Cass. com., 12 février 2013, n° 11-23.610
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui était gérant de la société à responsabilité limitée Assainissement services adréchois (la société ASA), a été révoqué de ses fonctions lors de l'assemblée générale tenue le 28 octobre 2008 sur la proposition de M. Y..., associé majoritaire ; qu'il a fait assigner la société ASA et M. Y... en dommages-intérêts ; que les sociétés Assainissement services et Azur copropriété travaux appartenant au même groupe sont intervenues volontairement à l'instance ;
Sur le deuxième et le troisième moyens :
Attendu que ces moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Attendu que la société ASA et M. Y... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés solidairement à payer à M. X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts en réparation de la révocation vexatoire dont il a fait l'objet, alors, selon le moyen, que le quitus délivré au gérant d'une société pour sa gestion ne prive pas de juste motif la révocation prononcée en raison de détournements commis au préjudice d'autres sociétés du groupe, de telles fautes étant distinctes de la gestion approuvée par le quitus ; qu'en l'espèce, les exposants faisaient valoir que M. X... avait été révoqué, lors de l'assemblée du 28 octobre 2008, de son mandat de gérant de la société ASA en raison des détournements de fonds ou de marchandises qu'il avait commis au préjudice d'autres sociétés du groupe (les sociétés Assainissement services et Azur copropriété travaux) ; que la cour d'appel a d'ailleurs condamné M. X... à rembourser à la société Azur copropriété travaux la valeur de marchandises qui appartenaient à cette dernière mais qui avaient été utilisées pour le chantier de la « maison de M. X... » ; qu'en retenant que la seule délivrance à M. X... d'un quitus pour sa gestion de la société ASA au titre de l'année 2007-2008 suffisait à priver sa révocation de juste motif, lorsque le quitus ne couvrait pas les actes commis par l'intéressé au détriment des deux autres entités du groupe, la cour d'appel a violé l'article L. 223-5 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu'il résulte du procès-verbal de séance que M. Y... fait état d'une perte de confiance à l'égard du gérant, et entend faire un incident de séance après examen de l'activité de la société, des comptes sociaux de l'exercice écoulé, des perspectives d'avenir et de la gestion de la société ; qu'il relève encore que lors de l'assemblée générale du 30 mars 2009, les comptes 2007-2008 concernant la période où M. X... était gérant, ont été approuvés et qu'il a reçu quitus de sa gestion pour cette période ; qu'en l'état de ces constatations faisant ressortir que les détournements allégués n'avaient pas été invoqués au soutien de la décision de révocation litigieuse, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen est inopérant ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que lors de l'assemblée générale du 30 mars 2009, M. Y..., toujours majoritaire, pouvait refuser quitus à M. X... s'il avait considéré qu'il existait des éléments suffisants pour justifier les faits qu'il lui avait reprochés en octobre 2008, et qu'il a manifestement abusé de sa position d'associé majoritaire pour parvenir à la révocation de M. X... ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher l'existence d'une volonté de nuire constitutive d'une faute personnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE et ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Y..., conjointement et solidairement avec la société Assainissement services adréchois, à payer à M. X... une somme de 60 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de la révocation vexatoire dont il a fait l'objet, et en ce qu'il a condamné M. Y..., conjointement et solidairement avec la société Assainissement services adréchois, la société Azur assainissement services et la société Azur copropriété travaux au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 16 juin 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.