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Décisions

Cass. com., 22 octobre 2013, n° 12-24.162

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Lyon, du 22 juin 2012

22 juin 2012

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 22 juin 2012) et les productions, que M. X... a fondé avec plusieurs associés la société Apex-CLL, aujourd'hui dénommée la société à responsabilité limitée Laser vision institut Lyon (la société LVIL), ayant pour activité l'exploitation d'un centre de chirurgie réfractive, dont il était le gérant ; qu'à la suite d'une opération de restructuration, la société Amexc, ayant pour dirigeant M. Y..., est devenue l'associé majoritaire de la société LVIL ; que l'assemblée des associés de la société LVIL qui s'est tenue le 20 avril 2005 a rejeté la résolution portant sur l'approbation des comptes et révoqué M. X... de ses fonctions de gérant ; que soutenant que sa révocation était intervenue sans juste motif et dans des conditions brusques et vexatoires, M. X... a fait assigner les sociétés LVIL et Amexc et M. Y...en dommages-intérêts ; que la société LVIL a sollicité reconventionnellement la condamnation de M. X... au paiement de certaines sommes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société LVIL la somme de 80 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge est lié par les conclusions des parties et doit se prononcer seulement sur ce qui est demandé ; qu'en condamnant M. X... à payer à la société Laser vision institut Lyon la somme de 80 000 euros à titre de dommages-intérêts lorsque les conclusions de la société Laser vision institut Lyon demandaient exclusivement à la cour d'appel de dire et juger que les faits ayant justifié la révocation de M. X... étaient fautifs et avaient entraîné un préjudice de 548 996 euros sans former une demande de condamnation, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que la cour d'appel, qui a relevé d'office le moyen pris de la faute qu'aurait commise M. X... « en ne prenant pas des mesures pour remédier aux écarts entre le nombre de tirs laser enregistrés par les machines et le nombre d'actes facturés et surtout pour permettre une traçabilité des écarts », faute qui fonde la condamnation à 80 000 euros de dommages-intérêts, et qui n'a pas provoqué les explications des parties, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°/ que la cour d'appel, qui n'a pas recherché en quoi les faits de ne pas prendre « des mesures pour remédier aux écarts entre le nombre de tirs laser enregistrés par les machines et le nombre d'actes facturés et surtout pour permettre une traçabilité des écarts » étaient constitutifs de fautes de gestion engageant la responsabilité du gérant envers la société, a privé de base légale sa décision au regard de l'article L. 223-25 du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en l'état des textes alors applicables, la cour d'appel était régulièrement saisie d'une demande de condamnation explicitement formée dans les motifs des conclusions de la société LVIL ;

Et attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que l'absence de mise en place d'une procédure de prise en charge des patients et de contrôle interne est source d'un risque fiscal et de responsabilité civile ; qu'il retient encore que l'existence d'écarts entre la comptabilité, le compteur interne et le compteur laser concernant le nombre de tirs est de nature à entraîner une suspicion de fraude à défaut de traces permettant de justifier de tels écarts ; qu'il ajoute que ces faits sont imputables à M. X... auquel il appartenait, en tant que gérant de la société LVIL, de prendre toutes les dispositions nécessaires à son bon fonctionnement ; qu'ayant ainsi fait ressortir qu'en s'abstenant de prendre les mesures propres à remédier à ces écarts et à en assurer la traçabilité, M. X... avait commis des fautes de gestion engageant sa responsabilité, la cour d'appel, qui a fondé sa décision sur un moyen qui était dans le débat, et qui a effectué la recherche invoquée par la troisième branche, a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt de condamner la société LVIL à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts du fait du caractère brutal de la révocation, alors, selon le moyen, que la révocation du gérant de la société à responsabilité limitée est subordonnée à l'existence de justes motifs dont le gérant doit avoir connaissance avant la décision de l'assemblée des associés afin de pouvoir les réfuter dans l'exercice des droits de la défense ; que faute pour le gérant d'avoir pu s'expliquer sur les faits qui lui étaient imputés, ces faits ne sauraient constituer de justes motifs de révocation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a constaté que M. X... n'avait pas été avisé des faits qui lui étaient reprochés antérieurement à l'assemblée des associés ayant prononcé la révocation avec effet immédiat de ses fonctions de gérant, et a rejeté la demande de M. X... tendant à obtenir des dommages-intérêts pour révocation sans juste motif, n'a pas tiré de ses propres énonciations les conséquences légales qui en découlaient en violation de l'article 223-25 du code de commerce et de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que l'arrêt retient que les questions inscrites à l'ordre du jour de l'assemblée des associés du 20 avril 2005 étaient susceptibles de déboucher sur la question de la révocation du gérant et que l'assemblée avait donc pu valablement délibérer sur cette révocation ; qu'ayant constaté que M. X... n'avait été invité à s'exprimer qu'après que la décision de révocation eut été prise, l'arrêt retient encore que cette révocation décidée sans que l'intéressé ait été préalablement invité à s'expliquer sur les faits qui lui étaient reprochés a revêtu un caractère brutal ; que de ces constatations et appréciations, lesquelles étaient étrangères à l'existence d'un juste motif de révocation, la cour d'appel a exactement déduit que M. X... pouvait seulement prétendre à des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par lui du fait des circonstances brutales de sa révocation ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.