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Décisions

Cass. 1re civ., 5 novembre 1991, n° 90-15.298

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Cass. 1re civ. n° 90-15.298

4 novembre 1991

Attendu que l'Union générale cinématographique (UGC) a formé, en 1948, avec la société italienne Tever film une association en participation ayant pour objet exclusif la réalisation et l'exploitation du film de Rossellini Allemagne année zéro, dont la première projection publique a eu lieu, à Milan, le 1er décembre 1948 ; qu'il était convenu que le négatif du film dont les deux sociétés resteront copropriétaires sera à la libre disposition d'UGC et qu'une copie destinée à la seule fin d'exploitation en Italie sera remise à la société Tever ; que cette dernière avait l'exploitation exclusive du film pour l'Italie tandis que l'UGC avait celle pour la France ; que la société française Télédis, cessionnaire des droits d'UGC, a, le 28 juin 1988, assigné la société Films sans frontières (FSF) pour faire cesser l'exploitation en France du film qui lui avait été concédée, en 1986, par les sociétés Arcana et Adige venant aux droits de la société Tever, lesquelles ont été appelées en garantie par FSF ; que l'arrêt attaqué a rejeté cette demande aux motifs que la diffusion du film était devenue libre ;.

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, et le deuxième moyen, réunis : (sans intérêt) ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré caduc l'accord de 1948 aux motifs que les droits d'auteur avaient disparu par l'entrée du film dans le domaine public, alors, selon le moyen, que les droits des producteurs sur les supports matériels des films sont distincts des droits d'auteur et que la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil et la loi du 11 mars 1957 en refusant de donner effet au contrat de coproduction ;

Mais attendu, selon l'article 63-1 de la loi du 11 mars 1957, que le contrat qui lie le producteur aux auteurs d'une oeuvre audiovisuelle emporte, sauf clause contraire, cession au profit du producteur des droits exclusifs d'exploitation de l'oeuvre ; qu'il en résulte que cette cession comporte la même durée que celle des droits eux-mêmes ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué, par une appréciation souveraine de la portée des accords de 1948, retient que ceux-ci ont été passés uniquement en vue de réaliser le film et d'exploiter les droits patrimoniaux cédés par l'auteur et qu'aucune stipulation ne traite des conditions dans lesquelles, après l'entrée du film dans le domaine public, chacun des coproducteurs exercera son droit de propriété sur le support matériel en sa possession légitime ; que c'est donc à juste titre que la cour d'appel a décidé que ces accords ne pouvaient fonder une exclusivité d'exploitation détachée de l'exercice des droits pécuniaires de l'auteur ; qu'ainsi, le moyen n'est pas mieux fondé ;

Mais sur le quatrième moyen : (sans intérêt) ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a condamné la société Télédis à payer à la société Films sans frontières la somme de 100 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 26 avril 1990, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles