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Décisions

Cass. soc., 26 janvier 2000, n° 98-44.177

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gélineau-Larrivet

Rapporteur :

M. Frouin

Avocat général :

Mme Barrairon

Avocat :

SCP Piwnica et Molinié

Cons. prud'h. Montpellier, du 5 mai 1998

5 mai 1998

Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 98-44.177 à 98-44.182 ;

Attendu que M. X... et cinq autres salariés de la société Stade 1 ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de sommes à titre d'indemnité compensatrice de jours de grève et à titre de rappel d'heures supplémentaires ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que l'AGS et l'UNEDIC font grief aux jugements attaqués d'avoir fixé au passif de l'employeur un rappel d'heures supplémentaires avec indemnités de congés payés y afférents ainsi que des dommages-intérêts pour résistance abusive, alors, selon le moyen, que l'AGS avait contesté, dans ses écritures, les documents versés aux débats par le salarié à l'appui de sa demande en paiement d'heures supplémentaires ; qu'en estimant que les salariés n'avaient pas été contredits en ce qu'ils invoquaient des heures supplémentaires, le conseil de prud'hommes a dénaturé les termes du litige et a ainsi violé les dispositions de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que le conseil de prud'hommes, qui a seulement constaté que l'employeur se bornait à contester les éléments fournis par les salariés sans produire des éléments propres à les contredire, n'a pas modifié les termes du litige ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 521-1 du Code du travail ;

Attendu que, pour accueillir la demande des salariés à titre d'indemnité compensatrice de jours de grève, le conseil de prud'hommes a énoncé que la grève avait été déclenchée pour obtenir le paiement des salaires des mois d'avril et mai 1997, qu'il est de jurisprudence constante que l'employeur n'a pas respecté ses engagements et que de ce fait les salaires doivent être payés ;

Attendu, cependant, que la grève ayant pour effet de suspendre l'exécution du contrat de travail, l'employeur n'est pas tenu de payer le salaire pendant la période de cessation du travail ; que ce n'est que dans le cas où les salariés se sont trouvés dans une situation contraignante telle qu'ils ont été obligés de cesser le travail pour faire respecter leurs droits essentiels, directement lésés par suite d'un manquement grave et délibéré de l'employeur à ses obligations que celui-ci peut être condamné à payer aux grévistes une indemnité correspondant à la perte de leur salaire ;

Qu'en statuant comme il l'a fait, alors qu'il résultait de ses énonciations que, si la grève était motivée par le non-paiement des salaires des mois d'avril et mai 1997, l'entreprise avait été préalablement placée sous le régime du redressement judiciaire en raison de ses difficultés financières, ce dont il découlait que le manquement de l'employeur n'était pas délibéré, le conseil de prud'hommes n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ;

Et sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 143-11-1, alinéa 1er, du Code du travail ;

Attendu que, selon l'article L. 143-11-1, alinéa 1er, du Code du travail, en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, l'AGS garantit le paiement des sommes dues aux salariés en exécution de leur contrat de travail ;

Attendu que la cour d'appel a décidé que l'AGS était tenue de garantir les sommes allouées aux salariés à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive à la demande des salariés ;

Q'en statuant ainsi, alors que les sommes allouées à des salariés par décision de justice à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive à leur demande ne résultent pas de l'exécution du contrat de travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne l'indemnité compensatrice de jours de grève et les dommages-intérêts pour résistance abusive alloués aux salariés, les jugements rendus le 5 mai 1998, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Montpellier ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits jugements et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Nîmes.