulsive et déterminante de la remise des oeuvres à l'association ;
Que la première charge est de ne pas revendre les oeuvres ; que cette charge est limitée à la
seule « revente » ; que leur cession ou remise à titre gratuit voire de prêt ne constitue pas une
violation de cette charge ;
Qu'il n'est nullement établi que l'association a « revendu » ces oeuvres à M. A... ou à sa
Fondation ; que l'exposition de celles-ci sous le nom de la Fondation A... ne caractérise donc pas
une inexécution de cette condition ;
Que seules deux oeuvres, les deux monochromes, sont susceptibles, au vu des conclusions des
parties, d'avoir fait l'objet d'une inexécution de cette charge ;
Qu'une simple intention de vendre est insuffisante à caractériser cette inexécution ;
Que, quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... ;
Qu'il a fait l'objet d'une saisie et d'une tentative de vente forcée par la société Total bénéficiant
d'un titre exécutoire à l'encontre de M. A... ;
Que la « revente » n'est pas limitée à la cession volontaire par l'association ; que la vente du bien
à la suite d'une saisie peut caractériser une inexécution de la charge ;
Que M. A... n'a pas contesté la saisie ;
Que toutefois, le tableau a été saisi sans appréhension courant 2004 parmi environ 200 oeuvres ;
que le bien a été emporté en septembre 2012, huit ans après, parmi d'autres pour être vendu aux
enchères ;
Que la vigilance de M. A... a pu être surprise ;
Que, s'agissant d'une oeuvre aussi connue, sa vente aux enchères publiques aurait été connue
de tous ;
Qu'en outre, au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens ;

Qu'enfin, il est constant que l'association a contesté la nouvelle saisie diligentée par la société
Total portant sur les autres oeuvres de Simon Y... ;
Qu'il ressort de ces éléments que le silence gardé ne caractérise pas une violation de la charge
précitée de nature à justifier la révocation de la donation ;
(...)
Que par conséquent, aucune autre charge que celle interdisant la revente n'a été violée ;
Que par conséquent, seule la révocation de la donation du « [...] » sera prononcée » ;
1°/ ALORS QUE le contrat de vente est formé dès qu'on est convenu de la chose et du prix,
quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ;
qu'en l'espèce, ainsi que la cour d'appel l'a elle-même rappelé, les consorts Y... invoquaient la
violation de la condition de non-revente stipulée par le donateur, en raison de « la vente du « [...]
» à M. D... ce qui résulte des conclusions de celui-ci et d'un avoir mentionné sur une facture à
l'en-tête personnelle de M. A... portant sur un autre tableau » et précisaient « que M. A... n'a pu
honorer la vente car le tableau était saisi » (arrêt, p. 12, § 6) ; que pour écarter la révocation de la
donation de cette oeuvre, la cour d'appel a retenu « qu'une simple intention de vendre est
insuffisante à caractériser cette inexécution » et que « quels qu'en soient les motifs, le « [...] » n'a
pas été vendu à M. D... » (arrêt, p. 21, § 9 et 10) ; qu'en statuant ainsi, cependant qu'était
invoquée non pas une « simple intention de vendre » l'oeuvre mais sa vente effective et parfaite
dont la livraison n'avait pas été honorée, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, en
violation des articles 953 et 954 du code civil, ensemble l'article 1583 du même code ;
2°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, la tentative du donataire de violer la charge d'une donation
justifie sa révocation dès lors qu'elle s'est concrétisée par des actes tendant directement à cette
violation, et que ce résultat n'a été évité qu'en raison de circonstances indépendantes de la
volonté du donataire ; qu'en l'espèce, les exposants faisaient précisément valoir que M. A...,
président de l'association donataire, avait vendu à M. Philippe D... l'oeuvre « [...] », et que cette
vente n'avait pas été honorée pour la seule raison que l'oeuvre avait été « saisie par Total
Lubrifiants » (conclusions des exposants, p. 20, § n°46) ; que pour écarter la révocation de la
donation de cette oeuvre, la cour d'appel a affirmé « qu'une simple intention de vendre est
insuffisante à caractériser cette inexécution » de la charge en sorte que, « quels qu'en soient les
motifs, le « [...] » n'a pas été vendu à M. D... » (arrêt, p. 21, § 9 et 10) ; qu'en statuant ainsi,
cependant que ces motifs étaient de nature à justifier la révocation de la donation dès lors que
les actes du donataire tendaient directement à la vente de l'oeuvre et que seules des
circonstances extérieures avaient évité sa conclusion, la cour d'appel a violé les articles 953 et
954 du code civil ;
3°/ ALORS QUE manque à ses obligations le donataire qui, tenu de faire respecter la condition
de non-revente de l'oeuvre dont il a été gratifié, n'accomplit aucune diligence à cette fin ; qu'un tel
comportement caractérise une négligence fautive justifiant la révocation de la donation ; qu'en
l'espèce, ainsi que la cour d'appel l'a rappelé, les consorts Y... reprochaient à l'association
donataire et à son président d'avoir « laissé saisir puis mettre en vente le « [...] » » sans avoir
accompli « aucune diligence pour empêcher cette vente pendant huit ans » (arrêt, p. 12, § 8) ;
que pour écarter la révocation de la donation de cette oeuvre, la cour d'appel a retenu que « la
vigilance de M. A... a pu être surprise » lorsque « le bien a été emporté en septembre 2012, huit
ans après, parmi d'autres pour être vendu aux enchères », que cette vente « aurait été connue
de tous », « qu'au regard de l'importance de la dette de M. A..., la vente de cette oeuvre
n'empêcherait pas la vente forcée de ses biens » et que « l'association a contesté la nouvelle
saisie diligentée par la société Total portant sur les autres oeuvres » (arrêt, p. 21, antépénult. § à
p. 22, § 3) ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen pris de la négligence fautive de la
donataire qui, durant les huit années ayant précédé la vente aux enchères, n'avait accompli
aucune diligence pour l'éviter, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux
Conseils, pour M. A... et de l'association L'Incitation à la création
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR ordonné la révocation de la donation portant sur l'oeuvre
intitulée « [...] » et d'AVOIR en conséquence condamné l'association L'incitation à la création et
M. A... in solidum à verser à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et
Mme Anna Y... épouse Z... la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE en ce qui concerne le « [...] », ce tableau a été donné à l'association ; qu'il
n'est pas en sa possession ; qu'il lui appartient donc de justifier qu'elle a respecté, le concernant,
la clause lui faisant interdiction de le vendre et que son absence résulte d'autres motifs ; qu'elle
ne verse aucune pièce à cet égard ; qu'elle n'a donc pas respecté la charge de sa donation ; que,
compte tenu des termes dénués d'équivoque de la condition et de l'importance attachée par M.
Y... à l'absence de spéculation, cette violation justifie la révocation de la donation ; que la
révocation peut n'être que partielle ; que la révocation sera donc limitée, au titre de la violation de
la clause précitée, à ce tableau ;
ALORS QU'il incombe au demandeur à l'action en révocation d'une donation pour inexécution
d'une obligation mise à la charge du donataire de rapporter la preuve de cette inexécution ; qu'en
retenant en l'espèce, pour ordonner la révocation de la donation, par Simon Y..., de son oeuvre
intitulée « [...] », que l'association donataire ne justifiait pas avoir respecté l'interdiction qui lui était
faite de procéder à sa revente, quand il appartenait aux demandeurs à l'action en révocation
d'établir qu'elle avait violé cette interdiction, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en
violation de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131
du 10 février 2016.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'association L'incitation à la création et M. A...
in solidum à verser à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et Mme Anna
Y... épouse Z... la somme de 400 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE compte tenu des moyens soulevés par l'association qui conteste en être
détenteur, la restitution du tableau « [...] » est impossible ; que le bien a été évalué à la somme
de 400 000 euros ; que l'association sera condamnée à verser cette somme ; qu'il appartient aux
appelants de démontrer que ce non-respect de la charge est également imputable à M. A... ; que
les conclusions, dans une autre procédure, de M. D..., ne peuvent engager M. A... ; que M. A...
était le président de l'association ; que des oeuvres données à l'association ont été apportées à
sa fondation ; que des oeuvres se sont trouvées à son domicile personnel ; que M. A... a ainsi
exercé personnellement sur les oeuvres données par Simon Y... des prérogatives excédant
celles d'un président d'association ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que le non-
respect de la condition est également dû à un fait personnel de M. A... ; qu'il sera donc
condamné, in solidum avec l'association, au paiement de cette somme ;
ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en
l'espèce, les consorts Y... ne sollicitaient, dans leurs conclusions d'appel, la condamnation in
solidum de l'association L'incitation à la création et de M. A... à verser la somme de 400 000
euros en réparation du préjudice résultant de la disparition du « [...] » qu'au seul profit de Mme
X... veuve Y... ; qu'en condamnant in solidum l'association L'incitation à la création et M. A... à
verser cette somme à M. Daniel Y..., M. Jean-Marc Y..., M. André Y..., M. Pierre Y... et Mme
Anna Y... épouse Z..., bien que ceux-ci n'aient formulé à leur profit aucune demande sur ce point,

la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de
procédure civile.