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Décisions

Cass. 3e civ., 21 janvier 2021, n° 20-40.061

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chauvin

Rapporteur :

Mme Djikpa

Avocat général :

M. Brun

Avocats :

SCP Foussard et Froger, Me Le Prado

TJ Marseille, du 21 oct. 2020

21 octobre 2020

Jonction

1. En raison de leur connexité, les questions prioritaires de constitutionnalité n° J 20-40.062 et G 20-40.061 sont jointes.

Faits et procédure

2. Après avoir acquis, par voie de cessions amiables, les parcelles nécessaires à la réalisation d'un projet qui avait préalablement été déclaré d'utilité publique, l'établissement public d'aménagement Euroméditerranée (l'EPAEM) a saisi le juge de l'expropriation aux fins de fixation des indemnités d'éviction revenant à la société [...] et à la Société de maintenance de réparation de matériel maritime, locataires des biens en cause.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

3. Par jugements du 21 octobre 2020, la juridiction de l'expropriation des Bouches-du-Rhône a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article L. 323-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique en ce qu'elles ne s'appliquent pas aux locataires occupant un bien ayant fait l'objet d'un transfert de propriété par voie de cession amiable au profit de l'expropriant, portent-t-elles atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment le principe d'égalité devant la loi et la liberté d'entreprendre ? ».

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

4. La disposition contestée est applicable au litige, qui porte sur la fixation d'une indemnité d'éviction par le juge de l'expropriation au profit d'un locataire commerçant dont le relogement ou la réinstallation n'est pas assurée par l'expropriant.

5. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

6. La question posée présente un caractère sérieux en ce que cette disposition, qui permet aux locataires ou preneurs commerçants, artisans, industriels ou agricoles d'un bien exproprié d'obtenir un acompte, représentant la moitié du montant des offres de l'expropriant, est réservée aux locataires d'un bien ayant fait l'objet d'une ordonnance d'expropriation, à l'exclusion des locataires d'un bien ayant donné lieu à une cession amiable consentie à l'expropriant après déclaration d'utilité publique, est susceptible de porter atteinte aux principes d'égalité devant la loi et de la liberté d'entreprendre.

7. En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité.